Finance Archives - Master Intelligence Economique et Stratégies Compétitives Le Master Intelligence Economique qui combine analyse économique, outils de veille, e-réputation, gestion de crise et big data via une formation sur deux ans. Wed, 08 Mar 2023 21:59:01 +0000 fr-FR hourly 1 Comprendre le fonctionnement du Foreign Exchange FOREX ou marché des changes https://master-iesc-angers.com/comprendre-le-fonctionnement-du-foreign-exchange-forex-ou-marche-des-changes/ Wed, 08 Mar 2023 21:59:01 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3652 Le FOREX est un marché financier qui joint à la fois des opérateurs financiers, les traders, des institutions financières, des entreprises ainsi que des banques centrales, chacun ayant des objectifs précis dans ce marché et les titres qui sont échangés… Continuer la lecture

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Le FOREX est un marché financier qui joint à la fois des opérateurs financiers, les traders, des institutions financières, des entreprises ainsi que des banques centrales, chacun ayant des objectifs précis dans ce marché et les titres qui sont échangés dans le FOREX sont appelés devises. Les devises les plus traitées sont le dollar américain (USD), le yen japonais (JPY), la livre sterling (GBP), le franc suisse (CHF), le dollar australien (AUD) et l’euro (EUR). Ces devises sont appelées les “majors”, par opposition aux “minors” qui représentent les devises émergentes et exotiques. Le marché des changes est entièrement dématérialisé et décentralisé. Il n’est rattaché à aucune place boursière en particulier, ce marché est accessible à tous car les opérations y sont réalisées de gré à gré. Dans cet article, nous analyserons les différents intervenants de ce marché et les risques auxquels ils sont exposés.

La notion du marché des changes

Le foreign exchange est le marché financier sur lequel les devises sont échangées l’une contre l’autre. Il s’agit du marché le plus liquide et le plus volatile au monde pour plusieurs raisons. Tout d’abord, il est le plus grand marché financier au monde, avec un volume de transactions quotidiennes de 5 000 milliards de dollars, signifiant qu’il y a beaucoup d’acheteurs et de vendeurs en tout temps, ce qui facilite la liquidité du marché. En plus, le marché des changes est ouvert 24 heures sur 24, 5 jours par semaine, ce qui permet aux traders de participer à tout moment de la journée. Enfin, le marché étant décentralisé, il n’y a pas de lieu physique ou de bourse centralisée où les transactions sont effectuées. Les transactions sont effectuées via un réseau électronique des banques permettant une grande flexibilité et une grande liquidité.

Concernant la volatilité, elle est due aux nombreux facteurs qui influencent les taux de change, comme les taux d’intérêt, les politiques économiques ou encore les événements géopolitiques. Sur le marché des changes, les taux de change qui fluctuent en fonction de l’offre et de la demande de chaque devise, les banques centrales peuvent également intervenir pour stabiliser le taux de change de leur devise nationale.

Une capture d’écran prise à 1h15, le 27 janvier 2023 montre l’évolution des cours de devises sur une période de 5 jours et l’évolution des taux de change avec une base de référence le dollar américain. On voit l’évolution des différentes grandes devises par rapport au dollar. Par exemple, à cet instant, un euro vaut à 1,0897 dollar américain, il y a donc une hausse de l’euro de 0,30 % par rapport au dollar. Sur la deuxième image ci-dessous, une capture prise 10 minutes après, on observe une baisse de la hausse de l’Euro par rapport au dollar, cette hausse est maintenant de 0,21% et un euro vaut 1,0888 dollars américains. Si on s’intéresse aux autres devises comme la livre sterling ou le franc suisse, on peut observer l’évolution significative des cours de devises.

Ces graphiques nous permettent de confirmer la volatilité très présente sur le marché des changes. Le marché des changes est très complexe car il est influencé à la fois par des facteurs exogènes et endogènes au niveau d’un pays.

Le Forex implique deux devises au moins, nous avons une devise de base et une devise de cotation.

  • La devise de base est la première devise mentionnée dans une paire de devises sur le marché des changes (forex). C’est celle contre laquelle la seconde devise, appelée devise cotée, est échangée.
  • La devise cotée, également appelée devise de contrepartie ou devise de contre-devise, est la seconde devise mentionnée dans une paire de devises sur le marché des changes (forex). Elle est échangée contre la première devise, appelée devise de base.

Dans le cas du graphique ci-haut, la devise de base est l’euro et la devise cotée est le dollar américain.

Le marché des changes, comme tout marché financier, est régulé et surveillé de près. En France, c’est l’autorité des marchés financiers AMF qui est chargée de la réglementation et de la surveillance.

Le rôle de l’Autorité des Marchés Financiers

L’Autorité des marchés financiers a un rôle de réglementation et de surveillance sur le marché des changes (FOREX) en France.

En matière de réglementation, l’AMF s’assure que les prestataires de services financiers proposant des produits ou des services liés au marché des changes sont conformes aux lois et règlementations en vigueur, notamment en ce qui concerne la protection des investisseurs et la transparence des informations fournies aux clients.

En matière de surveillance, l’AMF surveille les activités sur le marché des changes pour détecter les comportements frauduleux ou irréguliers et prendre des mesures pour y remédier. Elle peut également mettre en place des mécanismes de surveillance pour détecter les risques systémiques pour la stabilité financière. L’AMF veille aussi à ce que les courtiers Forex agissent de manière légale et éthique, en conformité avec les réglementations en vigueur.

L’AMF peut également intervenir pour résoudre les litiges entre les investisseurs et les prestataires de services financiers sur les marchés des changes, et pour prendre des sanctions administratives ou judiciaires en cas de manquements aux règles. L’AMF travaille en étroite collaboration avec les autres autorités de réglementation et de surveillance, tant au niveau national qu’européen et international, pour renforcer la réglementation et la surveillance des marchés des changes.

Le marché des changes est également affecté par les acteurs qui y interagissent. Il existe plusieurs intervenants qui, en fonction de leurs différents objectifs, peuvent impacter ou non le marché des changes.

Les intervenants sur le marché des changes

Les intervenants sont ceux qui affectent ce marché, ils ont des objectifs divers mais profitent tous des tendances baissières et haussières du marché. Dans le FOREX, les intervenants sont les banques commerciales, les banques centrales, les multinationales, les investisseurs institutionnels, les brokers et les particuliers.

Les banques commerciales ont généralement pour objectif de faire :

  • Le market-making, en achetant et en vendant des devises pour leur propre compte afin de réaliser un bénéfice en exploitant les écarts entre les prix d’achat et de vente. Elles utilisent également des stratégies de “hedging” pour réduire leur propre risque de change en achetant et en vendant simultanément des devises différentes.
  • L’arbitrage afin de profiter des inégalités de prix sur différents marchés. Par exemple, ils peuvent exploiter les écarts de taux d’intérêt entre les devises en achetant une devise à un taux d’intérêt élevé et en vendant immédiatement une autre devise à un taux d’intérêt plus bas.
  • La spéculation consiste à prendre des positions sur les devises en utilisant les anticipations des mouvements futurs des taux de change. Les banques commerciales peuvent utiliser des stratégies de spéculation pour réaliser des bénéfices en achetant une devise qu’elles prévoient de voir apprécier, ou en vendant une devise qu’elles prévoient de voir se déprécier. La spéculation est risquée car elle repose sur des anticipations qui peuvent ne pas se réaliser.

Ces banques doivent disposer des moyens humains généralement spécialisés par fonction trader, saler, arbitragiste, … et des moyens techniques.

L’étude 2022 de EUROMONEY montre que les banques commerciales sont bien les principales intervenantes sur ce marché,  plus de 65 % des parts du marché sont concentrés seulement entre 10 banques.

Les banques centrales peuvent intervenir sur le marché des changes dans le but de maintenir la stabilité de leur monnaie et de protéger leur économie des fluctuations extrêmes des taux de change. Les interventions des banques centrales peuvent prendre plusieurs formes, notamment :

  • Les interventions de change : les banques centrales peuvent acheter ou vendre des devises sur le marché pour influencer les taux de change. Par exemple, si une banque centrale veut renforcer sa monnaie, elle peut acheter sa propre devise sur le marché pour augmenter sa demande et faire monter son cours.
  • Les taux d’intérêt : les banques centrales peuvent utiliser les taux d’intérêt pour influencer les taux de change. Les taux d’intérêt plus élevés attirent les investisseurs et renforcent la monnaie, tandis que les taux d’intérêt plus bas ont l’effet inverse.
  • Les réserves de change : les banques centrales peuvent utiliser leurs réserves de change pour intervenir sur le marché. Les réserves de change sont des devises étrangères qu’une banque centrale détient pour stabiliser le taux de change.

Les principales banques centrales sont donc la Réserve Fédérale des Etats-Unis (FED), la Banque Centrale Européenne (BCE), la Banque du Japon (BOJ), la Banque d’Angleterre (BOE), la Banque Centrale Suisse (BCS), ce sont ces banques qui fixent le taux directeur qui est le taux d’intérêt auquel les banques centrales prêtent de l’argent à d’autres banques. Elles utilisent les taux d’intérêt pour influencer les taux de change en les ajustant pour rendre leur monnaie plus ou moins attractive.

Les entreprises multinationales sont sur le marché des changes pour pouvoir échanger les devises qu’elles ont gagnées dans un pays pour les devises dont elles ont besoin pour payer leurs dépenses dans d’autres pays. Cela leur permet également de couvrir leur risque de fluctuation des taux de change pour les transactions internationales.

Les investisseurs institutionnels sont les investisseurs professionnels tels que les banques, les fonds de pension, les sociétés d’assurance, …. Ils ont généralement des sommes importantes à investir et peuvent utiliser des techniques de trading avancées pour maximiser leurs profits sur le marché des changes. Les investisseurs institutionnels sont considérés comme des acteurs importants sur le marché des changes en raison de la taille importante de leurs investissements et de leur capacité à influencer les taux.

Les “brokers” ou courtiers sur le marché des changes jouent le rôle des intermédiaires entre les acheteurs et les vendeurs de devises. Ils permettent aux traders individuels et aux entreprises d’accéder au marché et de passer des transactions par l’achat et la vente des devises étrangères. Les brokers fournissent également des services et des outils tels que les plateformes de trading en ligne, les cotations en temps réel et les analyses de marché afin d’aider leurs clients à prendre des décisions de trading informées.

Les transactions des banques centrales, des entreprises multinationales, des investisseurs institutionnels et des brokers ne représentent qu’environ 34 % du marché des changes, plus de 66 % étant détenus par les banques commerciales.

Une autre catégorie est celle des traders individuels sur le marché des changes qui sont des particuliers qui y interviennent en utilisant des techniques telles l’analyse technique ou l’analyse fondamentale, pour tenter de prévoir les fluctuations des taux de change et réaliser des profits.  Les individus réalisent également des opérations non commerciales par exemple dans le domaine du tourisme étranger, des pensions, le transfert de salaires, des redevances.

Les risques auxquels les intervenants sont exposés

Les intervenants du marché des changes (FOREX) sont exposés à plusieurs risques, notamment :

  • Le risque de change : le risque que les variations des taux de change aient un impact sur les actifs ou les passifs d’une entreprise ou d’un investisseur.
  • Le risque de contrepartie : Il s’agit du risque que la contrepartie d’une transaction ne soit pas capable de remplir ses obligations financières.
  • Le risque de liquidité : les marchés peuvent être peu liquides, ce qui rendra difficile l’entrée ou la sortie d’un investissement.
  • Le risque de taux d’intérêt sur le marché des changes (FOREX) découle des variations des taux d’intérêt des différentes devises. Les taux d’intérêt ont un impact sur la valeur relative des devises car ils affectent les flux de capitaux entre les différents pays.
  • Le risque de crédit : Il s’agit du risque que la contrepartie ne remplisse pas ses obligations financières. Il existe le risque de contrepartie, le risque de contrepartie systémique, le risque de contrepartie de crédit.
  • Pour les consommateurs qui sont les “traders”, le risque d’investir sur les sites de trading en ligne est lié aux pratiques frauduleuses de ces sites litigieux. En effet, les consommateurs novices dans le domaine, reçoivent des propositions de gains rapides et importants avec un accompagnement de plus en plus personnalisé alors que le Forex est un marché non régulé et constitue de ce fait un marché spéculatif très risqué. Pour contrer ces sites, l’AMF publie une liste noire des sites non autorisés à proposer du Forex qui est mise à jour de façon régulière.

Il est important de noter que ces risques ne sont pas exclusifs et peuvent être interconnectés, il est donc important pour les intervenants du marché des changes de bien comprendre ces risques et de mettre en place des mesures pour les gérer efficacement. Pour gérer le risque de marché sur le marché des changes, les traders et les investisseurs peuvent utiliser des instruments financiers tels que les options et les contrats à terme pour couvrir leurs positions. Il est également important de surveiller les tendances du marché et de diversifier les positions pour réduire les risques.

Le marché des changes ou FOREX est un marché très complexe et volatile qui présente de nombreux risques pour les traders et les investisseurs. Le rôle de l’AMF est de protéger les investisseurs, de promouvoir la transparence du marché. Comme vu plus haut les différents intervenants agissent en fonction de leurs objectifs et sont donc exposés aux risques du marché de différentes manières. Pour gérer ces risques et s’en prémunir, les intervenants utilisent plusieurs instruments financiers et techniques comme diversifier leurs portefeuilles.

Par Sidonie Nkongolo et Fatou Gaye, promotion 2022-2023 du M2 IESCI

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La Fintech en Afrique : un secteur en croissance malgré les disparités https://master-iesc-angers.com/les-fintech-en-afrique-un-secteur-en-croissance-malgre-les-disparites/ Sat, 27 Nov 2021 19:02:50 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3516 Durant la crise covid-19, le secteur de la Fintech a connu une forte croissance dans les différents pays du monde. Le secteur a montré que les solutions financières numériques permettent la survie et le maintien des activités de plusieurs entreprises.… Continuer la lecture

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Durant la crise covid-19, le secteur de la Fintech a connu une forte croissance dans les différents pays du monde. Le secteur a montré que les solutions financières numériques permettent la survie et le maintien des activités de plusieurs entreprises. Et le continent africain ne fait pas exception au contraire le secteur de Fintech en Afrique est en forte croissance. 80% des africains ont accès à des téléphones portables et seulement 28% ont un compte bancaire. Pourtant les dernières statistiques montrent que l’Afrique a plus de 100 millions utilisateurs de portefeuilles électroniques ce qui représente environ la moitié de tous les portefeuilles mobiles dans le monde.

De ce fait, personne ne peut nier le potentiel de la Fintech Africaine en termes de nombre d’utilisateurs, nombre de transactions ainsi que le taux de croissance potentiel, cependant plusieurs questions peuvent se poser dans un continent de 45 pays en développement et des disparités intra et inter pays très importantes.

Dans cet article, nous allons tenter de mettre en lumière 2 principaux éléments : D’abord, l’état du secteur de la Fintech en Afrique, en présentant les champions du continent et leurs avancements en matière de Startup, programme d’accompagnement ainsi que l’investissement. Puis dans une seconde partie, nous allons traiter le cas de l’Afrique Francophone de l’ouest comme une zone où il reste beaucoup d’effort à faire pour le développement d’un écosystème Fintech en vrai sens du terme.

L’Afrique du Sud, le Kenya et le Nigeria : des leaders de la Fintech Africaine

Les  services de la Fintech connaissent un essor en Afrique, ces services sont utilisés par les ruraux et les urbains, titulaires ou non d’un compte bancaire. En effet, le « Global Fintech Index City Ranking » a illustré ce constat dans sa publication de 2020. Le Classement a analysé par un algorithme spécifique l’écosystème Fintech de plus de 230 villes dans 65 pays dans les différents continents. Le « Global Fintech Index City Ranking » montre déjà la présence de 12 villes dans le classement, dont 4 parmi les Top 100.

L’Afrique du Sud un leader continental

Le premier constat de l’analyse de la Fintech en Afrique est la place de l’Afrique du Sud comme un leader continental du secteur avec 2 villes parmi les Top 100, à savoir Johannesburg en 62ème place et Cape Town en 87ème place, et également la présence de 3 autres villes dans le classement (Pretoria, Gauteng et Stellenbosch respectivement en la 211ème, 215ème et la 231ème place). De ce fait, les villes Sud-Africaines, principalement la capitale Johannesburg et Cape Town sont considérées comme des villes en pleine croissance comme New Delhi et Sao Paulo par exemple. En addition, la place occupée par l’Afrique du Sud n’est pas un coup de hasard, le pays dispose de plusieurs dispositifs réglementaires et initiatives encourageant les activités et les services de la Fintech, par exemple : la South Africa Reserve Bank a mis en place un programme « Financial Technology Program » pour évaluer l’émergence du secteur de la Fintech et examiner les conséquences sur la réglementation du pays, un groupe de travail intergouvernemental a été créé également spécialement dédié pour les technologies financières.

Classement des 12 villes africaines selon le « Global Fintech Index City Ranking 2020 »

Le Kenya et le Nigeria deux hubs continentaux de la Fintech

Deuxième pays africain en classement (42ème place de la capitale Nairobi), le Kenya est un pays avec une grande croissance des services du mobile Banking. Ces services connaissent une croissance rapide grâce aux nombreux incubateurs et  régulateurs mis en place, comme l’Africa eXellerator Lab ou la Digital Lenders Association of Kenya. En plus, Nairobi seule concentre plus de 20% des technologies financières africaines et elle est considérée par le « Global Fintech Index City Ranking » comme le deuxième centre de Fintech en Afrique. Cette place occupée est principalement due à l’existence de plusieurs investisseurs locaux et l’attirance de plusieurs bailleurs de fonds internationaux d’une part, et la régulation dédiée et la supervision du secteur par la Banque Centrale de Kenya d’une autre part.

Le Nigeria à dix places derrière le Kenya (52ème rang pour Lagos) est le troisième pays africain selon le même classement. Le pays le plus peuplé en Afrique compte 40% de citoyens non bancarisés et plus de 65% de la population moins de 25 ans. Ces deux facteurs font de ce pays une des plus grandes opportunités potentielles des technologies financières au continent. De surcroit le pays dispose également d’un arsenal de dispositifs réglementaires et des initiatives pour l’accompagnement de ce secteur comme le Nigeria Fintech Week ou bien le cadre réglementaire spécifique pour la Fintech élaboré par la Banque Centrale où même la Nigeria Interbank Settelement System permettant aux entrepreneurs de se lancer dans le secteurs.

Ces trois pays (Afrique du Sud, Kenya et Nigeria) sont considérés comme des hubs de la Fintech à observer, et ce à côté de plusieurs autres villes comme Dubaï, Istanbul ou Copenhague. Cependant d’autre pays africains sont des hubs en construction comme le Ghana, l’Egypte et l’Ouganda, tous présents dans des rangs avancés dans le classement.

L’investissement dans les Fintech africaines

La capacité d’attirer des investissements est une condition sine qua non pour la croissance de n’importe quel secteur. D’ailleurs, la croissance rapide et exponentielle des services numériques durant la crise du Covid-19 a permis une hausse des investissements dans les services numériques en Afrique et particulièrement en Fintech. En effet, le dernier rapport de Distrupt Africa a retracé l’évolution des investissements en Fintech en Afrique depuis 2015.

Le rapport a révélé que le continent a enregistré des investissements de 160,319 millions USD en 2020, soit une croissance de plus de 49% par rapport à l’année dernière ; Le même rapport souligne l’augmentation du nombre de Start-ups africaines bénéficiaires de cette enveloppe d’investissement qui passe de 77 start-ups en 2019 à 99 startups en 2020, soit une croissance de 28% entre les deux années. Cette tendance haussière d’investissement est partiellement due au fait que les services numériques en général et les technologies financières en particulier sont devenus indispensables pour le développement voire la survie et la continuité des activités des entreprises africaines durant et après la crise du Covod-19.

Une autre tendance soulignée par Disrupt Africa, est la traduction des avancées des pays en matière d’infrastructure et d’écosystème Fintech sur les investissements. En effet, les champions continentaux (Afrique du Sud, Nigeria, Kenya et l’Egypte) sont les pays dont les start-ups ont pu attirer le maximum des investissements avec plus de 97% des financements destinés pour le secteur en 2020 soit 155,554 millions USD. De surcroit les start-ups nigériennes prennent la part du lion avec 89,342 millions USD, soit 55,7% de la totalité des fonds d’investissements pour le secteur.

L’Afrique francophones de l’ouest : un exemple des Fintech africaines à promouvoir

Dans la première partie de notre analyse, nous avons tenté de mettre en lumière le secteur de la Fintech en Afrique surtout d’un point de vue des grands acteurs et l’importance des investissements dédiés à ce secteur ces dernières années. Toutefois, dans ce passage nous allons traiter un exemple d’une zone géographique qui connait un développement moins rapide des services de la Fintech. Dans cette partie nous analyserons le paysage de la Fintech dans l’Afrique francophone de l’ouest et principalement les conclusions tirées des 6 pays suivants : Le Bénin, le Mali, la Côte d’Ivoire, le Sénégal, la République Démocratique du Congo et le Togo.

Ainsi le premier  axe de notre analyse serait le nombre de start-ups Fintech dans ces pays, le nombre des incubateurs et les différents secteurs d’activités des start-ups. Et effet, et selon les rapports des « Fintech inclusives en Afrique francophone » rédigés par le cabinet MicroSave consulting en partenariat avec Mastercard Foundation, le nombre des entreprises Fintech dans les 6 pays reste inférieur au pays leader comme l’Afrique du Sud, Kenya et le Nigeria et ne dépasse pas les 20 dans la majorité des pays. L’étude montre que les start-ups présentes sont au nombre de 11 au Bénin, 17 au Mali, 37 en côte d’Ivoire, 24 au Sénégal, 12 à la RDC et 17 au Togo. Ce retard en termes de nombre d’acteurs s’explique principalement par la faiblesse du climat d’affaire et du cadre juridique des technologies financières dans tous les pays.  D’ailleurs, même en termes de facilitateurs actifs en Afrique (Coworking, accélérateurs, pôles d’innovation et incubateurs) les 6 pays étudiés comptent à peine une vingtaine de facilitateurs par pays (Mali compte 17 facilitateurs, 15 pour le Sénégal, 22 pour la Côte d’Ivoire, 14 pour le Togo, 10 au Bénin et 11 en RDC), un bilan qui reste très faible même par rapport à des pays qui ne sont pas également parmi les précurseurs en Fintech comme le Maroc (34 facilitateurs), la Tunisie (36 facilitateurs) ou le Zimbabwe (23 facilitateurs) par exemple.

En addition, l’étude a montré une concentration des start-ups dans ces 6 pays dans des activités spécifiques. La majorité des entreprises opèrent dans le paiement digital, et elles sont moins présentes dans les activités de Back office bancaire ou d’investissement et financement participatif, et elles sont quasi-inexistantes dans l’Assurtech et le crédit digital par exemple. Autre caractéristique des activités de la Fintech dans ces pays est le type de modèle d’affaire où 42% des start-ups opèrent dans le B2B, 33% en B2B2C, 19% en B2C et et les 6%  restantes sont partagées entre le P2P et le P2G.

Le manque de compétences managériales et de soutien sont les principales difficultés rencontrées

L’étude de MicroSave consulting a permis également d’identifier plusieurs difficultés et contraintes privant le secteur de la Fintech de sa maturation. La principale contrainte est le manque de compétences managériales des fondateurs des Fintechs, et ce malgré la présence de l’esprit entrepreneurial dans les systèmes éducatifs de plusieurs pays, les fondateurs doivent avoir accès à un accompagnement des spécialistes. D’un autre côté, le soutien offert aux start-ups reste insuffisant même incomplet surtout que plusieurs bénéficiaires affirment que à cause de la faiblesse des moyens financiers des accélérateurs et incubateurs, ils se transforment à un simple espace de coworking sans valeur ajoutée réelle au business. Après plusieurs contraintes peuvent s’ajouter à ces deux dernières comme le coût élevé des talents qualifiés, le penchant informel des Fintechs, la mauvaise compréhension des besoins exprimés des marchés ou même les contraintes d’infrastructure comme le coût d’accès à l’internet.

4 piliers pour le repositionnement de la Fintech en Afrique francophone

Finalement pour le repositionnement du secteur, 4 champs d’actions s’avèrent indispensables. D’abord l’accès au capital, les modes de financement les plus dominants sont les capitaux propres et les investisseurs providentiels et les fonds capital-risque dans une absence d’autres modes comme les aides publiques, les crédits et le financement participatif. Et donc, ces pays doivent encouragement les financements par la création d’un fonds de garantie par exemple, et la diffusion et la sensibilisation des entrepreneurs de l’existence des différents programmes de financements, ils doivent également promouvoir les possibilités des investissements privés. Un autre facteur indispensable est l’accès au talent où des efforts restent à fournir en matière de la mise en place des incubateurs et des systèmes de mentorat, la promotion de la culture de l’entrepreneuriat et offrir un environnement favorable pour la montée en compétences des jeunes entrepreneurs. Puis la mise en place d’un cadre réglementaire permettant le suivi et l’accompagnement de la croissance du secteur de la Fintech, et ce par plusieurs moyens comme l’existence d’une carte d’identité digitale, la mise en d’une réglementation favorable (Sandbox, groupe de travail,..), et la détermination des conditions de fonctionnement des entreprises « ease of doing Business ». Et finalement, les collaborations et partenariats par le renforcement des rôles des partenaires en matière de financements, les acteurs de télécommunications, les incubateurs avec une réflexion sérieuse sur les besoins et les intérêts des grandes entreprises afin de bien déterminer les partenariats à conclure.

Finalement, le secteur de la Fintech en Afrique reste un secteur à fort potentiel avec des pays leaders comme l’Afrique du Sud, le Nigeria et le Kenya et des économies à accompagner comme le Maroc, la Tunisie, le Togo, la Cote d’ivoire,…. Mais le secteur peut, et dans un contexte de disparités économiques importantes entre les pays et des taux de chômage flagrant, présenter une solution pour plusieurs problématiques économiques du continent africain.

Par Mahmoud Hajjami, promotion 2021-2022 du M2 IESCI

Sources

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https://bfaglobal.com/catalyst-fund/briter-catalyst-fund-state-of-the-fintech-industry-report/

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La crise du groupe Evergrande en Chine : illustration de la nouvelle politique de « prospérité commune » de Pékin https://master-iesc-angers.com/la-crise-du-groupe-evergrande-en-chine-illustration-de-la-nouvelle-politique-de-prosperite-commune-de-pekin/ Wed, 17 Nov 2021 22:33:48 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3505 Le groupe immobilier Evergrande a été fondé en 1996 à Guangzhou (Canton) en plein boom immobilier chinois par Xu Jiayin, ancien ouvrier sidérurgiste. Sa cible est alors la classe moyenne du pays qui émerge à une vitesse stupéfiante suite au… Continuer la lecture

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Le groupe immobilier Evergrande a été fondé en 1996 à Guangzhou (Canton) en plein boom immobilier chinois par Xu Jiayin, ancien ouvrier sidérurgiste. Sa cible est alors la classe moyenne du pays qui émerge à une vitesse stupéfiante suite au développement économique des dernières décennies. Au cours des années 2000, le groupe connaît une incroyable ascension et devient un acteur de premier ordre sur le marché de l’immobilier chinois, au point d’entrer à la bourse de Hong-Kong en 2009. Dans la foulée, les activités de la société se diversifient et Evergrande prend le contrôle du club de Super League chinoise de Guangzhou, rebaptisé alors Guangzhou Evergrande. L’entreprise se lance également dans les secteurs des produits laitiers, des céréales et du pétrole, puis tente de construire une voiture électrique, et finance cette myriade de projets et de dépenses par un recours massif à l’endettement. Cette pratique ne semble pourtant pas, dans un premier temps, être un frein au développement du groupe qui continue son expansion à un rythme soutenu. En 2017, le PDG du groupe Xu Jiayin devient même l’homme le plus riche d’Asie avec une fortune estimée à 43 milliards de dollars.

Mais depuis la fin de l’été, le deuxième plus grand promoteur immobilier chinois fait trembler l’économie du pays. Le géant criblé de dettes doit aujourd’hui faire face à la colère de millions d’acheteurs qui voient la construction de leurs logements toujours en suspens, mais aussi des investisseurs qui attendent toujours des retours sur leurs placements. Cependant, la situation très préoccupante du groupe n’est pas un fait nouveau, et de nombreux signaux semblaient montrer depuis presque deux ans que les fondations du conglomérat étaient déjà sensiblement fragilisées. En novembre 2018 arrivent par exemple les premiers avertissements de la banque centrale qui ajoute Evergrande à sa liste de conglomérats très endettés à surveiller, signalant qu’un effondrement potentiel pourrait entraîner des risques systémiques.

La deuxième moitié de l’année 2020 marque « le début de la fin » pour la firme désormais basée à Shenzhen. Au mois d’août, les autorités chinoises mettent en place le dispositif des « trois lignes rouges » qui vise à limiter l’endettement des promoteurs. Cette opération coup de poing du gouvernement vise à assainir le marché de l’immobilier et à dégonfler la bulle spéculative sur ce secteur. Elle s’inscrit dans une volonté plus globale du Parti communiste chinois de limiter l’endettement des acteurs économiques locaux, qu’ils soient publics ou privés, afin d’avoir un marché intérieur plus sain. Ce coup de vis général a d’ailleurs déjà eu raison de plusieurs entreprises publiques qui n’ont pas pu encaisser les conséquences de leurs erreurs stratégiques. Le secteur de l’immobilier est quant à lui un cas assez spécial. Il a en effet été pendant plusieurs décennies le théâtre d’une course effrénée et particulièrement dérégulée qui en a fait, avec les exportations, l’un des piliers de l’impressionnante croissance économique chinoise amorcée dans les années 1980 sous Deng Xiaoping, et qui l’amène à peser aujourd’hui près de 30% du PIB. Cette folie de l’immobilier a cependant donné naissance à un nombre conséquent de projets peu viables et de faillites et plus généralement à une situation qui semble désormais insoutenable. En effet, l’empire du milieu compte 3 milliards de mètres carrés invendus qui représentent une capacité de logement de 90 millions de personnes. Depuis 2002, les prix ont été multipliés par 6 et dans certaines grandes mégalopoles comme Shanghaï, Pékin ou Shenzhen, un logement peut coûter l’équivalent de trente voire quarante années de salaire moyen.

Pour Evergrande, qui rappelons-le se finance très majoritairement par endettement, ces nouvelles mesures ont logiquement constitué une nouvelle fragilisation de l’édifice. En août 2020, le groupe a annoncé qu’il risquait de ne pas pouvoir effectuer des paiements dus en janvier 2021, cela a provoqué dès le mois de septembre 2020 une chute de 15% des actions du conglomérat à la bourse de Hong Kong. Une partie des créanciers a alors accepté de renoncer à leurs paiements, évitant temporairement au groupe de régler une ardoise de l’ordre de 13 milliards de dollars. Mais ce répit ne fut que de courte durée car la santé financière du groupe n’a fait que se détériorer tout au long de l’année 2021. Tandis qu’en juin le cabinet de recherche Capital Economics estime qu’Evergrande dispose de 1,3 trillion de yuans (soit plus de 207 milliards de dollars) d’engagements de prévente, ce qui correspond à environ 1,4 million de logements qu’il s’était engagé à construire, l’entreprise annonce fin août qu’elle doit impérativement lever des fonds et vendre des actifs pour éviter un nouveau défaut de paiement. La société révèle en effet dans un document boursier que son passif est désormais chiffré à 305 milliards de dollars, soit tout de même 2% du PIB chinois, et que les risques de défaut de paiement des emprunts sont conséquents. Ces événements marquent alors un nouveau tournant et l’affaire Evergrande prend une toute nouvelle ampleur.

La médiatisation de l’affaire depuis septembre 2021

Alors que des manifestations publiques éclatent devant le siège du groupe à Shenzhen et que la pression médiatique autour de l’affaire ne cesse d’enfler, Evergrande se voit accorder fin septembre un délai supplémentaire de 30 jours pour payer un coupon de 83.5 millions de dollars qu’il n’avait pas pu honorer jusqu’alors. Si au terme de cette période cette dette ne serait pas remboursée, un défaut de paiement serait prononcé et les chances de voir le géant faire faillite n’en seraient que renforcées. Ce délai de grâce n’a néanmoins pas été une période d’accalmie.

Le 4 octobre, le groupe suspend sa cotation à la bourse de Hong Kong sans en expliquer les raisons alors que ses actions ont chuté de plus de 80% depuis le début de l’année et à peine huit jours plus tard, Evergrande manque une triple échéance de paiements à hauteur de 148 millions de dollars.

Une issue plus positive semblait cependant se dessiner avec des rumeurs faisant état de la vente de 50.1% d’une filiale de services immobiliers à une division du groupe Hopson Development Holdings pour 2.5 milliards de dollars, mais là encore le sort en a décidé autrement. Le 20 octobre le promoteur annonce en effet que les négociations ont été rompues suite à des désaccords sur le mode de paiement de l’opération. Le lendemain, le groupe retrouve la bourse de Hong Kong mais voit son titre s’effondrer immédiatement et baisser de plus de 12.5% à la clôture. Alors que son destin semblait scellé, Evergrande a finalement réussi à s’acquitter de sa dette de 83.5 millions de dollars à quelques jours seulement de l’échéance de son délai de trente jours et a même vu le cours de ses actions rebondir de 5% dans la foulée. Néanmoins, le conglomérat est loin d’être tiré d’affaire et s’il semble en capacité de rembourser in extremis des intérêts de l’ordre de quelques millions de dollars, le remboursement du principal, qui devrait chiffrer bien au-delà, sera sans doute une épreuve encore plus difficile à surmonter.

Un risque systémique ?

Si le défaut de paiement et la faillite du groupe semblent avoir été pour le moment évités, les déboires d’un groupe aussi vaste qu’Evergrande, qui gère 778 projets en cours dans 223 villes et génère plus de 3 millions d’emplois directs et indirects, soulèvent des inquiétudes quant à un risque systémique pour l’économie chinoise voire mondiale. À titre d’exemple, le marché des métaux, et notamment de l’acier, du cuivre et de l’aluminium, a subi de plein fouet les mésaventures du promoteur chinos. Les cours de ces matériaux indispensables à la construction ont en effet connu des variations significatives, à la hausse comme à la baisse, en fonction de l’évolution de la situation en Chine. De plus, celle-ci reste la deuxième économie du monde et un gigantesque marché pour de nombreux acteurs internationaux. Il semble inévitable que tous les pays qui y exportent pourraient ressentir un ralentissement, notamment les autres pays asiatiques, tandis que les pays occidentaux beaucoup moins dépendants des ventes en Chine seraient eux touchés dans une moindre mesure. Cependant, si l’on a entendu très tôt des comparaisons avec la crise de 2008, il semble que cet épisode ne sera pas un « Lehman Brothers » chinois. Bien que les deux compagnies aient des similitudes, le fait qu’Evergrande évolue sur un marché bien plus fermé et moins connecté au reste du monde limite les risques globaux. Cet événement ne constituera très probablement qu’un ralentissement, et non une crise.

En revanche, les autorités locales ont plusieurs fois rappelé qu’une faillite d’Evergrande constituerait un risque systémique à l’échelle chinoise qui, rappelons-le, dépend énormément du secteur de l’immobilier. Cela pourrait même, à une plus grande échelle, acter la fin du modèle de croissance financé par la dette mis en place sous Deng Xiaoping. Depuis 2008, la dette du secteur privé en Chine a doublé par rapport au PIB, passant de 112 % à 224 % en 2020. Dans n’importe quelle autre économie développée cette propension à autant se reposer sur de la dette privée aurait provoqué une grave crise financière, mais le fait que la Chine ait le contrôle sur la quasi-totalité des composantes essentielles son économie lui permet de mettre en place un tel système dans lequel jusqu’à peu, les banques pouvaient encore allègrement prêter à un acteur surendetté. Ce procédé a cependant des contre-coups et à participé à l’émergence d’un marché de l’immobilier trop longtemps resté à l’écart des régulations, dont les prix n’ont cessé de flamber et où désormais plusieurs millions de bâtiments restent inoccupés, en témoignent les villes fantômes qui fleurissent un peu partout sur le territoire. L’endettement massif d’Evergrande n’est pas un fait nouveau, mais la situation n’a réellement commencé à dégénérer que l’an dernier lorsque les autorités ont durci les règles pour contrer la bulle immobilière locale et éviter un effet domino sur les acteurs nationaux dépendant de ces grands groupes. À titre d’exemple, les activités du promoteur concernent 128 banques et 120 autres institutions non-bancaires qui redoutent toutes un défaut de paiement, sans compter les milliers de fournisseurs qui attendent d’être rémunérés et les millions de particuliers qui ne savent pas si le logement qu’ils ont acheté sur plan leur sera livré un jour.

Sur le secteur de l’immobilier les effets sont d’ailleurs déjà visibles. Les ventes de terrains à construire ralentissent, ce qui représente un vrai manque à gagner pour les collectivités locales, mais plus généralement, la situation du conglomérat a lancé une vague de froid sur les investissements immobiliers : pour la première fois depuis six ans, le prix des logements neufs a reculé d’environ 1%. S’il venait à se prolonger, ce ralentissement du secteur pourrait donc sonner la fin du rythme actuel de la croissance chinoise et devrait enclencher une baisse des richesses des ménages et donc de la consommation intérieure.

L’attitude très en retrait de Pékin

Ce qui semble toutefois le plus intéressant et surprenant est l’attitude presque effacée de Pékin qui n’a pas exprimé publiquement son intention de venir en aide au promoteur. Cette attitude est bien entendu volontaire et reflète la volonté de Xi Jinping de changer drastiquement son modèle de croissance et de mettre en place une « prospérité commune » qui devra réduire les inégalités qui bafouent les idéaux égalitaires du Parti communiste chinois.

Dès lors, que va faire le gouvernement du cas très encombrant qu’est Evergrande? Il semble probable que la politique des « trois lignes rouges » restera en vigueur mais que les autorités vont veiller à restructurer le conglomérat et à éviter de trop gros dégâts sur les entreprises et les ménages. Ce qui semble désormais clair c’est que  Pékin a l’intention de faire d’Evergrande, et sûrement d’autres sociétés très endettées un exemple. Cela signifiera sans doute de grosses pertes pour les actionnaires et les détenteurs d’obligations mais aussi une restructuration de la direction du groupe, voire même un éclatement et une revente de ses entités. Un autre enjeu pour le gouvernement concerne les dizaines de milliers de personnes qui ont déjà prépayé les 1.4 millions de logements d’une valeur de 200 milliards de dollars et qui ne sont pas encore achevés. Bien que la Banque centrale chinoise, la PBOC, ait injecté des milliards de dollars de liquidités pour éviter toute panique sur les marchés, pour l’heure, Pékin ne semble pas disposé à renflouer les caisses du promoteur, au contraire, les autorités ont même demandé à Xu Jiayin de puiser dans sa fortune pour payer les dettes encore dues par sa société. Même son de cloche du côté des investisseurs, l’objectif est de rendre ces derniers plus au fait des réalités et des dérives du milieu et les encourager à placer leur épargne sur des secteurs plus sains. Le gouvernement veut à la fois envoyer un signal fort sur le surendettement des entreprises et contrôler tout impact plus large sur son économie.

Si la Chine gère cette affaire avec adresse, elle aura prouvé sa capacité à réprimer les excès du capitalisme qu’elle souhaite désormais combattre avec son objectif de « prospérité commune ». Elle aura également purgé une partie structurante de ses excès de dette et aura l’opportunité de se concentrer davantage sur les industries qu’elle souhaite développer pour sa croissance future. Comme le résume Richard Vague, « La crise d’Evergrande peut faire partie de sa transition, bien que douloureuse, de ce que certains ont appelé sa stratégie “construire, construire, construire” à une stratégie “inventer, inventer, inventer” qui se concentre plutôt sur les industries du futur ».

La Chine a montré qu’elle était en mesure de gérer ce type de situation par le passé et, selon toute vraisemblance, elle saura également gérer Evergrande.

 Par Louis-Mael Jouanno, promotion 2021-2022 du M2 IESCI

Sources web

  • The Economic Times. (2021, 24 septembre). « The rise and demise of Chinese property firm Evergrande ». The Economic Times
  • Zhifan Liu. (2021, 21 septembre). « Le géant Evergrande au bord de la faillite, Pékin silencieux ». Libération
  • Simon Leplâtre. (2021, 4 octobre). « Xu Jiayin, le patron mégalo d’Evergrande qui fait trembler la planète finance ». La Matinale du Monde
  • Etienne Goetz. (2021, 23 septembre). « Les déboires du promoteur font tanguer les cours des métaux ». Les Echos
  • Marion Heilmann. (2021, 23 septembre). « L’affaire Evergrande en 7 questions ». Les Echos
  • Clare Jim. (2021, 24 septembre). « ENCADRÉ-Pourquoi Evergrande constitue un risque systémique potentiel ». Boursorama
  • Bastien Bouchaud. (2021, 27 septembre). « Comment Evergrande menace le miracle économique chinois ». Les Echos
  • The Economic Times. (2021, 24 septembre). « For Xi Jinping and China Evergrande, a delicate balancing act ». The Economic Times
  • Sophie Rolland. (2021, 27 septembre). « Trente jours de grâce pour Evergrande, trente jours d’incertitude pour les marchés ». Les Echos
  • William Gerlach. (2021, 28 septembre). « Opinion | De quoi Evergrande est-il le symbole ? ». Les Echos – Le Cercle
  • Nicolas Baverez. (2021, 4 octobre). « Baverez – Evergrande ou la fin des “ quarante glorieuses “ chinoises ». Le Point
  • Mark Leon Goldberg. (2021, 4 octobre). « Will China’s Evergrande Crisis Unleash a Global Economic Contagion? ». Undispatch
  • Tom Westbrook, Donny Kwok. (2021, 4 octobre). « Evergrande va céder 51% d’une de ses filiales pour 5 milliards de dollars, rapporte la presse ». Challenges
  • François Chimits. (2021, 6 octobre). « Chine : “ Le géant immobilier Evergrande est le symbole des limites d’un modèle économique dont Pékin veut s’extraire “ ». Le Monde
  • Stephen S. Roach. (2021, 7 octobre). « Evergrande : la Chine a bien d’autres démons ». Les Echos
  • Dominique Baillard. (2021, 14 septembre). « Chine: Evergrande va-t-il entraîner toute l’économie chinoise dans son naufrage? – Aujourd’hui l’économie ». rfi
  • Business Mayor. (2021, 15 octobre). « Xi Jinping’s Evergrande dilemma has repercussions far beyond China ». Business Mayor
  • Les Echos. (2021, 20 octobre). « Evergrande reprend ce jeudi sa cotation en Bourse ». Les Echos
  • Frederic Schaeffer. (2021, 21 octobre). « Evergrande se rapproche de la faillite ». Les Echos
  • (2021, 22 octobre). « Le promoteur immobilier chinois Evergrande évite de justesse un défaut de paiement ». France24
  • (2021, 4 octobre). « Le géant chinois Evergrande suspend ses opérations à la bourse de Hong Kong ». France24
  • Richard Vague. (2021, 28 septembre). « Will China’s Debt Bomb Explode? ». Democracy
  • Le Figaro. (2021, 27 octobre). « Pékin presse le patron d’Evergrande de régler l’ardoise ». Le Figaro

 

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Affaire Gamestop : la croisade du peuple ? https://master-iesc-angers.com/affaire-gamestop-la-croisade-du-peuple/ Fri, 19 Mar 2021 13:09:34 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3416 David contre Goliath, Main Street versus Wall Street, un nombre fulgurant d’analogies ont déferlé dans les articles de journaux et autres blogs afin de représenter les principaux partis de cette affaire incroyable, si incroyable que la plateforme Netflix a déjà… Continuer la lecture

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David contre Goliath, Main Street versus Wall Street, un nombre fulgurant d’analogies ont déferlé dans les articles de journaux et autres blogs afin de représenter les principaux partis de cette affaire incroyable, si incroyable que la plateforme Netflix a déjà lancé un projet documentaire dédié.

Il s’agit de l’affaire Gamestop, un cas financier invraisemblable opposant le « peuple », rassemblé en communautés sur internet qui,  face à des loups de la finance New Yorkaise, ont réussi à faire trembler Wall Street.

Les enjeux de ce bigornage peuvent être représenté par ce graphe aux pics saillants du cours de l’action au cœur de toutes les discussions :

Cette dernière, qui était à environ 4 dollars il y a quelques mois a pu atteindre en quelques semaines une valeur maximale de plus de 480 dollars, faisant passer la société émettrice pourtant en grand difficulté, à une pseudo-prospérité déconcertante la plaçant du jour au lendemain dans le top 500 des plus grandes entreprises du monde.

Au moment même où cet article est rédigé, l’action de Gamestop a fluctué entre 40 et 150 dollars. Que signifie alors ces oscillations et l’exaltation sociale et médiatique qui les ont déterminées ? Quel rôle ont joué les réseaux sociaux dans cet épisode ?

L’objectif de cet article est de décrypter de manière chronologique les faits importants qui ont marqué cette affaire par une mise en contexte et une description des partis concernés.

A. Mise en contexte

Gamestop ou l’impact de la progression du dématérialisé.

Gamestop est une entreprise disposant de commerces physiques qui vendent principalement des jeux vidéo en plus de produits dérivés issus de la pop culture. Elle possède plus de 5000 magasins à travers le monde dont les ⅔ se trouvent aux Etats-Unis et se trouve être depuis 2008, la maison mère de la chaîne de magasins Micromania, présente dans la plupart des villes de France.

Compte tenu de la forte progression de l’achat de produits dématérialisés, Gamestop et ses filiales subissent de plein fouet cette transition étant donné leur spécialisation dans la vente physique de biens, dont la dématérialisation aujourd’hui semble déjà de plus en plus convenir à de nombreux consommateurs qui, suite au progrès du digital et à l’accès à des espaces de stockage conséquents et  peu chers, favorisent l’accentuation de ce phénomène tout comme c’est déjà le cas pour l’industrie du film et de la musique.

Sur l’aspect financier, si l’on combine les résultats de l’entreprise pour ces trois dernières années, les pertes s’évaluent à plus d’un milliard de dollars

Gamestop est cotée sur le New York Stock Exchange (NYSE), le premier indice boursier mondial. Selon des experts comptables,  l’ensemble des possessions de l’entreprise est valorisé à 2,8 Milliards de dollars pour des dettes estimées à 2,2 milliards de dollars. Ne laissant donc “que” quelques centaines de millions à se partager entre les actionnaires. Ce qui semble plus ou moins représentatif de la situation difficile de la société.

Descriptions des fonds d’investissement et des opérations financières concernées

La valeur en bourse reflète théoriquement l’opinion des marchés financiers sur le succès futur de l’entreprise, une faible valeur en bourse signifie donc qu’il y a peu de gens prêts à acheter des actions, rendant donc difficile le financement pour l’entreprise émettrice. De ce fait, des pratiques et opérations financières existent, permettant de parier à la hausse ou à la baisse la valeur d’une action.

Pour ce qui est de Gamestop, il y eut donc des Hedges Funds ou fonds d’investissement fortement actifs sur le marché de Wall Street, qui pensent que l’action de l’entreprise va s’effondrer compte tenu du contexte et décident alors de parier dessus. Parmi elles, on retrouve entre autres des fonds tels que Citron Research, Melvin Capital de la maison mère Citadel.

Cette pratique se nomme le short selling, une méthode d’investissement qui permet d’avoir des gains sur la chute de valeur d’une société en empruntant ses actions à une valeur A, de les revendre pour encaisser, puis de profiter d’une chute du cours boursier de cette action, ce qui permet de rembourser la société à un coût bien moindre que prévu par cette dernière. Ainsi, constater du shorting sur les actions d’une entreprise, ne fait que renforcer la défiance des actionnaires sur ses performances, ce qui a tendance à baisser encore davantage la valeur de son action compte tenu de la mauvaise image qu’elle affiche.

Description de la communauté

Face à cette situation, des petits porteurs ou encore “boursicoteurs” qui ont tendance à se rassembler en communauté sur internet, s’intéressent progressivement au cas Gamestop. Parmi ces communautés, on retrouve r/WallStreetBets, un forum hébergé sur le réseau social anglophone Reddit et où échangent des millions d’adhérents qui ont l’habitude d’effectuer des opérations financières depuis chez eux via leurs appareils. Ses membres, à majorité d’une tranche d’âge allant de 28 à 45 ans, sont généralement férus de technologie et de la culture vidéo-ludique depuis leur enfance, ainsi bon nombre d’entre eux, sous un élan de nostalgie, commencent à se mobiliser face à la situation que traverse l’enseigne.

B. Déroulement des faits

Au milieu de l’année 2020 et afin de sauver l’entreprise, il est proposé aux actionnaires de Gamestop de la sortir de la bourse afin d’annuler les shorts, et de prendre le temps de se rétablir. En rachetant massivement ses propres actions et qui a permis un rehaussement de sa valeur (De 3 à 7 dollars entre Mai et Septembre 2020)

En Septembre 2020 entre alors en scène le jeune entrepreneur devenu milliardaire Ryan Cohen qui achète environ 13% des actions de Gamestop et qui semble prendre également à cœur l’état de l’enseigne. Son implication sur cette affaire aura pour incidence de convaincre davantage de personnes parmi les actionnaires et les particuliers sur Reddit à s’intéresser de près à la valeur de l’action de l’entreprise, ce qui rehaussera sa valeur, passant de 7 à près de 20 dollars en Janvier 2021.

A la mi-janvier, les choses s’accélèrent suite à la diffusion d’un rapport (https://www.regcompliancewatch.com/gamestop-raid-prompts-finra-alert/) mettant en exergue le short excessif que subissent les actions Gamestop par des fonds d’investissement. Suite à cela des voix s’élèvent afin de saisir cette (opportunité ?) et de marquer un “grand coup”.

Le short squeeze

C’est l’appellation donnée à cette manœuvre financière qui fera couler beaucoup d’encre de par le monde dans cette affaire ? Suite aux informations certifiées de shorting massif effectués par des fonds, un nombre massif de particuliers sur Reddit se mobilise afin d’inciter et encourager toujours plus de personnes à acheter des actions Gamestop dans le but de rehausser davantage sa valeur. En effet, comme mentionné précédemment, le shorting consiste à emprunter des actions d’une entreprise, de les revendre et de profiter de la chute de son cours pour gagner une marge. Quand on pratique le shorting, le gain est limité par le plancher c’est-à-dire que l’action ne peut pas valoir moins que zéro, Mais la perte elle ne l’est pas. Dès lors, que se passerait-il si la valeur de l’action empruntée ne baissait pas, mais venait plutôt à augmenter ? Qui plus est de manière fulgurante ; dit de façon simple, il s’agira d’une catastrophe pour ces opérateurs.

L’excitation autour de Gamestop prend donc de l’ampleur, le 21 Janvier 2021, la valeur de son action double, passant alors à 40 dollars, ce qui “pressa” le fond Citron Research à abandonner son short établi en début Janvier pour 20 dollars l’action. Quelques jours plus tard, la déclaration sur Twitter du milliardaire Chamath Palihapitiya sur son souhait de parier à la hausse sonne l’explosion des compteurs : l’action terminera la journée à 188 dollars.

Durant la soirée du même jour, Elon Musk, qui a déjà pu montrer par le passé son aigreur pour les fonds d’investissement qui pratique le shorting, se joint la fête en postant un tweet avec un lien renvoyant au groupe r/WallStreetBets sur Reddit :

Le 27 janvier, à l’ouverture, l’action Gamestop vaut 354 dollars.

Plus qu’un mouvement : une croisade

Pour que le short squeeze soit “sévère” envers ces Hedges funds qui ont short, un simple processus d’achat et de vente d’actions n’est pas fructueux. En effet, l’on précise que la mobilisation portait envers et contre tout sur l’achat des actions et non leur revente, la raison est simple : les fluctuations existantes de la valeur de l’action entre achat et vente durant les heures d’ouverture du marché boursier pourraient permettre à ces fonds de combler les pertes voire même de générer du profit. Ce qui n’est en aucun cas l’objectif du mouvement. Ainsi, une fois les efforts pour permettre la réévaluation de l’action ont porté leurs fruits, un slogan se fît alors fortement relayer au sein de la communauté en vue de motiver les membres et les participants à garder leurs actions au maximum ; le slogan “Hold the Line” ou “Patientez, Maintenez”.

Cet élan de solidarité est sans précédent dans ce milieu. D’autant plus qu’il s’agit ici d’argent, de beaucoup d’argent, réputé pour avoir la capacité de détruire la plus forte des relations de confiance entre les individus.

Le grand perdant

Bien qu’il soit très complexe d’apposer le mot victoire à ce mouvement, il n’en demeure pas moins que l’un des objectifs de la communauté voulant marquer un gros coup contre les fonds d’investissement ayant short massivement l’action de Gamestop peut être qualifié de réussi. En effet l’histoire retiendra le nom de Melvin Capital Management comme principal perdant, ce fond spéculatif notamment connu pour ses paris à découvert s’est vu infligé des pertes colossales. Durant les trois premières semaines de l’euphorie, le fond aurait essuyé des pertes de plus 3,5 milliards de dollars. Ces chiffres pourraient être réévalués à la hausse si l’on prend en compte d’autres opérateurs qui auraient short sans pour autant le déclarer.

Conclusion

Les rouages de cette affaire ont donc les caractéristiques adéquates pour la production d’un film sensationnel. L’adage “l’union fait la force” adapté au progrès et aux pratiques interactives actuelles n’aura jamais été plus parlant.

Bien qu’un pavé soit jeté, il n’en demeure pas moins que le secteur de la finance, de par ses moyens s’avère être un océan et non une mare. Impactant donc peu au final les établis en vigueur.

Ainsi,  dire qu’un rassemblement d’individus issus du peuple a réussi à “battre” Wall Street semble aller vite en besogne, car, bien que des milliards aient été plus ou moins “redistribués”, ces quelques acteurs du milieu financier ne représentent pas la globalité du secteur.

Cette expédition punitive par le peuple a non moins révélé au grand jour les contours d’un système dont l’opacité autour des pratiques semble vive malgré les instances de contrôle existantes.

Par Ayman Hilal, promotion 2020-2021 du M2 IESCI

Webographie

 

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L’impact de la pandémie Covid-19 sur le secteur bancaire français https://master-iesc-angers.com/limpact-de-la-pandemie-covid-19-sur-le-secteur-bancaire-francais/ Fri, 26 Feb 2021 10:13:06 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3367 Les banques ont un rôle crucial dans le système économique. En exerçant le rôle d’intermédiaire entre les détenteurs et les apporteurs de capitaux, elles permettent le financement l’économie, maintenir les taux et combler les déficits budgétaires. De par leur rôle… Continuer la lecture

L’article L’impact de la pandémie Covid-19 sur le secteur bancaire français est apparu en premier sur Master Intelligence Economique et Stratégies Compétitives.

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Les banques ont un rôle crucial dans le système économique. En exerçant le rôle d’intermédiaire entre les détenteurs et les apporteurs de capitaux, elles permettent le financement l’économie, maintenir les taux et combler les déficits budgétaires.

De par leur rôle dans la responsabilité sociétale, et  en tant qu’instrument clé du maintien du système économique, la crise de la Covid-19 les a replacées sur le devant de la scène.

Mais en tant qu’entreprise de droits privés, elles ne sont pas non plus épargnées par un environnement économique concurrentiel féroce depuis une trentaine d’années, les obligeant ainsi à revoir leur stratégie.   Cette concurrence, qui était déjà significative entre banques dites « traditionnelles », est exacerbée avec le phénomène des nouveaux entrants tels que les grands commerçants, les FinTech, les « néobanques »[1] (Orange banque, N26 ou encore Révolut), les opérateurs de télécommunication ou encore les géants d’internet.

De ce fait, pour préserver leurs avantages concurrentiels, les banques dites « traditionnelles » ne peuvent donc plus se contenter de leur seul univers, elles doivent aussi innover en permanence et se battre sur le terrain des innovations, poussées par les technologies numériques.

L’enjeu pour les banques aujourd’hui sera de trouver cet équilibre ténu entre leur histoire et raison d’être, avec le monde financier “technologisé” qui est celui d’aujourd’hui et qui sera, encore davantage, celui de demain.

Une mutation déjà en marche

Les banques françaises dans la course de la taille critique

Dès les années 1995, les banques avaient déjà commencé des stratégies de croissance externe pour atteindre la taille critique et préserver leurs marges, trouver des nouvelles sources de revenu et soutenir leur produit net bancaire (PNB).

Quelques exemples parmi les fusions et acquisitions importantes :

  • Rachat du CIC par la Banque fédérative Crédit mutuel en 1998,
  • Rachat de Paribas par BNP en 2000,
  • Rachat du Crédit Lyonnais, devenu LCL, par le Crédit Agricole en 2003,
  • Rapprochement de la Caisse d’épargne et de la Banque Populaire pour constituer la BPCE en 2009.

Dernièrement, décembre 2020, la Société générale et le Crédit du Nord ont été jusqu’à annoncer la fusion de leurs réseaux de détail, faisant disparaitre une des deux marques. Cette fusion provoquera la fermeture de 600 agences d’ici fin 2024, permettant ainsi des synergies et préservant le résultat.

Depuis les années 2010, le secteur bancaire français est dominé par cinq groupes : BNP Paribas, BPCE (Banques Populaires-Caisses d’Épargne), Crédit Agricole, Crédit Mutuel et Société Générale, qui représentent environ 80% des crédits distribués et 90% des dépôts collectés.

Avec une concentration très avancée, le secteur bancaire français reste oligopolistique.

Une politique de diversification des produits

Parallèlement à ce mouvement de concentration, les banques françaises ont aussi diversifié leurs services : conquête des marchés « proches » comme les assurances, avec la notion de « bancassurance », l’immobilier, les services et les banques en ligne (Boursorama, filiale de la Société Générale), mais aussi, en développant de plus en plus de produits ou services hors domaine bancaire, comme les services à la personne à domicile, les offres d’abonnement de téléphonie mobile ou encore les systèmes de protection du domicile.

Le Crédit Mutuel-CIC, par exemple, a déployé une offre de location de vélo avec assistance électrique à Paris, Lyon et Strasbourg. A la Caisse d’Épargne Midi-Pyrénées, les équipes envisagent un avenir dans la domotique.

Mais les banques ne s’arrêtent pas là. Certaines exploitent déjà le marché des partenariats avec les grandes enseignes. BNPP, par exemple,  propose des invitations à des événements sportifs ou culturels et des réductions dans diverses grandes enseignes à ses clients Priority. La Banque Postale communique sur les avantages Sephora, Interflora ou encore Alinéa.

Le secteur bancaire entre dans l’ère du numérique

Cette transformation du secteur bancaire ne peut être réalisable sans une ambition numérique. En effet, le virage du numérique est primordial, mais reste extrêmement délicat. Il regroupe plusieurs catégories à la fois. Les banques doivent tenir compte non seulement des innovations technologiques et des évolutions des produits, mais aussi de nouveaux modèles économiques et de nouveaux concurrents.

Ces transformations obligent donc une réorganisation en interne sur différentes thématiques en même temps. Par exemple, la gestion des ressources humaines, face aux transformations que connaissent les banques, est, par définition, un enjeu transversal. Les acteurs sont en effet confrontés à un double défi : trouver les compétences nécessaires pour se transformer et gérer l’obsolescence de certaines compétences, d’un côté, et, de l’autre, réussir à trouver l’équilibre entre digital et la possibilité d’interagir avec des conseillers.

Si, dès les années 2010, les banques ont bien pris conscience de ce nouveau virage, les projets digitaux restent toujours des projets très lourds et toujours « en-cours ».  Même si certaines banques sont plus avancées que d’autres, les transformations du type Core Système (qui touche à leurs activités banque de détail) restent problématique.

Ce que la crise Covid a changé

« Il y a eu un moment de stupeur au mois de mars, on était peu nombreux à s’attendre à une décision aussi radicale », affirme un cadre dirigeant d’une banque de Maine et Loire, lors de son interview du 8 janvier 2021.

Les mesures sanitaires prises par le gouvernement, conduisant au confinement de l’ensemble de la population, ont bouleversé les interactions des différents acteurs économiques. Pour préserver la continuité de l’activité toutes les banques ont dû activer des plans d’urgence.

La nécessité d’adopter le digital, provoquée par la crise sanitaire, a modifié très rapidement les schémas organisationnels internes et la relation clients-fournisseurs. D’une relation directe, parfois hybride avec un mélange de numérique et de contacts réels, les banques se sont retrouvées à exercer un lien 100% digital.

Accélération de la transformation du système d’information et de l’organisation

Les infrastructures informatiques ont été mises à rude épreuve. Le système d’information bancaire, qui était initialement conçu comme une forteresse quasi hermétique et inviolable, doit s’ouvrir dans la précipitation. Par exemple, la Société Générale a dû déployer en 15 jours l’accès à distance de 50 000 collaborateurs. Les transactions à distance ont été décuplées. Le télétravail a dû être généralisé. 90% des salariés hors agences ont pu être placés en télétravail pour certaines banques. Des activités jusqu’ici inéligibles au télétravail, telles que les opérations de paiements ou de trading se sont retrouvées en quelques jours réalisées à distance par des collaborateurs équipés en urgence. Les processus ont dû être adaptés. Il y a eu des simplifications des procédures opérationnelles, des recours intensifs aux outils digitaux pour faire face à l’afflux des demandes de prêts garantis par l’Etat (PGE), des recours à la robotisation des traitements d’information, ou encore des workflows d’approbation de signatures digitales.

Accélération de la digitalisation du parcours clients

Du côté de la relation clientèle, les processus ont aussi été bouleversés. Les clients ont dû s’adapter à l’utilisation des canaux d’accès digitaux. Même si le digital est ancré dans les usages des Français, il n’a progressé que lentement : seulement 14% via mobile selon la dernière étude Deloitte. Avec ses 545 points de vente par million d’habitants en France (chiffre 2020), l’agence bancaire est jusqu’à présent le canal majeur pour toutes les opérations, hors consultation de soldes bancaires et virements (moins de 20% en agence). Or, pendant la crise sanitaire, le taux d’utilisation des canaux d’accès à distance a parfois été multiplié par 2 pour certains établissements. (Source : revue bancaire)

Les conséquences dans le secteur bancaire

Les mesures bâloises à l’épreuve

Si les banques ne sont pas à l’origine de la crise sanitaire, elles pourraient, en revanche, être une partie de la solution, en étant utilisées comme instruments pour favoriser la reprise économique. Les banques vont à la fois permettre d’éviter les faillites des entreprises et jouer leur rôle de financeur de l’économie réelle.

En effet, l’impact économique de la crise sanitaire pourrait laisser craindre une généralisation des défauts de paiements. A date, les mesures prises par la Banque Centrale Européenne (BCE) et autres instances de régulation rendent cela peu probable. En revanche, le risque d’insolvabilité des banques peut être réel. Après la crise financière de 2008, les accords Bâle III ont permis de relever les niveaux de fonds propres de 8 à 10,5%. La crise de la covid 19 sera un révélateur de l’efficacité des mesures bâloises post 2008. Les banques françaises sont sans aucun doute plus résilientes et robustes qu’en 2008, mais si la pandémie perdure, une dégradation durable de l’économie, ajoutée à un contexte de taux bas depuis quelques années, pourraient entrainer de fait les banques dans une spirale déficitaire.

« Pendant très longtemps, nous avons eu un système de banque assuranciel très performante économiquement. On arrivait dans ce système à répondre dans de bonnes conditions aux exigences baloises, que ça soit en termes de fonds propres ou en termes de liquidités. Mais dans le futur, il y aura moins de marge de manœuvre pour répondre à ces exigences. La question de la baisse de la rentabilité du secteur financier pendant une période plus ou moins longue n’est pas à exclure. Le contexte de taux bas a beaucoup impacté la rentabilité des banques. », explique un dirigeant d’une banque de Maine et Loire, lors de son interview du 11 janvier 2021.

Un nouveau modèle économique, organisationnel et technologique

La crise sanitaire a été un accélérateur de la transformation numérique. De nombreux freins psychologiques ont été levés. L’expérience de la crise a prouvé que les clients et les collaborateurs étaient prêts à l’accepter.

Cette digitalisation accélérée par nécessité a provoqué :

  • une accélération dans les nouvelles habitudes des modes de travail
  • une accélération dans les modifications de processus
  • une accélération dans un nouveau mode d’interaction client

De nouvelles habitudes des modes de travail à créer

Si la crise sanitaire a été un formidable accélérateur, elle a aussi révélé les faiblesses de la précipitation.

Sur le plan organisationnel, les salariés ayant fait du télétravail, sont peu enclins à revenir à une organisation présentielle totale après le premier confinement : pertes de temps dans les transports ou encore angoisses des collègues ensemble pendant des réunions. La révision du cadre légal du travail pour flexibiliser les conditions de mobilisation des salariés doit donc être accélérée.

En revanche, il y a eu un renversement de tendance après le deuxième confinement, où les collaborateurs ont demandé à revenir en présentiel malgré les consignes du gouvernement en faveur du télétravail.

Néanmoins, il y a eu malgré tout une accélération du télétravail, qui a permis de révéler des difficultés managériales, du maintien de la motivation des équipes, car les collaborateurs et managers n’étaient ni préparés, ni formés au télétravail.

« Pendant la crise, nous avons pris conscience que nous ne pouvions pas faire tant de choses que ça à distance. La crise sanitaire nous a permis de comprendre ce qu’on pouvait offrir ou pas, ce qu’il nous manquait, et pour demain ce qu’il faut que nous fassions. Par exemple, après la crise, les conseillers ont demandé à revenir en agence. Beaucoup ont réalisé que toute la semaine en télétravail n’était pas facile. Nous avons investi dans la formation pour les aider.», a expliqué un cadre dirigeant d’une banque. 

D’un point de vue organisationnel, les banques qui étaient sur un modèle reposant sur le lien de proximité, doivent aujourd’hui trouver un juste équilibre dans cette nouvelle relation « digitale-physique ».

Une nouvelle relation clients à imaginer

Du côté de la relation client, la crise de la covid-19 a donc changé le paradigme pour un nouveau mode relationnel à la fois 100% digital et 100% physique. Le nouveau défi est à la fois la gestion des réseaux d’agences, et l’accompagnement de la clientèle vers une « consommation autonome » associée d’un conseil à plus forte valeur ajoutée, « le conseiller augmenté ».

Le nombre d’agences en France, de 35 837 en 2019 n’a baissé que de 7,5% en 10 ans. La France compte 545 agences pour 1 million d’habitants, derrière l’Espagne (558 agences), mais bien loin devant la moyenne constatée dans la zone euro qui est de 285 agences [2].

Si aujourd’hui, grâce aux investissements digitaux de ces vingt dernières années, l’écart en matière d’offre et d’expérience client entre les banques traditionnelles et les néo-banques s’est fortement réduit, il n’en reste pas moins des enjeux stratégiques importants, portant sur l’innovation des usages et la valeur client perçue. Les clients attendent, à la fois, de l’autonomie dans les tâches quotidiennes, et souhaitent bénéficier dans le même temps de conseils personnalisés. Les clients veulent avoir accès aux services bancaires aussi facilement qu’ils le peuvent avec des applications de type Uber, Spotify ou Deliveroo. Le « Online Merge Offline »[3] (OMO) pourrait correspondre à un « must have » stratégique pour les banques dans les années à venir.

« Il n’y aura plus de différence positive avec le digital pour les banques. En revanche, il y aura bien une différence négative si on ne le fait pas. », affirme un cadre dirigeant d’une banque.

Le défi de la maitrise des nouvelles technologies à relever

Les processus qui ont été mis en place dans l’urgence ont vu apparaître des fragilités liées aux risques et aux contrôles.

Afin d’assurer la continuité de l’ensemble des activités dans une situation quasi absolue de télétravail des effectifs, les infrastructures techniques ont été fortement sollicitées, allant parfois jusqu’à la limite de leurs capacités.  Les différentes étapes et points de contrôles des déploiements n’ont pas pu être totalement vérifiés.

D’une part, les enjeux de cyber-sécurité, démultipliés par les problématiques de confidentialité des informations manipulées, ont été confrontés à une augmentation des risques opérationnels. En interne, par exemple, la plupart des banques ayant mis en place un workflow digital sont revenues sur leur workflow classique.

En externe, le paiement sans contact, devenant la nouvelle norme, doit nécessiter des adaptations importantes en termes de sécurité et d’infrastructure.

D’après le magasin UFC Que Choisir, le paiement sans contact est deux fois plus fraudé que celui par carte bancaire avec code secret. Le paiement à distance est de son côté dix-sept fois plus fraudé.

Les initiatives de modernisation des infrastructures et des dispositifs de gestion de crise devront être renforcés et devenir complets à plus long terme.

D’autre part, dans l’industrie bancaire, « le legacy » datant des années 70 et qui gère les comptes clients, demeurait jusqu’à maintenant le système dominant. Bien que les banques se soient approprié les dernières innovations sur les smartphones, applications, méthodes biométriques d’identification etc… très peu d’entre elles se sont véritablement lancées sur la refonte de leur Core système, de l’open banking [4], ou encore de l’utilisation des données bancaires. Les concepts comme BAAP (Bank As A Platform), BAAS (Bank As A Service) ou même fournisseurs de données ne sont pas encore envisagés.

La banque de demain

La pandémie peut laisser présager un risque de contre-performance pour l’ensemble de l’économie mondiale, et plus particulièrement pour les banques qui jouent un rôle majeur de coordinateurs. Face à cette incertitude, les banques risquent donc de freiner leur capacité d’investissement à un moment crucial, où au contraire, elles se doivent d’investir encore plus pour imaginer leur futur.

« En tant que dirigeant, il faut être vigilant à ne pas sacrifier l’investissement de préservation, voire l’investissement de développement. L’investissement, c’est la préservation du MCO (Maintien en Condition Opérationnelle) au quotidien, et de continuer à flécher son investissement pour continuer de développer de nouveaux services. Le risque pour le secteur bancaire, et notamment pour certains établissements, est de ne plus être en mesure d’assurer ce deuxième pilier. », alerte le dirigeant d’une banque.

Les banques ont bénéficié d’un élan formidable avec la crise sanitaire, qui a bousculé à la fois l’organisation du travail, le management, les relations clients ou encore la gestion interne, et ouvert le champ des possibles à l’Open banque, ou encore de nouveaux concepts tel que BAAS et BAAP. L’accélération de la transformation numérique, et notamment la data, pourraient être des alliés de taille pour rebâtir un modèle bancaire plus agile et plus résilient.

Tout ceci montre que le secteur bancaire possède depuis longtemps une richesse d’informations à exploiter au travers de ses données, une véritable nouvelle richesse des banques, bien plus que le volume des capitaux qu’elles peuvent détenir. La maîtrise et l’exploitation de la donnée, et surtout de la donnée en temps réel peut devenir une véritable source de communication et de prise de décision.

Sur ce point, il est fort probable que la data soit un avantage concurrentiel décisif et un levier majeur dans la transformation du secteur bancaire.

Mais cette accélération a aussi mis en avant les fragilités comme un Core Système datant des années 70. Si le virage du digital doit être envisagé, il faut aussi opérer un changement en profondeur des systèmes d’information. Ce sont des investissements lourds mais qui ne peuvent pas être reculés indéfiniment.

De plus, côté relation clients, la crise sanitaire a aussi montré que les collaborateurs n’étaient pas assez préparés, ni au télétravail et ni à une clientèle maintenant habituée à la possibilité du digital et qui devient extrêmement exigeante. Si le virage du digital doit être entrepris, il doit l’être avec une réflexion en parallèle sur les changements en profondeur des métiers de la banque. Ce change management doit s’articuler à la fois sur une évolution des tâches opérationnelles et d’une réévaluation des compétences clés, pour tendre vers une plus grande expertise et une capacité à améliorer l’expérience du client.

L’après Covid-19 a montré que le « self care »[5] a des limites, il ne suffit pas d’avoir la nouvelle application, il faut aussi accompagner le lien humain à la clientèle, qui en ces temps de distanciation sociale est de plus en plus nécessaire.

« L’enquête de CASA[6] a montré que la proximité relationnelle a été un élément de rassurance pendant et après la crise. Il n’y a pas eu le même soutien avec les banques en ligne. Cette proximité relationnelle est très importante dans les moments compliqués, sur les populations qui ont été fragilisées par la crise. Nous avons su soutenir ceux qui étaient particulièrement touchés par la crise comme les artisans, ou encore les particuliers touchés par le chômage. L’IRC[7] n’a jamais autant augmenté qu’en 2020, et c’est vrai pour quasiment toutes les caisses du groupe. Cet indice de confiance a prouvé notre capacité à réagir et à soutenir nos clients dans des moments difficile. », explique un cadre dirigeant d’une banque.

La pandémie a permis aux banques de montrer qu’elles pouvaient jouer pleinement un rôle sociétal

Par exemple, concernant le « geste mutualiste », le Crédit Agricole ou encore le Crédit Mutuel-CIC, ont mobilisé chacun 200 millions d’euros pour accompagner les professionnels, artisans, commerçants, et les aider à passer le cap.

De ce fait, parmi les 25 marques les plus utiles citées pendant le confinement, une banque a été nommée pour la première fois. Le Crédit Agricole apparait ainsi parmi Tiktok, Leroy Merlin, Picard Surgelés ou encore Fortnite[8].

Autre fait révélateur de l’après Covid, là où Orange Banque, la néobanque qui revendique plus d’un million de clients en France et qui émarge dans le club des néobanques millionnaires, accuse 549 millions d’euros de pertes accumulées en 3 ans (selon Les Echos), le Crédit Agricole, leader de la banque de détail en France, affiche quant à lui, à fin septembre 2020, un résultat net sous-jacent de 4,7 milliards d’euros, en baisse de seulement 300 millions d’euros par rapport à 2019, tout en intégrant une hausse du coût du risque de près de 1,5 milliards d’euros.

La crise sanitaire a de ce fait révélé que les banques dites « classiques » peuvent déployer leurs SI extrêmement rapidement. Pour la plupart très solides financièrement, elles ont montré en outre, et ont su faire connaître, leur capacité à apporter une contribution réelle au soutien de l’activité économique.

Si les néo-banques ont effectivement gagné des parts de marché, les banques classiques ayant un réseau dense, comme le Crédit Agricole ou encore le Crédit Mutuel, en ont aussi gagné. La proximité relationnelle et un réseau dense restent des atouts concurrentiels. 

« Il n’y a pas eu de démonstration sur le fait que, sur les dernières années, les banques à réseaux étaient définitivement condamnées. Pour notre part, nous avons gagné des parts de marché. », affirme un cadre dirigeant d’une banque. 

La banque doit aller encore plus loin en tant que partie prenante. Si la Covid-19 a permis de mettre la responsabilité sociétale des banques sur le devant de la scène, la banque pourrait être une « entreprise à mission ». Pour ce dirigeant de banque, respecter la législation ne suffit plus.

« Il faut aller plus loin, et se forger sa propre philosophie d’acteur économique, sur ce qui est un projet moyen et long terme, et qui répond à la fois à un équilibre économique, mais aussi à une création de valeur dans la durée pour la société. Il faut que, partout où nous le pouvons, de façon continue, venions influencer la transformation écologique et environnementale, en soyons partie prenante. », a-t-il affirmé. Et ceci, même si, effectivement, il admet qu’à date il n’est pas possible de créer de façon définitive une préférence sur un positionnement particulier si la contrepartie n’est pas en mesure de payer pour consommer le service, et ajoute : « C’est aussi cette réalité qui nous rattrape. »

Il conclut : « Cette crise a aussi rappelé le fait que nous sommes des animaux sociaux. Concernant la digitalisation, bien sûr que nous sommes déjà en train de basculer. Dans le monde de demain, on sera moins nombreux, mais on aura quand même besoin des deux piliers de services. Demain, toutes les banques auront des apps comme « WeChat », qui ne sera pas un avantage concurrentiel. Le vrai avantage concurrentiel sera notre capacité à faire muter nos métiers sur un marché en contraction. »

Malgré les défis qui les attendent, les banques sont peut-être donc les grandes bénéficiaires de cette crise, là où les néobanques, elles, ont montré les limites de leur modèle.

Par Thao Noet et Ammar Aleid, promotion 2020-2021 du M2 IESCI

Références :

(Les sites internet ont été consultés entre le 18 et 23 décembre 2020)

De Coussergues, S., Bourdeaux, G. & Gabteni, H. (2020). 1. Le secteur bancaire français. Dans : , S. de Coussergues, G. Bourdeaux & H. Gabteni (Dir), Gestion de la banque: Tous les principes et outils à connaître (pp. 3-40). Paris: Dunod.

Groupe Crédit Agricole : https://www.credit-agricole.com/notre-groupe/decouvrir-le-groupe-credit-agricole

Crédit Agricole Anjou Maine : https://www.credit-agricole.fr/ca-anjou-maine/particulier.html

Statista :

https://fr.statista.com/statistiques/492273/part-cinq-grands-groupes-bancaires-total-bilan-bancaire-france

Le Figaro :

https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/le-classement-des-banques-traditionnelles-qui-negocient-le-mieux-le-virage-de-la-digitalisation-20200130

Presse citron :

https://www.presse-citron.net/comment-le-groupe-bnp-paribas-a-reussi-son-virage-numerique/

Études et analyses :

https://www.etudes-et-analyses.com/marketing/marketing-bancaire/etude-de-cas/forces-porter-credit-agricole-487803.html

BFM TV :

https://www.bfmtv.com/economie/experts/guillaume-almeras/les-nouvelles-strategies-bancaires-sont-elles-vraiment-pertinentes_AN-201905070213.html

Culture banque :

Classement des banques françaises en 2019

La Tribune :

https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/covid-19-le-secteur-bancaire-est-il-pret-a-etre-un-acteur-de-la-reprise-848680.html

France Transaction :

https://www.francetransactions.com/actus/news-banques/banques-un-secteur-en-mutation-44-000-suppressions-de-postes-annoncees-en.html

France Culture :

https://www.franceculture.fr/economie/covid-19-de-lattitude-des-banques-en-temps-de-crise

CGI :

https://www.cgi.fr/fr-fr/blog/covid-19-accelerateur-transformation-secteur-bancaire

Revue d’économie financière :

https://www.oklein.fr/strategies-de-la-banque-de-detail-face-a-la-revolution-technologique-retrouvez-mon-analyse-parue-dans-le-dernier-numero-de-la-revue-deconomie-financiere-intitule-technologies-et-mutat-2/

Revue banque :

http://www.revue-banque.fr/banque-detail-assurance/article/crise-covid-19-renforce-les-attentes-clientele-pro

Fédération bancaire française :

http://www.fbf.fr/fr/espace-presse/communiques/un-secteur-bancaire-au-service-de-l’economie-francaise-et-un-dialogue-social-actif,-mobilises-pour-assurer-la-securite-des-salaries-et-des-clients

http://fbf.fr/fr/files/APGCYU/MEMO%2005%20-%20Emploi%20dans%20les%20banques_octobre%202020.pdf

http://www.fbf.fr/fr/espace-presse/communiques/signature-de-l’accord-pour-la-gestion-previsionnelle-des-emplois-et-des-competences-(gpec)

Observatoire des métiers de la banque :

http://www.observatoire-metiers-banque.fr/f/chiffresTendances/sf/plus/s/contours_2020

http://www.observatoire-metiers-banque.fr/f/etudes/sf/plus/s/impact_numerique_charge_clientele_particuliers

Économie matin

http://www.economiematin.fr/news-Covid-19-fraude-bancaire-désemplit-pas-malgre-crise

[1] On appelle  « néo-banque », une banque soumise aux mêmes obligations réglementaires et prudentielles que les banques traditionnelles mais qui ne disposent ni d’une structure en « dur », ni d’un réseau d’agences. L’ensemble de leurs services n’est accessible qu’à travers internet même si quelques représentations physiques sont possibles.

[2] Source : https://www.optionfinance.fr/actualites/actualites-generales/detail/le-nombre-dagences-baisse-moins-en-france.html

[3] Le concept OMO a été introduit par Alibaba pour le marché chinois. Il fait suite au mouvement O2O (Online To Offline). Aujourd’hui, les informations captées « online » permettent d’agir « offline » grâce à IOT (Internet Of Things). Par exemple, le réfrigérateur va envoyer la liste des courses directement au caddy conduit par le consommateur dans un supermarché. En passant devant les rayons, le consommateur recevra alors des publicités sur des produits qui lui sont spécialement dédiés.

[4] La notion d’Open Banking est apparu dans la deuxième Directive européenne des services de paiements (DSP2) de 2013

[5] Le self care est vise à donner aux clients la possibilité d’avoir des ressources en ligne et/ou des espaces collaboratifs pour trouver des réponses 24h/24 et 7j/7, en instantané. Les clients ont la possibilité de gérer leurs problèmes ou demandes en toute autonomie, grâce à des supports numériques variés, qui peuvent aller de l’application aux informations sur un site, jusqu’au chatbot ou la FAQ dynamique. (Source : https://blog.smart-tribune.com/selfcare-definition).

[6] CASA : Crédit Agricole SA

[7] IRC : Indice de recommandation Clients. Cet indice permet d’évaluer l’image de l’entreprise et la probabilité des clients à la recommander à son entourage.

[8] https://www.influencia.net/fr/actualites/in,tendances,decathlon-arte-carrefour-doctolib-vinted-ces-marques-plus-utiles-nos-vies,10591.html

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La digitalisation bancaire https://master-iesc-angers.com/la-digitalisation-bancaire/ Wed, 16 Jan 2019 13:49:18 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=2992 Les activités financières jusqu’alors réservées aux banques sont en train de passer  le cap de la digitalisation, et le marché est en train de se désintermédier à très grande vitesse. Dans ce contexte en pleine mutation les banques vont devoir… Continuer la lecture

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Les activités financières jusqu’alors réservées aux banques sont en train de passer  le cap de la digitalisation, et le marché est en train de se désintermédier à très grande vitesse. Dans ce contexte en pleine mutation les banques vont devoir se réinventer. Le digital a facilité l’apparition de nouveaux acteurs qui sont venus concurrencer les établissements financiers traditionnels. Cette concurrence s’est accélérée avec l’émergence des Fin Tech. Ces start-up spécialisées dans les technologies financières se concentrent généralement sur des offres de produits et services bancaires à faible réglementation et à fortes marges.

Ainsi la question centrale de notre travail est la suivante : Quelles sont les enjeux du digital dans les banques ?

I. Emergence des banques en ligne et changement de comportement de la nouvelle génération

Dans cette partie nous allons essayer de dégager qu’elle est la place qu’occupe différentes banques en ligne sur le marché français, ainsi que la part des Français utilisant les services en ligne pour accéder à leur compte bancaire.

La facilité d’utilisation des applications mobiles bancaires et leur rapidité ont donné un élan positif aux banques en ligne. Il est devenu primordiale à n’importe quelle banque d’avoir un support digital pour répondre aux besoins et aux attentes des client en terme de facilité de transaction bancaire ou bien même de communication entre les deux parties c’est-à-dire entre le client et son conseiller.

Part des internautes et de la population française effectuant des opérations bancaires en ligne de 2006 à 2016.

À travers ce graphique nous remarquons l’utilisation croissante de la population française d’internet pour effectuer différentes opérations bancaires, cela démontre encore une fois l’importance des technologies et de la digitalisation dans le secteur bancaire.

II. L’influence du numérique dans les métiers de la banque

La digitalisation bancaire aura qu’on  le veuille ou non un impact sur les métiers de la banque tels qu’ils sont perçus aujourd’hui. On s’intéressera à l’évolution des trois métiers les plus susceptibles de connaitre une mutation dans la banque.

2-1 Mutations du métier de gestionnaire de back office

Un gestionnaire backoffice est la personne chargée de régler les opérations financières liées aux agences bancaires.

Tout d’abord l’évolution de ce métier passe par la dématérialisation des instruments de paiement. Comme révolution dans ce métier on peut imaginer une véritable dématérialisation du chèque papier qui sera remplacé  par le « chèque image » obtenu par la lecture d’un code barres ce qui fera une économie considérable de papier.

D’autre part on peut songer également à une modification des activités et des compétences liées à ce métier.  En effet on peut penser à une amélioration en matière de compétence du métier de gestionnaire backoffice une sorte de montée en gamme dans laquelle le gestionnaire Back Office sera amené à réaliser des opérations de contrôle, même si cela n’entrainera pas de profonde modification du métier. Dans cette perspective le gestionnaire de Backoffice pourra disposer de plus de temps car moins sollicité, ce qui peut l’amener à développer des interactions avec les clients, tandis que ses anciennes activités seront transférées vers le middle office, l’efficacité de ce métier dépendrait maintenant sur les capacités relationnelles du gestionnaire BackOffice avec les clients. En effet, cette nouvelle configuration augmente fortement le champ d’action des gestionnaires de backoffice qui peuvent intervenir sur des opérations allant du simple contrôle de conformité à des interactions avec le client final.

2-2 Mutation du métier de conseiller clientèle particuliers

Dans une banque le conseiller clientèle est le principal interlocuteur entre la banque et le client. Le conseiller clientèle est à l’écoute du client et le conseille sur les différents produits bancaires afin de répondre au mieux à ses attentes.

L’avènement du numérique continue de bouleverser le métier de conseiller clientèle, cela se voit à travers la baisse de fréquentation des agences et  l’utilisation de plus en plus massive de canaux à distance dans le traitement d’opérations bancaires simples (passer un virement, modifier son plafond de retrait). Aujourd’hui le client est de plus en plus informé parfois même plus que le conseiller client et souhaite avoir la solution adéquate.

Sur l’activité et les compétences du métier le rôle de conseiller client est appelé à évoluer vers plus de relation client et plus de conseil. Dans ce nouveau contexte technologique accru, les banques doivent être à la hauteur et ce quel que soit le canal emprunté. Pour le métier de conseiller clientèle, l’accent doit être mis sur la personnalisation et la pertinence du service apporté au client. Le métier de conseiller client doit désormais être réalisé avec les outils de la nouvelle génération rendue possible grâce à Internet. Il faut rappeler que la banque par nature est une institution de proximité, de relation et de confiance, au vu de ces exigences il apparaît que les conseillers clients ont un rôle stratégique dans l’activité de service proposée par les banques, c’est donc aux conseillers bancaires de s’adapter aux nouvelles habitudes des clients.

D’autre part, il faudrait aussi penser à une spécialisation beaucoup plus spécifique du métier de conseiller clientèle, une spécialisation dans laquelle le conseiller client se doit d’être polyvalent, ou spécialisé dans un canal de distribution voire dans un métier particulier. Le métier de conseiller client de demain, se doit d’avoir accès à minima à autant d’informations que ses clients  et ce dans un court laps de temps, pour cela il faut absolument les codes et outils utilisés par les clients.

2-3 Mutations du métier de directeur d’agence

Le directeur d’agence est un maillon crucial dans le succès de la distribution bancaire d’agence qu’il a sous sa direction. Le directeur d’agence peut endosser plusieurs costumes celui de financier, de commercial, de gestionnaire. Il est en charge du développement de l’activité de son agence dans le secteur géographique dans lequel il se trouve.

Avec le développement du digital et au sens large du numérique le métier de directeur d’agence peut bénéficier d’un pouvoir et d’une autonomie beaucoup plus importante, la digitalisation lui permettra de mieux évaluer les performances de ses collaborateurs via des outils d’indicateur de performance existant sur les tablettes au-delà des indicateurs traditionnels de performances des salariés. Le digital devrait permettre de faciliter l’exercice du métier et en particulier les opérations de contrôle à travers l’automatisation des opérations de ces derniers. Les managers d’agences auront également plus un rôle de pilote de satisfaction client tout en renforçant leurs compétences managériales.

Conclusion

Le digital dans les banques sert comme outil de stratégie afin de se rapprocher des clients à travers les moyens du numérique et d’Internet, il sert aussi à modifier et améliorer les conditions de travail en interne. Les banques qui font le choix du numérique réalisent un grand pari sur l’avenir, tout étant conscient des risques internes que cela peut engendrer. Les entreprises matures dans l’utilisation du numérique, ont une efficacité supérieure aux autres de 20% et sont susceptibles d’augmenter leur rentabilité de 40%. Ce constat est fort intéressant et qui devra encourager les banques à intensifier leurs efforts.

Cependant l’introduction du numérique n’est pas sans conséquences négatives, on peut supposer qu’il aura plusieurs changements dans les métiers de la banque comme on l’a vu, c’est aux banques de tirer le meilleur parti de cette situation si elles veulent retourner la situation à leurs avantages.

Article de Adnane Drici, promotion 2018/2019 du M2 IESCI

Bibliographie

  • « L’évolution du modèle bancaire à l’ère du digital » Fabrice Lamirault.
  • « L’impact du numérique sur les métiers de la banque » Charlotte Béziade & Serge Assayag.

Sites internet

  • https://www.bankobserver-wavestone.com/digitalisation-bancaire-nouveaux-defis-rh/
  • https://www.latribune.fr/entreprises-finance/banques-finance/le-numerique-chamboule-tout-de-l-emploi-dans-les-banques-512869.html
  • https://lnt.ma/secteur-bancaire-digitalisation-processus-irreversible/
  • http://www.dynamique-mag.com/article/banque-face-enjeux-digital.8728
  • https://www.digitall-conseil.fr/avenir-secteur-bancaire-a-lere-digital/
  • https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-168485-levolution-du-modele-bancaire-a-lere-du-digital-2077723.php

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De la création de la monnaie aux bitcoins : investissez seulement et uniquement ce que vous êtes prêt à perdre https://master-iesc-angers.com/de-la-creation-de-la-monnaie-aux-bitcoins-investissez-seulement-et-uniquement-ce-que-vous-etes-pret-a-perdre/ Tue, 30 Jan 2018 12:22:38 +0000 http://master-iesc-angers.com/?p=2611 L’argent est le maitre du monde. Notre quotidien, nos projets, notre futur dépendent de l’argent qui circule dans l’économie. Pourtant rares sont les citoyens, les politiciens et les décideurs sachant vraiment ce qu’est l’argent. D’où vient-il ? Et qui le fabrique ?… Continuer la lecture

L’article De la création de la monnaie aux bitcoins : investissez seulement et uniquement ce que vous êtes prêt à perdre est apparu en premier sur Master Intelligence Economique et Stratégies Compétitives.

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L’argent est le maitre du monde. Notre quotidien, nos projets, notre futur dépendent de l’argent qui circule dans l’économie. Pourtant rares sont les citoyens, les politiciens et les décideurs sachant vraiment ce qu’est l’argent. D’où vient-il ? Et qui le fabrique ?

Beaucoup croient que l’argent est fabriqué par l’Etat, qu’ils ont réellement de l’argent sur leurs comptes bancaires et que les banques prêtent l’argent de leurs déposants quand elles font crédit. Or, ces trois croyances sont totalement fausses ! La confusion règne au profit d’une finance mondialisée. En partant de ce que tout le monde connait, pas à pas, en employant des termes techniques et en illustrant chaque principe par des exemples simple cet article vous donne les bases indispensables à la compréhension du système monétaire depuis la naissance de la première monnaie jusqu’aux monnaies numériques comme le bitcoin.

I. La double monnaie

La monnaie est au cœur de nos économies, elle en est le fluide qui permet les échanges des biens et des services.

Pour savoir comment le monde fonctionne, il est indispensable de savoir doù vient cette monnaie

La monnaie prend plusieurs formes qu’il faut bien distinguer : il y a la monnaie sous forme de billets et de pièces, on l’appelle la monnaie centrale corporelle, ou encore monnaie manuelle, liquide ou espèces. Et il y a une autre forme de monnaie, la monnaie qui se trouve sur chaque compte en banque, on l’appelle la monnaie scripturale, ou la monnaie secondaire.

II. Histoire de la monnaie

L’histoire de la monnaie s’étale sur des milliers d’années. Et la plupart des gens croient que la monnaie est venue pour remplacer le troc : le fait d’échanger un bien contre un autre.

Les historiens ne cessent de le répéter et les faits ne font que le prouver : ce n’est pas le troc qui est apparu en premier mais le crédit : la comptabilité des dettes bien avant l’apparition de la monnaie.

Pour mieux comprendre : imaginons deux paysans, l’un produit des salades qu’il récolte au printemps et l’autre produit des pommes de terre qu’il récolte en automne. Au printemps l’un doit à l’autre une quantité bien déterminée de salade qu’il ne pourra rembourser qu’en automne par des pommes de terre.

C’est la confiance qui permettait ces échanges différés, tout le monde partageait le même principe moral : « une dette doit être remboursée ». Mais au-delà d’un volume d’échange, la parole ne suffisait plus il faut donc consigner par écrit. Les communautés prenaient une unité de compte virtuelle ou un étalon pour donner un prix aux biens et aux services qu’ils échangeaient.

Durant plusieurs milliers d’années il n’y avait pas de monnaie, juste la comptabilité des dettes des communautés entre elles. Ce n’est que vers 700 Avant J.C, que des souverains ont imposé l’usage d’une monnaie comme moyen d’échange sous la forme d’un objet dont ils s’attribuaient l’exclusivité de la production.

Les métaux précieux comme l’or ou l’argent étaient devenus une monnaie internationale, il était risqué de déplacer ses métaux précieux et donc à partir du 17ème siècle les marchands confiaient la garde de leurs métaux aux orfèvres en échange d’un certificat de dépôt nominatif.

Les marchands se mirent à se payer non pas avec les métaux précieux mais avec ces certificats, la monnaie papier était née. Remarquant que les commerçants laissaient leurs métaux précieux dans leurs coffres, les orfèvres ont eu l’idée de les prêter à d’autres marchands contre des intérêts.

Tant que les emprunteurs et déposants ne venaient pas en même temps pour récupérer leurs métaux précieux, les orfèvres pouvaient imprimer plus de certificats que de métaux disponibles dans leurs coffres.

Aujourd’hui les métaux précieux sont remplacés par la monnaie centrale, cette monnaie propre à chaque Etat et fabriquée par la banque centrale est dite une monnaie fiduciaire, du latin fiducia qui veut dire confiance. Et la monnaie secondaire est l’équivalent des certificats de dépôt.  Les banques accordent des crédits en créant de la monnaie scripturale et elle en crée beaucoup plus que de monnaie centrale qu’elles déposent dans ses coffres.

III. Bitcoin : la fameuse monnaie numérique

Tout comme l’euro et le dollar, le bitcoin est une monnaie, sauf que cette dernière est numérique c’est-à-dire qu’on ne peut l’utiliser que sur internet, elle n’existe pas en vrai (en pièces ou en billets).Le premier bitcoin a été créé en 2009, par satoshi nakamoto.

Mais avant de rentrer dans le vif du sujet, il est important de faire le tour de quatre points:

  1. Une question de confiance

Trois dispositifs de confiance fondent en définitive le crédit de la monnaie :

  • confiance sociale résultant d’une longue pratique au sein d’une communauté ;
  • confiance « matérielle » accordée à la valeur en quelque sorte embarquée dans l’instrument monétaire, comme on vient de le voir à propos des métaux précieux ;
  • confiance institutionnelle et politique qui attache une autorité souveraine, un « tiers de confiance », à un support, billet de banque et autres monnaies fiduciaires ;
  1. La domination de la monnaie scripturale

Aujourd’hui, la monnaie scripturale, qui n’est rien d’autre qu’une écriture sur un compte en banque, représente plus de 90% de la masse monétaire en circulation, devant les billets et les pièces qui représentent la monnaie centrale. Il est donc impossible que tous les gens qui disposent d’un compte bancaire puissent retirer tout leur argent en même temps.

  1. Les systèmes bancaires pour surveiller toute transaction

Les états essayent le plus possible d’imposer des lois qui interdisent ou qui rendent plus difficile les échanges avec du liquide. En France il est interdit d’acheter un bien d’une valeur dépassant les 3000 euros en cash, il est nécessaire de passer à travers la banques, c’est-à-dire par chèque ou virement bancaire. Mais pourquoi tout cela ? Tout simplement parce que quand les transactions passent par le système bancaire, il est plus facile de les contrôler.

  1. Les transferts intra-bancaires : les intérêts

De nos jours, tout le monde payent des sommes de petites ou de grandes tailles sans jamais employer des billets de banque. Quand un client d’une banque veut transférer de l’argent à un client de la même banque, cette dernière ne réalise qu’une manipulation de chiffres. En revanche, quand un transfert doit se faire entre deux banques distinctes et concurrentes la monnaie centrale intervient et donc la banque centrale. Ce transfert qui fait intervenir un intermédiaire est payant.

Ces quatre points nous seront très utiles pour la compréhension du nouveau système du bitcoin et pourquoi les gens préfèrent l’utiliser. Mais avant, comment peut-on avoir du bitcoin ?

Le bitcoin est ce qu’on appelle une crypto-monnaie, une monnaie virtuelle contrairement à toute autre monnaie classique. Il existe plusieurs manières d’avoir un porte-monnaie virtuel pour le bitcoin et la plus simple est de se rendre sur le site du bitcoin : www.bitcoin.org et de suivre les étapes.

Une fois le portefeuille créé, une adresse lui est automatiquement associée. Et c’est à travers cette adresse qu’il est possible de recevoir ou envoyer des bitcoins. Une opération simple rapide qui ne nécessite aucune carte d’identité ou de frais. Maintenant la question qui se pose est la suivante :

 Comment une monnaie aussi simple dans son utilisation a pu avoir la confiance de toute une population ?

          Au moment où cet article a été rédigé, la valeur totale du bitcoin qui circule dans le monde entier dépasse les 300 milliards de dollars et cela est dû à plusieurs raisons dont la première est le fait qu’il n’existe pas d’intermédiaire et donc pas de frais de transfert pour les transactions entre les utilisateurs du bitcoin.

Le bitcoin ne dépend pas d’un Etat, d’un gouvernement ou d’une banque, les transactions se font directement, c’est ce qu’on appelle en informatique le peer to peer (P2P). De plus, pour le bitcoin il n’existe pas de frontières, il unifie tout le monde et permet les transactions avec une seule monnaie.

Il est à noter aussi que la production et la gestion de cette crypto monnaie n’est gérée par aucun organisme mais ce n’est pas pour autant que ce n’est pas un système régulé. Comme toute transaction bancaire, les transactions en bitcoin doivent être vérifiées. Et dans ce cas-là, ce n’est pas une banque qui vérifie ces transactions mais toutes les personnes ayant un portefeuille de bitcoin. Ce qui fait du bitcoin et de toute autre crypto monnaie, une monnaie décentralisée.

Maintenant, s’il n’existe aucun organisme qui s’occupe de la production et de la gestion de cette monnaie virtuelle, alors d’où vient-elle ?

En effectuant des transactions, chaque personne fait désormais partie de ce qu’on appelle la blockchain : une base de données qui contient l’historique de tous les échanges effectués entre ses utilisateurs depuis sa création en 2009. Cette base de données est sécurisée et distribuée : elle est partagée par ses différents utilisateurs, sans intermédiaire, ce qui permet à chacun de vérifier la validité de la chaîne.  Les transactions effectuées entre les utilisateurs du réseau sont regroupées par blocs. Chaque bloc est validé par les nœuds du réseau, selon une technique appelée le “Proof-of-Work”, preuve de travail, et consiste en la résolution de problèmes algorithmiques. Une fois le bloc validé, il est horodaté et ajouté à la chaîne de blocs. La transaction est alors visible pour le récepteur ainsi que l’ensemble du réseau.

Un block dans la blockchain du bitcoin contient 2400 transactions, l’équivalent de 1MB, et comme mentionné précédemment chaque block constitué doit être validé par le nœud du réseau appelés « les mineurs » : Toutes ces personnes avec leurs ordinateurs qui ont choisi d’utiliser leur puissance de calcul pour participer à la vérification de toutes les transactions du bitcoin. On dit qu’ils minent du bitcoin. Et en récompense de leur travail, ils vont recevoir une petite commission des transactions effectuées en plus des bitcoins crées spécialement pour eux.

Cest donc comme ça que le bitcoin est créé !

Pour une moyenne de dix minutes, des bitcoins sont créés et tous les quatre ans le nombre de bitcoins créés pour un bloc inscrit dans la blockchain est divisé par deux. Au début, et plus précisément en 2009 on gagnait 50 bitcoins, aujourd’hui en 2018, on gagne 12.25 bitcoins et l’opération se répète jusqu’à tendre vers zéro en 2141. Et dans ce cas plus aucun bitcoin ne sera créé et les mineurs ne seront payés que par la commission des transactions effectuées.

IV. Le plus d’un veilleur stratégique

Sur ce présent graphique, on notera la présence de cinq pics principaux, en date des 15, 18, 19, 20 et 22 décembre 2017. Et cette période a été marquée principalement par :

V. Conseil du jour :

« Investissez seulement et uniquement ce que vous êtes prêt à perdre. »

Aujourd’hui le bitcoin peut valoir 10 000 dollars mais dans un mois il peut valoir moitié moins et dans un an plus rien du tout. Je n’en sais rien, vous n’en savez rien, personne n’en sait rien et tous ceux qui vous disent l’inverse sont des menteurs ou des arnaqueurs. On ne peut guère prévoir avec certitude l’avenir du bitcoin.

Par Ghita Tagnaouti, promotion 2017-2018 du M2 IESCI

Références

Bitcoin project. 2009. Débuter avec Bitcoin. Bitcoin.org. [En ligne] 2009. https://bitcoin.org/fr/debuter.

blockchain france. Qu’est-ce que la blockchain ? blockchainfrance.net. [En ligne] https://blockchainfrance.net/decouvrir-la-blockchain/c-est-quoi-la-blockchain/.

Hugo. 2017. LE BITCOIN, C’EST QUOI ? COMMENT EN OBTENIR ? Explication ! Youtube . [En ligne] 24 Sep 2017. https://www.youtube.com/watch?v=89L22vEl74Q.

La Monnaie Scripturale. piecedemonnaie.fr. [En ligne] http://www.piecedemonnaie.fr/lexique/monnaie-scripturale/.

Soriano, Paul. 2011. La monnaie : une question de confiance. paulsoriano.fr. [En ligne] 23 Mars 2011. http://www.paulsoriano.fr/La-monnaie-une-question-de-confiance,230.

STEVEN. 2017. BITCOIN : Comment ça marche et où en acheter ? Youtube. [En ligne] 29 Nov 2017. https://www.youtube.com/watch?v=gMRW46y1Ka4.

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En quoi la finance offshore facilite-t-elle les prochaines crises financières ? https://master-iesc-angers.com/en-quoi-la-finance-offshore-facilite-t-elle-les-prochaines-crises-financieres%e2%80%89/ Tue, 19 Dec 2017 10:20:11 +0000 http://master-iesc-angers.com/?p=2547 « Les paradis fiscaux et judiciaires facilitent une circulation rapide des capitaux, sans aucun contrôle. Ils favorisent ainsi la spéculation, notamment sur les taux de change et la fuite des capitaux des économies émergentes, des phénomènes qui ont grandement contribué à… Continuer la lecture

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« Les paradis fiscaux et judiciaires facilitent une circulation rapide des capitaux, sans aucun contrôle. Ils favorisent ainsi la spéculation, notamment sur les taux de change et la fuite des capitaux des économies émergentes, des phénomènes qui ont grandement contribué à la survenance de crises financières. »[1]

Les récents scandales qui secouent le système financier mondial ont révélé tout un mécanisme sophistiqué d’optimisation fiscale dont profitent certaines multinationales et les grandes fortunes. Le dernier en date, celui des « paradise papers[2] », a mis en exergue les failles et les pratiques opaques d’optimisation fiscale qui se déroulent à l’échelle de la planète. Ce scandale dénonce à la fois le manque d’éthique de certains dirigeants de grandes multinationales et d’hommes politiques, mais aussi les risques que représentent la finance offshore pour l’économie mondiale.

Selon la banque de France, « la notion de finance offshore peut être définie comme l’ensemble des services financiers fournis par des banques ou autres institutions financières à des agents économiques non-résidents. »[3]  En nous basant sur cette définition et de manière caricaturale nous pouvons dire que la finance offshore est l’ensemble des transactions financières faites dans un autre pays que celui où se déroule l’activité, afin d’optimiser la fiscalité (paradis fiscal) ou la gestion financière des capitaux.

On s’accorde sur le fait que les paradis fiscaux constituent une menace pour l’architecture et la stabilité de la finance mondiale, mais peuvent-ils être des causes directes d’une crise ?

Pour rappel au sortir de la crise financière de 2008, la lutte contre les paradis fiscaux est devenue une priorité du G20. Parmi les statuts adoptés lors du sommet de 2009 figure la volonté des États de lutter contre tous les facteurs susceptibles d’être une source d’instabilité ou de dérégulation financière avec dans leur ligne de mire les finances offshores. En adoptant cette posture, les chefs d’État souhaitaient agir sur les facteurs jugés responsables de la crise : à savoir les fonds spéculatifs (hedge funds), les paradis fiscaux, les agences de notation, etc. Ainsi il est important d’étudier en quoi la finance offshore facilite les crises financières.  Et quel sera son rôle dans les prochaines crises à venir.

I.  La finance offshore : un sous-système de l’économie mondiale

Selon le professeur Franc Jovanovic, l’origine et le développement de la finance offshore sont « liés aux tentatives de restreindre certains mouvements internationaux de capitaux ; puis à l’effondrement du système de Bretton Woods (tentatives des états de contrôler les flux financiers internationaux). » Ce qui fait que les banques internationales ouvrent des comptes dans des devises différentes de celle du pays dans lequel la banque réside pour échapper aux contrôles. En ce qui concerne les multinationales, elles délocalisent une partie ou créent des filiales dans les territoires ou pays à fiscalité réduite ou nulle, c’est-à-dire où le taux d’imposition est jugé très bas, et qui n’œuvrent pas pour la transparence (paradis fiscaux). Selon l’OCDE, il faut le concours de quatre critères pour définir un paradis fiscal :

  • Des impôts insignifiants ou inexistants ;
  • L’absence de transparence sur le régime fiscal ;
  • L’absence d’échanges de renseignements fiscaux avec d’autres États ;
  • Le fait d’attirer des sociétés-écrans ayant une activité fictive

Cette définition de l’OCDE du paradis fiscal peut être scindée en deux facteurs sources. Le premier est le manque de coordination sur la législation mondiale en termes de finance ce qui obligerait les États à échanger des renseignements et à avoir de la transparence dans les questions fiscale. Le deuxième facteur source est la souveraineté des États qui permet à chaque État d’avoir sa propre législation en termes de finance. Ces deux facteurs combinés rendent l’optimisation fiscale légale, car les bénéficiaires de ce système se conforment aux lois fiscales de leur paradis fiscal d’accueil.

C’est aux USA dans les États du Delaware et du New Jersey, que sont apparus les premiers paradis fiscaux au cours du 19e siècle. Quant au secret bancaire moderne, il a vu le jour en Suisse dans les années 30 et sera l’amorce du caractère opaque dans le monde des finances dont les paradis fiscaux ont su profiter. Profitant des failles du système juridique, toutes les transactions financières vers les paradis fiscaux se font dans le strict respect du droit. Grâce aux conseils extrêmement prolifiques de cabinets spécialisés, les multinationales et les grandes fortunes organisent la « fuite légale de leurs capitaux ».

En effet, les institutions financières et les cabinets d’avocats établis dans ces paradis fiscaux permettent aux multinationales de créer des sociétés offshores et aux grandes fortunes d’ouvrir des comptes bancaires pour une optimisation fiscale. Cette démarche d’optimisation fiscale est légale, car elle tire profit des possibilités qu’offrent les lois de ces pays afin d’échafauder des montages complexes. Les services offerts sont variés et légaux, mais la plupart réduisent les recettes fiscales des autres nations, accroissent les inégalités et alimentent l’instabilité financière mondiale.

Les trois grands leviers de ces paradis fiscaux (faible contrôle et imposition, la possibilité de résidence fictive et le secret bancaire) ont permis à la finance offshore de connaitre un grand essor. Selon le FMI (Fonds monétaire international), 50 % des transactions internationales transitent par les paradis fiscaux et l’on y dénombre 4000 banques et près de 2 millions de sociétés-écrans. L’envergure et l’ampleur, que représentent ces finances offshores, rendent sceptiques quelques économistes quant au rôle que ce système parallèle peut engendrer à l’avenir. On voit en ces finances offshores une source d’instabilité ou de dérégulation de l’économie mondiale.

II.      Les paradis fiscaux et judiciaires : accélérateurs de crises financières

Les paradis fiscaux jouent un rôle important dans la finance internationale, donc il est essentiel d’étudier leur place dans les crises financières. La série de crises financières et économiques (mexicaine, asiatique, russe) qui ont secoué les marchés à partir du milieu des années 1990 a montré que les flux à l’origine de l’instabilité financière ont transité par les paradis fiscaux.

1.      L’impact des paradis fiscaux et judiciaires dans les crises financières

Les incitations proposées par les paradis fiscaux (le secret et les avantages fiscaux) leur permettent de capter d’énormes capitaux. Les paradis fiscaux avec leur régulation opaque et leur nébuleux mécanisme de fonctionnement et de démultiplication de compte présentent un fort risque de spéculation. Ils jouent un rôle considérable dans la finance internationale et dans les différentes crises qui ont secoué le monde. Si les paradis fiscaux ne font pas partie des causes directes de la crise de 2008, ils ont contribué à accélérer sa propagation. Certains économistes comme Nicholas Shaxso, Robescu Ofelia Valentina et Diaconeasa Aurelia Aurora reprochent aux paradis fiscaux d’avoir contribué à l’accentuation de la crise financière de plusieurs façons différentes. Ils reprochent à ces territoires de par leur système financier opaque, leur politique du secret, la méfiance et les dangers qui y sont associés d’avoir servi de centres de comptabilisation offshore qui ont augmenté massivement les liquidités financières. Pour ces derniers, les paradis fiscaux avec leurs essences même ont largement participé à la dérégulation du système, car des sociétés se sont servies de ces niches économiques pour faire croître leur dette ou pour occulter leurs créances. En guise d’exemple nous pouvons citer quelques grandes banques d’entreprise qui ont failli faire faillite avec la crise de 2008, parce qu’ils avaient des actifs dissimulés dans les paradis fiscaux :

  • « la banque britannique Northern Rock, pour avoir commercialisé abusivement des CDO (“Collaterised Debt Obligations”) au travers d’un trust situé à Jersey en septembre 2007,
  • la banque américaine Bear Sterns, pour avoir fait prospérer des fonds spéculatifs aux îles Caïmans et en Irlande en mars 2008, ce que fera également la banque allemande Hypo Real Estate avec le même résultat,
  • la banque Lehmann Brothers, pour avoir profité de la législation très laxiste du Delaware en septembre 2008, un paradis fiscal au cœur de l’État le plus développé du monde (le gouvernement américain a laissé sombrer cette banque, ce qui a conduit à d’autres effets dévastateurs). »
  • L’entreprise de trading dans le domaine de l’énergie ENRON en 2001 avait caché ses pertes dans d’innombrables filiales dans les îles Caïmans et dans les îles Turques et Caïques.
  • Le groupe laitier Parmalat en 2003 avait prétendu disposer d’une « cagnotte » aux îles Caïmans, qui s’est finalement volatilisée. » (plateforme de paradis fiscaux et judiciaires).

2.      Les paradis fiscaux, un canevas latent pour les prochaines crises

Les paradis fiscaux sont un instrument d’opacité, de dérèglementation, de spéculation et de concentration de masses financières par lequel toute prochaine crise financière se verra amplifiée. Ils facilitent :

  • l’opacité dans les relations financières : ces territoires constituent un élément important dans l’opacité des systèmes financiers internationaux. Avec leurs fonds d’investissement spéculatifs, ils sèment des doutes et des incertitudes entre les acteurs bancaires, financiers les investisseurs ou tout autre détenteur de capitaux. Les fonds d’investissement spéculatifs (Hedge fund) qui représentent près de 80 % dans les Paradis fiscaux et judiciaires (dont un grand nombre aux iles des Caïmans) achètent souvent des titres émis par les organismes de crédit hypothécaire. Ces Hedg Fund, échappant à tout contrôle de leur comptabilité et de la valeur de leurs actifs par un quelconque organisme public, sont amenés à injecter sur le marché des sommes énormes pour continuer leurs opérations. Ils sont une des causes des fluctuations fortes et contradictoires des marchés financiers. Selon les estimations de l’économiste Gabriel Zucman, auteur de la richesse cachée des nations (Seuil, 2017), les 0,01 % les plus riches du monde parviennent ainsi à esquiver 30 % des impôts qu’ils devraient normalement payer. Le secret bancaire, l’incertitude sur l’identité des propriétaires, la complexité des montages juridiques et des circuits financiers, l’absence de transparence sont autant d’éléments établissant la nocivité des paradis fiscaux et leur rôle dans l’opacité du système financier international.
  • la formation de capitaux spéculatifs : Les paradis fiscaux n’attirent pas seulement les banques, entreprises et grosses fortunes, ils attirent aussi certaines transactions illégales telles que le blanchiment d’argent, le financement d’activités illicites, etc. Ce qui représente un danger réel pour l’économie mondiale. En voulant être « attractifs » en offrant une réglementation particulièrement laxiste et non contraignante, les paradis fiscaux ont aussi attiré de la finance « illicite », laquelle intervient par ailleurs dans l’économie réelle par des investissements dans des entreprises. L’existence de tels territoires « sans lois contraignantes » sont des lieux propices où se croisent, se mêlent et s’interconnectent l’économie légale et l’économie criminelle. Le FMI estime qu’entre 600 milliards et 1 500 milliards de dollars sont introduits dans le circuit économique par le biais des montages financiers faits dans les paradis fiscaux. Les paradis fiscaux et judiciaires facilitent une circulation rapide de capitaux en favorisant la spéculation notamment sur les taux de changes et la fuite des capitaux des économies émergentes.
  • Toutes les déréglementations: L’existence de ces territoires vient peser sur l’ensemble des réglementations qui pourraient être prises par les autres États. Dès lors que ces territoires voient transiter plus de 50 % des transactions financières internationales, il est évident que la moindre réglementation ou régulation qui pourrait être prise par un État ou par un groupe d’États à l’égard des secteurs bancaires et financiers serait de fait rapidement rendue en grande partie caduque. La réglementation qui s’applique aux entreprises localisées, par exemple en France ou dans l’Union européenne n’est pas la même que celle dans les paradis fiscaux. De ce fait certaines entreprises françaises, afin de se défaire de la réglementation fiscale française vont délocaliser leur siège ou filiale dans les paradis fiscaux ou ils seront dispensés de fiscalité. Néanmoins, des tentatives de régulation ont été menées par les organisations étatiques. Depuis les accords de Bâle I (1996), Bâle II (2004) et Bâle III (2010), les banques sont soumises à une réglementation prudentielle qui les contraint à réserver un volume minimal de capitaux propres égal à 8 % du total de leurs actifs risqués (portefeuilles de titres et encours de crédits). Avec ce ratio de solvabilité, les banques soumises à cette réglementation sont donc limitées dans leurs possibilités de faire des crédits : elles doivent disposer des capitaux propres suffisants pour rester au-dessus du seuil des 8 %. Pour contourner ces dispositions, des banques ont sorti de leur bilan certains de leurs crédits en les « titrisant » et en les mettant au nom d’entités juridiques nouvelles localisées dans des paradis fiscaux, ce qui leur permettait d’échapper ainsi à cette réglementation. Par ailleurs, avec la primauté de la totale liberté de circulation des capitaux par-delà les frontières étatiques, les paradis fiscaux et judiciaires provoquent une concurrence à la baisse entre les différents systèmes de régulation nationaux.
  • La création et la concentration de masses financières énormes. Le partage inégalitaire des richesses est largement antérieur à l’existence des paradis fiscaux, mais la prolifération, depuis une trentaine d’années, de tels territoires, a bien un lien avec l’accroissement énorme des inégalités constaté à l’intérieur des États, au Nord comme au Sud, et entre les États. L’existence de ces territoires rend encore plus facile la fraude fiscale de grande ampleur pour les multinationales et les particuliers riches qui vont pouvoir échapper à tout ou partie des impôts établis par les États dont ils sont originaires ou dont ils ont la nationalité. Cette fraude va accroître les profits nets de celles et ceux qui la pratiquent, pendant que les autres entreprises et la grande masse des particuliers vont devoir payer plus d’impôts (ce qui est fraudé par les uns est toujours, plus ou moins, payé par les autres, en impôts supplémentaires ou en redistributions et en services publics en moins). En facilitant le développement de la fraude fiscale de haut niveau, en étant des havres de tranquillité pour les profits qui résultent des trafics en tous genres et de la corruption de haut vol, ces territoires sont bien un outil qui favorise l’accentuation des inégalités et la concentration de masses financières énormes, de toutes origines (légales parfois, très souvent illégales et criminelles).

Conclusion

Les paradis fiscaux ne sont pas une maladie du système financier international, mais constituent un élément essentiel de sa rentabilité. La culture du secret pratiquée à la fois sur la nature et les origines des fonds combinées à la faible fiscalité en vigueur dans ses territoires les rend très attractifs et facilite la concentration de masse financière énorme. Ils sont structurés pour soustraire une richesse phénoménale aux pays dans lesquels de grands groupes réalisent leur chiffre d’affaires. Pays qui, pour beaucoup, connaissent par ailleurs un endettement massif qui plombe leurs comptes publics et fait porter la charge de l’impôt sur leurs citoyens. Ainsi, l’optimisation fiscale qu’ils procurent représente un sérieux manque à gagner pour les états. La perte de recette publique due à ces systèmes d’optimisation ou de minimisations fiscales fragilise sur le long terme les finances publiques des États. La concurrence fiscale que livrent les paradis fiscaux agit comme une pompe aspirante qui capte toute sorte de capitaux sans trop porter un regard sur leurs origines. « C’est une branche de l’arbre à finances sur lequel sont assis les capitalistes qui ne la scieront pas volontiers, quoi qu’en disent leurs représentants politiques ». Je pense que la bataille contre la finance offshore est loin d’être terminée, mais avec l’engagement de la communauté internationale, certaines mesures seront prises pour qu’on ne retrouve pas dans les prochaines années une nouvelle bulle spéculative et une nouvelle crise.

Par Khady Diagne, promotion 2017-2018 du M2 IESCI

Sources :

  1. http://www.stopparadisfiscaux.fr/
  2. https://www.cairn.info/revue-francaise-d-administration-publique-2012-4-page-1025.htm
  3. http://www.attac93sud.fr/IMG/pdf/paradis_fiscaux_et_judiciaires_et_crise_financiere.pdf
  4. http://www.novethic.fr/lexique/detail/paradis-fiscaux.html
  5. http://finance.blog.lemonde.fr/2008/12/07/les-paradis-fiscaux-et-la-crise-financiere/
  6. https://blogs.alternatives-economiques.fr/chavagneux/2009/09/23/comment-les-paradis-fiscaux-nourrissent-l%E2%80%99instabilite-financiere
  7. https://france.attac.org/nos-publications/notes-et-rapports/articles/les-paradis-fiscaux-agents-de-la-crise-financiere
  8. https://www.les-crises.fr/les-paradis-fiscaux/
  9. https://www.cairn.info/revue-management-et-avenir-2010-5-page-168.htm#anchor_abstract
  10. http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2015/08/25/20002-20150825ARTFIG00105-shadow-banking-tout-comprendre-sur-la-finance-de-l-ombre.php
  11. http://www.cadtm.org/Comment-les-banques-et-les
  12. https://clio-cr.clionautes.org/mondialisation-et-crises-financieres.html
  13. http://www.atlantico.fr/decryptage/industrie-finance-est-elle-devenue-totalement-incontrolable-paul-jorion-thierry-bonneau-pascal-ordonneau-640340.html/page/0/1
  14. http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/crise-financiere-en-2017-forte-196002
  15. http://www.espaces-marx.net/IMG/pdf/T_4_Ylonen.pdf
  16. https://www.diploweb.com/Geopolitique-des-paradis-fiscaux.html

[1] http://www.stopparadisfiscaux.fr/enjeux-et-problemes/article/instabilite-financiere

[2] Les « Paradise Papers » désignent une enquête menée par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et ses 96 médias partenaires, dont Le Monde, soit 400 journalistes de 67 pays. Ces révélations s’appuient sur une fuite de documents initialement transmis, en 2016, au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung par une source anonyme.
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/paradise-papers/article/2017/11/07/paradise-papers-peut-on-encore-reguler-l-evasion-fiscale-des-multinationales_5211348_5209585.html#4WwHkLI4dkX2IOMg.99

[3] Bulletin de la banque de France N° 82 octobre 2000

 

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Comment la finance offshore favorise la prochaine crise financière https://master-iesc-angers.com/comment-la-finance-offshore-favorise-la-prochaine-crise-financiere/ Fri, 08 Dec 2017 10:02:23 +0000 http://master-iesc-angers.com/?p=2495 Il y a de cela dix années, une crise financière se déclenchait aux États-Unis et marquera de ses empreintes l’histoire du monde et celui de la finance internationale en particulier. C’est la crise des Subprimes ou de l’immobilier, entraînant avec… Continuer la lecture

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Il y a de cela dix années, une crise financière se déclenchait aux États-Unis et marquera de ses empreintes l’histoire du monde et celui de la finance internationale en particulier. C’est la crise des Subprimes ou de l’immobilier, entraînant avec elle la faillite de nombreuses grandes banques comme la banque Lehman Brothers. S’en sont suivi de nombreuses actions dans le but d’une meilleure réglementation de la finance à l’exemple des accords de Bâle III. Dix années plus tard, alors que les séquelles de la précédente restent encore présentes, le vent d’une nouvelle crise caresse le monde de la finance avec de nombreux systèmes bancaires affaiblis comme celui de l’Italie[1]. Cette finance internationale laisse observer une finance offshore de plus en plus imposante et caractérisée par une circulation rapide d’énormes capitaux à travers le monde facilitée par les paradis fiscaux et judiciaires.

I. Définitions

Une crise financière[2] est un phénomène économique matérialisé par un dysfonctionnement des marchés de capitaux dû principalement à des prises de risques mal maîtrisées, à la dégradation de la solvabilité de certains emprunteurs publics ou privés et/ou aux comportements spéculatifs de certains opérateurs.

La finance offshore[3] traduit les placements de capitaux à l’étranger, en général dans un paradis fiscal, pour optimiser ses ressources financières.

            Il est important de savoir que le terme « Crise financière » n’est qu’un concept qui abrite un ensemble de dysfonctionnement des marchés de capitaux ou de crise. Ainsi, sous le jargon « crise financière », on retrouve :

  • La crise boursière
  • La crise de la dette publique
  • La crise bancaire
  • La crise de change
  • La crise qui affecte un marché à terme

La crise boursière[4] est une crise qui touche l’ensemble des valeurs boursières. Son facteur de déclenchement est souvent la perte de confiance de la part des investisseurs.

La dette publique est une dette émise par un émetteur souverain, c’est-à-dire en général un État. Une dette souveraine peut être formée de titres d’emprunts émis par le trésor public d’un pays, de crédits bancaires ou d’institutions d’État, de prêts d’autres États ou d’institutions supranationales. La crise de la dette survient donc lorsque les États deviennent incapables d’assumer les échéances et que les charges des intérêts qui résultent de ces dettes pèsent énormément sur leur économie[5].

La crise bancaire[6] est définie comme une situation dans laquelle : « La totalité ou la majorité du capital bancaire est érodée ». C’est-à-dire que les banques font face à différentes pertes, accumulation de crédits non performants et de créances douteuses, ainsi que des pertes en capital qui réduisent leurs différents ratios prudentiels.

Le marché des changes est un marché sur lequel se retrouvent tous les acteurs qui souhaitent échanger une devise contre une autre devise, par exemple l’euro contre le dollar. Lorsqu’une devise perd beaucoup de valeur, au moins 30 % de moins que le dollar, on dit que le pays connaît une crise de change[7].

La crise dans les marchés à terme se caractérise par l’arrêt de circulation des matières, elles se déclarent lorsque ceux qui ont à vendre ne trouvent plus d’acheteurs et ceux qui voudraient acheter ne le peuvent pas.

II. Les facteurs de crises financières

Les différents types de crises financières étant spécifiés plus haut, on constate avec un peu plus de recul que ces dernières présentes des causes communes. Ainsi, toute crise financière peut résulter d’une situation de mauvaise gestion en face d’un risque de marché, d’un risque de crédit ou d’un risque de liquidité.

Le risque de marché[8] est le risque de perte liée à l’évolution de la valeur de marché d’un portefeuille d’instruments financiers. Le risque de marché a deux composantes qui doivent exister toutes les deux pour qu’il y ait effectivement un risque :

  • Une exposition : qui renvoie à la détention d’un portefeuille d’instruments financiers
  • Une incertitude : dans le cas du risque de marché, l’incertitude réside dans l’évolution future de la valeur de marché des instruments détenus. En cas d’évolution défavorable du marché, l’investisseur est exposé à réaliser une perte au lieu du bénéfice escompté.

Le risque de crédit[9] résulte de l’incertitude quant à la possibilité ou la volonté des contreparties ou des clients de remplir leurs obligations. Tout simplement, il existe donc un risque pour la banque dès lors qu’elle se met en situation d’attendre une entrée de fonds de la part d’un client ou d’une contrepartie de marché. Un exemple de risque de crédit s’observe avec la crise des subprimes où les banques entendaient un retour d’importantes contreparties de la part de leurs clients ayant contracté des prêts énormes pour l’immobilier.

Le risque de liquidité quant à lui renvoie à une insuffisance de liquidité disponible pour faire face aux créances. Dans une pareille situation, une entreprise est susceptible de faire faillite. Le risque de liquidité correspond également au risque de ne pouvoir vendre un produit à un prix avantageux. En effet, certains titres sont, par nature, moins liquides que d’autres et comportent un risque élevé. Les banques sont aussi confrontées à ce phénomène lorsque les épargnants retirent plus d’argent qu’il n’y a de dépôts. Cela les fragilise et elles peuvent éprouver des difficultés à rembourser leurs clients, notamment si elles utilisent les dépôts à court terme pour financer les prêts à long terme. Sur le marché, le risque de liquidité peut rendre difficiles les transactions sans qu’il n’y ait un impact sur les prix.

III. Caractéristiques des paradis fiscaux

Comme mentionné plus haut, le monde de la finance est caractérisé par une montée en puissance de la finance offshore à travers les paradis fiscaux et judiciaires. Ainsi, la finance offshore qui est pour la plupart du temps assimilée au transfert des capitaux d’un point géographique vers des paradis fiscaux, il serait alors important de spécifier le périmètre d’application du terme « paradis fiscal » à un territoire avant de se jeter dans toute analyse.

Pour prétendre au statut de paradis fiscal et judiciaire, un territoire doit pouvoir :

  • Garantir le secret sur les transactions effectuées en mettant des obstacles aux échanges d’informations avec toute entité extérieure (secret bancaire).
  • Offrir une fiscalité faible au non-résident, ce qui peut permettre d’appliquer une fiscalité à taux plein pour les résidents.
  • Se caractériser par une hypertrophie de l’industrie financière par rapport à l’économie réelle sur le territoire.
  • Un cadre politiquement stable permettant une mainmise sur les institutions garantissant l’absence d’opposition aux règles, c’est-à-dire favorisant la corruption.
  • Garantir l’anonymat des propriétaires des structures non résidentes établies (secret judiciaire).

IV. Analyse

La finance offshore est sans doute en train de jouer un rôle important dans la survenance de la prochaine crise financière. Elle contribue à la fuite d’énormes masses de capitaux vers les paradis fiscaux, engendrant ainsi d’énormes manques à gagner pour les États. En effet, la finance offshore amenuise les recettes des États qui voient la charge de leur dette souveraine être de plus en plus insupportable. Par exemple, la France pays en austérité voie entre 60 et 80 milliard d’euro[10] par année s’échapper dans ces paradis fiscaux, soit 100 % du budget alloué pour l’éducation en 2017 et soit 200 % des charges résultantes de sa dette publique[11]. D’autre part ces pertes s’élèvent à environ 180 milliard[12]s de dollars dans les pays en développement, ce qui est un problème sérieux lorsqu’on connait la dette de ces pays vis-à-vis des banques et pays développés avec pour conséquence que l’on pourrait se retrouver face à une crise de liquidité à la longue si ce phénomène ne trouve pas de solution.

D’autre part, nous avançons l’argument selon lequel la finance offshore est à l’origine des spéculations que l’on observe au niveau des marchés financiers à l’exemple du marché américain où les indicateurs atteignent des proportions historiques. Ainsi, ces importantes sommes de liquidité issues des différents montages financiers que ce soit en ce qui concerne le blanchiment d’argent ou l’évasion fiscale, que nous considérons comme des gains supplémentaires pour leurs propriétaires, offrent une certaine aisance et facilité à être réinvestis dans un but spéculatif dans les marchés financiers, surtout qu’ils empruntent des canaux qui ne sont presque pas réglementés. Nous noterons que ce système de finance parallèle à la banque traditionnelle avait déjà été pointé du doigt lors de la crise de 2008. Ainsi, une étude menée en 2017 par l’organisme OXFAM avance qu’au courant de l’année 2015, 20 des plus grandes banques de l’Union européenne déclaraient 1 euro sur 4 de leurs bénéfices dans les paradis fiscaux, où elles n’emploient même pas parfois un salarié, soit un total de 25 milliards d’euros pour cette année-là[13]. Ceci pour traduire la masse de capitaux en jeu et l’importance du danger auquel les banques sont exposées.

Le « shadow banking » ou alors la finance de l’ombre ou finance parallèle connaît un essor fulgurant ces dernières années. Comme pour toute chose, tout excès nuit surtout lorsqu’il n’est soumis à aucune réglementation. Le shadow banking s’appuie sur les paradis fiscaux et ainsi, réussi à contourner avec facilité l’ensemble des contraintes auxquelles est soumise la finance traditionnelle, contraintes qui sont sensées permettre d’éviter d’autres dysfonctionnements des marchés financiers comme celui de 2008.

La banque de France évaluait à 25 000 milliards de dollars le montant des transactions de cette finance qui s’appuie sur les paradis fiscaux en 2002, le total passait à 75 000 milliards de dollars en 2013, à 95 000[14] milliards de dollars en 2016 soit la moitié du PIB mondial, et progresserait de 3000[15] milliards de dollars par années, soit 3 fois le montant du mécanisme de sécurité bancaire mis en place par l’Union européenne.

Tous ces chiffres aident à mesurer le risque que les paradis fiscaux font courir au monde de la finance et dans une certaine mesure à l’économie mondiale de par la nature et le volume des transactions qu’elle engendre, et ce en l’absence de toute réglementation.

Par Marco Takam, promotion 2017-2018 du M2 IESCI

REFERENCES

Archer, Jean-Yves. 2017. “«Shadow Banking» : La Menace Fantôme,” LesEchos.fr.

Banque Info. 2017. “Lexique,” Lexique bancaire et économique.

Express Business. 2017. “La Prochaine Crise Est Imminente. Mais D’où Viendra-T-Elle ?,” Express Business.

Fimarkets. 2017a. “Le Risque De Crédit,”

Fimarkets. 2017b. “Le Risque De Marché: Principaux Concepts,”

Frédéric Morelle. 2017. “Dico Du Commerce International,” Dico du commerce international.

Gamra, Saoussen Ben and Mickaël Clévenot. 2006. “Libéralisation Financiere Et Crises Bancaires Dans Les Pays Émergents.”

Lison Rehbinder. 2017. “Paradise Papers : Pourquoi Les Etats Doivent Reprendre La Main Face Aux Multinationales,” Faim Développement magazine.

Mataf.net. 2017. “Education,” Glossaire.

Ministère de l’action et des comptes publics. 2017. “Les Chiffres Clés Du Budget De L’état 2017,”

Oxfam France. 2017. “L’évasion Fiscale Génère Un Lourd Manque À Gagner Pour Les Services Publics Essentiels, Selon Oxfam,” Business & Human Rights, Resource Centre.

Sydo. “Qu’est-Ce Qu’une Crise De Change ?,” Dessine-moi l’éco.

Techno-Science.net. 2017. “Glossaire,” Definition.

[1] Express Business. 2017. “La Prochaine Crise Est Imminente. Mais D’où Viendra-T-Elle ?,” Express Business.

[2] Banque Info. 2017. “Lexique,” Lexique bancaire et économique.

[3] Techno-Science.net. 2017. “Glossaire,” Definition.

[4] Mataf.net. 2017. “Education,” Glossaire.

[5] Frédéric Morelle. 2017. “Dico Du Commerce International,” Dico du commerce international.

[6] Gamra, Saoussen Ben and Mickaël Clévenot. 2006. “Libéralisation Financiere Et Crises Bancaires Dans Les Pays Émergents.”

[7] Sydo. “Qu’est-Ce Qu’une Crise De Change ?,” Dessine-moi l’éco.

[8] Fimarkets. 2017b. “Le Risque De Marché: Principaux Concepts,”

[9] Fimarkets. 2017a. “Le Risque De Crédit,”

[10] Oxfam France. 2017. “L’évasion Fiscale Génère Un Lourd Manque À Gagner Pour Les Services Publics Essentiels, Selon Oxfam,” Business & Human Rights, Resource Centre.

[11] Ministère de l’action et des comptes publics. 2017. “Les Chiffres Clés Du Budget De L’état 2017,”

[12] Lison Rehbinder. 2017. “Paradise Papers : Pourquoi Les Etats Doivent Reprendre La Main Face Aux Multinationales,” Faim Développement magazine.

[13] Oxfam France. 2017. “L’évasion Fiscale Génère Un Lourd Manque À Gagner Pour Les Services Publics Essentiels, Selon Oxfam,” Business & Human Rights, Resource Centre.

[14] Archer, Jean-Yves. 2017. “«Shadow Banking» : La Menace Fantôme,” LesEchos.fr.

[15] Ibid.

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