L’impact de la pandémie Covid-19 sur le secteur bancaire français

Les banques ont un rôle crucial dans le système économique. En exerçant le rôle d’intermédiaire entre les détenteurs et les apporteurs de capitaux, elles permettent le financement l’économie, maintenir les taux et combler les déficits budgétaires.

De par leur rôle dans la responsabilité sociétale, et  en tant qu’instrument clé du maintien du système économique, la crise de la Covid-19 les a replacées sur le devant de la scène.

Mais en tant qu’entreprise de droits privés, elles ne sont pas non plus épargnées par un environnement économique concurrentiel féroce depuis une trentaine d’années, les obligeant ainsi à revoir leur stratégie.   Cette concurrence, qui était déjà significative entre banques dites « traditionnelles », est exacerbée avec le phénomène des nouveaux entrants tels que les grands commerçants, les FinTech, les « néobanques »[1] (Orange banque, N26 ou encore Révolut), les opérateurs de télécommunication ou encore les géants d’internet.

De ce fait, pour préserver leurs avantages concurrentiels, les banques dites « traditionnelles » ne peuvent donc plus se contenter de leur seul univers, elles doivent aussi innover en permanence et se battre sur le terrain des innovations, poussées par les technologies numériques.

L’enjeu pour les banques aujourd’hui sera de trouver cet équilibre ténu entre leur histoire et raison d’être, avec le monde financier “technologisé” qui est celui d’aujourd’hui et qui sera, encore davantage, celui de demain.

Une mutation déjà en marche

Les banques françaises dans la course de la taille critique

Dès les années 1995, les banques avaient déjà commencé des stratégies de croissance externe pour atteindre la taille critique et préserver leurs marges, trouver des nouvelles sources de revenu et soutenir leur produit net bancaire (PNB).

Quelques exemples parmi les fusions et acquisitions importantes :

  • Rachat du CIC par la Banque fédérative Crédit mutuel en 1998,
  • Rachat de Paribas par BNP en 2000,
  • Rachat du Crédit Lyonnais, devenu LCL, par le Crédit Agricole en 2003,
  • Rapprochement de la Caisse d’épargne et de la Banque Populaire pour constituer la BPCE en 2009.

Dernièrement, décembre 2020, la Société générale et le Crédit du Nord ont été jusqu’à annoncer la fusion de leurs réseaux de détail, faisant disparaitre une des deux marques. Cette fusion provoquera la fermeture de 600 agences d’ici fin 2024, permettant ainsi des synergies et préservant le résultat.

Depuis les années 2010, le secteur bancaire français est dominé par cinq groupes : BNP Paribas, BPCE (Banques Populaires-Caisses d’Épargne), Crédit Agricole, Crédit Mutuel et Société Générale, qui représentent environ 80% des crédits distribués et 90% des dépôts collectés.

Avec une concentration très avancée, le secteur bancaire français reste oligopolistique.

Une politique de diversification des produits

Parallèlement à ce mouvement de concentration, les banques françaises ont aussi diversifié leurs services : conquête des marchés « proches » comme les assurances, avec la notion de « bancassurance », l’immobilier, les services et les banques en ligne (Boursorama, filiale de la Société Générale), mais aussi, en développant de plus en plus de produits ou services hors domaine bancaire, comme les services à la personne à domicile, les offres d’abonnement de téléphonie mobile ou encore les systèmes de protection du domicile.

Le Crédit Mutuel-CIC, par exemple, a déployé une offre de location de vélo avec assistance électrique à Paris, Lyon et Strasbourg. A la Caisse d’Épargne Midi-Pyrénées, les équipes envisagent un avenir dans la domotique.

Mais les banques ne s’arrêtent pas là. Certaines exploitent déjà le marché des partenariats avec les grandes enseignes. BNPP, par exemple,  propose des invitations à des événements sportifs ou culturels et des réductions dans diverses grandes enseignes à ses clients Priority. La Banque Postale communique sur les avantages Sephora, Interflora ou encore Alinéa.

Le secteur bancaire entre dans l’ère du numérique

Cette transformation du secteur bancaire ne peut être réalisable sans une ambition numérique. En effet, le virage du numérique est primordial, mais reste extrêmement délicat. Il regroupe plusieurs catégories à la fois. Les banques doivent tenir compte non seulement des innovations technologiques et des évolutions des produits, mais aussi de nouveaux modèles économiques et de nouveaux concurrents.

Ces transformations obligent donc une réorganisation en interne sur différentes thématiques en même temps. Par exemple, la gestion des ressources humaines, face aux transformations que connaissent les banques, est, par définition, un enjeu transversal. Les acteurs sont en effet confrontés à un double défi : trouver les compétences nécessaires pour se transformer et gérer l’obsolescence de certaines compétences, d’un côté, et, de l’autre, réussir à trouver l’équilibre entre digital et la possibilité d’interagir avec des conseillers.

Si, dès les années 2010, les banques ont bien pris conscience de ce nouveau virage, les projets digitaux restent toujours des projets très lourds et toujours « en-cours ».  Même si certaines banques sont plus avancées que d’autres, les transformations du type Core Système (qui touche à leurs activités banque de détail) restent problématique.

Ce que la crise Covid a changé

« Il y a eu un moment de stupeur au mois de mars, on était peu nombreux à s’attendre à une décision aussi radicale », affirme un cadre dirigeant d’une banque de Maine et Loire, lors de son interview du 8 janvier 2021.

Les mesures sanitaires prises par le gouvernement, conduisant au confinement de l’ensemble de la population, ont bouleversé les interactions des différents acteurs économiques. Pour préserver la continuité de l’activité toutes les banques ont dû activer des plans d’urgence.

La nécessité d’adopter le digital, provoquée par la crise sanitaire, a modifié très rapidement les schémas organisationnels internes et la relation clients-fournisseurs. D’une relation directe, parfois hybride avec un mélange de numérique et de contacts réels, les banques se sont retrouvées à exercer un lien 100% digital.

Accélération de la transformation du système d’information et de l’organisation

Les infrastructures informatiques ont été mises à rude épreuve. Le système d’information bancaire, qui était initialement conçu comme une forteresse quasi hermétique et inviolable, doit s’ouvrir dans la précipitation. Par exemple, la Société Générale a dû déployer en 15 jours l’accès à distance de 50 000 collaborateurs. Les transactions à distance ont été décuplées. Le télétravail a dû être généralisé. 90% des salariés hors agences ont pu être placés en télétravail pour certaines banques. Des activités jusqu’ici inéligibles au télétravail, telles que les opérations de paiements ou de trading se sont retrouvées en quelques jours réalisées à distance par des collaborateurs équipés en urgence. Les processus ont dû être adaptés. Il y a eu des simplifications des procédures opérationnelles, des recours intensifs aux outils digitaux pour faire face à l’afflux des demandes de prêts garantis par l’Etat (PGE), des recours à la robotisation des traitements d’information, ou encore des workflows d’approbation de signatures digitales.

Accélération de la digitalisation du parcours clients

Du côté de la relation clientèle, les processus ont aussi été bouleversés. Les clients ont dû s’adapter à l’utilisation des canaux d’accès digitaux. Même si le digital est ancré dans les usages des Français, il n’a progressé que lentement : seulement 14% via mobile selon la dernière étude Deloitte. Avec ses 545 points de vente par million d’habitants en France (chiffre 2020), l’agence bancaire est jusqu’à présent le canal majeur pour toutes les opérations, hors consultation de soldes bancaires et virements (moins de 20% en agence). Or, pendant la crise sanitaire, le taux d’utilisation des canaux d’accès à distance a parfois été multiplié par 2 pour certains établissements. (Source : revue bancaire)

Les conséquences dans le secteur bancaire

Les mesures bâloises à l’épreuve

Si les banques ne sont pas à l’origine de la crise sanitaire, elles pourraient, en revanche, être une partie de la solution, en étant utilisées comme instruments pour favoriser la reprise économique. Les banques vont à la fois permettre d’éviter les faillites des entreprises et jouer leur rôle de financeur de l’économie réelle.

En effet, l’impact économique de la crise sanitaire pourrait laisser craindre une généralisation des défauts de paiements. A date, les mesures prises par la Banque Centrale Européenne (BCE) et autres instances de régulation rendent cela peu probable. En revanche, le risque d’insolvabilité des banques peut être réel. Après la crise financière de 2008, les accords Bâle III ont permis de relever les niveaux de fonds propres de 8 à 10,5%. La crise de la covid 19 sera un révélateur de l’efficacité des mesures bâloises post 2008. Les banques françaises sont sans aucun doute plus résilientes et robustes qu’en 2008, mais si la pandémie perdure, une dégradation durable de l’économie, ajoutée à un contexte de taux bas depuis quelques années, pourraient entrainer de fait les banques dans une spirale déficitaire.

« Pendant très longtemps, nous avons eu un système de banque assuranciel très performante économiquement. On arrivait dans ce système à répondre dans de bonnes conditions aux exigences baloises, que ça soit en termes de fonds propres ou en termes de liquidités. Mais dans le futur, il y aura moins de marge de manœuvre pour répondre à ces exigences. La question de la baisse de la rentabilité du secteur financier pendant une période plus ou moins longue n’est pas à exclure. Le contexte de taux bas a beaucoup impacté la rentabilité des banques. », explique un dirigeant d’une banque de Maine et Loire, lors de son interview du 11 janvier 2021.

Un nouveau modèle économique, organisationnel et technologique

La crise sanitaire a été un accélérateur de la transformation numérique. De nombreux freins psychologiques ont été levés. L’expérience de la crise a prouvé que les clients et les collaborateurs étaient prêts à l’accepter.

Cette digitalisation accélérée par nécessité a provoqué :

  • une accélération dans les nouvelles habitudes des modes de travail
  • une accélération dans les modifications de processus
  • une accélération dans un nouveau mode d’interaction client

De nouvelles habitudes des modes de travail à créer

Si la crise sanitaire a été un formidable accélérateur, elle a aussi révélé les faiblesses de la précipitation.

Sur le plan organisationnel, les salariés ayant fait du télétravail, sont peu enclins à revenir à une organisation présentielle totale après le premier confinement : pertes de temps dans les transports ou encore angoisses des collègues ensemble pendant des réunions. La révision du cadre légal du travail pour flexibiliser les conditions de mobilisation des salariés doit donc être accélérée.

En revanche, il y a eu un renversement de tendance après le deuxième confinement, où les collaborateurs ont demandé à revenir en présentiel malgré les consignes du gouvernement en faveur du télétravail.

Néanmoins, il y a eu malgré tout une accélération du télétravail, qui a permis de révéler des difficultés managériales, du maintien de la motivation des équipes, car les collaborateurs et managers n’étaient ni préparés, ni formés au télétravail.

« Pendant la crise, nous avons pris conscience que nous ne pouvions pas faire tant de choses que ça à distance. La crise sanitaire nous a permis de comprendre ce qu’on pouvait offrir ou pas, ce qu’il nous manquait, et pour demain ce qu’il faut que nous fassions. Par exemple, après la crise, les conseillers ont demandé à revenir en agence. Beaucoup ont réalisé que toute la semaine en télétravail n’était pas facile. Nous avons investi dans la formation pour les aider.», a expliqué un cadre dirigeant d’une banque. 

D’un point de vue organisationnel, les banques qui étaient sur un modèle reposant sur le lien de proximité, doivent aujourd’hui trouver un juste équilibre dans cette nouvelle relation « digitale-physique ».

Une nouvelle relation clients à imaginer

Du côté de la relation client, la crise de la covid-19 a donc changé le paradigme pour un nouveau mode relationnel à la fois 100% digital et 100% physique. Le nouveau défi est à la fois la gestion des réseaux d’agences, et l’accompagnement de la clientèle vers une « consommation autonome » associée d’un conseil à plus forte valeur ajoutée, « le conseiller augmenté ».

Le nombre d’agences en France, de 35 837 en 2019 n’a baissé que de 7,5% en 10 ans. La France compte 545 agences pour 1 million d’habitants, derrière l’Espagne (558 agences), mais bien loin devant la moyenne constatée dans la zone euro qui est de 285 agences [2].

Si aujourd’hui, grâce aux investissements digitaux de ces vingt dernières années, l’écart en matière d’offre et d’expérience client entre les banques traditionnelles et les néo-banques s’est fortement réduit, il n’en reste pas moins des enjeux stratégiques importants, portant sur l’innovation des usages et la valeur client perçue. Les clients attendent, à la fois, de l’autonomie dans les tâches quotidiennes, et souhaitent bénéficier dans le même temps de conseils personnalisés. Les clients veulent avoir accès aux services bancaires aussi facilement qu’ils le peuvent avec des applications de type Uber, Spotify ou Deliveroo. Le « Online Merge Offline »[3] (OMO) pourrait correspondre à un « must have » stratégique pour les banques dans les années à venir.

« Il n’y aura plus de différence positive avec le digital pour les banques. En revanche, il y aura bien une différence négative si on ne le fait pas. », affirme un cadre dirigeant d’une banque.

Le défi de la maitrise des nouvelles technologies à relever

Les processus qui ont été mis en place dans l’urgence ont vu apparaître des fragilités liées aux risques et aux contrôles.

Afin d’assurer la continuité de l’ensemble des activités dans une situation quasi absolue de télétravail des effectifs, les infrastructures techniques ont été fortement sollicitées, allant parfois jusqu’à la limite de leurs capacités.  Les différentes étapes et points de contrôles des déploiements n’ont pas pu être totalement vérifiés.

D’une part, les enjeux de cyber-sécurité, démultipliés par les problématiques de confidentialité des informations manipulées, ont été confrontés à une augmentation des risques opérationnels. En interne, par exemple, la plupart des banques ayant mis en place un workflow digital sont revenues sur leur workflow classique.

En externe, le paiement sans contact, devenant la nouvelle norme, doit nécessiter des adaptations importantes en termes de sécurité et d’infrastructure.

D’après le magasin UFC Que Choisir, le paiement sans contact est deux fois plus fraudé que celui par carte bancaire avec code secret. Le paiement à distance est de son côté dix-sept fois plus fraudé.

Les initiatives de modernisation des infrastructures et des dispositifs de gestion de crise devront être renforcés et devenir complets à plus long terme.

D’autre part, dans l’industrie bancaire, « le legacy » datant des années 70 et qui gère les comptes clients, demeurait jusqu’à maintenant le système dominant. Bien que les banques se soient approprié les dernières innovations sur les smartphones, applications, méthodes biométriques d’identification etc… très peu d’entre elles se sont véritablement lancées sur la refonte de leur Core système, de l’open banking [4], ou encore de l’utilisation des données bancaires. Les concepts comme BAAP (Bank As A Platform), BAAS (Bank As A Service) ou même fournisseurs de données ne sont pas encore envisagés.

La banque de demain

La pandémie peut laisser présager un risque de contre-performance pour l’ensemble de l’économie mondiale, et plus particulièrement pour les banques qui jouent un rôle majeur de coordinateurs. Face à cette incertitude, les banques risquent donc de freiner leur capacité d’investissement à un moment crucial, où au contraire, elles se doivent d’investir encore plus pour imaginer leur futur.

« En tant que dirigeant, il faut être vigilant à ne pas sacrifier l’investissement de préservation, voire l’investissement de développement. L’investissement, c’est la préservation du MCO (Maintien en Condition Opérationnelle) au quotidien, et de continuer à flécher son investissement pour continuer de développer de nouveaux services. Le risque pour le secteur bancaire, et notamment pour certains établissements, est de ne plus être en mesure d’assurer ce deuxième pilier. », alerte le dirigeant d’une banque.

Les banques ont bénéficié d’un élan formidable avec la crise sanitaire, qui a bousculé à la fois l’organisation du travail, le management, les relations clients ou encore la gestion interne, et ouvert le champ des possibles à l’Open banque, ou encore de nouveaux concepts tel que BAAS et BAAP. L’accélération de la transformation numérique, et notamment la data, pourraient être des alliés de taille pour rebâtir un modèle bancaire plus agile et plus résilient.

Tout ceci montre que le secteur bancaire possède depuis longtemps une richesse d’informations à exploiter au travers de ses données, une véritable nouvelle richesse des banques, bien plus que le volume des capitaux qu’elles peuvent détenir. La maîtrise et l’exploitation de la donnée, et surtout de la donnée en temps réel peut devenir une véritable source de communication et de prise de décision.

Sur ce point, il est fort probable que la data soit un avantage concurrentiel décisif et un levier majeur dans la transformation du secteur bancaire.

Mais cette accélération a aussi mis en avant les fragilités comme un Core Système datant des années 70. Si le virage du digital doit être envisagé, il faut aussi opérer un changement en profondeur des systèmes d’information. Ce sont des investissements lourds mais qui ne peuvent pas être reculés indéfiniment.

De plus, côté relation clients, la crise sanitaire a aussi montré que les collaborateurs n’étaient pas assez préparés, ni au télétravail et ni à une clientèle maintenant habituée à la possibilité du digital et qui devient extrêmement exigeante. Si le virage du digital doit être entrepris, il doit l’être avec une réflexion en parallèle sur les changements en profondeur des métiers de la banque. Ce change management doit s’articuler à la fois sur une évolution des tâches opérationnelles et d’une réévaluation des compétences clés, pour tendre vers une plus grande expertise et une capacité à améliorer l’expérience du client.

L’après Covid-19 a montré que le « self care »[5] a des limites, il ne suffit pas d’avoir la nouvelle application, il faut aussi accompagner le lien humain à la clientèle, qui en ces temps de distanciation sociale est de plus en plus nécessaire.

« L’enquête de CASA[6] a montré que la proximité relationnelle a été un élément de rassurance pendant et après la crise. Il n’y a pas eu le même soutien avec les banques en ligne. Cette proximité relationnelle est très importante dans les moments compliqués, sur les populations qui ont été fragilisées par la crise. Nous avons su soutenir ceux qui étaient particulièrement touchés par la crise comme les artisans, ou encore les particuliers touchés par le chômage. L’IRC[7] n’a jamais autant augmenté qu’en 2020, et c’est vrai pour quasiment toutes les caisses du groupe. Cet indice de confiance a prouvé notre capacité à réagir et à soutenir nos clients dans des moments difficile. », explique un cadre dirigeant d’une banque.

La pandémie a permis aux banques de montrer qu’elles pouvaient jouer pleinement un rôle sociétal

Par exemple, concernant le « geste mutualiste », le Crédit Agricole ou encore le Crédit Mutuel-CIC, ont mobilisé chacun 200 millions d’euros pour accompagner les professionnels, artisans, commerçants, et les aider à passer le cap.

De ce fait, parmi les 25 marques les plus utiles citées pendant le confinement, une banque a été nommée pour la première fois. Le Crédit Agricole apparait ainsi parmi Tiktok, Leroy Merlin, Picard Surgelés ou encore Fortnite[8].

Autre fait révélateur de l’après Covid, là où Orange Banque, la néobanque qui revendique plus d’un million de clients en France et qui émarge dans le club des néobanques millionnaires, accuse 549 millions d’euros de pertes accumulées en 3 ans (selon Les Echos), le Crédit Agricole, leader de la banque de détail en France, affiche quant à lui, à fin septembre 2020, un résultat net sous-jacent de 4,7 milliards d’euros, en baisse de seulement 300 millions d’euros par rapport à 2019, tout en intégrant une hausse du coût du risque de près de 1,5 milliards d’euros.

La crise sanitaire a de ce fait révélé que les banques dites « classiques » peuvent déployer leurs SI extrêmement rapidement. Pour la plupart très solides financièrement, elles ont montré en outre, et ont su faire connaître, leur capacité à apporter une contribution réelle au soutien de l’activité économique.

Si les néo-banques ont effectivement gagné des parts de marché, les banques classiques ayant un réseau dense, comme le Crédit Agricole ou encore le Crédit Mutuel, en ont aussi gagné. La proximité relationnelle et un réseau dense restent des atouts concurrentiels. 

« Il n’y a pas eu de démonstration sur le fait que, sur les dernières années, les banques à réseaux étaient définitivement condamnées. Pour notre part, nous avons gagné des parts de marché. », affirme un cadre dirigeant d’une banque. 

La banque doit aller encore plus loin en tant que partie prenante. Si la Covid-19 a permis de mettre la responsabilité sociétale des banques sur le devant de la scène, la banque pourrait être une « entreprise à mission ». Pour ce dirigeant de banque, respecter la législation ne suffit plus.

« Il faut aller plus loin, et se forger sa propre philosophie d’acteur économique, sur ce qui est un projet moyen et long terme, et qui répond à la fois à un équilibre économique, mais aussi à une création de valeur dans la durée pour la société. Il faut que, partout où nous le pouvons, de façon continue, venions influencer la transformation écologique et environnementale, en soyons partie prenante. », a-t-il affirmé. Et ceci, même si, effectivement, il admet qu’à date il n’est pas possible de créer de façon définitive une préférence sur un positionnement particulier si la contrepartie n’est pas en mesure de payer pour consommer le service, et ajoute : « C’est aussi cette réalité qui nous rattrape. »

Il conclut : « Cette crise a aussi rappelé le fait que nous sommes des animaux sociaux. Concernant la digitalisation, bien sûr que nous sommes déjà en train de basculer. Dans le monde de demain, on sera moins nombreux, mais on aura quand même besoin des deux piliers de services. Demain, toutes les banques auront des apps comme « WeChat », qui ne sera pas un avantage concurrentiel. Le vrai avantage concurrentiel sera notre capacité à faire muter nos métiers sur un marché en contraction. »

Malgré les défis qui les attendent, les banques sont peut-être donc les grandes bénéficiaires de cette crise, là où les néobanques, elles, ont montré les limites de leur modèle.

Par Thao Noet et Ammar Aleid, promotion 2020-2021 du M2 IESCI

Références :

(Les sites internet ont été consultés entre le 18 et 23 décembre 2020)

De Coussergues, S., Bourdeaux, G. & Gabteni, H. (2020). 1. Le secteur bancaire français. Dans : , S. de Coussergues, G. Bourdeaux & H. Gabteni (Dir), Gestion de la banque: Tous les principes et outils à connaître (pp. 3-40). Paris: Dunod.

Groupe Crédit Agricole : https://www.credit-agricole.com/notre-groupe/decouvrir-le-groupe-credit-agricole

Crédit Agricole Anjou Maine : https://www.credit-agricole.fr/ca-anjou-maine/particulier.html

Statista :

https://fr.statista.com/statistiques/492273/part-cinq-grands-groupes-bancaires-total-bilan-bancaire-france

Le Figaro :

https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/le-classement-des-banques-traditionnelles-qui-negocient-le-mieux-le-virage-de-la-digitalisation-20200130

Presse citron :

https://www.presse-citron.net/comment-le-groupe-bnp-paribas-a-reussi-son-virage-numerique/

Études et analyses :

https://www.etudes-et-analyses.com/marketing/marketing-bancaire/etude-de-cas/forces-porter-credit-agricole-487803.html

BFM TV :

https://www.bfmtv.com/economie/experts/guillaume-almeras/les-nouvelles-strategies-bancaires-sont-elles-vraiment-pertinentes_AN-201905070213.html

Culture banque :

Classement des banques françaises en 2019

La Tribune :

https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/covid-19-le-secteur-bancaire-est-il-pret-a-etre-un-acteur-de-la-reprise-848680.html

France Transaction :

https://www.francetransactions.com/actus/news-banques/banques-un-secteur-en-mutation-44-000-suppressions-de-postes-annoncees-en.html

France Culture :

https://www.franceculture.fr/economie/covid-19-de-lattitude-des-banques-en-temps-de-crise

CGI :

https://www.cgi.fr/fr-fr/blog/covid-19-accelerateur-transformation-secteur-bancaire

Revue d’économie financière :

https://www.oklein.fr/strategies-de-la-banque-de-detail-face-a-la-revolution-technologique-retrouvez-mon-analyse-parue-dans-le-dernier-numero-de-la-revue-deconomie-financiere-intitule-technologies-et-mutat-2/

Revue banque :

http://www.revue-banque.fr/banque-detail-assurance/article/crise-covid-19-renforce-les-attentes-clientele-pro

Fédération bancaire française :

http://www.fbf.fr/fr/espace-presse/communiques/un-secteur-bancaire-au-service-de-l’economie-francaise-et-un-dialogue-social-actif,-mobilises-pour-assurer-la-securite-des-salaries-et-des-clients

http://fbf.fr/fr/files/APGCYU/MEMO%2005%20-%20Emploi%20dans%20les%20banques_octobre%202020.pdf

http://www.fbf.fr/fr/espace-presse/communiques/signature-de-l’accord-pour-la-gestion-previsionnelle-des-emplois-et-des-competences-(gpec)

Observatoire des métiers de la banque :

http://www.observatoire-metiers-banque.fr/f/chiffresTendances/sf/plus/s/contours_2020

http://www.observatoire-metiers-banque.fr/f/etudes/sf/plus/s/impact_numerique_charge_clientele_particuliers

Économie matin

http://www.economiematin.fr/news-Covid-19-fraude-bancaire-désemplit-pas-malgre-crise

[1] On appelle  « néo-banque », une banque soumise aux mêmes obligations réglementaires et prudentielles que les banques traditionnelles mais qui ne disposent ni d’une structure en « dur », ni d’un réseau d’agences. L’ensemble de leurs services n’est accessible qu’à travers internet même si quelques représentations physiques sont possibles.

[2] Source : https://www.optionfinance.fr/actualites/actualites-generales/detail/le-nombre-dagences-baisse-moins-en-france.html

[3] Le concept OMO a été introduit par Alibaba pour le marché chinois. Il fait suite au mouvement O2O (Online To Offline). Aujourd’hui, les informations captées « online » permettent d’agir « offline » grâce à IOT (Internet Of Things). Par exemple, le réfrigérateur va envoyer la liste des courses directement au caddy conduit par le consommateur dans un supermarché. En passant devant les rayons, le consommateur recevra alors des publicités sur des produits qui lui sont spécialement dédiés.

[4] La notion d’Open Banking est apparu dans la deuxième Directive européenne des services de paiements (DSP2) de 2013

[5] Le self care est vise à donner aux clients la possibilité d’avoir des ressources en ligne et/ou des espaces collaboratifs pour trouver des réponses 24h/24 et 7j/7, en instantané. Les clients ont la possibilité de gérer leurs problèmes ou demandes en toute autonomie, grâce à des supports numériques variés, qui peuvent aller de l’application aux informations sur un site, jusqu’au chatbot ou la FAQ dynamique. (Source : https://blog.smart-tribune.com/selfcare-definition).

[6] CASA : Crédit Agricole SA

[7] IRC : Indice de recommandation Clients. Cet indice permet d’évaluer l’image de l’entreprise et la probabilité des clients à la recommander à son entourage.

[8] https://www.influencia.net/fr/actualites/in,tendances,decathlon-arte-carrefour-doctolib-vinted-ces-marques-plus-utiles-nos-vies,10591.html

Admin M2 IESC