Covid Archives - Master Intelligence Economique et Stratégies Compétitives Le Master Intelligence Economique qui combine analyse économique, outils de veille, e-réputation, gestion de crise et big data via une formation sur deux ans. Sun, 27 Jun 2021 10:40:10 +0000 fr-FR hourly 1 L’industrie du tabac va-t-elle sauver le monde ? https://master-iesc-angers.com/lindustrie-du-tabac-va-t-elle-sauver-le-monde/ Sun, 27 Jun 2021 10:40:10 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3487  Le tabagisme est une vieille tradition ayant pour origine les tribus indiennes de la fin du premier millénaire, qui s’est imposée comme une habitude moderne de centaines de milliers de personnes. Au fil des années, l’industrie du tabac a pu… Continuer la lecture

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 Le tabagisme est une vieille tradition ayant pour origine les tribus indiennes de la fin du premier millénaire, qui s’est imposée comme une habitude moderne de centaines de milliers de personnes. Au fil des années, l’industrie du tabac a pu prendre une place importante en engrangeant de profits mirobolants (290 milliards d’euros de chiffre d’affaire et plus de 29 milliards d’euros de bénéfices en 2010 d’après Datagueule) en dépit de son statut controversé depuis 1953. Malgré les méfaits avérés du tabagisme pour la santé humaine, les fabricants de tabac sont parmi les premiers contribuables dans de nombreux pays. En France, par exemple, l’industrie a rapporté 11,2 milliards d’euros en 2013. En raison de ces dommages importants pour la santé, la production et la distribution du tabac sont strictement réglementées par l’État. Ainsi, on observe, ces dernières années une tendance à la baisse de la consommation et une augmentation du coût des paquets de cigarettes en France. Les gouvernements cherchent un équilibre entre les recettes fiscales élevées provenant des ventes de tabac et la protection de la santé des citoyens, qui est la question la plus urgente de 2020.

L’année 2020 a été rude pour l’économie mondiale et pour les entreprises du secteur privée. Les mesures sanitaires exigeantes ont entrainé une pression sociale sur la population et les habitudes de consommations des ménages. L’industrie du tabac a également fait face à un certain nombre de restrictions. Par exemple, en Afrique du Sud, une interdiction de fumer a été introduite pendant 5 mois[1], en Belgique – une interdiction de fumer pendant un match de football[2], etc.

Du fait d’impact du tabac sur la santé dont les effets constituent un facteur de risque important dans l’aggravation des symptômes de la Covid-19, on aurait pu s’attendre à une baisse de la consommation de tabac en tant que résultante de l’abandon pour les nouveaux consommateurs ou pour motiver l’abandon pour les consommateurs habituels. Mais le marché du tabac a tout de même connu une progression sur la période du premier confinement de mars à mai 2020.

Santé Publique France a réalisé une enquête auprès de 422 consommateurs de tabac dans le but de suivre l’évolution des comportements et de la santé mentale pendant l’épidémie. Cette enquête, à l’heure actuelle, le 28 décembre 2020, a permis d’observer une hausse de 27% de la consommation de tabac sur 3 mois contre une diminution de 19% sur la même période, 55% d’entre eux ont déclaré avoir une consommation stable de tabac. Cela peut s’expliquer par les changements dans les politiques stratégiques des compagnies de tabac liées au lancement de nouveaux types de produits. La principale question en temps de crise sanitaire de 2019 est de savoir quels produits innovants sont produits par les compagnies de tabac et quelles sont leurs contributions à la santé humaine?

Le marché du tabac en Mutation: stratégies et produits innovants

La réorientation stratégique des entreprises de la production de cigarettes classiques à l’introduction d’un nouveau type de produit, comme la cigarette électronique, a commencé bien avant la crise sanitaire de 2019. Le premier concept de e-cigarette a été développé en 1963. Le premier dispositif rendu public destiné à simuler l’utilisation d’une vraie cigarette a été réalisé en 2003. Mais ce n’est qu’en 2009 qu’une technologie moderne a été inventée, la vaporisation par résistance chauffante, caractérisée par son « Electronic Nicotine Delivery System (ENDS) ». Ainsi, il y a des décennies, les fabricants de tabac ont commencé à s’intéresser au créneau des produits moins nocifs pour la santé, et chaque acteur majeur du tabac propose maintenant sa cigarette électronique. Avec l’avènement des nouvelles produits, la conscience des consommateurs évolue, nous voyons donc des changements globaux dans la mission et la stratégie de développement des compagnies de tabac.

Le succès sur le marché du tabac dépend de facteurs macro-économiques externes tels que la population, la situation économique dans la région de vente, la politique fiscale de la région, etc. En effet, les facteurs ci-dessus sont décrits dans le document de stratégie 2007 de British American Tobacco. Ainsi le défi lancé par la direction de American British Tobacco en 2007 est de répondre aux besoins des fumeurs adultes. Pour ce faire, il est nécessaire :

  • De comprendre les besoins des consommateurs ;
  • D’avoir des produits qui répondent aux attentes des consommateurs, au moment où ils sont nécessaires ;
  • De pouvoir livrer les produits aux points de vente où le consommateur effectue des achats.

En analysant ces tâches, nous pouvons conclure qu’il y a une décennie l’objectif principal de l’entreprise était le développement d’un réseau de distribution. Mais ces derniers temps, les habitudes de consommateurs ont subi de plus en plus de changements. Avec l’adoption généralisée des nouvelles technologies de communication, il est devenu possible de promouvoir plus globalement des modes de vie sains et des tendances antitabac. La réglementation des ventes de tabac par l’État s’est également généralisée. Ces tendances ne pouvaient pas passer inaperçues aux yeux des fabricants de tabac et, par conséquent, elles ont contribué au développement de nouveaux produits moins nocifs pour la santé. Le lancement et le développement de nouveaux produits est un processus stratégique à long terme qui nécessite des innovations. Nous assistons donc à une transformation des stratégies sur le marché du tabac : le passage du développement des réseaux de distribution au développement de l’innovation.

Ainsi, aussi paradoxal que cela puisse paraître, les compagnies de tabac, qui gagnent des milliards grâce aux mauvaises habitudes de l’humanité, orientent leurs efforts pour réduire les dommages à la santé des fumeurs. Le PDG de American British Tobacco (BAT) a présenté la stratégie du groupe en mars 2020, dont le message principal est : « Notre héritage – et la base de notre succès – est dans les cigarettes. Cependant, nous reconnaissons que le monde change. Un objectif clair de construire un “avenir meilleur” en réduisant l’impact de nos activités sur la santé ».

Public Health England, un organisme du ministère de la santé du Royaume-Uni, a réalisé deux examens complets et a déclaré que le vapotage est au moins 95 % moins nocif que le tabagisme. Ainsi, les entreprises se concentrent sur le développement et le lancement de nouveaux produits innovants pour le marché, tels que la vapeur, fusion du tabac et de la vapeur, produits de chauffage du tabac, tabac sans fumée etc… En 2017, BAT a acquis une nouvelle série de produits qui devraient devenir une innovation dans le domaine du tabac sans fumée. À la suite de cette acquisition, BAT a développé la disponibilité du SNUS, une poudre de “tabac blanc”, sous la marque Epok. Le “tabac blanc” est fabriqué selon un processus de production spécial qui purifie et raffine soigneusement le tabac brun. Ce procédé présente l’avantage supplémentaire de réduire les niveaux de certains constituants tels que les métaux lourds. Les consommateurs affirment que l’utilisation du produit procure exactement la même sensation que le tabac brun ordinaire. Le tabac blanc est un produit de consommation courante, mais le SNUS ne coule pas et ne décolore pas les dents.

Pour l’entreprise Japan Tobacco, ses objectifs c’est de développer de produits émergents, prendre de l’expansion géographique, pour ce faire elle a investi des centaines de millions dans la recherche et développement et le marketing pour conserver sa croissance ; dans une perspective de long terme et aussi de prendre des parts de marchés à ses concurrents.

Avec l’avancé du marché du numérique de nos jours, Japan Tobacco International (JTI) a signé un contrat avec Orange Business Service, pour cinq ans, ce contrat terminera en 2021 ; pour sa transformation digitale, qui a pour but, de fournir un service très varié, managés à 20 000 utilisateurs sur plus de 300 sites dans le monde, de faciliter les démarches sur les réseaux sociaux comme les accès à distance, les communications unifiées, les centres d’appels en utilisant la technologie Skype for business…

La cigarette traditionnelle a des conséquences négatives sur la santé de ses consommateurs, les entreprises qui les produisent veulent réduire le taux de décès par des nouveaux produits moins nocives pour la santé. L’entreprise JTI en 2014, a présenté une cigarette chauffée sur le nom de Ploom tech, cette technologie permet de créer la vapeur de tabac en chauffant un liquide sans nicotine à 360°c qui passe par une capsule avec du tabac granulé, l’entreprise a considéré que cette technologie peut concurrencer les cigarettes classiques et électroniques. Fin 2015, c’est l’arrivée de la cigarette électronique avec une cartouche pré-remplies pour les adultes, cette technologie cigarette a été développée avec Logic compact au format porche, elle est comme un petit stylo plat et carré, elle a trois couleurs et cinq parfums. Les pods Logic compact qui ont des saveurs comme tabac, menthol, cerise, baies-menthe et fraise. Chaque pot équivaut à un paquet de cigarette, elle est équipée d’une batterie de 350mAh performante. De 2015 à 2020, le Groupe JTI a investi deux milliards de dollars pour le développement de ce produit à l’échelle internationale, le JTI est considéré comme le leader en ce qui concerne de l’innovation des produits risques réduits.

En 2016, Philip Morris International (PMI) a annoncé un changement de stratégie majeur sur le long terme (2025) qui vise à fabriquer des produits limitant au maximum la présence de substances toxiques. En 2020, Andre Calantzopoulos, le CEO de PMI dans une interview avec l’Harvard Business Review évoque les réflexions qui ont permis aux ingénieurs et scientifiques de l’entreprise d’atteindre des résultats d’environ 95% de réduction de substances nocives dans les produits de nouvelles générations proposés par PMI. Les objectifs de la stratégie de PMI sont les suivants comme détaillés dans le rapport transmis à la SEC pour les investisseurs et actionnaires de PMI : plaider en faveur de l’élaboration de cadres réglementaires fondés sur la science pour le développement et la commercialisation des nouveaux produits. Dans le but d’atteindre ces points essentiels de la stratégie globale de l’entreprise, PMI a développé 4 stades de produits qui seront mis à l’étude en R&D :

  • L’utilisation d’un dispositif de chauffage à commande précise intégrant la technologie IQOS HeatControl, dans lequel une unité de tabac spécialement conçue et brevetée est insérée et chauffée pour générer un aérosol ;
  • L’utilisation d’une source de chaleur au carbone pressé ;
  • L’utilisation d’un aérosol de sel de nicotine ;
  • L’intégration des produits e-vapor, qui sont des appareils à piles qui produisent un aérosol en vaporisant une solution liquide contenant de la nicotine.

Chez Phillip Morris, les nouveaux produits font référence à la gamme de produit de la marque IQOS (cigarette électronique sans fumée), propriété de PMI lancée en 2015. Ce produit est le fer de lance qui permet de décliner les licences en recharge et autres accessoires au nom de marques connus par les consommateurs. Cette gamme est le pari sur lequel PMI joue son avenir afin de redorer son blason auprès du grand public ainsi que des institutions de santé publique et du milieu médical. A ce jour, PMI est poursuivi en justice dans 60 affaires judiciaires diverses à cause des effets sur la santé des consommateurs, des plantations et divers litiges.

Lors de la présentation de ses résultats pour ce second trimestre 2020 British American Tobacco a déclaré que ses ventes de cigarettes ont reculé, en volume, de -6,3 % (par rapport au second trimestre 2019) sur l’ensemble de ses marchés dans le monde. Un résultat explicable essentiellement par les restrictions imposées aux voyages pour cause de pandémie. Sinon, dans ces résultats, BAT met en avant surtout la croissance de ses activités « nouvelles catégories / NGP » +14,7 % :

  • Soit +9,1 % dans la catégorie du tabac à chauffer ;
  • Soit +41 % dans les produits du vapotage
  • Soit +67 % dans la catégorie « modern oral » (nicotine en sachets).

En 2020, on observe une baisse des ventes de cigarettes classiques et une augmentation des ventes de nouveaux produits tels que les e-cigarettes, nicotine en sachets, tabac à chauffer. Cependant, on ne peut pas affirmer que les nouveaux produits remplaceront complètement ou même largement les cigarettes classiques. Le taux de croissance élevé des ventes des nouvelles catégories est très probablement associé au stade de vie du produit, qui est au stade de croissance rapide, tandis que les cigarettes classiques traversent la transition du stade de maturité au stade de déclin.

Une nouvelle stratégie des entreprises liée à l’introduction de nouveaux produits sur le marché et une transition massive vers la cigarette électronique consiste de :

  • Mener des recherches et informer les consommateurs
  • Un dialogue avec l’État sur la réglementation de la vente de cigarettes électroniques. La tâche est de faire pression pour la vente de cigarettes électroniques, leur promotion sur le marché et de changer la réglementation des ventes.
  • Transition vers l’e-commerce et développement des technologies numériques.

Les biens technologiques protègent contre la contrebande

La production de nouvelles catégories de produits est à forte intensité de connaissances et de main-d’œuvre. De cette manière, les entreprises diversifient leurs portefeuilles, protégeant leur marché des produits de contrebande de cigarettes. La crise de santé et le ralentissement financier en 2020 ont causé une tempête parfaite, selon des recherches de JTI, qui ont permis aux contrebandiers organisés de répondre à la demande des consommateurs qui ont besoin des biens bon marché et ce groupe va tirer parti dans la diminution du pouvoir d’achat, dans la récession mondiale plus spécifiquement dans les pays à fiscalité élevée.

L’économie numérique facilite également la commercialisation des produits auprès du client final. Les applications WhatsApp et Facebook ont montré les méthodes de communications rapides et faciles entre les criminels et les consommateurs.

Selon la Chambre de commerce internationale, le commerce de contrefaçon atteindra 4 milliards de dollars d’ici 2022, à travers le commerce électronique, pour la banque mondiale, les groupes criminels qui font de la contrebande, qui produisent, qui distribuent et vendent les produits de tabac qui n’ont pas payé aucun droit de taxe, leur commerce s’élève déjà environ de 40 à 50 milliards de dollars chaque année[3]. JTI a préparé un plan d’action contre ces groupes criminels qui base du renforcement du contrôle douanier et de l’interaction avec les autorités gouvernementales. Mais la stratégie à long terme de transition de la société vers des produits plus avancés sur le plan technologique, comme les cigarettes électroniques, est en soi une garantie contre la contrefaçon. Ainsi, malgré le risque de flambée de la contrebande en raison de la crise économique provoquée par la pandémie, à long terme, on voit l’impact de la gamme de produits des compagnies de tabac sur la réduction du volume de la contrefaçon.

Les additifs aromatiques sont-ils plus nocifs que la nicotine ?

Pour analyser les ingrédients des e-cigarettes modernes, nous avons utilisé les informations fournies par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). Ces informations sont des données brutes extraites des déclarations et notifications effectuées par les fabricants et importateurs de ces produits. Aux fins de procéder à la publication des informations prévues par la réglementation, l’Anses n’a effectué aucun traitement ni aucune analyse de ces informations et ne peut, par conséquent, en garantir leur contenu ou leur exactitude. Néanmoins, la base de données contient des informations sur les produits de vapotage enregistrés en France depuis 2016 et indique le nom du composant principal.

La base du liquide de vapotage se compose de 2 éléments :  Propylène glycol (PG, Monopropilene glycol) et Glycérine végétale (Glycérine, Glycerol). Les produits de vapotage peuvent ne contenir aucune nicotine (0 à 18 mg/ml) ou contenir des saveurs et des additifs aromatiques (3-15%). La glycérine et le propylène glycol ne sont pas considérés comme toxiques quand ils sont administrés par voie orale. Néanmoins, ces liquides peuvent contenir des substances chimiques qui augmentent leur toxicité.

Nous avons analysé environ 65 000 produits enregistrés en France. Sur la figure 7 et 8, les composants non toxiques sont indiqués en vert et les composants toxiques, qui sont des additifs aromatiques et sont les plus nocifs pour la santé, sont indiqués en rouge. À partir du graphique, nous pouvons voir que, par rapport aux années précédentes, les fabricants déclarent une teneur en nicotine inférieure en 2020. Néanmoins, la teneur en additifs aromatiques laisse à la prudence, d’autant plus que la publicité des produits aromatiques s’adresse indirectement au public des jeunes et des écoliers. Le tableau (annexe 1) présente les principales caractéristiques des composants du vapotage.

Après avoir étudié le contenu des e-liquides pour cigarettes électroniques, d’une part, on constate que la quantité de nicotine diminue, et d’autre part, la quantité d’additifs aromatiques augmente. Les additifs aromatiques peuvent être à la fois naturels et artificiels. Certains additifs sont connus pour être plus toxiques que d’autres, la cannelle en étant un exemple nocif. L’innocuité des autres arômes alimentaires est reconnue en cas d’ingestion. On ne sait pas aujourd’hui quels sont les effets du chauffage et de l’inhalation répétée sur plusieurs années de ces additifs.  Cependant, on pense que les doses absorbées pourraient être plus importantes que par voie orale et que si tel est le cas certains arômes pourraient alors poser souci. Il est également important de prêter attention au contenu proportionnel de Propylène glycol et Glycérine végétale des cigarettes électroniques. Glycérine végétale est moins nocif, par conséquent il est plus préférable de lui choisir comme composant principal. Un autre aspect important du remplacement des cigarettes classiques par des produits de vapotage est le manque de dépendance physique à la nicotine. Cependant, les habitudes de consommation des e-cigarettes restent les mêmes, ce qui pose la question de la dépendance psychologique du tabagisme.

Fabrication de vaccins et développement des soins de santé

Le nouveau portefeuille de produits du tabac ne se limite pas au lancement d’équivalents innovants de cigarettes classiques. La crise sanitaire mondiale et la pandémie de 2019 ont incité les compagnies de tabac à travailler sur un vaccin contre les Covid-19.

En 2014 BAT a acquis la société Kentucky BioProcessing dans le but d’utiliser certaines de ses technologies d’extraction du tabac uniques pour développer davantage une nouvelle catégorie de produits ininflammables. En 2014, KBP est devenue l’une des rares entreprises à offrir un traitement efficace contre Ebola en lançant ZMapp ™ en partenariat avec la société californienne Mapp BioPharmaceuticals en partenariat avec la Biomedical Advanced Research and Development Administration (BARDA). Ainsi, en avril 2020, British American Tobacco a annoncé son travail sur le développement d’un vaccin contre le COVID-19. Le vaccin est développé en utilisant une nouvelle technologie de plants de tabac à croissance rapide.

Le vaccin utilise la technologie brevetée du tabac à croissance rapide de BAT, qui présente plusieurs avantages par rapport à la technologie vaccinale traditionnelle :

  • Ceci est potentiellement plus sûr étant donné que les plants de tabac ne peuvent pas héberger des agents pathogènes qui causent des maladies humaines.
  • C’est plus rapide car les éléments du vaccin s’accumulent dans les plants de tabac beaucoup plus rapidement – 6 semaines dans les plants de tabac contre plusieurs mois en utilisant des méthodes conventionnelles.
  • La formulation vaccinale développée par KBP reste stable à température ambiante, contrairement aux vaccins conventionnels, qui nécessitent souvent une réfrigération.
  • Il peut induire une réponse immunitaire efficace en une seule dose[4].

L’approche végétale du développement de vaccins est révolutionnaire

Le géant de l’industrie du tabac Philip Morris et le japonais Mitsubishi Tanabe Pharma sont les principaux actionnaires d’une société biopharmaceutique Medicago. Pendant la pandémie, Medicago est également activement impliqué dans la course à l’invention des vaccins contre Covid 2019. La technologie Medicago est inhabituelle. Plutôt que de compter sur des cylindres massifs en acier inoxydable pour cultiver du lactosérum, l’entreprise cultive des serres qui cultivent un proche parent du tabac. En insérant une partie de la séquence génétique du coronavirus dans des cellules végétales, les légumes-feuilles sont transformés en mini-usines pour la production de protéines. Le vaccin a déjà passé avec succès la première phase de test ; en novembre 2020, la société a entamé la deuxième phase de test du vaccin[5].

Conclusion

Les investissements des fabricants de tabac dans de nouvelles catégories de produits moins nocifs pour la santé ont commencé bien avant la pandémie de coronavirus. La sortie et la production de nouveaux produits modifient la stratégie des compagnies de tabac, qui se concentrent principalement sur la réduction des dommages à la santé. Pour réaliser ses objectifs, les entreprises de tabac utilisent tout un arsenal de méthodes qui leur permettent d’influencer l’opinion des consommateurs. L’une de ces méthodes sont les actions de lobbying sont menés comme afin de retarder ou d’annuler des lois qui visent à diminuer la taxation de la consommation de tabac. L’autre est un gros investissement dans la recherche et le développement. En plus de travailler à réduire la teneur en nicotine des produits du tabac, les laboratoires de recherche travaillent à la création d’un vaccin contre le coronavirus et de médicaments basés sur les propriétés médicinales du tabac.

L’une des principales tendances de 2020 dans l’industrie du tabac est une augmentation de la part des nouvelles catégories de produits et une diminution de la part des cigarettes classiques dans le portefeuille des entreprises. Le développement d’un vaccin anti-coronavirus à base de tabac est également un progrès dans l’industrie du tabac. Les travaux sur des produits innovants, des objectifs principales de réduction des méfaits des produits du tabac ont poussé les entreprises à acquérir des laboratoires de recherche plusieurs années avant la pandémie. Mais la crise sanitaire mondiale affectera le portefeuille des sociétés de tabac qui pourraient être en mesure de générer des bénéfices grâce à la production de médicaments à base de tabac. Actuellement, la situation sur le marché du tabac ressemble à une relation « gagnant-gagnant ». Tout le monde profite des nouveaux produits – les consommateurs réduisent les risques pour la santé, l’État continue de recevoir des revenus pour le trésor public, les entreprises réduisent le risque de contrefaçon. Mais est-ce vraiment le cas ?

En fait, les entreprises de l’industrie du tabac fondent leurs activités sur les habitudes malsaines de l’humanité. le succès d’une stratégie visant à développer des produits innovants moins nocifs, contenant toujours de la nicotine ou des additifs aromatiques affectent toujours la santé. Ce double jeu de producteur de produit nocif et d’aide aux victimes soulève des questions sur l’impartialité et la bonne foi de ces entreprises comme nous avons pu le voir des actions de lobbying au niveau des instances décisionnaires pour les convaincre de l’innocuité des produits vendus. Dans le but de donner une image plus saine au tabac et vu les investissements faits pour trouver un vaccin grâce au tabac, doit-on s’attendre à ce que l’industrie du tabac puisse fabriquer des produits de santé pour profiter indirectement d’un rayonnement de ses potentiels produits de santé ?

Par Franj Kalma Moufoura, Alisa Zhukova, Caleb Durandisse, promotion 2020-2021 du M2 IESCI

[1] https://www.bat.com/group/sites/UK__9D9KCY.nsf/vwPagesWebLive/DOBSLNHQ#

[2] http://www.lemondedutabac.com/belgique-coronavirus-masque-ou-cigarettes-il-faut-choisir-interdiction-de-fumer-dans-les-stades/

[3] https://www.jti.com/jti-report-warns-gathering-storm-black-market

[4] https://www.bat.com/group/sites/UK__9D9KCY.nsf/vwPagesWebLive/DOBN8QNL

[5] http://ie.shafaqna.com/EN/AL/2447986

[6] https://www.stop-tabac.ch/fr/e-cigarette-et-tabac-chauffe-3/l-essentiel-sur-la-e-cig/decryptage-des-e-liquides#:~:text=Le%20glyc%C3%A9rol%20est%20souvent%20utilis%C3%A9,l’instar%20du%20propyl%C3%A8ne%20glycol.

Annexe 1. Caractéristiques des composants du vapotage

 

Nom de la composante Fonctions
NICOTINE ·         La nicotine aux doses utilisées par les vapoteurs n’est pas dangereuse, addictif

·         Les risques potentiels de la nicotine provenant des produits du tabac sans fumée (snus, snuff). Il a été fait état d’effets hémodynamiques, de dysfonctionnement endothélial, de cas de thrombogenèse, d’inflammation systémique, ainsi que d’autres effets métaboliques[6].

PROPYLENE GLYCOL (PG) ·  un exhausteur d’arômes

·  substance issue de la pétrochimie, qui n’a ni odeur, ni goût, ni couleur

·  le PG a moins tendance à boucher le clearomiseur que la glycérine végétale

·  Avec la nicotine, il procure également le fameux « hit » en gorge recherché par les vapoteurs pratiquant l’inhalation indirecte

Capacité d’irritation : le PG peut provoquer des irritations chez certaines personnes sensibles (des problèmes d’insuffisance rénale, réactions d’irritations, une irritation des voies respiratoires), mais que la plupart des effets négatifs n’apparaissent que lors d’une exposition à des quantités importantes, qui sont loin d’être atteintes avec une cigarette électronique.

GLYCERINE VEGETALE (GV) / GLYCEROL  ·  Issue à l’origine de la fabrication du savon, se présente sous la forme d’un liquide épais, visqueux, incolore et inodore, au goût sucré

·  Non toxique

·  Produit une vapeur généreuse appréciée des amateurs d’inhalation directe

·  Les liquides à forte teneur en VG sont susceptibles d’encrasser

Glycérol de qualité pharmaceutique (USP) La qualité de GLYCERINE qui assure à priori une absence d’impuretés toxiques dans le glycérol.
Arômes :  BUTANOATE D’ETHYLE / Ethyl butyrate et autres additifs aromatiques ·  Irritation de la peau; irritation possible des yeux et des muqueuses; possibilité de maux de tête, d’étourdissements, de nausées, de vomissements et de narcose.

 

Bibliographie

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Impact de la crise de la Covid sur les évènements du monde du Luxe https://master-iesc-angers.com/impact-de-la-crise-de-la-covid-sur-les-evenements-de-la-mode-de-luxe/ Thu, 17 Jun 2021 09:53:42 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3480 Au printemps 2020, les entreprises du monde entier ont dû s’adapter pour faire face à la crise liée à la COVID 19. Les mesures de confinement auxquelles les gouvernements ont recouru ont bouleversé l’organisation des entreprises. Les firmes multinationales ont… Continuer la lecture

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Au printemps 2020, les entreprises du monde entier ont dû s’adapter pour faire face à la crise liée à la COVID 19. Les mesures de confinement auxquelles les gouvernements ont recouru ont bouleversé l’organisation des entreprises. Les firmes multinationales ont vu une complexité se rajouter à leur complexité et chaque secteur a été touché. Les informations ont fusé de partout sur l’approvisionnement des magasins de première nécessité, dits commerces essentiels, sur les rayons vides ou les ruptures de stocks en raison de l’approvisionnement à l’international et de la mise à l’arrêt de la Chine, grand pays producteur, en raison du fait que le berceau de la pandémie a été Wuhan, ville de la Chine centrale. Il y a eu pourtant un secteur, moins médiatisé, qui a tout autant été touché pour les mêmes raisons : le secteur de la mode et du luxe. En effet, dans les années 2000, le marché de la mode de luxe a gagné la Chine. La production jadis très concentrée en Italie a bougé vers la Chine, attirée par le faible coût de la main-d’œuvre. Ont alors suivi les grands magasins et showroom lancés sur les traces de la nouvelle clientèle chinoise qui a gagné en pouvoir d’achat et prête à s’acheter des articles de luxe.

En janvier 2020 apparaissaient officiellement les premiers cas de coronavirus en Chine. S’en sont suivi le confinement des villes puis du pays et la fermeture des frontières. Cette situation inédite a paralysé de nombreuses productions et canaux de distribution disruptant ainsi toute la chaîne d’approvisionnement dans plusieurs secteurs. La particularité du secteur de la mode de luxe est que les nombreux évènements, rendez-vous culte organisés à des moments précis de l’année, ont dû également être modifiés ou annulés, d’autant plus que la maladie a gagné très vite le deuxième pays au cœur du secteur qu’est l’Italie, avant de se propager à l’échelle planétaire, alors que les évènements de la mode de luxe rassemblent chaque année des milliers de visiteurs du monde entier.

La mode est aussi vieille que le monde. Elle renvoie aux goûts vestimentaires d’une époque et d’une région ainsi qu’à l’image que la société s’en fait. L’industrie a renforcé sa présence dans le monde avec la conception des magazines de mode au 18ème siècle et comprend le textile, les vêtements, l’horlogerie et la bijouterie, chaussures et maroquinerie, parfum, cosmétique et optique. Ce marché est dominé par des marques françaises comme Louis Vuitton, Chanel, Cartier, Saint Laurent, détenant la plus grande part de marché (23,5% du chiffre d’affaire du top 100, selon une étude de Deloitte). Ce qui fait du luxe l’un des secteurs les plus dynamiques de l’économie française avec un chiffre d’affaire de 150 Milliards d’Euro en 2019, trois fois plus que l’aéronautique. Le secteur est également le numéro 1 de l’exportation avec un chiffre de 50 milliards d’Euro en 2019. En France, l’industrie du luxe crée environ 10.000 emplois chaque année et verse au trésor public près de 1,2 milliards d’Euro chaque année.

La question que l’on se pose est : pourquoi continuer à acheter des vêtements et des accessoires alors que le monde est à l’arrêt et que tout le monde reste chez soi ? Face à cette interrogation, on peut se dire que l’industrie de la mode de luxe a dû drastiquement souffrir de cette crise de la production à la distribution. Cependant, lors d’un interview donné à Elle sur l’impact de la crise sur le secteur au dernier trimestre 2020, Tory Burch donne son avis sur la question. D’après la styliste américaine, à une époque incertaine, les vêtements rassurent et permettent de se raccrocher à la réalité. Pour elle c’est une question de bien-être. L’enjeu est de se réinventer et de réussir à assurer une certaine présence auprès des clients, étant donné que les calendriers des évènements ont été bouleversé. Il est donc de bonne guerre d’analyser les conséquences de cette année sans précédente sur un secteur aussi important. D’autant plus que Paris accueille d’importants évènements liés à la mode de luxe, auquel se limitera ce document. La première partie de cet article abordera le secteur avant la crise et comment les entreprises y ont fait face. Ensuite une deuxième partie abordera les conséquences de la crise sanitaire sur les évènements, les innovations auxquelles les entreprises ont dû recourir pour limiter les dégâts et celles qui sont susceptibles de perdurer.

Le positionnement du secteur de la mode avant 2020

Le secteur de la mode est en constante évolution et ne cesse de gagner, chaque année, des parts de marché, notamment en raison de ses innovations, de son marketing et de ses nouveaux outils. La France est la première puissance mondiale dans le domaine de la mode, tel que le luxe. En effet, un quart des ventes mondiales est réalisé par des marques françaises [1]. Le chiffre d’affaires de ce secteur pèse aujourd’hui près de 2,7% du PIB français. Le territoire compte de nombreuses grandes maisons de haute couture comme Channel, Christian Dior, Louis Vuitton, Balmain, qui ont fait la renommée de la France à l’international, avec les vêtements, les parfums ou bien les accessoires. C’est également le cas avec de grandes entreprises regroupant de prestigieuses marques reconnues mondialement comme LVMH (Moët Hennessy Louis Vuitton) ayant pour PDG Bernard Arnault ainsi que la Société Kering dirigée par François-Henri Pinault et l’Oréal, sous la direction de Jean-Paul Agon. Selon le cabinet Deloitte, en 2017, ces trois entreprises se situaient dans le classement des 10 premières entreprises internationales dans le domaine du luxe d’après une étude de Deloitte.

En conséquence de la crise des subprimes, selon les Echos, le secteur a connu une baisse cumulée du chiffre d’affaires d’environ 14 % entre 2008 et 2017.  Toutefois, la mode du luxe a su se renouveler, se développer sur le marché du numérique et attirer les nouveaux jeunes créateurs. Ainsi, auparavant, les boutiques n’envisageaient pas de présenter leurs produits sur les sites, ceux-ci étant souvent faits sur-mesure ou uniques et orientés vers un public cible précis, habitué à fréquenter les boutiques. Réalisant l’importance de séduire un public plus jeune, tel que les 15-35 ans et de le fidéliser, un tournant a pourtant été pris. Cette catégorie d’âge peut suivre les nouvelles tendances plus facilement, détecter rapidement les promotions, diffuser et relayer les informations sur les réseaux sociaux. Ils sont donc des facteurs de développement importants pour les entreprises. Les produits de luxe, notamment le sur-mesure, permettent d’avoir, grâce à internet, la possibilité de visualiser le produit, l’adapter à ses envies et provoquer plus facilement l’achat. La mode de luxe a donc pris le tournant de l’e-commerce.

Ensuite, l’exportation à l’étranger représente un secteur relativement important pour le secteur de la mode du luxe. Depuis, une dizaine d’années, les Chinois font partie des plus gros consommateurs de ce type de bien. En effet, la classe moyenne chinoise possède aujourd’hui davantage de pouvoir d’achat et la population ne cesse de s’accroître, le marché atteint est donc majeur et ne cesse de se développer. Selon un rapport de McKinsey China Luxury de 2019, 35% des consommateurs de biens de luxe dans le monde sont chinois.

Avant l’année 2020, le secteur de la mode a donc connu un nouvel élan prometteur, redonnant confiance, notamment auprès des consommateurs conquis par les nouvelles pratiques de ces dernières années.

« C’est vraiment une tendance globale. Le tourisme a un poids très élevé dans la consommation de produits de luxe, et ce sont surtout les Chinois qui ont porté cette croissance en 2017 et vont continuer de la porter en 2018 : ils se sont mis à beaucoup consommer sur leur marché domestique, et par ailleurs ils se sont remis à voyager » Bénédicte Sabadie, associée en charge du secteur Luxe chez Deloitte France / 29-05-2018 / Site Fashion Network

Les conséquences de la crise sur les évènements

Le secteur du luxe mise beaucoup sur les évènements en raison de leur fort impact médiatique et commercial. Il s’agit des traditionnels fashion week, des défilés de mode, des festivales, des showrooms et de tous les autres évènements rassemblant des stars et des personnalités connues, notamment du showbiz. Cette année, l’interdiction des rassemblements n’a pas rendu les évènements possibles. Cependant, le secteur du luxe très ancré dans les traditions, a dû s’adapter et trouver des alternatives. Depuis sa première édition en 1985, le festival de Hyères créé par Jean Pierre Blanc soutien les jeunes créations par son rassemblement international de mode et de photographie. La 35ème édition cette année a eu lieu dans des conditions atypiques. Si organiser ce genre de festival n’est généralement pas une tâche facile, la crise sanitaire a encore plus complexifié la situation. L’organisateur déclare rester quand même optimiste pour l’industrie car elle a montré qu’elle sait se remettre en question et s’adapter. Même les grandes marques développent de nouveaux réflexes. Gucci par exemple a décidé de renoncer aux présentations qui s’enchainent et de choisir son propre rythme de présentation de collections et de proposition de défilés. Elle a ainsi manqué la fashion week de Milan. Cette décision de la marque phare du géant Français Kering pose la question de la pérennité des évènements traditionnels de mode comme nous les connaissons depuis plusieurs décennies.

Le secteur de la mode regorge de créativité et d’inventivité en raison de la quintessence même du métier. En effet pour réussir, les créateurs sont habitués à être attentif aux tendances et à adapter leurs créations au marché tout en intégrant leurs visions. Désormais il va falloir étendre cette capacité aux organisations. En février dernier, Armani a été le premier à prendre en Europe, la décision de changer le cours normal des choses. Ainsi, son défilé à la fashion week de Milan s’est tenu à huis clos dans un de ses teatro, dans le souci de préserver le bien-être de ses invités en leur évitant de fréquenter des endroits surpeuplés. Le défilé a été diffusé sur le site internet de la griffe et sur ses comptes de réseaux sociaux. En revanche, les défilés de six créateurs chinois ont été annulés, ainsi que les salons professionnels, les showrooms professionnels. Les market week ont également été annulé. Il s’agit d’un rendez-vous de distribution entre les marques et les acheteurs après la fashion week. Les défilés métiers art et croisières de mai avec Chanel, Prada et Gucci ont également été annulé. Certains organisateurs profitent de la disruption créée par la crise, pour insérer leurs objectifs de performance préexistants. Ainsi, la fashion week homme de Londres de janvier 2021 a été reportée à celle des femmes de février 2021 afin de réduire la norme de genre et les déplacements pour une mode éco responsable. Le British fashion Council a annulé la prochaine édition de la fashion week homme de Londres en raison de la pandémie, du Brexit, et évoque une volonté de repenser l’évènement.

Certains évènements ont été drastiquement modifiés pour répondre aux nouvelles exigences. La semaine de la mode de juin 2020 et celle de la haute couture de juillet 2020 ont été digitalisées. La fashion week homme Paris de juillet s’est déroulée à 100% en ligne. A Milan, les prochains évènements sont confirmés. Ils se tiendront en physique ou en digital en fonction de l’évolution de la pandémie. Depuis l’été 2020, Milan organise ses évènements en numérique. L’automne dernier, la fashion week de Milan a présenté 156 collections via un espace de showroom digital avec 300 marques.  Ce canal a battu un record avec 45 millions de vues et a fait de Milan la première plateforme mondiale la plus visualisée des semaines de la mode. Le président de la chambre Italienne de la mode a sollicité l’aide du gouvernement pour soutenir les efforts de résilience du secteur sinistré. Il faut noter que la mode est la deuxième industrie manufacturière en Italie. Elle réalise plus de 60% de la production haut de gamme mondiale et 41% de la production européenne en termes de mode/accessoires contre 12% pour l’Allemagne et 8% pour la France. En effet, d’après une étude de l’organisation patronale Confindustria Moda, le secteur a perdu 29 Milliards d’euros de chiffre d’affaires en Italie, sur les neufs premiers mois de l’année 2020. D’autres évènements ont bel et bien eu lieu en présence des convives. Cependant, ils ont dû se faire dans des lieux atypiques, plus appropriés pour respecter les exigences de cette situation inédite. Le défile printemps-été 2021 de Céline par exemple s’est tenu à huis clos au stade Albert II à Monaco. Ces changements ont impacté les dynamiques d’achat étant donné que dans la mode de luxe il y a beaucoup d’achats qui se font après les évènements. Les maisons ne sont pas face à des acheteurs en B to B.

L’impact de la crise en quelques chiffres

Le recul de l’activité, la mise à l’arrêt des usines, la fermeture des magasins et enfin les reports et annulations d’évènements ont porté un coup dur au secteur. Les maisons de luxe Françaises étant exportatrices à 90%, la perte de chiffre d’affaire pour l’année 2020 a été évaluée à 20%. Il faut noter que les marchés asiatiques représentent 50% des ventes de ces maisons. Le secteur craint aujourd’hui un « effet de cliquet ». C’est-à-dire que les consommateurs prennent des habitudes d’achat et que le marché ne revienne plus à ce qu’il était avant la crise. LVMH avec ses 75 maisons, prévoyait un recul des ventes de 10 à 20%. L’activité du groupe Kering a été soutenue par la marque Gucci, alors que la branche lunettes/joaillerie/horlogerie a enregistré un recul de vente de 25% en raison de l’arrêt du tourisme en Europe. Par surprise, les sacs de luxe ont connu une forte demande au premier semestre. Louis Vuitton a enregistré une hausse de 123% avec un prix moyen par sac de plus de 104%. Les millénials ont été identifiés comme étant les clients à l’origine de ce boom de vente. D’après le magazine InStyle, les millénials ont acheté plus de sac à main Hermès au cours du deuxième trimestre que n’importe quelle autre tranche d’âge. Ils sont les nouvelles cibles des maisons de luxe. Leur application favorite TikTok a à cet effet été utilisé pour la diffusion de certains défilés. Les jeunes privés de loisir dépensent leurs économies auprès des maisons de luxe. Certaines marques adoptent des stratégies commerciales de partenariat. Par exemple la maison Valentino noue des partenariats avec animal crossing.

La place de l’innovation en période post crise

Depuis le début de la crise, certains articles posent le postulat selon lequel le secteur de la mode du luxe devrait se réinventer. Il pourrait mener des stratégies commerciales, digitales et stratégiques en accord avec les demandes du marché, les besoins et réalités des nouveaux clients, et les contraintes environnementales auxquelles il doit se soumettre. Mais le secteur très centré sur l’humain peine à tirer parti de l’euphorie du digital et de la technologie. D’après Bruno Pavolvsky, Président des activités mode de Chanel, sans les rencontres, le métier n’a aucun sens. Il disait que l’humain, le travail de la main, les rencontres entre les créateurs et les artisans, doivent absolument perdurer. Toutefois, cela n’empêche pas qu’il y a une forte émergence de la technologie dans le domaine depuis une trentaine d’années. Situation qui s’est accentuée avec la crise actuelle et le recours au digitale, une autre forme d’expression de la créativité. Les créateurs avant-gardistes qui introduisent des innovations et des concepts particuliers dans leur art vont avoir l’opportunité de laisser court à leur imagination pour répondre aux besoins du marché en période post-covid. Quant aux géants du luxe, ils amorcent la digitalisation. Kering, Richemont et Alibaba ont décidé de soutenir la plateforme Britannique d’e-commerce Farfetch avec un investissement de 928 millions d’euros. En effet, cette plateforme d’e-commerce a enregistré un boom d’activité en 2020 alors qu’elle peinait à être rentable. Farfetch fit son entrée en bourse en 2018 en faisant confiance à la place des marketplaces à l’horizon 2025. Mais avec le coronavirus, la société a le vent en poupe. Avec ce partenariat, Kering, Richemont et Alibaba ont pour ambition de conserver leur notoriété dans le monde de la mode du luxe et de l’accroitre en Chine. Il faut également souligner les coopérations, avec le monde de la culture en général, qu’a généré cette crise. En effet, la fashion week a fait appel à des cinéastes pour réaliser des évènements en ligne sensationnels. C’était le cas du cinéaste Matteo Garrone qui a travaillé pour Dior.

La crise a également eu un impact sur les rapports aux choses et la consommation. Il va falloir délaisser les tendances pour se concentrer sur les créations intertemporelles. De plus, elle renforce les enjeux écologiques du secteur. Les grandes puissances du luxe pourraient se retrouver très vite menacé par des nouveaux entrants qui font mieux avec peu et d’introduire des disruptions dans le secteur. Un secteur qui se réinvente engendre des opportunités qui peuvent être exploitées par des acteurs qui ont du potentiel et une vision. Les évènements n’impliquent pas que les créateurs et leurs créations mais également tous les métiers autour. De ce fait, les métiers de l’art, de la culture et les entreprises du digital devraient s’intéresser aux changements qui s’opèrent dans le monde de la mode de luxe, surtout en ces périodes post-covid.

Face à un contexte incertain, la nécessité de mettre en place une stratégie

Enfin, face à ces nouveaux enjeux et à l’instabilité que connaît le secteur de la mode de luxe, comme les crises financières ou de la Covid-19, l’intelligence économique est une notion essentielle à inclure dans le processus de réflexion des entreprises. Même si la France reste leader dans ce domaine d’activité, les concurrents sont nombreux tels que la Russie, l’Inde ou la Chine qui souhaitent offrir à leurs clients, de plus en plus fortunés, des produits créés dans leur propre pays.

L’importance de la veille

La création des services de veille au sein des structures n’est plus vue comme une option mais bien comme une nécessité. Elle permet ainsi de surveiller la concurrence, détecter les sources de contrefaçon ou bien repérer les pays permettant la mise en place de brevets, marques ou dessins et modèles, voire même de droits d’auteur. La veille intervient aussi dans le processus de production afin d’élaborer de nouveaux produits (nouvelle collection, style, tendances), nouvelles techniques (couture, pliage…), ou technologies (impression 3D, défilé virtuel, essayage à distance). Enfin, celle-ci permet de surveiller la réputation des entreprises, les réseaux sociaux prenant une importance majeure aujourd’hui. Les maisons de luxe s’appuient sur des valeurs et une qualité reconnue par tous. Toutefois, les créateurs peuvent parfois être au cœur de conflits, il est donc important de valoriser cette image auprès de l’extérieur.

Dans la société LVMH, le travail de veille est très important car il permet d’actualiser régulièrement les connaissances que possède l’entreprise en matière scientifique : utilisation de certaines substances, reformulation de produits, nouvelles utilisations de certaines substances mais aussi réglementation : droit international, normes, contraintes, sécurité ou traçabilité des produits.

Savoir analyser pour mettre en application

Ensuite, le traitement et l’analyse des données recueillies grâce à la veille permettent de mieux cibler la clientèle, d’en toucher une nouvelle ou de s’adapter rapidement aux nouvelles attentes ou tendances. Grâce à l’ère du numérique, on constate ces dernières années que la clientèle est mieux informée donc plus exigeante. Le haut de gamme doit se montrer à la hauteur de ces attentes.

Pour cela, la mode doit se présenter sur de nouveaux supports et proposer des expériences marquantes. Les défilés sont des occasions parfaites pour attirer et se démarquer. De plus, mettre en place une stratégie d’intelligence économique permet de préserver les savoir-faire des grandes maisons de luxe et de garantir ces atouts, gage de qualité. Elle permet aussi d’innover en permanence.

Les créateurs doivent constamment avoir de nouvelles idées et créations pour garantir de nouvelles collections innovantes. Ils créent la mode de demain et donc ne doivent cesser d’avoir une longueur d’avance. La stratégie d’intelligence économique permet cette préparation et cette anticipation. Enfin, elle permet de s’adapter aux tendances de la société. Aujourd’hui, le consommateur se veut plus responsable et acteur de son monde. Le secteur de la mode se convertit donc peu à peu à l’éco-responsabilité. En effet, face à cette industrie polluante, les enseignes doivent élaborer de nouvelles stratégies pour attirer les nouveaux clients sensibles à ces nouvelles préoccupations. On valorise donc le recyclage, des tissus bio ou éco-responsables, valorisant le travailleur en le rémunérant à sa juste valeur.

Toute la chaîne de production est remaniée pour garantir la transparence envers les consommateurs. L’intelligence économique permet de mettre en place ces stratégies, de tracer les produits, de répondre aux attentes des consommateurs en répondant à leurs besoins et de valoriser l’image de la mode du luxe.

Pour conclure, le secteur de la mode représente aujourd’hui un domaine majeur dans l’économie française et mondiale, notamment en raison de la multitude d’acteurs qui composent la chaîne et qui en dépendent. Toutefois, la crise de la covid-19 est venue bouleverser les habitudes en instaurant de nouvelles pratiques : le développement des entreprises sur internet, l’augmentation des achats en ligne, les défilés virtuels et le déploiement de la réalité virtuelle. Même si les problématiques ne sont pas évidentes car lors de l’achat, le client souhaite voir les produits, les toucher et les essayer, le numérique doit relever ces enjeux pour réduire au maximum les contraintes imposées et permettre aux clients de s’approprier le produit. Quel sera donc l’avenir du secteur de la mode de luxe et va-t-on s’approprier les nouvelles pratiques liées au numérique ? Dans tous les cas, il sera difficile de convertir la filière à 100% au numérique en raison de l’importance qu’accorde le consommateur à toucher et essayer le produit. Pourtant, cette expérience a permis de déployer de nouvelles technologies, pratiques et de nouveaux outils qui ont rapidement modernisé le secteur. Dans les années à venir, ces habitudes vont probablement continuer de se développer pour toucher de nouveaux clients, qui jusque-là, n’étaient pas ou peu inclus dans le système et créer de nouvelles manières de vendre. De plus, en raison de la demande croissante des consommateurs, davantage de pratiques et de produits éco-responsables pourraient voir le jour. Le domaine de la mode de luxe est donc depuis ces dernières années en pleine mutation, la pandémie a toutefois permis d’accélérer cette modernisation. Ces prochaines années pourraient donc annoncer l’essor dans la mode de nouvelles technologies plus adaptées à ces changements.

Par Colette Armandine AHAMA et Aude LEMONNIER, promotion 2020-2021 du M2 IESCI

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Impact de la crise Covid sur le secteur de la restauration : analyse des sociétés Flunch et Five Guys https://master-iesc-angers.com/impact-de-la-crise-covid-sur-le-secteur-de-la-restauration-analyse-des-societes-flunch-et-five-guys/ Thu, 10 Jun 2021 10:19:56 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3468 Flunch est une société par actions simplifiée créée le 4 juin 1981, chaîne de restauration en libre-service française, exploitée par le groupe Agapes, présente aujourd’hui en France, en Espagne, en Pologne et en Italie. Five Guys, une compagnie à responsabilité… Continuer la lecture

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Flunch est une société par actions simplifiée créée le 4 juin 1981, chaîne de restauration en libre-service française, exploitée par le groupe Agapes, présente aujourd’hui en France, en Espagne, en Pologne et en Italie. Five Guys, une compagnie à responsabilité limitée créée en 1986, chaîne américaine de restauration rapide haut de gamme. Elle est spécialisée dans les hamburgers, les hot-dogs et les frites, et ne cesse d’accroître son développement partout à travers le monde. Le but de cette analyse n’est pas seulement de relater la situation actuelle des deux entreprises, mais bel et bien de faire état de leur situation et de leurs stratégies envisagées avant et après le coronavirus, et de faire une comparaison entre ces enseignes, dans le but de visualiser sur le court et le long terme, le meilleur modèle économique envisageable pour un potentiel investisseur.

« En première ligne, les chaines de restauration. Deux enseignes sur trois pourraient ne pas survivre selon un cabinet spécialisé. »

Viktor Frédéric, journaliste pour France 3, 24 juillet 2020

Si la plupart des secteurs sont aujourd’hui impactés par cette crise du coronavirus, le secteur de la restauration s’avère être un secteur des plus touchés. En effet, selon le cabinet Gira Conseil, 2 enseignes sur 3 pourraient ne pas survivre à cette crise. Ce sont tous les types de restaurants qui sont touchés. Qu’il s’agisse des chaînes de restaurations ou des étoilés, aucun n’est épargné. 15% des restaurants pourraient d’ici la fin de l’année 2020, ne pas rouvrir leurs portes. La crise du coronavirus aurait en 2020, engendré une baisse de 50 à 55% de chiffre d’affaires pour le secteur de la restauration par rapport à 2019, soit une baisse d’environ 30 milliards d’euros. Si l’on regarde l’ensemble du secteur de la restauration et de l’hôtellerie, 2 établissements sur 5 envisageraient de se séparer d’une partie de leurs salariés, supposant ainsi un nombre total de 200 000 emplois supprimés d’ici la fin de l’année 2020.

Ayant connaissance de l’état et des stratégies envisagées par les deux enseignes, quel serait pour un investisseur le modèle économique le plus approprié dans lequel il pourrait investir au mieux son capital financier ?

Les ingrédients pour une recette à moitié réussie

Flunch, l’arrivée de Thierry Bart peut changer la donne

Si Flunch a su faire ses preuves auprès du public français dès les années 70, la première chaîne de restauration en libre-service, inspirée du modèle de restauration en libre-service américain, est aujourd’hui victime de l’échec de son modèle économique : la cafétéria. Le premier restaurant créé en 1971 à Englos dans le Nord, avait pour but de conserver l’ascendante présence de la clientèle de la galerie de son centre commercial. L’enseigne a su rapidement s’imprégner de ce modèle économique de cafétéria et a vu son nombre de restaurants augmenter. En effet, le concept de cafétéria a été au départ si bien mené par l’enseigne nordiste, grâce à son concept de repas à bas prix, qu’elle s’est rapidement imposée avec ses 255 restaurants et 8500 collaborateurs, comme l’un des leaders du marché de la restaurant française. Cependant, si en 2012, son chiffre d’affaires était de 511 576 500 €, l’enseigne a été victime au fil des années de l’échec de son système économique, ayant pour conséquence la perte considérable de sa clientèle et la fermeture de certains de ces restaurants déficitaires. Entre 2014 et 2019, Flunch a perdu 13 % de son chiffre d’affaires et 10 % de ces clients. L’enseigne diminue chaque année le montant de ses investissements, soit plus de 23 % en trois ans ainsi que ses dépenses publicitaires de plus de 30 %. La crise du coronavirus a donc engendré une perte totale de 5 millions d’euros d’économie pour les salariés, à la suite de l’annonce d’une chute de 47,71 % de la valeur du FCP Agap Action. En 2020, d’après de récentes sources d’informations, le chiffre d’affaires de l’enseigne aurait plongé de près de 212 millions d’euros et l’enseigne aurait demandée à être placée sous procédure de sauvegarde.

La société est aujourd’hui présidée par le groupe AGAPES, et dirigée par Thierry Bart. Un homme qui, grâce à son expérience de direction générale de 30 ans, a de quoi faire pencher la balance pour l’enseigne française. Anciennement directeur chez le groupe « Elior Group », une entreprise multinationale française spécialisée dans la restauration collective et les services au chiffre d’affaires de 4.9 milliards d’euros en 2019, il est depuis octobre 2019, directeur général délégué du groupe « Agapes Restauration », un groupe de l’Association familiale Mulliez, créé en 1971, engagée dans le domaine de l’alimentation.

« Bien avant la crise sanitaire, l’entreprise n’était déjà pas en grande forme, on a déjà vécu plusieurs plans sociaux. On en était conscients, on était lucides. » 

Grégory Dubois, délégué syndical central CFDT, 27 janvier 2021

Bien avant que le coronavirus n’apparaisse, la société luttait déjà pour sa survie. Depuis plusieurs années déjà, la filiale française subit l’ascension des autres chaînes de restaurations telles que McDonald’s, Burger King, Five Guys dont le business model diffère de Flunch. Cette crise du coronavirus n’a donc fait qu’accélérer son érosion. Une érosion qui ne date visiblement pas d’aujourd’hui car en 2018 déjà, après avoir évoqué l’idée d’un plan de renouvellement fondé sur la tentative de différenciation (épicerie, cave à vin, rôtisserie), le développement d’une offre de produits supérieurs bio, la digitalisation et la mise à disposition de services associés (ventes à emporter, réservations en ligne), le concept ne trouve guère de clients et n’arrive pas à évoluer, ce qui le mène tout droit à un échec cuisant. En revanche, Flunch a tout de même tiré profit de ce concept en conservant leur système de board digital, leurs bippers en grillade et leur carte MyFlunch.

En 2020, avec l’arrivée du nouveau directeur Thierry Bart, et de son nouveau plan “cap à 5 ans”, l’objectif est de refaire à neuf sa marque en se positionnant non plus comme étant une cafétéria mais comme un Food Hall. Un plan regroupant 6 grands axes, favorisant tout d’abord les relations avec les producteurs locaux, mettant l’accent sur des prix plus raisonnables, sur son activité et sur l’expérience des consommateurs, leur proposant ainsi de nouveaux moyens de commander. Ce plan envisage également l’idée de s’implanter davantage autour des sites les plus convoités par la clientèle (autoroutes notamment). L’arrivée du nouveau dirigeant pourra-t-elle changer la donne pour Flunch ? Pourra-elle mettre à profit l’ensemble des plans prévus ? En tout cas aujourd’hui, à défaut de persévérer sur leur tentative de renouvellement de stratégie en 2018, l’entreprise française semble déterminée à innover et à revoir le jour, malgré un fort ralentissement causé par cette crise sanitaire, et malgré en 2021, une procédure qui place l’enseigne sous sauvegarde, ce qui ne fait que compliquer davantage leurs plans.

La Covid-19, premier vrai obstacle pour Five Guys

Five Guys, est une chaîne américaine de restauration rapide haut de gamme, qui a ouvert dès 1986 son premier restaurant à Arlington en Virginie. Cette fameuse enseigne a été inventée par la famille Murrell et plus précisément par les 5 enfants, qui avaient le choix entre étudier ou monter une affaire. Le choix fut évident pour les enfants Murrell, qui passèrent ainsi de nombreuses années à perfectionner leur concept de restauration. Un concept, qui a si bien fonctionné, qu’en moins de 18 mois dans les années 2003, conscients de l’immense succès de leur restaurant auprès des américains, s’empressent déjà d’offrir 300 franchises à travers le pays. Cette franchisation de masse fait alors parler d’elle partout aux Etats-Unis, dans des nouvelles telles que Nation’s Restaurant News, Restaurant Business Magazine ou encore Franchise Times, ce qui a davantage fait exploser l’enseigne américaine. Le restaurant qui n’était à l’époque que très petit, a pris un envol fulgurant et a créé un tel engouement, qu’il est devenu l’un des restaurants les plus aimés de Washington DC. Il a même été gratifié du « meilleur burger de la région métropolitaine ». 30 ans après, ce sont plus de 1500 restaurants qui sont ouverts, et 1500 autres qui n’attendent qu’à être convoités par leur clientèle.

L’enseigne est en France, dirigée par John Eckbert, un homme particulièrement impliqué dans le processus de développement de Five Guys car en 2010, il s’associe avec Sir Charles Dunstone et Roger Taylor pour bâtir une nouvelle plateforme de croissance dans l’industrie alimentaire et des boissons. Ensemble, ils ont identifié Five Guys comme étant la première offre de burger haut de gamme aux États-Unis et ont réussi à convaincre la famille Murrell de créer une coentreprise, faisant ainsi venir Five Guys au Royaume-Uni. Five Guys a été lancé à Covent Garden le 4 juillet 2013. La coentreprise a ouvert plus de 140 magasins en 6 ans, avec des fleurons européens ouverts et commercialisés à Paris, Madrid et Francfort. On voit alors, que Five Guys est une enseigne qui a su rapidement attirer l’œil de grands investisseurs, a vu son nombre de magasins augmenter en peu de temps et a su convaincre son public. L’entreprise détient par ailleurs des résultats financiers conséquents. On estime son chiffre d’affaires en 2016, date à laquelle l’enseigne américaine s’implante en France, aux alentours de 750 millions d’euros. Concernant le chiffre d’affaires en France, on voit également qu’il ne cesse d’augmenter depuis 2016. [Voir graphiques ci-dessous].

 

Source :  https://www.pappers.fr/entreprise/five-guys-france-817518244

Si le chiffre d’affaires est positif depuis 2016, le résultat ne l’est cependant pas. En effet, le résultat net de Five Guys depuis 2016, s’apparente à un déficit plutôt qu’à un bénéfice. On voit donc qu’il n’y a pas nécessairement de corrélation entre chiffre d’affaires et résultat net.

 

Source :  https://www.pappers.fr/entreprise/five-guys-france-817518244

Comme le montre ce compte de résultat de la société Flunch ci-dessous, des années 2006 jusqu’aux années 2012 (les données récentes n’étant pas disponibles), le chiffre d’affaires en 2006 était de 414 952 000€ avec un résultat net à 17 408 000€. Cependant, on remarque que plus on avance dans le temps, en 2008, le chiffre d’affaires étant de 429 488 000€, et plus le résultat net baisse, 12 256 000€. Il en est de même pour 2012, avec 511 576 000€ de chiffre d’affaires et un résultat net de 7 029 000€.

 Même constat donc que pour Five Guys. Le chiffre d’affaires peut augmenter d’années en années, mais le résultat peut lui chuter bien au contraire. On voit donc que le bénéfice de Flunch est au même titre que son chiffre d’affaires (graphique 5) en chute libre, et ce depuis de nombreuses années déjà, ce n’est pas récent.

 

Source :  https://www.bilansgratuits.fr/entreprise/bilans/32077251000022.htm

« Ouvrir une dizaine de restaurants par an. On ne nous a pas demandé d’en faire une centaine mais nous accélérons. »

Directeur général de Five Guys France, Vincent Lemaître, 25 février 2019

Soucieux de leur présence aux yeux du monde, la société américaine prévoyait avant même que la crise n’apparaisse, de développer leur stratégie d’expansion à travers le globe. En effet, la société familiale qui s’est implantée en France depuis près de 5 ans, avait comme objectif d’ajouter une dizaine de restaurants par an, en plus de ces 19 actuellement installés en France.

Cependant, cette crise du coronavirus a bel et bien ralenti l’expansion souhaitée de Five Guys, en mettant une pression sur les résultats de l’enseigne, qui peine à comptabiliser les effets et les pertes engendrées par le coronavirus.

« On March 25, we furloughed 50 percent of our corporate staff and reduced compensation for all remaining employees. Owners and senior executives have not received compensation since March 11. […] In addition, we promise to do all that we can to keep our employees, customers and the community safe – all while delivering you the best dining experience we can. »

The Murrell Family Founders, Five Guys, 8 mai 2020

Cet extrait provient d’un communiqué des fondateurs en personnes, l’entreprise américaine a été contrainte de mettre en place des mesures drastiques pour faire face à cette crise. C’est pour cette raison que le 25 mars dernier, la société américaine a licencié 50 % de son personnel et réduit la rémunération de tous les autres employés. Les propriétaires et les cadres supérieurs n’ont pas reçu de rémunération depuis le 11 mars. Les 5 frères promettent à travers leur communiqué, de faire tout leur possible pour assurer la sécurité de leurs employés, de leurs clients et de la communauté, tout en leur offrant la meilleure expérience culinaire possible.

Analyse et choix des ingrédients, la recette idéale

Flunch, vers une possible échappatoire

Après avoir tenté l’impossible en 2018 avec leur plan de renouvellement, Flunch revient en 2020 avec un nouveau directeur et un plan qui à première vue semble solide. Cependant à première vue, la situation actuelle de Flunch semble tout de même être la plus fragile par rapport à son opposant, Five Guys. En effet, Flunch bien avant que le coronavirus n’existe, semblait être dans une situation qui ne leur permettait plus de se confronter aux autres enseignes. Leur concept qui fonctionnait certes depuis les années 70 du fait du nombre croissant de centres commerciaux en France, n’attire guère de monde aujourd’hui. Le leader français des cafétérias avait donc pour seul objectif de prouver que son concept tenait encore la route, c’est du moins ce qu’ils ont tenté de faire en 2018. Ce modèle économique qui a longtemps été un atout majeur est devenu aujourd’hui sa plus grosse faiblesse. [Voir graphique ci-dessous]

 

Comme nous le montre ce graphique, le modèle économique de Flunch devient sa plus grande faiblesse. Cette faiblesse ne date cependant pas d’aujourd’hui, cette crise sanitaire n’a fait que remuer le couteau dans la plaie d’une entreprise déjà bien fragilisée, qui fermait déjà quelques-uns de ces restaurants, et qui par conséquent licenciait du personnel. Pour ce qui est de Five Guys, le nombre de licenciements n’est pas représentatif de son activité régulière hors crise. En effet cette crise sanitaire a mis à mal pendant une période, l’entreprise américaine qui a dû licencier son personnel. On voit donc que d’un côté, Five Guys a été directement impacté dans son activité à cause de la crise sanitaire, alors que Flunch bien avant que la crise sanitaire ne commence peinait déjà à faire surface.

Pour comprendre comment l’enseigne a perdu la plupart de sa clientèle il faut remonter à quelques années. Flunch dans ses débuts, accompagnait les clients dans les zones commerciales, mais le restaurant n’était pas ouvert le week-end, première limite. Au fil des années, la fréquence des personnes dans les centres commerciaux a diminué, victime de la fulgurante apparition du commerce en ligne, venant directement impacter le commerce physique. A noter aussi, qu’au regard du développement du domaine de la restauration en France, le concept de cafétéria a rapidement « pris un coup de vieux » et s’est vu perdre un nombre conséquent de clients qui souhaitaient vivre des expériences autres que celles leur rappelant le service parfois très basique de la cantine, à savoir des repas où les personnes, armés de leurs couverts, de leur plateau et de leur carte de cantine, allaient faire la queue pour choisir leur entrée, leur plat et leur dessert puis s’asseyaient à table, pour « déguster » leur repas dans des assiettes et des plateaux bas de gamme en plastique. Flunch est donc finalement devenu le choix par dépit des consommateurs, qui se sont vite tournés vers des nouveaux modèles de restauration qui marchent comme McDonald’s, Burger King ou encore Five Guys. Des restaurants qui, de par de leur originalité et leur fraîcheur sont venus enlacer les clients, friands de nouvelles expériences gustatives.

Récemment, avec l’arrivée de leur nouveau dirigeant Thierry Bart, les plans diffèrent et le cap à 5 ans relève notre attention. Mais est-il trop tard pour l’enseigne ? Aura-t-elle l’opportunité de se renouveler ? Il est aujourd’hui difficile pour une enseigne d’innover un tout nouveau concept car beaucoup existent déjà, ce qui laisse peu de choix aux nouveaux arrivants sur le marché. Bien que Flunch ne soit pas un nouvel arrivant, elle nécessite tout de même d’innover son modèle économique pour tenter de retrouver sa place sur le marché, et conquérir ou reconquérir ses clients. Nous ne doutons pas sur la capacité de l’enseigne à modifier son modèle économique si les moyens leurs étaient accordés, mais serait-ce suffisant pour récupérer une clientèle abandonnée depuis fort longtemps ?

« Les incertitudes sont encore nombreuses du fait des conséquences du Covid (crise économique, télétravail, arrêt du tourisme), aussi ce projet de redéploiement sera progressif et maîtrisé à travers des tests sur les restaurants afin d’évaluer les résultats et investissements nécessaires pour le généraliser. »

Thierry Bart, directeur de Flunch France, 30 septembre 2020

Ainsi, comme le montre Thierry Bart dans cet extrait, cette crise du coronavirus a stoppé net le développement de cette nouvelle stratégie envisagée, laissant alors place à un contexte d’incertitude du fait des lourdes conséquences du coronavirus, combinée à une impossibilité de projection à long terme et un cap à 5 ans qui pour l’instant, tombe totalement à l’eau à cause de cette procédure de sauvegarde.

Five Guys, défaitiste par les chiffres mais vainqueur par la digitalisation

Rares sont les personnes qui ne connaissent pas cette fameuse enseigne Five Guys, qui depuis quelques années déjà ne cesse d’augmenter son nombre de restaurants en France, et qui envisage encore d’en ouvrir d’autres. En effet, les 5 frères ont depuis le lancement de leur premier restaurant opté pour la qualité et pour la diversité de leurs produits, les projetant dans le haut du panier. L’enseigne a su rapidement attirer le grand public en France notamment et est aujourd’hui ancré dans l’histoire de la restauration rapide haut de gamme.

Mais d’où vient ce succès si rapide de l’enseigne ? Pourquoi un produit qui d’apparence est en moyenne plus cher que les autres enseignes de restauration rapide, fonctionne si bien ? Pour répondre à cela, plusieurs points peuvent être relevés. Five Guys qui n’était à l’origine qu’un projet familial, s’est rapidement transformé en une usine déployée partout à travers le globe. Cependant, c’est un restaurant qui de par son histoire et sa décoration intérieure assez modeste et simpliste, conserve une certaine ambiance familiale, une certaine impression de déguster chez soi des bons burgers frais fait maison. Ce n’est pas le clou du spectacle. En effet, si son succès est encore aujourd’hui naissant et grandissant, il en est de même pour son emplacement stratégique. A titre d’exemple, McDonald’s, un concurrent direct de Five Guys, détient dans le monde 35000 établissements. Five Guys, n’en détient que 1441. La différence est colossale. Five Guys a fait le choix à la différence de McDonald’s, de s’installer dans le centre-ville de grandes villes, comme Paris aux Champs-Elysées, qui est le plus grand magasin Five Guys au monde, avec un total de 1200 mètres carrés. C’est dorénavant le premier restaurant de la chaîne américaine en termes de fréquentation et de chiffre d’affaires.

Cependant, à la suite de la crise sanitaire, leurs plans d’expansion ont quelque peu été freinés, leur empêchant alors d’accroître leur expansion sur le marché de la restauration rapide haut de gamme. Bien que cette chaîne de restauration ait été elle aussi impactée par cette crise du coronavirus, étant une enseigne qui a d’ores et déjà su convaincre ses nombreux investisseurs et fidèles clients, elle saura retrouver le chemin qui mènera à sa réussite. Une hypothèse possiblement soutenue par l’ouverture de son nouveau restaurant à Strasbourg en 2020, ou celui au Havre en 2021. Cela montre que cette crise sanitaire ne les a pas abattus, ils souhaitent en effet adopter une posture offensive en ouvrant un nouveau restaurant dans cette difficile période de crise. Comme l’ont indiqué les fondateurs dans leur communiqué, l’enseigne a dû passer par des périodes de licenciements de masse, et des périodes où les cadres n’étaient pas ou peu payés.

Le bilan économique de Five Guys a bel et bien été impacté par cette crise, mais a en contrepartie été l’heureux bénéficiaire du système de livraisons et de click-and-collect pour ses clients. En effet, dans cette période du coronavirus, si les restaurants ne sont pour autant pas ouverts, la digitalisation de la restauration et l’opportunité pour les clients de consommer chez eux bénéficie aux grandes chaines de restauration qui continuent d’alimenter leur chiffre d’affaires. A l’inverse de son opposant Flunch qui peine à faire surface et à tirer parti de cette digitalisation, Five Guys semble avoir de meilleures armes pour faire face à cette crise sanitaire qui devrait se poursuivre jusqu’en 2021.

Les ingrédients pour une bonne recette, une balance plutôt équilibrée

 

Comme nous pouvons le voir sur le graphique [voir ci-dessus], le chiffre d’affaires de Flunch est en chute libre depuis 2018, alors que celui de Five Guys ne cesse d’augmenter depuis son arrivée en France 2016. Le modèle économique défaillant de Flunch, et la crise sanitaire ne cessent de faire du mal à l’enseigne française.

Bien que l’avenir des deux enseignes soit incertain, nulle ne peut à ce jour, déclarer Flunch comme étant une enseigne totalement perdue et sans avenir malgré le fait qu’elle soit désormais placée sous procédure de sauvegarde, ou Five Guys comme étant l’enseigne intouchable. Que ce serait-il passé si, après cette crise du coronavirus et après cette arrivée de Thierry Bart, Flunch serait enfin parvenu à redonner du fil à retordre aux autres enseignes ? Après son échec en 2018, l’entreprise a aujourd’hui plus de recul quant aux projets à faire ou à ne pas développer, tout comme ce qu’il est actuellement conseillé de conserver ou de modifier comme son concept de cafétéria. L’enseigne avait donc tout pour bien repartir. A l’inverse, que se passerait-il si après cette crise du coronavirus, Five Guys n’arrivait plus à joindre les deux bouts et finissait par périr ?

 

Alors que la chaine de restauration Courtepaille dirigée par Guillaume Pautonnier, a pour cause du coronavirus, déposé le bilan en juillet 2020, après avoir été placé en redressement judiciaire, puis rachetée par son concurrent direct Buffalo Grill le 25 septembre dernier, Flunch demande à son tour à être placée sous procédure de sauvegarde, doit céder une soixante d’établissements et remettre en cause un total de 1300 emplois. Nous avions donc à travers une première analyse du sujet, émis l’idée que Flunch pouvait sombrer davantage après son dernier échec en date en 2018, quant à leur plan de renouvellement. Flunch devait impérativement ne pas refaire les mêmes erreurs, investir davantage dans la digitalisation et la mise en place de services associés, car certains concurrents comme Five Guys, bénéficient d’ores et déjà de cet avantage. La stratégie préalablement annoncée par Flunch, comme l’avait décidé le nouveau dirigeant Thierry Bart, était celle de changer de modèle économique. Malheureusement cette crise sanitaire aura eu raison d’eux. Leur concept de cafétéria ne fonctionnant plus, leur obligation aurait été celle d’innover et d’intégrer le marché du « Food Hall », pour tenter de contourner au mieux cette crise sanitaire. [Voir graphique 4]

 

La crise sanitaire a bel et bien ralenti un des souhaits de la part de l’entreprise familiale Five Guys, d’ouvrir 10 restaurants par an, qui se contente donc d’attendre de reprendre une activité normale. Pour ce qui est de Flunch, son objectif de mettre en place le plan Cap 5 ans et de passer au Food Hall tombe totalement à l’eau, l’enseigne doit aujourd’hui faire face à trois nouveaux obstacles, une possible fermeture de ses magasins, le licenciement d’un grand nombre de salariés (graphique 4), et doit sortir de cette procédure de sauvegarde.

« La procédure de sauvegarde « devrait permettre à l’entreprise de se donner du temps en termes de trésorerie en attendant la reprise de l’activité commerciale dont la date reste toujours incertaine, et de poursuivre son plan de transformation […] On ne s’attendait pas à un plan d’une telle ampleur […] bien avant la crise sanitaire, l’entreprise n’était déjà pas en grande forme, on a déjà vécu plusieurs plans sociaux. On en était conscients, on était lucides. » » Enseigne Flunch / Grégory Dubois, délégué syndical central CFDT, 27 janvier 2021

Pour ce qui est de Five Guys, nous n’avons pas spécialement de stratégies à proposer, outre le fait de continuer leur développement à l’international, tout en conservant leur aspect familial, la qualité de leur offre et de leurs produits, et l’utilisation de la digitalisation de leurs services, qui pendant cette période de coronavirus semble être le point culminant de l’enseigne. Cependant, il ne faut pour autant pas se reposer sur ses lauriers, car il faudra après la crise du coronavirus, rebondir et poursuivre les efforts de réouverture et d’expansion préalablement engagés avant la crise sanitaire.

Par Louis-Maël Jouanno et Antonin Gatard, promotion 2020-2021 du M2 IESCI

Bibliographie

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  • Graphique 1 :

 

 

 

  • Graphique 2 :

 

 

 

 

 

  • Graphique 5 (informations relatives au chiffre d’affaires) :

 

 

 

 

 

 

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L’impact de la pandémie Covid-19 sur le secteur bancaire français https://master-iesc-angers.com/limpact-de-la-pandemie-covid-19-sur-le-secteur-bancaire-francais/ Fri, 26 Feb 2021 10:13:06 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3367 Les banques ont un rôle crucial dans le système économique. En exerçant le rôle d’intermédiaire entre les détenteurs et les apporteurs de capitaux, elles permettent le financement l’économie, maintenir les taux et combler les déficits budgétaires. De par leur rôle… Continuer la lecture

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Les banques ont un rôle crucial dans le système économique. En exerçant le rôle d’intermédiaire entre les détenteurs et les apporteurs de capitaux, elles permettent le financement l’économie, maintenir les taux et combler les déficits budgétaires.

De par leur rôle dans la responsabilité sociétale, et  en tant qu’instrument clé du maintien du système économique, la crise de la Covid-19 les a replacées sur le devant de la scène.

Mais en tant qu’entreprise de droits privés, elles ne sont pas non plus épargnées par un environnement économique concurrentiel féroce depuis une trentaine d’années, les obligeant ainsi à revoir leur stratégie.   Cette concurrence, qui était déjà significative entre banques dites « traditionnelles », est exacerbée avec le phénomène des nouveaux entrants tels que les grands commerçants, les FinTech, les « néobanques »[1] (Orange banque, N26 ou encore Révolut), les opérateurs de télécommunication ou encore les géants d’internet.

De ce fait, pour préserver leurs avantages concurrentiels, les banques dites « traditionnelles » ne peuvent donc plus se contenter de leur seul univers, elles doivent aussi innover en permanence et se battre sur le terrain des innovations, poussées par les technologies numériques.

L’enjeu pour les banques aujourd’hui sera de trouver cet équilibre ténu entre leur histoire et raison d’être, avec le monde financier “technologisé” qui est celui d’aujourd’hui et qui sera, encore davantage, celui de demain.

Une mutation déjà en marche

Les banques françaises dans la course de la taille critique

Dès les années 1995, les banques avaient déjà commencé des stratégies de croissance externe pour atteindre la taille critique et préserver leurs marges, trouver des nouvelles sources de revenu et soutenir leur produit net bancaire (PNB).

Quelques exemples parmi les fusions et acquisitions importantes :

  • Rachat du CIC par la Banque fédérative Crédit mutuel en 1998,
  • Rachat de Paribas par BNP en 2000,
  • Rachat du Crédit Lyonnais, devenu LCL, par le Crédit Agricole en 2003,
  • Rapprochement de la Caisse d’épargne et de la Banque Populaire pour constituer la BPCE en 2009.

Dernièrement, décembre 2020, la Société générale et le Crédit du Nord ont été jusqu’à annoncer la fusion de leurs réseaux de détail, faisant disparaitre une des deux marques. Cette fusion provoquera la fermeture de 600 agences d’ici fin 2024, permettant ainsi des synergies et préservant le résultat.

Depuis les années 2010, le secteur bancaire français est dominé par cinq groupes : BNP Paribas, BPCE (Banques Populaires-Caisses d’Épargne), Crédit Agricole, Crédit Mutuel et Société Générale, qui représentent environ 80% des crédits distribués et 90% des dépôts collectés.

Avec une concentration très avancée, le secteur bancaire français reste oligopolistique.

Une politique de diversification des produits

Parallèlement à ce mouvement de concentration, les banques françaises ont aussi diversifié leurs services : conquête des marchés « proches » comme les assurances, avec la notion de « bancassurance », l’immobilier, les services et les banques en ligne (Boursorama, filiale de la Société Générale), mais aussi, en développant de plus en plus de produits ou services hors domaine bancaire, comme les services à la personne à domicile, les offres d’abonnement de téléphonie mobile ou encore les systèmes de protection du domicile.

Le Crédit Mutuel-CIC, par exemple, a déployé une offre de location de vélo avec assistance électrique à Paris, Lyon et Strasbourg. A la Caisse d’Épargne Midi-Pyrénées, les équipes envisagent un avenir dans la domotique.

Mais les banques ne s’arrêtent pas là. Certaines exploitent déjà le marché des partenariats avec les grandes enseignes. BNPP, par exemple,  propose des invitations à des événements sportifs ou culturels et des réductions dans diverses grandes enseignes à ses clients Priority. La Banque Postale communique sur les avantages Sephora, Interflora ou encore Alinéa.

Le secteur bancaire entre dans l’ère du numérique

Cette transformation du secteur bancaire ne peut être réalisable sans une ambition numérique. En effet, le virage du numérique est primordial, mais reste extrêmement délicat. Il regroupe plusieurs catégories à la fois. Les banques doivent tenir compte non seulement des innovations technologiques et des évolutions des produits, mais aussi de nouveaux modèles économiques et de nouveaux concurrents.

Ces transformations obligent donc une réorganisation en interne sur différentes thématiques en même temps. Par exemple, la gestion des ressources humaines, face aux transformations que connaissent les banques, est, par définition, un enjeu transversal. Les acteurs sont en effet confrontés à un double défi : trouver les compétences nécessaires pour se transformer et gérer l’obsolescence de certaines compétences, d’un côté, et, de l’autre, réussir à trouver l’équilibre entre digital et la possibilité d’interagir avec des conseillers.

Si, dès les années 2010, les banques ont bien pris conscience de ce nouveau virage, les projets digitaux restent toujours des projets très lourds et toujours « en-cours ».  Même si certaines banques sont plus avancées que d’autres, les transformations du type Core Système (qui touche à leurs activités banque de détail) restent problématique.

Ce que la crise Covid a changé

« Il y a eu un moment de stupeur au mois de mars, on était peu nombreux à s’attendre à une décision aussi radicale », affirme un cadre dirigeant d’une banque de Maine et Loire, lors de son interview du 8 janvier 2021.

Les mesures sanitaires prises par le gouvernement, conduisant au confinement de l’ensemble de la population, ont bouleversé les interactions des différents acteurs économiques. Pour préserver la continuité de l’activité toutes les banques ont dû activer des plans d’urgence.

La nécessité d’adopter le digital, provoquée par la crise sanitaire, a modifié très rapidement les schémas organisationnels internes et la relation clients-fournisseurs. D’une relation directe, parfois hybride avec un mélange de numérique et de contacts réels, les banques se sont retrouvées à exercer un lien 100% digital.

Accélération de la transformation du système d’information et de l’organisation

Les infrastructures informatiques ont été mises à rude épreuve. Le système d’information bancaire, qui était initialement conçu comme une forteresse quasi hermétique et inviolable, doit s’ouvrir dans la précipitation. Par exemple, la Société Générale a dû déployer en 15 jours l’accès à distance de 50 000 collaborateurs. Les transactions à distance ont été décuplées. Le télétravail a dû être généralisé. 90% des salariés hors agences ont pu être placés en télétravail pour certaines banques. Des activités jusqu’ici inéligibles au télétravail, telles que les opérations de paiements ou de trading se sont retrouvées en quelques jours réalisées à distance par des collaborateurs équipés en urgence. Les processus ont dû être adaptés. Il y a eu des simplifications des procédures opérationnelles, des recours intensifs aux outils digitaux pour faire face à l’afflux des demandes de prêts garantis par l’Etat (PGE), des recours à la robotisation des traitements d’information, ou encore des workflows d’approbation de signatures digitales.

Accélération de la digitalisation du parcours clients

Du côté de la relation clientèle, les processus ont aussi été bouleversés. Les clients ont dû s’adapter à l’utilisation des canaux d’accès digitaux. Même si le digital est ancré dans les usages des Français, il n’a progressé que lentement : seulement 14% via mobile selon la dernière étude Deloitte. Avec ses 545 points de vente par million d’habitants en France (chiffre 2020), l’agence bancaire est jusqu’à présent le canal majeur pour toutes les opérations, hors consultation de soldes bancaires et virements (moins de 20% en agence). Or, pendant la crise sanitaire, le taux d’utilisation des canaux d’accès à distance a parfois été multiplié par 2 pour certains établissements. (Source : revue bancaire)

Les conséquences dans le secteur bancaire

Les mesures bâloises à l’épreuve

Si les banques ne sont pas à l’origine de la crise sanitaire, elles pourraient, en revanche, être une partie de la solution, en étant utilisées comme instruments pour favoriser la reprise économique. Les banques vont à la fois permettre d’éviter les faillites des entreprises et jouer leur rôle de financeur de l’économie réelle.

En effet, l’impact économique de la crise sanitaire pourrait laisser craindre une généralisation des défauts de paiements. A date, les mesures prises par la Banque Centrale Européenne (BCE) et autres instances de régulation rendent cela peu probable. En revanche, le risque d’insolvabilité des banques peut être réel. Après la crise financière de 2008, les accords Bâle III ont permis de relever les niveaux de fonds propres de 8 à 10,5%. La crise de la covid 19 sera un révélateur de l’efficacité des mesures bâloises post 2008. Les banques françaises sont sans aucun doute plus résilientes et robustes qu’en 2008, mais si la pandémie perdure, une dégradation durable de l’économie, ajoutée à un contexte de taux bas depuis quelques années, pourraient entrainer de fait les banques dans une spirale déficitaire.

« Pendant très longtemps, nous avons eu un système de banque assuranciel très performante économiquement. On arrivait dans ce système à répondre dans de bonnes conditions aux exigences baloises, que ça soit en termes de fonds propres ou en termes de liquidités. Mais dans le futur, il y aura moins de marge de manœuvre pour répondre à ces exigences. La question de la baisse de la rentabilité du secteur financier pendant une période plus ou moins longue n’est pas à exclure. Le contexte de taux bas a beaucoup impacté la rentabilité des banques. », explique un dirigeant d’une banque de Maine et Loire, lors de son interview du 11 janvier 2021.

Un nouveau modèle économique, organisationnel et technologique

La crise sanitaire a été un accélérateur de la transformation numérique. De nombreux freins psychologiques ont été levés. L’expérience de la crise a prouvé que les clients et les collaborateurs étaient prêts à l’accepter.

Cette digitalisation accélérée par nécessité a provoqué :

  • une accélération dans les nouvelles habitudes des modes de travail
  • une accélération dans les modifications de processus
  • une accélération dans un nouveau mode d’interaction client

De nouvelles habitudes des modes de travail à créer

Si la crise sanitaire a été un formidable accélérateur, elle a aussi révélé les faiblesses de la précipitation.

Sur le plan organisationnel, les salariés ayant fait du télétravail, sont peu enclins à revenir à une organisation présentielle totale après le premier confinement : pertes de temps dans les transports ou encore angoisses des collègues ensemble pendant des réunions. La révision du cadre légal du travail pour flexibiliser les conditions de mobilisation des salariés doit donc être accélérée.

En revanche, il y a eu un renversement de tendance après le deuxième confinement, où les collaborateurs ont demandé à revenir en présentiel malgré les consignes du gouvernement en faveur du télétravail.

Néanmoins, il y a eu malgré tout une accélération du télétravail, qui a permis de révéler des difficultés managériales, du maintien de la motivation des équipes, car les collaborateurs et managers n’étaient ni préparés, ni formés au télétravail.

« Pendant la crise, nous avons pris conscience que nous ne pouvions pas faire tant de choses que ça à distance. La crise sanitaire nous a permis de comprendre ce qu’on pouvait offrir ou pas, ce qu’il nous manquait, et pour demain ce qu’il faut que nous fassions. Par exemple, après la crise, les conseillers ont demandé à revenir en agence. Beaucoup ont réalisé que toute la semaine en télétravail n’était pas facile. Nous avons investi dans la formation pour les aider.», a expliqué un cadre dirigeant d’une banque. 

D’un point de vue organisationnel, les banques qui étaient sur un modèle reposant sur le lien de proximité, doivent aujourd’hui trouver un juste équilibre dans cette nouvelle relation « digitale-physique ».

Une nouvelle relation clients à imaginer

Du côté de la relation client, la crise de la covid-19 a donc changé le paradigme pour un nouveau mode relationnel à la fois 100% digital et 100% physique. Le nouveau défi est à la fois la gestion des réseaux d’agences, et l’accompagnement de la clientèle vers une « consommation autonome » associée d’un conseil à plus forte valeur ajoutée, « le conseiller augmenté ».

Le nombre d’agences en France, de 35 837 en 2019 n’a baissé que de 7,5% en 10 ans. La France compte 545 agences pour 1 million d’habitants, derrière l’Espagne (558 agences), mais bien loin devant la moyenne constatée dans la zone euro qui est de 285 agences [2].

Si aujourd’hui, grâce aux investissements digitaux de ces vingt dernières années, l’écart en matière d’offre et d’expérience client entre les banques traditionnelles et les néo-banques s’est fortement réduit, il n’en reste pas moins des enjeux stratégiques importants, portant sur l’innovation des usages et la valeur client perçue. Les clients attendent, à la fois, de l’autonomie dans les tâches quotidiennes, et souhaitent bénéficier dans le même temps de conseils personnalisés. Les clients veulent avoir accès aux services bancaires aussi facilement qu’ils le peuvent avec des applications de type Uber, Spotify ou Deliveroo. Le « Online Merge Offline »[3] (OMO) pourrait correspondre à un « must have » stratégique pour les banques dans les années à venir.

« Il n’y aura plus de différence positive avec le digital pour les banques. En revanche, il y aura bien une différence négative si on ne le fait pas. », affirme un cadre dirigeant d’une banque.

Le défi de la maitrise des nouvelles technologies à relever

Les processus qui ont été mis en place dans l’urgence ont vu apparaître des fragilités liées aux risques et aux contrôles.

Afin d’assurer la continuité de l’ensemble des activités dans une situation quasi absolue de télétravail des effectifs, les infrastructures techniques ont été fortement sollicitées, allant parfois jusqu’à la limite de leurs capacités.  Les différentes étapes et points de contrôles des déploiements n’ont pas pu être totalement vérifiés.

D’une part, les enjeux de cyber-sécurité, démultipliés par les problématiques de confidentialité des informations manipulées, ont été confrontés à une augmentation des risques opérationnels. En interne, par exemple, la plupart des banques ayant mis en place un workflow digital sont revenues sur leur workflow classique.

En externe, le paiement sans contact, devenant la nouvelle norme, doit nécessiter des adaptations importantes en termes de sécurité et d’infrastructure.

D’après le magasin UFC Que Choisir, le paiement sans contact est deux fois plus fraudé que celui par carte bancaire avec code secret. Le paiement à distance est de son côté dix-sept fois plus fraudé.

Les initiatives de modernisation des infrastructures et des dispositifs de gestion de crise devront être renforcés et devenir complets à plus long terme.

D’autre part, dans l’industrie bancaire, « le legacy » datant des années 70 et qui gère les comptes clients, demeurait jusqu’à maintenant le système dominant. Bien que les banques se soient approprié les dernières innovations sur les smartphones, applications, méthodes biométriques d’identification etc… très peu d’entre elles se sont véritablement lancées sur la refonte de leur Core système, de l’open banking [4], ou encore de l’utilisation des données bancaires. Les concepts comme BAAP (Bank As A Platform), BAAS (Bank As A Service) ou même fournisseurs de données ne sont pas encore envisagés.

La banque de demain

La pandémie peut laisser présager un risque de contre-performance pour l’ensemble de l’économie mondiale, et plus particulièrement pour les banques qui jouent un rôle majeur de coordinateurs. Face à cette incertitude, les banques risquent donc de freiner leur capacité d’investissement à un moment crucial, où au contraire, elles se doivent d’investir encore plus pour imaginer leur futur.

« En tant que dirigeant, il faut être vigilant à ne pas sacrifier l’investissement de préservation, voire l’investissement de développement. L’investissement, c’est la préservation du MCO (Maintien en Condition Opérationnelle) au quotidien, et de continuer à flécher son investissement pour continuer de développer de nouveaux services. Le risque pour le secteur bancaire, et notamment pour certains établissements, est de ne plus être en mesure d’assurer ce deuxième pilier. », alerte le dirigeant d’une banque.

Les banques ont bénéficié d’un élan formidable avec la crise sanitaire, qui a bousculé à la fois l’organisation du travail, le management, les relations clients ou encore la gestion interne, et ouvert le champ des possibles à l’Open banque, ou encore de nouveaux concepts tel que BAAS et BAAP. L’accélération de la transformation numérique, et notamment la data, pourraient être des alliés de taille pour rebâtir un modèle bancaire plus agile et plus résilient.

Tout ceci montre que le secteur bancaire possède depuis longtemps une richesse d’informations à exploiter au travers de ses données, une véritable nouvelle richesse des banques, bien plus que le volume des capitaux qu’elles peuvent détenir. La maîtrise et l’exploitation de la donnée, et surtout de la donnée en temps réel peut devenir une véritable source de communication et de prise de décision.

Sur ce point, il est fort probable que la data soit un avantage concurrentiel décisif et un levier majeur dans la transformation du secteur bancaire.

Mais cette accélération a aussi mis en avant les fragilités comme un Core Système datant des années 70. Si le virage du digital doit être envisagé, il faut aussi opérer un changement en profondeur des systèmes d’information. Ce sont des investissements lourds mais qui ne peuvent pas être reculés indéfiniment.

De plus, côté relation clients, la crise sanitaire a aussi montré que les collaborateurs n’étaient pas assez préparés, ni au télétravail et ni à une clientèle maintenant habituée à la possibilité du digital et qui devient extrêmement exigeante. Si le virage du digital doit être entrepris, il doit l’être avec une réflexion en parallèle sur les changements en profondeur des métiers de la banque. Ce change management doit s’articuler à la fois sur une évolution des tâches opérationnelles et d’une réévaluation des compétences clés, pour tendre vers une plus grande expertise et une capacité à améliorer l’expérience du client.

L’après Covid-19 a montré que le « self care »[5] a des limites, il ne suffit pas d’avoir la nouvelle application, il faut aussi accompagner le lien humain à la clientèle, qui en ces temps de distanciation sociale est de plus en plus nécessaire.

« L’enquête de CASA[6] a montré que la proximité relationnelle a été un élément de rassurance pendant et après la crise. Il n’y a pas eu le même soutien avec les banques en ligne. Cette proximité relationnelle est très importante dans les moments compliqués, sur les populations qui ont été fragilisées par la crise. Nous avons su soutenir ceux qui étaient particulièrement touchés par la crise comme les artisans, ou encore les particuliers touchés par le chômage. L’IRC[7] n’a jamais autant augmenté qu’en 2020, et c’est vrai pour quasiment toutes les caisses du groupe. Cet indice de confiance a prouvé notre capacité à réagir et à soutenir nos clients dans des moments difficile. », explique un cadre dirigeant d’une banque.

La pandémie a permis aux banques de montrer qu’elles pouvaient jouer pleinement un rôle sociétal

Par exemple, concernant le « geste mutualiste », le Crédit Agricole ou encore le Crédit Mutuel-CIC, ont mobilisé chacun 200 millions d’euros pour accompagner les professionnels, artisans, commerçants, et les aider à passer le cap.

De ce fait, parmi les 25 marques les plus utiles citées pendant le confinement, une banque a été nommée pour la première fois. Le Crédit Agricole apparait ainsi parmi Tiktok, Leroy Merlin, Picard Surgelés ou encore Fortnite[8].

Autre fait révélateur de l’après Covid, là où Orange Banque, la néobanque qui revendique plus d’un million de clients en France et qui émarge dans le club des néobanques millionnaires, accuse 549 millions d’euros de pertes accumulées en 3 ans (selon Les Echos), le Crédit Agricole, leader de la banque de détail en France, affiche quant à lui, à fin septembre 2020, un résultat net sous-jacent de 4,7 milliards d’euros, en baisse de seulement 300 millions d’euros par rapport à 2019, tout en intégrant une hausse du coût du risque de près de 1,5 milliards d’euros.

La crise sanitaire a de ce fait révélé que les banques dites « classiques » peuvent déployer leurs SI extrêmement rapidement. Pour la plupart très solides financièrement, elles ont montré en outre, et ont su faire connaître, leur capacité à apporter une contribution réelle au soutien de l’activité économique.

Si les néo-banques ont effectivement gagné des parts de marché, les banques classiques ayant un réseau dense, comme le Crédit Agricole ou encore le Crédit Mutuel, en ont aussi gagné. La proximité relationnelle et un réseau dense restent des atouts concurrentiels. 

« Il n’y a pas eu de démonstration sur le fait que, sur les dernières années, les banques à réseaux étaient définitivement condamnées. Pour notre part, nous avons gagné des parts de marché. », affirme un cadre dirigeant d’une banque. 

La banque doit aller encore plus loin en tant que partie prenante. Si la Covid-19 a permis de mettre la responsabilité sociétale des banques sur le devant de la scène, la banque pourrait être une « entreprise à mission ». Pour ce dirigeant de banque, respecter la législation ne suffit plus.

« Il faut aller plus loin, et se forger sa propre philosophie d’acteur économique, sur ce qui est un projet moyen et long terme, et qui répond à la fois à un équilibre économique, mais aussi à une création de valeur dans la durée pour la société. Il faut que, partout où nous le pouvons, de façon continue, venions influencer la transformation écologique et environnementale, en soyons partie prenante. », a-t-il affirmé. Et ceci, même si, effectivement, il admet qu’à date il n’est pas possible de créer de façon définitive une préférence sur un positionnement particulier si la contrepartie n’est pas en mesure de payer pour consommer le service, et ajoute : « C’est aussi cette réalité qui nous rattrape. »

Il conclut : « Cette crise a aussi rappelé le fait que nous sommes des animaux sociaux. Concernant la digitalisation, bien sûr que nous sommes déjà en train de basculer. Dans le monde de demain, on sera moins nombreux, mais on aura quand même besoin des deux piliers de services. Demain, toutes les banques auront des apps comme « WeChat », qui ne sera pas un avantage concurrentiel. Le vrai avantage concurrentiel sera notre capacité à faire muter nos métiers sur un marché en contraction. »

Malgré les défis qui les attendent, les banques sont peut-être donc les grandes bénéficiaires de cette crise, là où les néobanques, elles, ont montré les limites de leur modèle.

Par Thao Noet et Ammar Aleid, promotion 2020-2021 du M2 IESCI

Références :

(Les sites internet ont été consultés entre le 18 et 23 décembre 2020)

De Coussergues, S., Bourdeaux, G. & Gabteni, H. (2020). 1. Le secteur bancaire français. Dans : , S. de Coussergues, G. Bourdeaux & H. Gabteni (Dir), Gestion de la banque: Tous les principes et outils à connaître (pp. 3-40). Paris: Dunod.

Groupe Crédit Agricole : https://www.credit-agricole.com/notre-groupe/decouvrir-le-groupe-credit-agricole

Crédit Agricole Anjou Maine : https://www.credit-agricole.fr/ca-anjou-maine/particulier.html

Statista :

https://fr.statista.com/statistiques/492273/part-cinq-grands-groupes-bancaires-total-bilan-bancaire-france

Le Figaro :

https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/le-classement-des-banques-traditionnelles-qui-negocient-le-mieux-le-virage-de-la-digitalisation-20200130

Presse citron :

https://www.presse-citron.net/comment-le-groupe-bnp-paribas-a-reussi-son-virage-numerique/

Études et analyses :

https://www.etudes-et-analyses.com/marketing/marketing-bancaire/etude-de-cas/forces-porter-credit-agricole-487803.html

BFM TV :

https://www.bfmtv.com/economie/experts/guillaume-almeras/les-nouvelles-strategies-bancaires-sont-elles-vraiment-pertinentes_AN-201905070213.html

Culture banque :

Classement des banques françaises en 2019

La Tribune :

https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/covid-19-le-secteur-bancaire-est-il-pret-a-etre-un-acteur-de-la-reprise-848680.html

France Transaction :

https://www.francetransactions.com/actus/news-banques/banques-un-secteur-en-mutation-44-000-suppressions-de-postes-annoncees-en.html

France Culture :

https://www.franceculture.fr/economie/covid-19-de-lattitude-des-banques-en-temps-de-crise

CGI :

https://www.cgi.fr/fr-fr/blog/covid-19-accelerateur-transformation-secteur-bancaire

Revue d’économie financière :

https://www.oklein.fr/strategies-de-la-banque-de-detail-face-a-la-revolution-technologique-retrouvez-mon-analyse-parue-dans-le-dernier-numero-de-la-revue-deconomie-financiere-intitule-technologies-et-mutat-2/

Revue banque :

http://www.revue-banque.fr/banque-detail-assurance/article/crise-covid-19-renforce-les-attentes-clientele-pro

Fédération bancaire française :

http://www.fbf.fr/fr/espace-presse/communiques/un-secteur-bancaire-au-service-de-l’economie-francaise-et-un-dialogue-social-actif,-mobilises-pour-assurer-la-securite-des-salaries-et-des-clients

http://fbf.fr/fr/files/APGCYU/MEMO%2005%20-%20Emploi%20dans%20les%20banques_octobre%202020.pdf

http://www.fbf.fr/fr/espace-presse/communiques/signature-de-l’accord-pour-la-gestion-previsionnelle-des-emplois-et-des-competences-(gpec)

Observatoire des métiers de la banque :

http://www.observatoire-metiers-banque.fr/f/chiffresTendances/sf/plus/s/contours_2020

http://www.observatoire-metiers-banque.fr/f/etudes/sf/plus/s/impact_numerique_charge_clientele_particuliers

Économie matin

http://www.economiematin.fr/news-Covid-19-fraude-bancaire-désemplit-pas-malgre-crise

[1] On appelle  « néo-banque », une banque soumise aux mêmes obligations réglementaires et prudentielles que les banques traditionnelles mais qui ne disposent ni d’une structure en « dur », ni d’un réseau d’agences. L’ensemble de leurs services n’est accessible qu’à travers internet même si quelques représentations physiques sont possibles.

[2] Source : https://www.optionfinance.fr/actualites/actualites-generales/detail/le-nombre-dagences-baisse-moins-en-france.html

[3] Le concept OMO a été introduit par Alibaba pour le marché chinois. Il fait suite au mouvement O2O (Online To Offline). Aujourd’hui, les informations captées « online » permettent d’agir « offline » grâce à IOT (Internet Of Things). Par exemple, le réfrigérateur va envoyer la liste des courses directement au caddy conduit par le consommateur dans un supermarché. En passant devant les rayons, le consommateur recevra alors des publicités sur des produits qui lui sont spécialement dédiés.

[4] La notion d’Open Banking est apparu dans la deuxième Directive européenne des services de paiements (DSP2) de 2013

[5] Le self care est vise à donner aux clients la possibilité d’avoir des ressources en ligne et/ou des espaces collaboratifs pour trouver des réponses 24h/24 et 7j/7, en instantané. Les clients ont la possibilité de gérer leurs problèmes ou demandes en toute autonomie, grâce à des supports numériques variés, qui peuvent aller de l’application aux informations sur un site, jusqu’au chatbot ou la FAQ dynamique. (Source : https://blog.smart-tribune.com/selfcare-definition).

[6] CASA : Crédit Agricole SA

[7] IRC : Indice de recommandation Clients. Cet indice permet d’évaluer l’image de l’entreprise et la probabilité des clients à la recommander à son entourage.

[8] https://www.influencia.net/fr/actualites/in,tendances,decathlon-arte-carrefour-doctolib-vinted-ces-marques-plus-utiles-nos-vies,10591.html

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La communication digitale au sein de l’administration publique marocaine : une nécessité vitale qui accompagne les évolutions de la société pour faire face à la crise sanitaire du coronavirus https://master-iesc-angers.com/la-communication-digitale-au-sein-de-ladministration-publique-marocaine-une-necessite-vitale-qui-accompagne-les-evolutions-de-la-societe-pour-faire-face-a-la-crise-sanitaire-du-coronavirus/ Wed, 16 Dec 2020 13:34:37 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3331 Les problèmes liés à la communication des services publics sont parmi les plus inquiétants en raison de leurs retombées humaines, c’est-à-dire leur impact sur la vie quotidienne des citoyens et sur le développement de l’État.  En effet, les objectifs de… Continuer la lecture

L’article La communication digitale au sein de l’administration publique marocaine : une nécessité vitale qui accompagne les évolutions de la société pour faire face à la crise sanitaire du coronavirus est apparu en premier sur Master Intelligence Economique et Stratégies Compétitives.

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Les problèmes liés à la communication des services publics sont parmi les plus inquiétants en raison de leurs retombées humaines, c’est-à-dire leur impact sur la vie quotidienne des citoyens et sur le développement de l’État.  En effet, les objectifs de l’administration ne peuvent être atteints si ces structures révèlent une incapacité à s’adapter aux changements technologiques qui s’opèrent à grande vitesse. Les administrations publiques, de différents secteurs d’activité, ne peuvent faire l’impasse sur les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication, sauf à risquer d’être en décalage avec les besoins évolutifs de la société et les exigences des citoyens. L’expérience montre que dans le cas contraire, les administrations connaissent plusieurs difficultés liées à la complexité des procédures, à la lenteur des délais des opérations, à la mauvaise coordination, voire même son absence, aux pertes massives du papier. On peut trouver comme difficultés des problèmes de conservation, d’archivage, de traçabilité et d’accessibilité, et de communication.

Avec les risques de contamination à travers les échanges physiques, la distanciation sociale et le confinement sanitaire imposés par la pandémie de COVID-19, les technologies de l’information et de la communication ont été un levier stratégique pour le développement et l’enrichissement des organisations dans la mesure où elles permettent la vitesse, la flexibilité, la perspicacité et l’innovation.  Ainsi, la digitalisation des services et l’accélération des processus de transformation numérique sont impératifs.

En se référant à l’article 27 de la constitution marocaine qui stipule que : « Les citoyennes et les citoyens ont le droit d’accéder à l’information détenue par l’administration publique, les institutions élues et les organismes investis d’une mission de service public » (Constitution du Maroc, 2011), et dans l’ambition de rendre accessibles en ligne les services dont le citoyen a besoin cela nous pousse à travers cet article à savoir jusqu’à quel point les NTIC, misent à la disposition du citoyen, pourraient-elles créer un terrain favorable à une meilleure communication entre l’administration et les usagers, en période de crise, en l’occurrence la pandémie de COVID-19 ?

Afin de donner des éléments de réponse à cette question, cet article sera scindé en quatre parties.

La première partie intitulée Généralités sur les NTIC et la communication digitale où on va essayer d’expliquer les deux notions « NTIC » et «  communication digitale », Alors que dans  la deuxième partie on va expliquer les  différents niveaux d’incarnation de leur usage à travers des exemples d’outils   de   la   communication  digitale dédiés par l’Administration marocaine au grand public, la troisième partie va exposer les axes d’amélioration de la communication digitale, et en fin en quatrième partie on va se pencher sur les Indicateurs d’évaluation de projets de digitalisation.

A. Généralités sur les NTIC et la communication digitale

  1. la notion des NTIC

L’acronyme NTIC (ou « TIC » équivalent de l’anglais ICT : « information and communication technologies ») désigne l’ensemble des technologies permettant de traiter des informations numériques et de les transmettre. L’expression « nouvelles technologies de l’information et de la communication » désigne donc une combinaison d’informatique et de télécommunications, mais elle s’est plus spécialement répandue dans le contexte du réseau Internet et du multimédia, c’est-à-dire de l’information audiovisuelle numérisée (images et sons, par opposition aux données de type texte et chiffres, moins volumineuses, qui constituaient l’essentiel des données transitant par les réseaux jusqu’au développement du web et du protocole http). « Les NTIC regroupent en effet tous les outils permettant d’utiliser, de transférer ou de partager des données  numériques  (textes,  images,  sons,…)  À partir de Cd-rom, à travers des réseaux locaux ou à travers le monde via Internet » D’après ces définitions nous pouvons déduire que les NTIC permettent une large diffusion de l’information, ce qui garantit une interactivité et favorise à la fois le travail individuel et le travail collectif.

Á travers le monde, les NTIC sont considérées comme un outil précieux de développement. Ces technologies commencent à devenir partie intégrante d’un système numérique qui sous-tend de plus en plus d’activités de développement. Autrement dit, ces nouvelles technologies passent aujourd’hui d’un rôle périphérique à un rôle fondamental qui permettra aux uns d’amener le développement et aux autres d’en faire l’expérience.

Au sein de l’Administration marocaine, , les  NTIC   prennent   de   plus   en   plus d’importance dans la mesure où elles incarnent une logique d’efficacité et de réactivité. De même, elles apportent des opportunités de plus en plus exploitables. L’utilisation  des  NTIC  par  l’administration  marocaine  constitue  depuis  des  années  une orientation  gouvernementale  primordiale,  dont  les  objectifs  sont  de  promouvoir  les  services offerts, de simplifier les démarches, de réduire la complexité organisationnelle et de passer de l’administration bureaucratique (administration et administré) à l’administration interactive (administration et client), censée satisfaire des citoyens de plus en plus exigeants et informés sur leurs droits et obligations.

Il est à noter dans ce sens que le développement rapide des  exigences  citoyennes  a  donné naissance au sein des pays de l’Union Européenne au concept de la « bonne administration ». Cette dernière stipule que : « Toute personne a le droit de voir ses  affaires  traitées impartialement,  équitablement  et  dans  un  délai  raisonnable  par  les  institutions,  organes  et organismes  de  l’UE.  Ce  droit  comporte  notamment  :  le  droit  de  toute  personne  d’être entendue  avant  qu’une mesure  individuelle  qui  l’affecterait  défavorablement  ne  soit  prise  à son encontre ; le droit d’accès de toute personne au dossier qui la concerne, dans le respect des  intérêts  légitimes  de  la  confidentialité  et  du  secret  professionnel  et  des  affaires  ; l’obligation  pour  l’administration  de  motiver  ses  décisions ». (Journal  officiel  de  l’Union européenne, 2007).

Ceci   présume   que   les   NTIC   jouent   un   rôle   prépondérant,  voir   vital,  au sein   des administrations, rôle qui va s’accentuer à l’ère du COVID-19, afin d’assurer la continuité du service public. Au sein des administrations, un nouveau mode de management a été instauré grâce aux NTIC. En effet, ces technologies ont permis de sortir de la rigidité de la bureaucratie et de favoriser un dynamisme de la communication et du partage d’information. Ces deux derniers éléments instaurent une interactivité entre l’administration et les usagers, une réponse aux besoins réels, une réduction des délais et des coûts et par conséquent permettent d’initier un processus de modernisation et de rationalisation de l’administration.

Le nouveau mode de management évoqué ci-dessus permettra certainement à l’administration marocaine le renouvèlement des pratiques et l’amélioration des procédures. Il présente en effet de grandes opportunités pour l’administration elle-même, ainsi que pour les relations que celle-ci entretient avec les citoyens, les autres départements et les entreprises.

De l’administration aux citoyens

A  l’ère  du  COVID-19,  les  Administrations  marocaines  se  tournent  davantage vers  les solutions numériques afin d’assurer la continuité de l’offre de services, d’entrer en contact avec   les   usagers   à   distance,   de   les   aider   à   accomplir   leurs   démarches   et   formalités administratives  tout  en  limitant  leurs  déplacements  et  en  réduisant les  correspondances  sur support  papier  susceptibles  d’être  un  facteur  de  risque  favorisant  la  propagation  de l’épidémie.  Quant aux NTIC, elles contribuent à améliorer les services publics rendus aux citoyens grâce aux applications informatiques prévues par l’Administration, ce qui facilite l’interactivité, d’une part, et le développement des services sur mesure, d’autre part.

De l’Administration aux entreprises

La relation entre l’Administration et les entreprises a été nettement améliorée par les NTIC, réalité qui a été mise en évidence durant cette période de pandémie. A travers cette relation, les NTIC permettent désormais la gestion des marchés publics, l’obtention des autorisations diverses, la mise en ligne de la documentation technique susceptible d’aider les utilisateurs à réaliser leurs missions dans de bonnes conditions et à distance.

De l’Administration aux autres administrations

Les NTIC contribuent à améliorer les relations interdépartementales ; l’objectif consiste dans le partage des correspondances, des expériences, des pratiques et des informations utiles d’intérêt général.

Au sein de l’Administration

A l’intérieur de l’Administration, les NTIC permettent la connexion du personnel et la continuité des services. Au-delà des objectifs portant sur l’amélioration de la coordination et la circulation de l’information, se note la fluidification des processus entre différents Services, Divisions et Directions. Par ailleurs, plusieurs structures ont lancé des projets, à l’ère du Coronavirus, afin de dématérialiser les processus et les échanges (0 Papier).

  1. La notion de la communication digitale

La communication digitale peut se définir comme étant : « une nouvelle discipline de la communication mais aussi du marketing.  Le terme désigne l’ensemble des actions (de communication et de marketing) visant à faire la promotion de produits et de services par le biais d’un média ou d’un canal de Communication digitale, dans le but d’atteindre les consommateurs d’une manière Personnelle, ultra ciblée et interactive. L’objectif nouveau des entreprises  est  donc  de  cibler  leurs  consommateurs  non  plus  seulement  sur  le  web  mais  à travers l’ensemble des médias Digitaux » (Oualidi, 2013).

En  effet,  ces  médias  numériques  permettent  de  mieux  répondre  aux  besoins exacts  et  de délivrer les bonnes informations au bon moment et ce, vu que l’information qui a été attachée à un support solide, aujourd’hui, elle est «liquide» et passe avec fluidité d’un support à autre et d’un réseau à un autre sans que le support solide ne se transmette. Somme toute, la communication digitale peut désigner l’ensemble des échanges et des informations transmises à travers le web, les médias sociaux et les terminaux mobiles.

Depuis plusieurs années, la notion de la communication digitale a été réservée exclusivement aux entreprises privées ; qu’elle soit, de nos jours, mise en exergue dans l’administration, cela révèle  une   conscience   et   une   pénétration   de   nouvelles   valeurs telles   que l’efficience, l’efficacité, la pertinence et les relations. Et c’est ce qui fait d’elle, désormais, un compagnon du quotidien, un moyen médiatique très puissant et donc un grand vecteur d’opportunités et un levier majeur de simplification des démarches dans la mesure où elle permet d’assurer l’accessibilité à des services plus efficaces et réactifs à tout moment et en dehors des horaires rigides de travail.

En outre, la communication digitale tire aussi sa force de cette période de crise sanitaire vu qu’elle permet un partage d’informations et une réactivité tout en limitant les rassemblements inutiles afin de diminuer le risque de contamination du aux déplacements, aux files d’attente, aux activités des guichets d’accueils et à l’usage du papier.

Les objectifs de la communication digitale au sein des administrations

La communication digitale est à la fois une pratique et un processus qui se fixe des objectifs organisationnels. Celle-ci « se   généralise   à   des   degrés   divers   en   fonction   du   secteur d’activité, de la taille de l’organisation et de ses moyens » (Pelet et Lucas-boursier, 2017). Ainsi,  au  sein  de  chaque  organisme  et  en  fonction  de  ses  missions  et  ses spécificités, les objectifs de la communication digitale changent. A titre d’exemple :

-Délivrer des informations (information juridique, politique, commerciale…)

-Expliquer des informations

-Justifier des choix politiques (loi, circulaire…)

-Rendre accessibles les services publics

-Convaincre la population d’une stratégie, d’un choix

-Sensibiliser (cas de la pandémie covid-19)

-Donner une image de marque

Les canaux de communication digitale

Les canaux de communication digitale diffèrent selon les objectifs visés et la population cible ; on peut citer :

-Portail : page web regroupant des accès à des sites et à des services sur Internet

-Réseaux sociaux : sous des formes différentes, ils touchent une large audience et offrent une grande visibilité et interactivité

-Site web : vitrine qui montre l’activité des organismes, les produits et services

-Blog :    site    internet    simplifié, utilisé    principalement    comme    complément d’information

-Applications informatiques : Les applications ont pour principale objectif d’atteindre une population existante sur l’un des supports les plus utilisés au monde (le téléphone portable)

-Emailing : moyen permettant aux organismes d’envoyer un contenu informationnel des directement dans les boîtes mail. Ce moyen est considéré comme étant complémentaire.

Le plan de communication digitale au sein de l’administration

Une stratégie de communication digitale passe en premier lieu par un document formalisé qui est le plan de communication. En effet il n’y a pas de méthode infaillible pour bâtir un plan de communication.  La manière de travailler va fortement dépendre du contexte (Adary etal.2018). En d’autres termes, la communication digitale n’a pas de règles strictes à respecter, mais elle est plutôt un art en mouvement vu qu’il y a des actions basées sur des plans soigneusement faits au préalable, comme  sur  d’autres  actions  préparées  à  court et  moyen terme,  pour répondre à une nécessité ou à une crise. Toutefois, un plan de communication doit répondre impérativement à un certain nombre d’exigences et qui sont :

-Stratégiquement durable

-Conceptuellement explicable

-Socialement responsable

-Managérialement acceptable

-Administrativement faisable

-Opérationnellement atteignable

-Financièrement réalisable

 -Concurrentiellement distinguable

 -Tactiquement modulable

-Objectivement mesurable.

B. Exemples d’outils de la   communication   digitale dédiés par l’Administration marocaine au grand public

Dans le but de faciliter l’accès à ses services, l’Administration marocaine a mis en place une panoplie d’outils de communication digitale bien avant même que le COVID-19 ne soit une réalité mondiale.  Ces outils ont revêtu une grande importance vu qu’ils ont permis aux citoyens de faire le suivi de leurs dossiers sans déplacement, sans intermédiaire et surtout sans problèmes de communication.  Ainsi, et depuis le début de l’état d’urgence sanitaire, l’Administration marocaine a privilégié, voire exigé l’échange électronique sous toutes ses formes pour faire face à la propagation de l’épidémie et garantir la continuité de son offre et ce, tout en garantissant la sécurité de ses fonctionnaires, ses partenaires et ses usagers.

Le site web TADAMONCOVID : (www.tadamoncovid.ma)

Cet espace a été dédié au dépôt des demandes d’aide et aux réclamations des travailleurs du secteur informel.  Ce site permettait le dépôt de demandes d’aide mensuelle consacrée par l’Etat aux ayants droit. Après la déclaration et la demande, l’intéressé(e), responsable de la famille, pourra connaitre l’issue de sa demande. En cas de rejet, une réclamation peut être déposée pour d’éventuel traitement. Selon SimilarWeb, l’outil d’analyse du trafic des sites web, le présent portail la connu un pic de nombre de visites, enregistré lors de son lancement en avril 2020 et ce, avec 7,5 millions de consultations.

On peut constater que la courbe des visites est décroissante. La lecture qu’on peut donner pour l’explication de cette pente peut être justifiée par l’arrêt des aides financières octroyées aux intéressés et qui doivent répondre à un certain critère. Avec l’arrêt de ces appuis, le nombre des   visiteurs a   considérablement   baissé   et   ce, pour   atteindre   les   55 000 visites en septembre 2020.

La plateforme ROKHSA : (www.rokhas.ma)

C’est une plateforme collaborative nationale qui fait partie des chantiers de la transformation numérique de l’Administration. En effet, elle permet la gestion numérique fluide et traçable du processus de la délivrance des autorisations d’urbanisme et des autorisations économiques. Son objectif est de réduire l’utilisation du papier, minimiser les déplacements et maitriser les délais. En ce qui concerne les autorisations d’urbanisme la plateforme permet aux membres des commissions de communiquer, de visualiser et d’annoter les plans.

Pour les autorisations économiques, la  plateforme   permet   une   gestion   dématérialisée   depuis   la   demande d’autorisation jusqu’à sa signature finale. Il est à noter que cette plateforme est déployée dans quelques régions, avec un objectif de sa généralisation sur tout le Royaume. Selon ecoactu.ma, la plateforme en question a été consultée au niveau de 204 communes par plus de 3039 fonctionnaires et plus de 7.258 architectes et topographes, avec une moyenne de plus de 390 demandes par jour. A titre incitatif, la Direction Générale des Collectivités Territoriales, relevant du Ministère de l’Intérieur, publiera périodiquement le classement du « championnat » des  communes  en fonction de leurs délais moyens de traitement des demandes d’autorisation, et ce dans le but d’améliorer la qualité des services rendus et d’instaurer une certaine compétitivité. On peut dégager l’absence de la délivrance des autorisations économiques et un nombre limité des communes ayant utilisé la plateforme rokhas.ma

Le portail Chikaya (www.chikaya.ma)

Dans le cadre des efforts fournis par le Gouvernement visant à rapprocher l’Administration du citoyen et à la suite des directives royales à l’occasion de l’ouverture du parlement en 2016, « […] Il est tout aussi inacceptable que l’Administration ne  réponde  pas  aux  plaintes  et  aux interrogations  des  gens,  comme  si  le  citoyen ne  valait  rien,  ou  comme  s’il  s’agissait  d’un simple  élément  dans  la  configuration  générale  de  l’espace  de  l’Administration.  Or, sans citoyen, point d’Administration. Le citoyen a le droit de recevoir des réponses à ses requêtes et  des  solutions  aux  problèmes qu’il lui expose. L’Administration est tenue d’expliquer les choses aux gens et de motiver ses décisions, qui doivent être prises sur la base de la loi […] ».

Le portail national chikaya.ma fait partie de multiples canaux d’interaction entre le grand public et l’administration, dans la mesure où il permet la gestion  des  réclamations,  des suggestions et des observations provenant des usagers des services publics. Cet outil représente un saut considérable en matière de modernisation et de  réactivité  de l’administration publique dans la mesure où il permet également d’évaluer les réponses des Administrations et de réouvrir les réclamations en cas de besoin.

Selon les chiffres donnés par portail chikaya.ma 1710 administrations ont adhéré à ce portail, avec plus de 816 000 réclamations déposées et plus de 564 000 réclamations traitées. Selon SimilarWeb le portail chikaya.ma est classé 219,678 au niveau mondial, tandis qu’au niveau national il est classé 897. Quant aux visites du portail nous constatons que durant la période allant du  mois  de  mars 2020  à septembre 2020,  le  site  a  connu  une  moyenne  mensuelle  de  visite  de  l’ordre  de 105.19k.

C. Les axes d’amélioration de la communication digitale

Selon le discours royal à l’occasion de l’ouverture du parlement en 2016 : « L’utilisation des nouvelles technologies contribue à faciliter l’accès, dans les plus brefs délais, du citoyen aux prestations, sans qu’il soit nécessaire de se déplacer souvent à l’Administration et de s’y frotter, car c’est là la cause principale de l’extension du phénomène de corruption et du trafic d’influence ».

Durant la dernière décennie, la communication digitale au sein des administrations publiques a suscité beaucoup d’intérêt vu sa grande valeur ajoutée, dans la mesure également où elle permet comme de réduire les coûts et le temps des procédures, de rapprocher les services  des  citoyens  et  de  permettre  de  mieux  répondre  à  leurs  besoins.  En d’autres termes, la communication digitale permet une transformation radicale et une modernisation de l’Administration. Compte tenu des multiples avantages évoqués ci-haut, l’administration marocaine ne doit pas considérer la fin de la crise  sanitaire  et  de  la  pandémie  COVID-19  comme  fin  de  la période de digitalisation, mais plutôt comme catalyseur afin de récupérer le retard accusé dans le domaine et de redoubler d’efforts pour une digitalisation totale de l’administration. A cette fin, on peut voir plusieurs leviers d’action multi-niveaux :

Au niveau de la stratégie gouvernementale

– Placer le secteur du digital au cœur des priorités

– Mettre en place un schéma directeur de transformation, d’amélioration et d’accélération de la digitalisation

– S’inspirer des meilleures pratiques internationales en la matière

– Veiller à équiper les administrations par des moyens technologiques adéquat pour renforcer l’usage des NTIC

– Généraliser la mise en place des services à distance

– Renforcer le capital humain par des compétences qualifiées

– Communiquer en interne pour mobiliser les fonctionnaires et les inciter à la mise en œuvre des stratégies

– Programmer des sessions de formation aux métiers du digital pour qualifier le capital humain

– Soutenir et encourager l’innovation à l’instar des projets de l’Agence du Développement du Digital (ADD)

Au niveau des Services aux usagers

– Mettre en ligne des portails d’administrations ergonomes, fonctionnels et accessibles 24/24

– Mettre à la disposition des usagers toutes les informations utiles (en ligne) aux démarches et procédures et proposition de cahiers de procédures

– Prendre en considération la régionalisation dans le chantier de la digitalisation de telle sorte que les prestations publiques proposées au sein des grandes villes doivent couvrir l’ensemble du territoire national

– Permettre aux usagers de réaliser la majorité de leurs démarches en ligne

– Aviser l’ensemble des citoyens, d’une façon simple et compréhensible (publicité), de l’existence d’outils de communication accessibles à distance permettant de franchir la porte de l’administration sans déplacement

– Prendre en considération le retour d’expérience des usagers pour améliorer les prestations

– Prendre en compte les personnes porteuses d’un handicap par le développement de programmes d’accessibilité numériques adaptés.

Au niveau du cadre juridique 

– Elaborer   des   textes   législatifs   qui   cadrent   toute   transformation   au   sein   des administrations

– Exiger aux administrations d’allouer des budgets au développement du digital

– Exiger des administrations de fixer des objectifs et des échéances

– Donner aux organismes disposant des compétences adéquates la responsabilité de mise en œuvre des stratégies

– Assurer un reporting régulier relatif à chaque projet de digitalisation (exploitation des outils informatiques) …

– Encourager les administrations engagées et ayant atteint une maturité numérique…

D. Indicateurs d’évaluation de projets de digitalisation

« Les services publics sont à l’écoute de leurs usagers et assurent le suivi de leurs observations, propositions et doléances. Ils rendent compte de la gestion des deniers publics conformément à la législation en vigueur et sont soumis, à cet égard, aux obligations de contrôle et d’évaluation ». (Constitution du Maroc, 2011). Au travers de ce qui précède on peut dire que la digitalisation doit s’inscrire dans une approche d’amélioration continue. Elle ne doit en aucun cas stagner à un stade de sa mise en œuvre. Dans ce sens, la roue de Deming (PDCA) peut fortement servir pour maintenir les progrès réalisés. Toutefois, il est primordial de définir un ensemble d’indicateurs clé de performance (ICP) qui vont permettre à la fois l’évaluation et la prise de décision. Comme :

– Taux de numérisation des procédures

– Nombre de visites des usagers

– Nombre de visites de portails et de sites web

– Temps passé sur les portais et les sites web

– Pourcentage de la mise en place des stratégies

– Retard annuel de mise en œuvre

– Taux de visite de portails et de sites web

– Téléchargement d’applications

– Impressions des citoyens.

Par rapport aux implications managériales, l’intégration des NTIC et de la digitalisation au sein de l’administration marocaine nécessite particulièrement une élaboration des bases juridiques et de leurs textes d’application qui cadrent cette transformation numérique, en parallèle, un accompagnement des fonctionnaires est indispensable surtout ceux habitués aux anciennes modalités de travail et ce, afin d’éviter les risques de l’exclusion et de la résistance au changement.

Par Ghizlane Ajouhi, promotion 2020-2021 du M2 IESCI

BIBLIOGRAPHIE :

-Adary,  A  etal.  (2018),  Commu-nicator-toute  la  communication  à  l’ère  digitale, Malakoff: Dunod.

-DENEF,  J.F.  (2001).  Les  nouvelles  technologies  de  l’information  et  de  la communication (NTIC) dans la formation médicale, au service de l’acquisition et du développement  des  compétences   du Mprofessionnelles,revueinternationale  francophone d’éducation médicale

-Pelet,  J.É.  &Lucas-Boursier.J.  (2017), Aide-mémoire  de Communication  digitale, Paris: Dunod.

– Oualidi, H. (2013),  Les  outils de la communication digitale-10 clés pour maitriser le web marketing, Paris: Edition Eyrolles.

-Thiam, I. & Ndiaye, S. (2020). COVID-19 et économie numérique dans le monde : Le pari  de la  réduction  de  la  fracture  numérique.  Revue  Internationale  du  Chercheur.

– Didier Danet La stratégie militaire à l’heure des NTIC et du « Big Data » : quelles hypothèses structurantes ? ,Revue internationale d’intelligence économique 2013/2 (Vol. 5), pages 125 à 139.

 

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Le printemps 2020 a emmené son lot de disruptions dans la gestion des organisations en raison de la crise du COVID-19 qui met depuis presque une année la stabilité du monde à rude épreuve. Si la gestion de cette crise sanitaire et celle de la crise économique qui en découle sont plus ou moins propre à chaque pays et entité, les entreprises ont, elles, en commun l’adoption de pratiques nouvelles comme le télétravail, les nouvelles réalités économiques, les changements dans leurs relations avec les tiers, qui nécessitent des stratégies, des méthodes et des adaptations nouvelles. Quand bien même bon nombre des enjeux actuels existaient déjà avant la crise sanitaire, ils se sont nettement amplifiés notamment avec la mise en place des distanciations sociales, le confinement et le passage exponentiel au digital.  Ainsi, la gestion du risque prend de l’ampleur tant la nécessité de réduire l’incertitude est croissante. Pour rappel, le risque peut être définie comme la survenance d’un événement aléatoire et imprévisible qui a des conséquences sur l’activité. La surveillance des environnements financiers, juridiques, fiscaux, opérationnels et politiques semblait faire, pendant longtemps, la panacée de la gestion du risque. Pourtant les aspects climatiques et environnementaux ne sont pas en reste. La gestion des risques ne saurait non plus laisser de côté le risque cyber étant donné qu’il fait partie du cœur de l’activité des entreprises et des organisations en général.

Avec la transformation digitale et le nombre sans cesse croissant de données gérées, la cybersécurité n’est plus une question de protection du patrimoine immatérielle mais implique également la protection de l’activité et de toute la chaine de valeur étant donné que les attaques informatiques paralysent l’activité. Aujourd’hui la force d’une entreprise se mesure à l’interopérabilité de ses systèmes et donc des différentes parties qui la composent, qui sont une et indissociable. La mise en œuvre d’une politique de cybersécurité est une dynamique qui rentre dans le cadre de la stratégie et nécessite des apports humains et techniques. Avec un retour en force des ransomwares l’année dernière, les spécialistes du sujet prédisaient l’augmentation des attaques contre les villes, les collectivités, les gouvernements, le cloud avec les jeux vidéo. Sachant qu’une toute petite faille peut servir à paralyser des organisations et que l’aspect le plus déplorable est la révélation par l’extérieur de possibilités de faille dans le système, la protection systémique n’est plus uniquement une question technique mais aussi managériale dans la mesure où il faut installer une culture de la protection des données, de l’information et des systèmes d’information – culture de la protection prêchée justement par l’intelligence économique-. Quelle sont les enjeux des risques cyber ? Quel a été l’impact du Covid ? Quelle est la portée du risque humain ? Quelle approche pour, à défaut de maitriser totalement, gérer le risque cyber ?

Statistiques, chiffres clés et risque humain

Selon le rapport Hiscox 2020 sur la gestion des cyber-risques[1], le coût moyen des pertes liées aux cyberattaques en France ne cesse de grimper et a été évalué à 35000 euros par incident en 2019. Le total des pertes est passéde 1,1 à 1,6 milliards d’euros entre 2018 et 2019. En revanche le nombre des entreprises touchées par un cyber-évènement passe de 67% à 37% en France, et les dépenses ont progressées de 39%. Alors que les grandes entreprises de plus de 1000 salariés sont les plus visées (51% ont signalé au moins un incident), les PME sont souvent les plus exposées en raison de leur faible expertise en protection systémique. Ainsi des actions sont mises en place à différent niveau, pour à défaut d’endiguer, limiter les risques. Nous pouvons évoquer entre autres le site de l’agence Européenne enisa.europe.eu qui propose un large panel de documentations, de formations et de communications sur des évènements, le site du gouvernement Français cybermalveillance.gouv.fr, le site de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’informations ssi.gouv.fr également diffuse énormément d’informations pouvant aider les entreprises et même les particuliers dans leur protection. Enfin, le site Le monde informatique propose également une rubrique dédiée à la cybersécurité et la rédaction a organisé entre mars et juin des webconférence, des débats, témoignages et démonstrations de partenaires sur le thème de la cybersécurité.

 

Par ailleurs les attaques informatiques, sont d’ordres diverses. D’après un sondage de OpinionWay et du CESIN, l’hameçonnage ou phishing est la plus répandue. Evaluée à 79% des cas de Cyberattaque, elle consiste à leurrer l’internaute pour lui soutirer des informations personnelles. L’arnaque au président qui représente 47% des attaques consiste en une fraude au cours de laquelle le fraudeur cible une entreprise ou une personne en se faisant passer pour un directeur hautement placé dans la hiérarchie ou une personnalité. Il organise des échanges par mail ou par téléphone pour instaurer la confiance avant de sévir. L’exploitation d’une vulnérabilité (43%) concerne l’exploitation des failles dans les systèmes d’informations et d’exploitation. Les vulnérabilités sont dues aux technologies de plus en plus complexes des systèmes d’informations des organisations. Ces vulnérabilités sont parfois connues mais pas corrigées. Les attaquants profitent du temps entre la détection et la correction pour exploiter les vulnérabilités, rendant ainsi nécessaire le contrôle permanent des systèmes. Il serait toutefois naïf de considérer que les vulnérabilités proviennent toujours du système. Il y a 20 ans le programme malveillant Iloveyou s’était répandu sur des dizaines de millions de machines dans le monde et avait été responsable d’environ 10 milliards de dollars de dommages en touchant le pentagone, la CIA, de grandes entreprises comme L’Oréal, Nestlé et Siemens, en exploitant une faille humaine. Le virus nommé « LOVE-LETTER-FOR-YOU.TXT.VBS » s’est propagé justement parce qu’il a su exploiter la faille liée à l’émotion humaine. « Tout le monde veut être aimé » a affirmé l’auteur.

De plus en plus d’entreprises prennent la mesure des choses tant les attaques sont multipliées, complexifiées, récurrentes, médiatisées et avec la mise en place du RGPD. Elles intègrent la sensibilisation dans leurs politiques de protection de SI. Toutefois, par excès de confiance accordée aux mécanismes mises en place, par manque d’informations et d’attention parfois par des actions malveillantes des employés ou ex-salariés, les virus sévissent encore énormément en entreprise, se propagent dans tout le système en pénétrant simplement un appareil. Les logiciels rançons et programmes malveillants utilisent certaines méthodes comme le chiffrement pour contourner les systèmes de sécurité.

D’après Christiane Féral-Schuhl, présidente du CNB, dans 80% des cas ce sont des employés ou ex-salariés qui portent atteintes pour une raison ou une autre aux systèmes d’informations de leurs employés ou ex-employés. La recrudescence des attaques par hameçonnage, les intrusions dans les systèmes en utilisant le pare feu humain comme faille, montrent que l’humain se révèle un talon d’Achille de la chaine devant être intégrée aux solutions de surveillance. La contrainte est de ne pas faire de la sécurité un barrage à l’innovation et à la confiance nécessaire au dynamisme d’un climat des affaires. Même s’il n’est pas nouveau de considérer l’humain comme facteur de risque, l’échec des mesures de protection basées sur l’outil démontre qu’il doit non seulement faire l’objet d’analyse comme tous les autres risques, mais aussi de stratégies afin de ne pas faire finalement plus de mal que de bien aux organisations.

Quid de l’après Covid ?

Avec le Covid les systèmes d’informations ont été sur-sollicités. La fracture numérique a rendu compliqué le suivi à distance de certains employés. Le télétravail massif, l’utilisation des équipements personnels et des VPN, l’utilisation des matériels et outils inhabituels comme les outils de visioconférence, le partage des données hors sol, le changement du cadre de travail, l’allègement des procédures, la consultation de sites internet non sécurisés -surtout pour s’informer sur le Covid- ont accru la vulnérabilité des systèmes. Il va sans dire que la crise a généré des opportunités d’attaques. Les sites internet et logiciels piégés se sont répandu ces 8 derniers mois. Selon Palo Alto, plus de 86600 noms de domaines liés à la pandémie auraient été créés entre le 09 Mars et le 26 Avril 2020. Alors que Sophos observe des pics de connexions allant jusqu’à 130.000/jour à des sites récents ayant un nom de domaine lié au COVID. La popularité de ZOOM, outil de visio conférence très utilisé dans les domaines professionnel et académique, a valu la compromission de plusieurs comptes d’utilisateurs. Des vulnérabilités concernant l’application ont été publiés sur des forums et vendues. Le soir du 20 Octobre 2020, Sopra Steria société de service informatique a été touchée par un ransomware qui visait probablement ces clients notamment les groupes financiers depuis plusieurs mois. Notons dans les attaques les plus retentissantes de cette année celles du transporteur maritime CMA CGM, de l’éditeur de logiciel Allemand Software AG. Les menaces internes incluent la violation de données dont a été victime le groupe canadien Desjardins avec l’usurpation de l’identité de plusieurs employés par un de leur collègue, le piratage des comptes Twitter après qu’une faille d’un employé soit exploitée par des adolescents, ou encore le vol de propriété intellectuelle de Cybereason.

Nous l’avons compris la confiance sans faille que ce soit en l’outil ou en l’humain n’est pas de mise. Le contrôle a également ses limites.. Les solutions préconisées par les experts jusqu’alors prévoient une approche holistique intégrant système IT, système industriel, et capital humain avec une analyse des comportements à risques des employés, et de toutes les parties prenantes, qui d’une manière ou d’une autre, sont amenées à entrer en contact avec le système interne d’une part, et d’autre part une protection du périmètre externe, des outils collaboratifs, de toute la chaine et un plan d’intervention en cas d’incident. Sur le plan financier, la gestion de risque exige un plan de continuité d’activité incluant une assurance au même titre que pour la survenance des catastrophes naturelles, des explosions ou des incendies, au vu de l’accroissement des risques financiers intrinsèquement liés aux attaques. L’assurance-cyber permet aux organisations de ne pas porter le risque inhérent aux frais liés aux paiements des cyber rançons, à la résolution des incidents, aux frais de réclamations et à la perte d’exploitation. Cependant, ces contrats n’incluant pas les garanties de fraudes liées au Phishing par exemple, il est important de faire la distinction et de maitriser non seulement les risques couverts par les polices d’assurance mais également le contour de la question du risque cyber aussi bien par les grandes entreprises, les PME que les TPE. A ces préconisations peuvent s’ajouter l’analyse des compétences internes et présentes sur le marché en matière de cybersécurité et de stratégie de sécurité et une démarche inclusive d’intelligence économique. En effet, les attaques ne sont pas uniquement motivées par les rendements financiers mais peuvent être également dans l’optique d’espionner l’organisation victime en vue de soutirer des informations stratégiques. Le rôle du RSSI ou CISO a ainsi évolué. Il est désormais acteur de la stratégie de long terme de l’entreprise et garant de la sécurité de l’information.

Quelles compétences pour la sécurité organisationnelle ?

Outre les compétences techniques de protection et de prévention des éventuelles attaques, le professionnel de la sécurité d’information a des compétences connexes. C’est un leader qui recentre sa mission sur la protection des informations sensibles ou peu sensibles de l’entreprise, en respectant les contraintes budgétaires et en drainant toutes les autres fonctions de l’entreprise dans une logique de coopération au sein de l’organisation et au-delà, et de fournisseur-client interne. Il travaille de concert avec la finance pour répondre à la contrainte budgétaire, avec la conformité et le juridique pour répondre aux contraintes légales et règlementaires, avec la gestion des talents et des ressources humaines pour la formation, la sensibilisation des collaborateurs avec les canaux appropriés. Il gère la monté en compétence de profils qui ne sont pas susceptibles de représenter un risque ou une faille pour l’organisation, étant donné que la valeur de la chaine se mesure à celle de son maillon le plus faible.

En bref, le RSSI doit montrer des compétences hétéroclites, analytiques, agiles et adaptatives. Le domaine de la cybersécurité est vaste et très varié. Même s’il est encore très technique il est aussi diversifié avec pour impératif de tenir en compte le risque humain, respecter les contraintes et surtout ne pas être un frein à l’innovation. Le Covid-19 a démontré que non seulement le risque cyber prend de l’ampleur mais tout le domaine de la cybersécurité fait de même. Les investissements grossissent, les compétences évoluent, la prise de conscience également. La cybersécurité n’est plus ni à prendre à la légère, ni un domaine complètement technique dans le brouillard de l’incompréhension des utilisateurs et des dirigeants.

Par Colette Armandine AHAMA, promotion 2020-2021 du M2 IESCI

Sigles

CESIN : Club de la Sécurité de l’Informatique et du Numérique

CISO: Chief Information Security Officer

CNB : Conseil National des Barreaux

IT : Information Technology

PME : Petite et Moyenne Entreprises

RSSI : Responsable de la sécurité des systèmes d’information

SI : Système d’Information

TPE : Très Petite Entreprise

Sources et Liens

Source Image 1 : https://fr.statista.com/infographie/15871/types-de-cyberattaques-les-plus-courantes-entreprises-francaises/

Source Image 2 : https://fr-statista-com.buadistant.univ-angers.fr/infographie/9377/comment-fonctionne-une-attaque-de-ransomware/

https://www.lemonde.fr/pixels/article/2020/05/04/vingt-ans-apres-le-createur-du-virus-informatique-i-love-you-temoigne_6038636_4408996.html

https://www.ayming.fr/insights/avis-dexpert/crise-sanitaire-et-cyber-risques-quand-la-covid-19-devient-une-aubaine/#_ftn4

https://www-cairn-info.buadistant.univ-angers.fr/revue-i2d-information-donnees-et-documents-2017-3-page-32.htm

https://www.globalsecuritymag.fr/10-cyberattaques-marquantes-et-10,20200917,102862.html

https://orangecyberdefense.com/fr/solutions/threat-intelligence/veille-en-vulnerabilites/

https://www.ayming.fr/insights/avis-dexpert/crise-sanitaire-et-cyber-risques-quand-la-covid-19-devient-une-aubaine/#_ftn4

https://www.cyberthreatcoalition.org/covid-19-cyber-threat-updates-blog/2020-04-14-weekly-threat-advisory

https://unit42.paloaltonetworks.com/covid-19-cloud-threat-landscape/

https://www.hiscox.fr/courtage/sites/courtage/files/documents/2020_RAPPORT_CYBER_HISCOX.pdf

[1] https://www.hiscox.fr/courtage/sites/courtage/files/documents/2020_RAPPORT_CYBER_HISCOX.pdf

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