Innovation Archives - Master Intelligence Economique et Stratégies Compétitives Le Master Intelligence Economique qui combine analyse économique, outils de veille, e-réputation, gestion de crise et big data via une formation sur deux ans. Thu, 17 Feb 2022 11:01:37 +0000 fr-FR hourly 1 La multiplication des licornes en France : entre promesses pour le futur et enjeux de souveraineté nationale https://master-iesc-angers.com/la-multiplication-des-licornes-en-france-entre-promesses-pour-le-futur-et-enjeux-de-souverainete-nationale/ Thu, 17 Feb 2022 10:42:33 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3568 L’essor des licornes françaises depuis 2019 Depuis le milieu du mois de janvier 2022, la France a dépassé la barre symbolique des 25 « licornes », avec 3 ans d’avance sur les ambitions affichées par Emmanuel Macron en 2019. Une… Continuer la lecture

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L’essor des licornes françaises depuis 2019

Depuis le milieu du mois de janvier 2022, la France a dépassé la barre symbolique des 25 « licornes », avec 3 ans d’avance sur les ambitions affichées par Emmanuel Macron en 2019.

Une licorne est une start-up valorisée à plus de 1 milliard de dollars, dont le siège social est en France et qui n’est pas cotée en bourse. Le terme valorisation est assez important et peut prêter à confusion. Il ne désigne pas le chiffre d’affaires de l’entreprise en question, mais bien une estimation qui repose sur le montant que des investisseurs ont payé lors de la dernière levée de fonds pour acheter une certaine fraction du capital. Il suffit par exemple qu’un investisseur apporte 100 millions de dollars dans le but de détenir 10% de l’entreprise pour que celle-ci atteigne une valorisation d’un milliard, alors même que ses résultats financiers peuvent, et sont très souvent, d’un ordre bien plus modeste.

Le terme de « licorne » a été évoqué pour la première fois en 2013 par Aileen Lee, une investisseuse américaine spécialisée en capital-risque et fondatrice de Cowboy Ventures. Au travers d’une étude, elle a montré que moins de 0,1 % des entreprises qui recevaient des investissements de capital-risque arrivaient à atteindre des valorisations dépassant le milliard de dollars. Ainsi, à la suite de cette observation, elle a nommé « licornes » ces start-ups uniques qui arrivaient à réaliser cette prouesse. En France, la première à être apparue est l’entreprise de covoiturage BlaBlaCar fondée en 2006, et à qui il a fallu neuf ans pour décrocher ce statut et être valorisée au-dessus d’un milliard de dollars.

La première licorne française n’est donc apparue qu’en 2015, et jusque très récemment, la France se positionnait encore assez en retrait dans ce domaine et peinait à faire émerger des jeunes entreprises innovantes, avec le potentiel de devenir des champions de leurs domaines. Malgré son statut d’économie de premier plan et avec un PIB qui représente près de 20% de celui du continent européen, notre pays ne présentait pas un écosystème d’incubation de start-up des plus dynamiques et peinait à faire honneur à son rang dans ce domaine. À titre d’exemple, durant l’ensemble de l’année 2016, seuls 2 milliards de dollars ont été levés par toutes les start-ups de l’Hexagone, sachant que cette somme a été enregistrée sur les trois premières semaines de cette année 2022. Mais alors comment expliquer la prolifération si spectaculaire de ces licornes, alors même que l’économie du pays est encore très affectée par la crise liée à la pandémie ?

Un des principaux éléments déclencheurs est très probablement l’objectif fixé par Emmanuel Macron en septembre 2019 lors d’une rencontre avec des entrepreneurs et investisseurs. Le président y a fait part de son ambition de voir le nombre de licornes françaises atteindre 25 d’ici à 2025, sachant qu’en 2019 leur nombre était alors de 7. La prise de position du gouvernement et l’objectif officiellement annoncé ont sûrement dû fixer un cap clair à atteindre et concentrer les efforts pour accélérer l’émergence de ces acteurs. Ainsi, à peine deux ans plus tard, ce nombre est déjà atteint grâce aux très nombreuses levées de fonds réalisées par les start-ups françaises, en particulier durant l’année 2021 et en ce début d’année 2022.

La multiplication des levées de fonds trouve quant à elle son origine dans plusieurs facteurs. Tout d’abord, les investisseurs sont aujourd’hui moins « frileux » et sont moins réticents à investir de grosses sommes d’argent, de l’ordre de plusieurs dizaines voire centaines de millions de dollars, dans des projets innovants et à fort potentiel pour ne pas passer à côté du champion de demain. En effet, comme l’explique l’article du site Groupe IGS, plusieurs fonds en capital-risque, c’est-à-dire des fonds spécialisés dans le financement de jeunes entreprises innovantes à haut potentiel de croissance, mais présentant toutefois toujours un risque important de défaillance, ont raté le coche et n’ont pas investi au moment opportun dans de futurs géants comme Facebook ou Uber. Désormais, ces investisseurs ont conscience que les choses évoluent très vite et qu’une entreprise extrêmement rentable peut émerger très rapidement, et c’est fort de ce constat que les levées de fonds se multiplient, et que des pays comme la France voient des licornes émerger de plus en plus vite. De plus, le contexte monétaire consécutif à la pandémie et les nombreuses mesures de relance, dont par exemple des injections de liquidités dans l’économie pour redynamiser l’activité, ont très clairement donné des ressources supplémentaires aux investisseurs.

Par ailleurs, de nombreuses mesures d’accompagnement des start-ups ont vu le jour sur notre territoire et permettent d’aider au lancement de nombreux projets innovants. Par exemple, Bpifrance aide depuis plusieurs années déjà environ 2000 start-ups au travers de différents dispositifs comme des bourses, des prêts ou des prises de participation. Au total, ces diverses aides de la banque publique d’investissement représentent plus d’un milliard d’euros destinés à l’accompagnement et l’émergence de jeunes entreprises innovantes en France. Enfin, Robin Rivaton de L’Express précise également que les entrepreneurs français sont désormais plus expérimentés et ont acquis une mentalité plus ambitieuse et n’hésitent plus à projeter une expansion au-delà des frontières de notre pays lors de la création de leurs projets.

Ainsi, moins de trois ans après la prise de parole du Président de la République, la barre des 25 licornes a été atteinte avec l’émergence d’une quinzaine d’acteurs dans ce laps de temps très réduit. À ce titre, l’année 2021 a été particulièrement prolifique avec l’arrivée de 12 licornes et des levées de fonds record qui ont augmenté de 115% par rapport à 2020 pour atteindre 11,56 milliards d’euros. Par ailleurs, les levées de 2021 ont dépassé la barre des 100 millions d’euros à 22 reprises, ce qui n’est arrivé que neuf fois en 2020.

Cet élan semble également s’accélérer en ce début d’année 2022 et des start-ups comme Payfit, Ankorstore ou Qonto ont rejoint ce club très fermé, avant qu’Exotec ne devienne officiellement la 25ème licorne le 17 janvier dernier après une levée de fonds de 335 millions de dollars. D’ailleurs, le cas d’Exotec est assez intéressant car l’entreprise est spécialisée dans la conception de robots pour faciliter la logistique, ce qui fait d’elle la première licorne française purement industrielle. Bien entendu, Emmanuel Macron a réagi à cette annonce et s’est félicité de la réussite de cet objectif.

De plus, le lendemain de l’annonce concernant Exotec, c’est la start-up Spendesk qui propose une plateforme de centralisation et de gestion des dépenses professionnelles qui est devenue la 26ème licorne, après un tour de table de 100 millions d’euros. Ces trois premières semaines de 2022 auront donc vues cinq levées de fonds dépasser les 100 millions d’euros, et au total près de deux milliards d’euros ont déjà été rassemblés par les start-ups de l’Hexagone. Au regard de ce début d’année particulièrement enthousiasmant, il est fort possible que les chiffres de l’année 2021 soient largement dépassés et que de nouvelles licornes émergent en nombre.

Panorama de l’écosystème actuel

Les 26 licornes de l’écosystème français ont cependant des valorisations assez inégales. Si près de la moitié d’entre elles se voient attribuées une valeur qui dépasse à peine le milliard de dollars, d’autres ont au contraire des valorisations bien plus conséquentes, et à ce titre, les trois plus grosses se détachent assez nettement du reste du peloton. La troisième place est actuellement occupée par Sorare, valorisée à 4.3 milliards de dollars, qui propose de collectionner des cartes de footballeurs sous forme de NFT et de les utiliser dans un jeu de « fantasy football ». Elle est précédée par Qonto, estimée à 4.9 milliards de dollars, qui est une entreprise de services financiers qui ne s’adresse pas aux particuliers mais aux PME et TPE. Enfin, la première licorne française est la marketplace de vente de produits électroniques reconditionnés Back Market, valorisée à 5.7 milliards de dollars.

Les 25 licornes françaises racontées en quatre graphiques

À l’image des valorisations, le montant des levées de fonds qui ont permis à tous ces acteurs de devenir des licornes sont eux aussi très inégaux. Si pour certaines start-ups comme Ivalua ou Lydia, des tours de tables inférieurs à 100 millions d’euros ont suffi, la grande hétérogénéité des entreprises et de leurs secteurs d’activité ont amené d’autres à lever plusieurs centaines de millions d’euros à l’image de Sorare ou Qonto.

Les secteurs dans lesquels les licornes de l’Hexagone évoluent sont donc très divers. L’infographie de Geraldine Russell de Maddyness propose de les répartir en 14 catégories différentes, parmi lesquelles quatre se distinguent particulièrement par leur importance et par le fait qu’elles dépassent les 5 milliards de dollars de valorisation. On constate donc que les licornes françaises sont davantage portées sur les secteurs de l’e commerce (13 milliards), la fintech (8.9 milliards), les divertissements (8 milliards) et le retail (5.48 milliards).

Où se situe la France par rapport à ses voisins ?

Malgré les résultats très positifs et la possible émergence de nombreuses nouvelles licornes sur l’année à venir, la France est encore assez loin d’être la première nation européenne dans ce domaine, et elle est encore nettement devancée par l’Allemagne et le Royaume-Uni. Les start-up des deux nations ont par exemple récolté respectivement 16 et 32 milliards de dollars de levées de fonds en 2021, ce qui correspond à des hausses de 200% et de 130%, encore bien au-delà des 11,56 milliards levés et de la hausse de 115% observée en France. De plus, face aux 12 nouvelles entrées en France sur l’année passée, le Royaume-Uni en a par exemple enregistré 20 et aucun des 10 plus gros investissements en Europe n’a eu lieu dans l’Hexagone.

L’Allemagne compte de son côté 25 licornes, avec des noms très connus comme le courtier Trade Republic ou la banque en ligne N26. Par ailleurs, le pays possède une « décacorne », une start-up valorisée à plus de 10 milliards de dollars baptisée Celonis, qui utilise l’intelligence artificielle pour signaler les problèmes dans les chaînes de traitement. En plus de Celonis, au moins deux autres entreprises allemandes possèdent une valorisation supérieure au leader français Back Market qui se trouve au 15ème rang européen.

Cependant, l’écart avec le Royaume-Uni est encore plus conséquent. Avec ses 37 licornes, il est en effet le leader incontesté de notre continent et détient en outre la fintech Checkout.com spécialisée dans les services de paiement. Cette entreprise possède la deuxième plus haute valorisation européenne avec 40 milliards de dollars, et a récemment levé un milliard de dollars auprès d’investisseurs.

Un autre groupe d’acteurs sans doute plus surprenants, fait néanmoins une vraie concurrence à la France. Les pays scandinaves ne comptent il est vrai pas beaucoup de licornes, mais on y retrouve cependant des acteurs de premier plan. La Suède possède par exemple Klarna, la plus grosse licorne d’Europe, aujourd’hui valorisée à plus de 45 milliards de dollars, ou encore Northvolt, qui fait elle aussi partie du top 10 avec 12 milliards de valorisation.

Les nouveaux objectifs

Ainsi, bien que la situation en France soit très positive, il faut tout de même reconnaître que notre pays est assez largement devancé, notamment par ses voisins Allemands ou Britanniques. L’enjeu est désormais de maintenir cette évolution et de se rapprocher petit à petit du rythme de ces deux autres nations. Bons nombres d’observateurs et de responsables, notamment la directrice de France Digitale Maya Noël, considèrent en effet que cet objectif de 25 licornes n’était qu’une étape, et qu’il faut désormais veiller à conserver cette dynamique pour faire émerger de nouveaux acteurs et faire croître ceux qui se sont déjà affirmés. Dans cette optique, les efforts devront assurément être poursuivis dans la formation aux métiers du numérique et dans le développement de capacités de financement de ces pépites par des fonds français. En effet, les dernières levées de fonds ont été menées par des fonds d’investissements étrangers comme les américains Tiger ou Goldman Sachs, ou encore les asiatiques SoftBank et Tencent. Sur les 22 levées de fonds de plus de 100 millions d’euros de l’année 2021, une seule opération aura vu un acteur français (Bpifrance) être le plus gros investisseur. Conscients de cette faiblesse, les dirigeants de France Digitale ont ainsi déclaré dans une tribune « les startups tricolores ambitieuses ne trouvent pas encore sur notre sol les financements suffisants pour devenir des leaders européens ou mondiaux, et sont trop souvent obligées de se tourner exclusivement vers des investisseurs étrangers. Leurs perspectives d’introduction en Bourse à Paris sont aussi limitées face à l’attractivité de la bourse américaine ».

L’introduction en bourse est un autre point assez sensible qui pousse assez régulièrement un acteur à fort potentiel à quitter le territoire pour aller s’installer à l’étranger. En effet, certains investisseurs restent encore assez dubitatifs quant à la capacité de la Bourse de Paris d’offrir les conditions idéales pour se valoriser et bien souvent les meilleures entreprises préfèrent se rapprocher de Wall Street. Cependant, les acteurs français ne restent pas de marbre face à cette situation et ont déjà affiché leur volonté de créer une réplique européenne du Nasdaq pour éviter l’exil des entreprises les plus prometteuses.

À l’échelle du continent, Emmanuel Macron a également fixé de nouveaux objectifs. Le Président de la République a en effet annoncé vouloir faire émerger 10 géants de la tech européens, c’est-à-dire des entreprises valorisées à plus de 100 milliards de dollars, d’ici 2030. Au vu de la situation actuelle, cela peut sembler ambitieux, et comme le précise la directrice de la Mission French Tech Clara Chappaz à l’Usine Digitale, « sur les dix plus grosses entreprises mondiales cotées, huit sont dans la tech mais pas une seule n’est européenne ». Ainsi, la création de ces géants européens, qui devront être en mesure de rivaliser avec les mastodontes américains et asiatiques, devra très certainement faire face à de nombreux défis. Il faudra sans doute réussir à s’imposer sur ces deux autres continents, une chose peu aisée et sur laquelle bons nombres d’entreprises du vieux continent en quête d’expansion se sont déjà cassé les dents. Par ailleurs, avant même de s’attaquer aux marchés mondiaux, il faut d’abord mieux accompagner le développement des acteurs prometteurs sur le territoire européen. Pour ce faire, il sera très certainement nécessaire de développer une structure et des règles plus harmonisés qui permettront la croissance des entreprises, car bien que l’Union Européenne compte presque 500 millions d’habitants, elle reste morcelée de 27 États membres avec des langues, des lois et des cultures bien différentes, ce qui représente un obstacle de taille.

Licornes et souveraineté

Si l’émergence d’entreprises innovantes et prometteuses sur des secteurs clés comme la tech est un signe très encourageant pour la compétitivité de notre économie, il ne faut pas pour autant occulter les limites de ce développement. À ce titre, même si le Président de la République s’est réjoui de la multiplication des licornes et de leur apport pour la souveraineté française, ce point est remis en question par de nombreux observateurs. Qu’elles appartiennent au secteur bancaire, au retail, à l’e-commerce ou autre, les start-ups européennes, et à fortiori tricolores, sont encore extrêmement dépendantes des GAFAM pour proposer leurs services et assurer leur croissance. Pour ces entreprises de taille encore modeste, les dépenses pour des services numériques sont significatives, et dans ce domaine, des solutions comme AWS d’Amazon ou Google cloud pour l’hébergement, ou encore Facebook/Meta et Google Ads pour les publicités sont encore de très loin les plus utilisées. Dans le dernier baromètre de France Digitale avec le cabinet EY publié en septembre 2021, 73% des 800 start-ups interrogées indiquent une dépendance envers les GAFAM et 43% d’entre elles estiment même qu’elles « ne pourraient pas se développer sans eux ». La dépendance encore très marquée de nos acteurs nationaux vis-à-vis des géants américains va alors dans le sens contraire des ambitions affichées de faire éclore des entreprises capables de devenir des acteurs de premier plan et des concurrents crédibles pour les produits des GAFAM.

La multiplication des pépites de la French Tech qui bien souvent hébergent leurs serveurs et utilisent toutes sortes de services chez les GAFAM et aident donc à leur prospérité, remet ainsi en cause les propos du Président de la République et mettent au contraire en lumière un modèle qui semble affaiblir notre souveraineté. Au-delà de remplir des objectifs chiffrés, la French Tech doit donc également veiller à faire émerger des acteurs qui seront capables de proposer des solutions alternatives sur des secteurs stratégiques, et qui viendront réellement renforcer la souveraineté de notre pays. Dans cette optique, le chercheur Romain Cosson et l’entrepreneur Romain Fouilland ont proposé dans une tribune parue dans Le Monde de « prendre une place centrale dans l’écosystème des fournisseurs en s’attaquant au marché bien plus fractionné des briques élémentaires ». Ces briques élémentaires désignent les modules et addons proposés en complément des services basiques des GAFAM mais qui répondent selon les auteurs de la tribune « à un besoin technique et indivisible pour une start-up ». En effet, vouloir concurrencer directement les géants américains semble être au mieux très ambitieux, tandis que faire émerger des acteurs sérieux sur ces marchés beaucoup plus éclatés mais qui semblent tout aussi stratégiques pourrait être une option intéressante, tant en ce qui concerne la compétitivité économique nationale que les questions de souveraineté numérique.

Une autre alternative à explorer et très plébiscitée concerne le développement des deep tech, des start-ups qui proposent des produits ou des services sur la base d’innovations de rupture. Sur ce sujet, le « Plan Deeptech », porté notamment par Bpifrance, s’est vu doté d’un budget de 2.5 milliards d’euros sur 5 ans pour aider à leur développement. Cela a entre autres permis de fortement accélérer leur croissance si bien que les deeptech françaises sont aujourd’hui plus de 1700 et représentent 10 % de l’ensemble des start-ups françaises et captent plus de 20 % des montants levés, avec 1.1 milliards d’euros en 2020.

Dans un article publié sur le site de l’EGE consacré aux deeptech, Patrick Blancheton précise ainsi « la deeptech positionne les entreprises mais surtout les Etats compétitifs sur la scène internationale » et ajoute « La deeptech est à l’évidence un enjeux de souveraineté nationale (mais aussi pour l’Europe) pour initier entre autres une dynamique soutenue visant au leadership de notre économie numérique aux côtés des GAFAM (enjeux de société, contre-pouvoir, un autre web après les plateformes, un autre modèle économique, …), afin de limiter leur hégémonie et la dépendance absolue de la France, à des technologies étrangères ».

Il faut sans aucun doute se réjouir de la multiplication des licornes, ces acteurs innovants et à fort potentiel, et continuer à œuvrer à leur croissance pour que la France rattrape son retard sur les leaders européens. En revanche, une chose est sûre, si notre pays veut développer un écosystème tech cohérent et réellement compétitif, les questions de souveraineté numérique doivent être réellement prises en compte et les efforts accomplis dans ce sens se doivent d’être renforcés. En ce sens, l’accompagnement de filières stratégiques et à forte compétitivité comme la deeptech semble être une piste très prometteuse.

Par Louis-Mael Jouanno, promotion 2021-2022 du M2 IESCI

Sources Web

  • Géraldine Russell, (2022, 19 janvier). « 25 licornes, c’est fait. Et maintenant quel prochain objectif pour la French Tech ? » Maddyness
  • Léna Corot, (2022, 18 janvier). « La French Tech se targue d’avoir 25 licornes, et après ? ». L’Usine Digitale
  • Challenges, (2022, 20 janvier). « La France célèbre sa 25ème licorne, et après? ». Challenges
  • Géraldine Russell, (2022, 18 janvier). « Les 25 licornes françaises racontées en quatre graphiques ». Maddyness
  • Guillaume Bregeras, Charlie Perreau, Adrien Lelièvre, (2022, 17 janvier). « Qui sont les 26 licornes de la French Tech ? ». Les Echos
  • Valentin Hamon Beugin, (2022, 17 janvier). « Back Market, Sorare, Qonto… Voici la liste des licornes françaises ». L’Usine Nouvelle
  • Thomas Leroy, (2022, 18 janvier). « En matière de licornes, la France fait-elle mieux que ses voisins européens? ». com
  • Groupe IGS. « Les licornes, ces start-ups de plus d’un milliard de dollars ». groupe-igs.fr
  • Illan Knafou, (2022, 19 janvier). « Qui sont les dix plus grosses licornes européennes ? ». Les Echos Start
  • Boris Manenti, (2022, 17 janvier). « Les start-up sont passées de pigeons à licornes ». L’Obs
  • Robin Rivaton, (2022, 18 janvier). « French Tech : les secrets de la multiplication des licornes, par Robin Rivaton ». L’Express
  • Antoine Cornu, (2022, 19 janvier). « Licornes et souveraineté, l’enjeu majeur d’un modèle français pour l’économie européenne ». Portail de l’IE
  • Sylvain Rolland, (2022, 17 janvier). « Souveraineté, Bourse, Gafam, taille critique, mixité : les cinq faiblesses de la French Tech ». La Tribune
  • Patrick Blancheton, (2022, 17 janvier). « Deeptech, un enjeu de souveraineté nationale ? ». Ecole de Guerre Economique
  • Sylvain Rolland, (2021, 23 septembre). « Souveraineté : le succès de la French Tech profite-t-il vraiment à la France ? », La Tribune
  • Romain Cosson, Romain Fouilland, (2020, 15 décembre). « Le lien entre création de start-up françaises et souveraineté numérique est discutable ». Le Monde
  • Jonathan Grelier, (2022, 26 Janvier). « Pourquoi cette avalanche de licornes dans la tech française début 2022 ? ». L’Usine Nouvelle
  • Bpifrance, (2021, 15 mars). « Plan Deeptech : 3 chiffres, 2 ans, un seul but ». Bpifrance
  • Franck Sebag, (2021, 22 septembre). « Performance économique et sociale des start-ups du numérique en France en 2021 ». EY

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La conquête du métaverse : un enjeu géopolitique https://master-iesc-angers.com/la-conquete-du-metaverse-un-enjeu-geopolitique/ Wed, 09 Feb 2022 22:01:48 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3566 Le 28 octobre 2021, lors de l’événement Facebook Connect, Mark Zuckerberg, annonçait le changement de nom de la maison mère du réseau social Facebook regroupant les messageries WhatsApp et Messenger et les plateformes Facebook et Instagram. Elle s’appellera désormais Meta.… Continuer la lecture

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Le 28 octobre 2021, lors de l’événement Facebook Connect, Mark Zuckerberg, annonçait le changement de nom de la maison mère du réseau social Facebook regroupant les messageries WhatsApp et Messenger et les plateformes Facebook et Instagram. Elle s’appellera désormais Meta.

Meta comme métaverse, cette doublure numérique du monde physique mélangeant réalité virtuelle et réalité augmentée dans un univers persistant et présentée comme l’internet du futur. Incarnés en avatars, nous aurons la possibilité d’y exercer une infinité d’activités de loisirs et professionnelles dans un monde en trois dimensions : jeux, rencontres, shopping, concerts, réunions professionnelles, entretiens de recrutement, démarches administratives.

Pour les entreprises, la concurrence sur ce marché naissant, estimé à 800 milliards de dollars en 2024 selon Bloomberg Intelligence et 1,5 trilliard de dollars en 2030 selon PwC, est déjà intense. Il s’agit de devenir leader le plus rapidement possible. En effet, l’économie numérique est caractérisée par une tendance au monopole ou à l’oligopole. Investir rapidement un marché de la sphère numérique permet de bénéficier d’effets de réseau liés à la participation des utilisateurs et de faibles coûts marginaux offrant à une entreprise l’opportunité d’en devenir leader. Si des droits de propriété intellectuelle (brevets, certificat d’utilité, etc…) sont attribués, la capacité à s’imposer face aux concurrents est alors accentuée.

Si l’apparition de cette technologie attire naturellement les convoitises des acteurs privés, elle semble aussi devenir une question géopolitique. De la même manière que pour les entreprises, plus tôt un Etat investira le métaverse, plus il aura de chances de le dominer.

De nombreux enjeux géopolitiques : étatique, coopétition, influence, protection des données personnelles, souveraineté numérique et équipement

L’émergence du métaverse fait apparaître de nombreux enjeux géopolitiques :

  • D’abord, un enjeu étatique : cette doublure numérique s’affranchirait des frontières et des juridictions nationales pour attribuer la primauté aux codes des acteurs du numérique. Quid des relations internationales ? Quid du Droit international qui les régit ? Qui sera au centre des enjeux mondiaux ? Les Etats auront-ils un pouvoir de contrôle et de régulation sur cet univers virtuel ?
  • Ensuite, un enjeu de coopétition pour développer l’interopérabilité des différents métaverses : en effet, pour assurer la circulation des données entre les différents univers persistants, plusieurs défis techniques sont à relever : interopérabilité des points d’accès, flexibilité créative, intégration d’avatars ou encore dimension spatiale. Ces problématiques sont si complexes qu’il est nécessaire de collaborer entre pays rivaux et entreprises concurrentes pour y répondre.
  • Un enjeu d’influence : l’Etat qui pourra se présenter comme un acteur fort du métaverse, le leader, voire le fondateur pourra intégrer cette qualité à sa stratégie de soft power, c’est-à-dire « l’habileté à séduire et à attirer » (Nye, 1990). S’il en détient le monopole technique, économique ou juridique, il pourra également user de son hard power, c’est-à-dire son pouvoir de coercition, afin d’imposer sa volonté à d’autres Etats.
  • Un enjeu de protection des données personnelles : si dans le cadre de l’Internet actuel, celles-ci bénéficient d’un arsenal juridique important – par exemple, en France, la loi du 6 janvier 1978 dite « Informatique et libertés », le règlement général sur la protection des données (RGPD), la directive (UE) du 27 avril 2016 dite “Directive Police Justice” – qu’en sera-t-il dans le métaverse ? La problématique n’en sera que plus exacerbée, alors qu’actuellement la protection des données personnelles est déjà jugée insuffisante et inadaptée dans certaines situations (Thibaut Douville, 2018).
  • Un enjeu de souveraineté numérique : la domination des GAFAM sur l’économie numérique européenne est déjà très importante. Par exemple, en France, les données de la SNCF, d’Orange et de Doctolib sont hébergées par Amazon Web Services. Le 18 octobre 2021, Facebook annonçait avoir l’intention de recruter 10 000 personnes en Europe pour créer un métaverse… Une façon d’asseoir un peu plus cette domination américaine sur le vieux continent ?
  • Un enjeu d’’équipement : le principal frein au déploiement du métaverse est le retard technologique du matériel nécessaire. Effectivement, si les casques de réalité virtuelle et les lunettes de réalité augmentée existent déjà, ils pâtissent d’un manque de puissance de traitement et sont encore peu ergonomiques. De plus, les technologies d’affichage sont encore à améliorer fortement. Le fossé technologique à combler pour permettre l’utilisation optimale du métaverse est encore immense et verra sûrement « une lente émergence de services et de produits » (Matthew Ball, capital-risqueur, fondateur de l’indice Roundhill Ball Metaverse ETF).

 

Dans ce contexte, quelles stratégies de conquête du métaverse ont développé les Etats-Unis, la Chine et l’Europe ? Quelle place pour la France dans cette compétition mondiale ? Faisons le point sur les mutations en cours.

Etats-Unis : Facebook, fer de lance économique et réglementaire du mouvement d’investissements américains dans le métaverse

A travers le rebranding de Facebook en Meta, les Etats-Unis semble exprimer leur velléité d’accaparer la notion même de « métaverse » et affirmer leur domination sur ce nouvel espace de conquête. A l’instar de la firme de Menlo Park qui a investi 10 milliards de dollars dans le métaverse en 2021, de nombreuses entreprises américaines investissent ce marché émergent. Ainsi, Microsoft s’est lancé dans la création d’un métaverse d’entreprise. En mai 2020, Apple a acquis la start-up californienne NextVR, spécialisée dans la diffusion d’évènements sportifs via des casques de réalité virtuelle. Niantic, spécialisée dans les jeux en réalité augmentée et à l’origine de la création de Pokémon Go, a levé 300 millions de dollars auprès de Coatue et a noué des partenariats avec Universal Pictures et Warner Music Group. Epic Games, entreprise créatrice du célèbre jeu Fortnite, a levé pour sa part un milliard de dollars. Decentraland propose des terrains virtuels à vendre ou des offres d’emploi au sein même du métaverse. Roblox permet d’ores-et-déjà l’organisation de concerts tels que celui de Lil Nas X en novembre 2020, prévoit des événements sportifs en parallèle de la coupe du monde de football 2022 et propose des espaces showroom à des marques telles que Nike, qui a inauguré le « Nikeland ». Reebok a lancé une collection de 200 chaussures virtuelles sur la plateforme d’échanges de NFT (Non-fungible token) Wax Atomic Hub. Jensen Huang, PDG de Nvidia a annoncé la création d’un nouveau métaverse par son entreprise. Enfin, Unity Software a acquis Weta Digital, le studio d’effets spéciaux utilisés dans la trilogie du « Seigneur des anneaux » ou dans le film « Avatar » pour un montant de 1,6 milliards de dollars, en vue de se lancer dans la création de son propre univers virtuel.

Parallèlement à l’émergence de cette multitude d’acteurs de la tech américaine, Facebook travaille à créer un environnement juridique favorable au développement du métaverse et, au passage, éviter des déconvenues telles que les poursuites du régulateur américain, motivées par la lutte antitrust. En effet, les locaux de l’entreprise situés à Washington ont été transformés en bureau de campagne. Nick Clegg, vice-président de Facebook chargé des affaires mondiales et de la communication et Sheryl Sandberg, directrice des opérations de l’entreprise y mène de nombreuses actions de lobbying afin de créer des normes et des protocoles pour le métaverse : groupes de réflexion, conférences telles que celle baptisée « Journey to the Metaverse » organisée lors du festival d’idées « Atlantic Festival », rencontres avec des décideurs politiques, des universitaires, des partenaires et des experts.

Chine : un développement du métaverse encadré par le pouvoir central

Lors de la 34ème étude collective sur la promotion du développement sain de l’économie numérique de la Chine par le Bureau politique du Comité central du Parti Communiste Chinois (PCC), qui s’est déroulée le 18 octobre 2021 ; le dirigeant du pays, Xi Jinping, a affirmé la détermination de son gouvernement à devenir un acteur incontournable des mutations numériques en cours et a souligné l’importance de l’intégration des économies réelle et numérique.

En novembre 2021, la Chine a lancé le Metaverse Industry Committee, sous l’égide de la China Mobile Communications Association (CMCA), premier groupe de l’industrie du métaverse. Lors de cet évènement, Wu Zhongze, l’ancien vice-ministre du ministère des sciences et des technologies a confirmé que la Chine souhaite bénéficier de l’effet de levier de cette nouvelle technologie pour accélérer l’intégration des économies réelle et numérique et dominer les autres Etats. De plus, l’institut chinois des relations internationales contemporaines, think-tank proche du pouvoir, a souligné que l’investissement actuel dans le métaverse conditionne la sécurité nationale de la Chine à trois variables : l’adoption rapide des nouvelles technologies émergentes pour assurer son positionnement dans la compétition mondiale, la gestion de la sécurité technique (cyberattaques, infrastructure critique, vol ou falsification de données) et la maîtrise des impacts politiques, sociaux et économiques.

Dans ce contexte favorable, la tech chinoise semble être prise de frénésie. En effet, Alibaba a déposé plusieurs enregistrements de marques telles que “Ali Metaverse, “Taobao Metaverse” et “DingDing Metaverse sur la plateforme Qichacha. Tencent a déposé une centaine de marques liées au métaverse telles que « Timi Metaverse », « Kings Metaverse », « QQ Metaverse » ou « QQ Music Metaverse » et a investi dans l’organisateur de concerts virtuels Wave. Bytedance, le groupe propriétaire de TikTok a acquis la société de réalité virtuelle Pico pour 772 millions de dollars. Yunfeng capital, crée par Jack Ma, fondateur d’Alibaba, a investi 100 millions de dollars dans la société de réalité augmentée Nreal. Le 21 décembre 2021, Baidu a présenté le premier métaverse chinois, baptisé « Xi Rang » (Terre d’espoir) lors de la conférence « Create 2021 ». D’autres acteurs de la tech chinoise, tels que Kuaishou, iQiyi, Li Auto ou Netfase se sont également lancés dans la conquête de ce nouveau marché.

Néanmoins, la politique de répression réglementaire de Pékin envers les entreprises technologiques peut constituer un frein important au développement des acteurs chinois du métaverse. Déployée à partir d’octobre 2020, après des critiques acerbes du fondateur d’Alibaba, Jack Ma, envers les autorités de régulation financière, son objectif est d’assurer le contrôle de l’autorité centrale sur le secteur numérique dont les entreprises sont accusées de monopolisation du marché et de comportements anticoncurrentiels. Elle répond aussi au projet de « prospérité commune » du pouvoir, dont l’objectif est de lutter contre l’inégalité de la répartition des richesses en Chine.

En effet, des règles anti-monopole sont mises en place et les sanctions se multiplient. Ainsi, le 3 novembre 2021, l’introduction en Bourse d’Ant Group, filiale d’Alibaba, a été suspendue ; en avril 2021, une amende de 2,3 milliards d’euros est infligée à Alibaba pour abus de position dominante ; le « Uber » chinois, Didi, a été retiré des magasins d’applications après une levée de fonds de 4,4 milliards de dollars à Wall Street ; les acteurs de la tech projetant une introduction en bourse doivent désormais se soumettre à un examen de sécurité par l’Administration du cyberespace ; une loi de protection des informations personnelles est promulguée ; une limitation du temps hebdomadaire consacré aux jeux vidéo – qualifiés d’ « opium mental » par le pouvoir – par les mineurs est instaurée ; aucune licence de jeu vidéo n’a été accordée depuis juillet 2021 et une campagne contre l’idolâtrie des influenceurs a été organisée par le gouvernement. Enfin, à la Bourse de Shenzhen, les actions de Hubei Century Network Technology, entreprise de solution informatique et de ZQGame, développeur de jeux, se sont envolées après l’annonce de Meta par Mark Zuckerberg avant de chuter brutalement après la publication d’un article, dans l’Economic Daily – proche du pouvoir – fustigeant la spéculation sur les actions d’entreprises investissant dans le métaverse et soulignant la tolérance zéro des autorités de réglementation des valeurs mobilières.

Europe : devenir une puissance normative du métaverse

Dans cette course effrénée, l’Europe semble vouloir se démarquer en se positionnant comme le régulateur du métaverse et devenir une puissance normative, entendue comme une « puissance qui n’a fondamentalement que la norme comme instrument privilégié, voire exclusif, d’action internationale » (Laïdi, 2008). En effet, face aux colossaux investissements américains et chinois ainsi qu’au constat de l’absence d’un géant de la tech européenne capable de concurrencer les GAFAM et les BATX, l’Europe a choisi de protéger son marché intérieur. L’Europe a ainsi développé une régulation du numérique afin d’encadrer les acteurs de cette industrie. Durant l’année 2022, le Digital Markets Act (DMA) et le Digital Service Act (DSA) entreront en vigueur. Le premier encadrera les activités des plus grandes plateformes qualifiées de contrôleurs d’accès accusés de pratiques anticoncurrentielles et d’abus de position dominante ; le second harmonisera les législations nationales en matière de luttes contre les contenus dangereux, illégaux et illicites. Depuis 2020, les députés européens travaillent également sur une règlementation des usages de l’intelligence artificielle portant sur différents volets dont la responsabilité civile et l’éthique. Enfin, le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) veille à encadrer le traitement des données personnelles sur le territoire européen.

Ce cadre législatif de plus en plus contraignant a participé à la décision de Meta de recruter 10 000 ingénieurs européens en cinq ans afin de créer le métaverse de la firme, s’ajoutant aux 58 000 salariés actuels. A travers la voix de deux hauts responsables, Nick Clegg et Javier Oliver, le groupe déclare même avoir l’intention d’intégrer « les valeurs européennes telles que la liberté d’expression, la vie privée, la transparence et les droits des individus » dans ce projet. Toutefois, l’aspect législatif n’est pas la seule motivation de Meta. Effectivement, l’entreprise souhaite également investir le marché de l’Europe des 28, représentant 500 millions de consommateurs, bénéficier des compétences d’ingénieurs hautement spécialisés et diplômés d’universités parmi les mieux classées du monde, d’un écosystème d’entreprises technologiques de pointe et assurer sa maîtrise des flux de données européens dont la stabilité fut mise à mal par l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), rendu le 16 juillet 2020 et invalidant l’accord de transfert des données entre l’Union européenne et les Etats-Unis, dit « Privacy Shield ».

A l’instar des Etats-Unis, et de la Chine, de nombreuses entreprises ont investi le métaverse. Ainsi, BMW et NVIDIA se sont associées afin de dupliquer une usine du constructeur automobile et simuler virtuellement des opérations avant déploiement physique. L’entreprise allemande Move Digital développe des solutions complète afin d’assister ses clients à se déployer dans les différents univers virtuels. En Autriche, les startups Blackshark.ai (construction d’environnement 3D), Trilite (faisceau laser utilisable dans les lunettes AR) et ViewAR (lunettes AR) ont bénéficié de levées de fonds pour investir le métaverse. La société madrilène Virtual Voyagers participe au développement de la plateforme de concerts utilisée dans le métaverse annoncé par Zuckerberg. Aussi, le secteur européen de la mode semble très enthousiaste et les initiatives se multiplient. Adidas a annoncé son projet d’investir le métaverse « The Sandbox ». Zara a lancé une collection dans l’univers virtuel coréen « Zepeto ». La marque italienne Diesel a créé sa propre plateforme, BVX (Brave Virtual Xperience), qui s’appuie sur le métaverse, les NFT et les jeux numériques. Enfin, Gucci et Burberry ont développé une collection d’accessoires de mode, respectivement pour Roblox et le jeu métaverse Blankos Block Party.

France : une French Tech dynamique, mais des faiblesses en termes de volume d’innovation, de recrutement et de levée de fonds

Qu’en est-il de la France ? Lors de la présentation du plan d’investissement « France 2030 », le 12 octobre 2021, le président de la République française Emmanuel Macron, a déclaré vouloir « placer la France à nouveau en tête de la production de contenus culturels et créatifs ». Le même jour, la ministre de la Culture Roselyne Bachelot twittait que « 600M€ seront investis dans les technologies immersives, de nouvelles infrastructures de tournage et de production numérique et la formation ».

La French Tech connaît une croissance exponentielle. En effet, le 17 janvier 2022, le chef de l’Etat annonçait la 25ème licorne française, start-up valorisée à plus d’un milliard de dollars. Soit trois ans avant le cap de 2025, annoncé à l’Elysée lors du France Digitale Day, en septembre 2019.

L’écosystème industriel de la réalité augmentée et de la réalité virtuelle est particulièrement riche dans l’hexagone. En effet, l’annuaire de l’association AFXR, représentant les acteurs français des technologies immersives, recense 420 professionnels. Par exemple, le centre de conseil et d’innovation Clarté propose aux entreprises de développer des projets de technologies immersives et a notamment collaboré avec Renault. La startup Lynx a développé un casque combinant réalités virtuelle et augmentée. Le métaverse The Sandbox a été fondé en 2012, par deux Français, Arthur Madrid et Sébastien Borget et leur entreprise a levé 93 millions de dollars via le Vision Fund 2 de SoftBank. Le groupe Havas a lancé la solution « Metaverse by Havas » afin d’accompagner les marques dans leurs déploiements au sein de différents univers virtuels. La startup rennaise Simango a lancé un hôpital en réalité virtuelle afin de former le personnel soignant. Les institutions culturelles telles que le Museum d’Histoire Naturelle de Paris ou l’Atelier des Lumières développent également des projets d’expériences immersives afin d’enrichir leurs expositions artistiques. L’ensemble de ces acteurs bénéficient de l’accompagnement d’environ 380 incubateurs de startups et du soutien de l’Etat qui, à travers la banque publique d’investissement (Bpifrance) et l’écosystème French Tech, composé de startups, d’investisseurs et de décideurs, a octroyé plusieurs centaines d’allocations à environ 2000 startups ; a mis en place des dispositifs fiscaux tels que le Crédit Impôt Recherche ou le Crédit d’Impôt Innovation et a développé des concours d’innovation tels que les concours i-Lab et i-nov.

 

Néanmoins, la France pâtit d’un certain nombre de freins au développement du secteur industriel dédié au métaverse. D’abord, peu de brevets dans le domaine des technologies immersives sont déposés, ce qui témoigne d’un retard en termes de volume d’innovation par rapport à d’autres Etats. En effet, selon le rapport « Le marché des technologies immersives : enjeux et perspectives » de BearingPoint, publié en février 2021, la France en a déposé 9 depuis début 2020 alors que les Etats-Unis en compte 1000, l’Asie 900, l’Europe 500 et l’Allemagne 100.

Ensuite, les startups françaises rencontrent des difficultés de recrutement importante freinant leurs croissances. Selon Soumia Malinbaum, administratrice de la fédération Numeum, première organisation professionnelle du secteur du numérique, il manque chaque année 10 000 ingénieurs. De plus, une enquête qualitative menée en octobre 2021, par France Stratégie et la Direction générale des entreprises, auprès des acteurs du numérique français, a souligné que les difficultés de recrutement concernaient les profils techniques à 62%, largement devant le deuxième métier sous tension, les profils commerciaux à 17%. Aussi, la même étude montre que l’absence de candidats constitue l’une des principales sources de difficultés de recrutement pour 74% PME en 2019. Par exemple, en 2019, 75% des postes en cybersécurité sont restés vacants. Enfin, le montant des levées de fonds réalisées par les startups françaises est encore trop faible. Si elles ont réussi à lever plus de 10 milliards d’euros en 2021, soit deux fois plus qu’en 2020, ce montant reste deux fois inférieur à celui des startups britanniques qui ont levé 24 milliards d’euros et 28 fois inférieur à celui des startups américaines qui a atteint le record de 289 milliards d’euros.

 

Ainsi, au-delà d’une compétition entre acteurs privés du numérique, la domination du métaverse est devenu pour les Etats, un enjeu géopolitique majeur aux multiples aspects : étatique, coopétition, influence, protection des données personnelles, souveraineté numérique et équipement. Les investissements américains, avec en tête ceux du groupe Facebook, rebaptisé Meta pour mettre en avant son projet de construction d’un métaverse et marquer les esprits, se démarquent par leurs importances et sont accompagnés par un fort lobbying pour assurer un environnement réglementaire favorable. La Chine a démontré, à travers de nombreux événements et déclarations politiques, sa volonté d’intégrer économies réelle et numérique et de développer rapidement une industrie du métaverse. Néanmoins, le pouvoir central, déterminé à encadrer les activités des acteurs du secteur, a développé une politique de répression réglementaire qui peut constituer un frein au développement. Consciente des puissances financières, technologiques et économiques américaine et chinoise, l’Europe a choisi de devenir une puissance normative, en développant une régulation du numérique contraignante, afin de protéger son marché intérieur. Cette position européenne a accéléré les investissements de Meta en Europe afin de bénéficier des avantages économiques du continent, de maîtriser les flux de données et d’influencer la législation. Dans cette compétition mondiale, la France bénéficie d’un écosystème industriel des réalités virtuelles et augmentées dynamique et a atteint un montant record de levées de fonds par ses startups en 2021. Toutefois, ce montant reste faible comparé à ceux d’autres puissances, les difficultés de recrutement dans le secteur du numérique sont importantes et le volume d’innovations dans le domaine des technologies immersives est insuffisant.

Bien que l’unité de l’Occident dans la conquête du métaverse ne soit pas encore explicite, il semble probable que la bipolarisation actuelle du cyberespace formée par le bloc occidental et le bloc sous influence chinoise (Friedman, 2006) se retrouve rapidement de manière exacerbée, dans cette doublure numérique du monde physique.

Par Daniel Bosselet, promotion 2021-2022 du master IESCI d’Angers

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Robot_Tesla_Bot_plus_humain_qu’humain.mp4 https://master-iesc-angers.com/robot_tesla_bot_plus_humain_quhumain-mp4/ Sun, 12 Dec 2021 21:32:32 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3530 L’être humain est en quête constante de nouvelles technologies, il n’est jamais rassasié. Pour autant, faut-il donner vie à toutes les idées qui nous traversent l’esprit ? L’essor des nouvelles technologies est apparu à la fin du 20ème siècle, avec l’arrivée… Continuer la lecture

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L’être humain est en quête constante de nouvelles technologies, il n’est jamais rassasié. Pour autant, faut-il donner vie à toutes les idées qui nous traversent l’esprit ?

L’essor des nouvelles technologies est apparu à la fin du 20ème siècle, avec l’arrivée d’Internet et du Web. À partir des années 2000, elles sont devenues omniprésentes pour toutes nos tâches quotidiennes. En effet, pour chaque problème que nous rencontrons, une solution technologique est alors créée pour y remédier. C’est ce que l’on appelle le solutionnisme. Une notion abordée par Evgeny Morozov, chercheur et écrivain américain d’origine biélorusse, qui développe une idée selon laquelle il faudrait apporter une solution pour chaque problème rencontré, qu’ils soient entièrement réels ou pas. On peut donc se demander si le robot Tesla Bot, inventé par la société d’Elon Musk, répond-il aujourd’hui à un besoin existant ?

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C’est lors du Tesla AI Day en août dernier que Tesla a révélé à son public l’intention de créer un robot aux allures intimement humaines : le Tesla Bot. Pour Elon Musk, la création de cette nouvelle intelligence artificielle n’est finalement que le prolongement d’une intelligence artificielle d’ores et déjà présente dans les voitures électriques Tesla. En d’autres termes, cette transition de la citadine électrique vers le Tesla Bot s’explique en partie du fait de son processeur Full Self Driving (FSD) qui occuperait plus ou moins la fonction même d’un cerveau humain. Cette puce électrique rendrait donc possible le transfert technologique entre les deux intelligences artificielles. À l’heure actuelle, la voiture électrique n’a pas la capacité de rouler seule, il ne s’agit que d’une conduite semi-autonome. Si cette technologie est encore loin d’être au point, elle bénéficiera tout de même au Tesla Bot qui devra apprendre au même titre que la voiture à devenir à terme autonome.

Alors qu’Elon Musk, très optimiste, prévoit de créer un prototype de ce robot d’ici 2022, certains plus pessimistes comme Rodney Brooks, ancien directeur du MIT Computer Science and Artificial Intelligence Laboratory et co-inventeur du robot Roomba, ne voient se développer le robot qu’à partir de 2031. Cela ne laisserait finalement qu’une faible marge de 10 ans à Elon Musk pour réaliser un tel projet. Seul le temps pourra nous révéler qui des deux avait raison.

En se penchant davantage sur la personnalité d’Elon Musk, nous savons tout le déterminisme et le désir d’aventure dont il fait usage. Ce robot ne pourrait être qu’un échec ou bien une réussite, quoi qu’il en soit son souhait de réaliser un robot aux caractéristiques humaines sera accompli. À vrai dire, on ignore la véritable motivation de ce projet. S’agit-il uniquement d’un coup marketing pour la marque Tesla ou envisage-t-il réellement de créer ce robot ?

Malgré les nombreux débats qu’ont suscité cette annonce, les fans d’Elon Musk n’ont pas caché leur engouement envers ce robot pour le moins semblable à celui du jeu vidéo Detroit : Become Human. Ce jeu vidéo développé par la société Quantic Dream en 2018, raconte l’histoire déconcertante de plusieurs robots aux allures bien humaines.

Comme nous le montre cette image ci-dessus, les personnages principaux ont tout à fait l’air d’être humains. Dans la peau de chaque humanoïde, vous pourrez au cours de l’histoire, réaliser toutes sortes de tâches humaines plus ou moins valorisantes, au profit de personnes parfois très aisées. Certains des personnages sont maltraités voire tués. À la fin de l’histoire, l’un des robots prend l’initiative de se rebeller et se voit même exprimer des sentiments envers des humains. Ce jeu vidéo est à la fois avant-gardiste et percutant, car il permet de réfléchir à de nouvelles questions auxquelles nous n’aurions pas pensé auparavant. Est-ce là un avant-goût de ce qui nous attend à l’avenir ?

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Ce sont des mots que pourrait prononcer ce nouveau robot Tesla Bot. En effet, selon les caractéristiques données par Tesla lors de la conférence AI Day, le robot mesurerait 1m72, pour un poids total de 56 kilos. Il pourrait se déplacer à 8 km/h, porter 20 kilos et soulever 68 kilos du sol. Il serait muni d’un corps, de deux bras, deux jambes et une tête, une apparence finalement humaine. Nous ne sommes pas dans le jeu vidéo Detroit : Become Human, mais cette liste de caractéristiques nous laisse tout de même dubitatifs. Selon les créateurs, le robot serait capable de remplacer l’humain pour accomplir toutes sortes d’activités. Occuper un emploi, faire des courses, agir en tant que domestique… Mais que feraient les humains si les robots faisaient tout à leur place ? Notre cerveau n’est à l’heure actuelle pas conditionné à voir un robot réaliser des tâches nous étant naturellement destinées, et c’est tout à fait légitime. Si les humanoïdes avaient la capacité de réaliser des tâches humaines, ne seraient-ils pas également capables de recréer entre eux un langage indéchiffrable ? Une expérience qui s’est déjà produite en 2017 chez Facebook, où deux petits robots issus du laboratoire de recherche sur l’intelligence artificielle ont réussi à communiquer à partir d’une version modifiée de l’anglais.

À l’image des voitures Tesla qui sont munies de la puce Full Self Driving (FSD) et du supercalculateur Dojo, les Tesla Bot auraient d’une manière égale, la possibilité de s’entraîner afin d’éviter des obstacles, de deviner s’il s’agit d’un piéton, d’un feu rouge, etc… Bien que ce système ne soit pas fiable à 100%, cela permet aux intelligences artificielles d’être en constant apprentissage, en constante formation. Un apprentissage que l’on pourrait comparer à celui d’un enfant, car il apprend à se déplacer, à faire des choses par lui-même, à parler… Tout comme l’humain, le robot a besoin de nombreuses expériences pour devenir « adulte » et autonome. Nous tendons vers une robotisation de l’homme et une humanisation des robots. Étrangement, les mots utilisés pour parler du robot semblent être ceux adressés à un humain, pourtant ce n’est pas le cas on parle bel et bien d’un objet connecté, d’une intelligence artificielle.

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Avant toute chose, il serait important de connaître la véritable vocation de ce futur robot. Serait-il uniquement utilisé dans le cadre domestique ? Ou bien dans le cadre professionnel ? Quoi qu’il en soit, à l’image de la voiture Tesla qui affiche aujourd’hui un prix très élevé, la logique serait de penser que ce robot sera lui aussi très cher. Tesla est une marque de luxe qui n’est accessible que par une minorité de la population. Bien que nos intentions soient bonnes et que l’envie soit celle de passer au tout électrique, cela reste très difficile d’accès pour les personnes aux faibles revenus. Afin de préserver la planète dans les années à venir, il nous faudrait pourtant passer à l’électrique et abandonner les carburants traditionnels. Afin d’accompagner cette conversion, il existe aujourd’hui des primes mais qui sont loin d’être suffisantes.

Idéalement, ce robot pourrait servir à plusieurs publics spécifiques. En premier lieu, ce robot pourrait s’avérer utile pour une personne en situation de handicap, afin de l’aider dans la vie de tous les jours. Il pourrait lui préparer un repas, entretenir une discussion avec elle, la guider dans ses mouvements… Sous cet angle, ce robot pourrait être une innovation positive pour toutes les personnes qui en ont le besoin. C’est par ailleurs la première hypothèse mise en avant dans le jeu Detroit : Become Human. En effet, l’un des humanoïdes doit s’occuper d’une personne en fauteuil roulant à son domicile. En revanche, comme nous l’avons expliqué précédemment, le prix de ce dernier sera certainement très élevé et les aides ne sont pas toujours à la hauteur des espérances. Une fois encore, ce robot trouverait usage aux personnes en situation de handicap ayant la capacité de pouvoir le financer. Or, les personnes en situation de handicap ne sont pas toutes aisées, l’argent n’est pas lié aux capacités physiques ou mentales, c’est donc une sorte d’injustice sociale.

En second lieu, et comme nous l’avons dit à plusieurs reprises, ce robot pourrait servir aux personnes les plus aisées. En effet, cette minorité de la population emploie toujours pour une partie, des personnes dans le but de répondre à toutes sortes de besoins. La préparation de repas, l’entretien du logement, du linge et du jardinage, etc… Ce personnel muni d’une conscience et de sentiments est rémunéré pour effectuer toutes ces missions, il est récompensé pour le travail qu’il a produit. Or, que se passerait-il si nous venions à utiliser des robots à la place des humains ? Ce personnel robotisé aux allures humaines ne serait d’un part pas rémunéré, mais ne serait également pas récompensé pour les efforts qu’il a produits. Il n’a pas de conscience ni de sentiments, il ne fait qu’obéir aux ordres qu’on lui a préalablement indiqué de faire. Ne serait-ce pas là une sorte d’esclavagisme moderne ? N’est-il pas pervers d’employer des humanoïdes au service de l’humain pour asservir ses propres besoins ? Il nous est pour le moment impossible d’y répondre car il n’existe pas encore d’humanoïdes capables de réaliser cela. Toutefois, grâce au jeu vidéo Detroit : Become Human, nous pouvons déjà imaginer l’envers du décor. Les personnages principaux que nous contrôlons tout au long du jeu sont maltraités et sont parfois même tués. Dans ce jeu, il n’y a aucune règle ni aucune loi qui interdit aux humains de les traiter de la sorte, serait-ce là une sorte de vide juridique ? Dans ce contexte du 21ème siècle où l’intelligence artificielle est omniprésente au sein de notre société, il est légitime de poser ce genre de questions éthiques. Faudrait-il à l’avenir appliquer une loi obligeant les personnes ayant des robots, à les respecter et à les considérer comme des humains (2.0) ? Ce questionnement peut paraître prématuré mais a déjà suscité de nombreux débats.

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Comme l’ont expliqué à maintes reprises les créateurs lors de leur présentation au AI Day 2021, ce robot aurait la capacité de réaliser toutes sortes de tâches de travail. De ce fait, si le robot remplace l’Homme pour chaque tâche de travail, que fait l’Homme concrètement ? Ne serait-il seulement pas la personne qui répare les robots lorsqu’ils sont en panne ? Celui qui guide les humanoïdes dans leur travail lorsqu’ils ont un « bug » ? Ou bien celui qui rassure les robots lorsqu’ils sont « tristes » ? Il ne s’agit là que de simples hypothèses, mais il est essentiel de voir à quel point cela peut bouleverser le modèle organisationnel des entreprises de demain. Dans ce contexte, la perte du contact humain serait inévitable puisqu’il ne serait bon qu’à aider des robots qui ne sont pas vraiment humains. La formation des humains serait simplifiée, mais en contrepartie moins diversifiée. Il ne serait utile de les former que sur la création ou la réparation de robots. Dans le scénario le plus fâcheux où les robots seraient capables de « s’auto-développer », l’Homme ne servirait finalement plus à rien. Nous sommes loin d’imaginer ce que le futur nous réserve sur le plan technologique.

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Motivés mais aussi aveuglés par l’envie d’innover, nous oublions parfois de nous poser les bonnes questions. En effet, en cas d’accident, qui est responsable ? Si c’est le robot, comment peut-il plaider sa cause ? Il ne s’agit peut-être même pas de sa faute. L’Humain qui l’a créé, accueilli et qui l’a formé, lui a appris à devenir le plus humain possible. Dans ce cas le robot appartient à l’Homme et lui est rattaché, c’est donc de son ressort. Toutefois, s’il s’agit vraiment de la faute du robot, peut-on réellement dire que c’est l’Humain qui est responsable ? Il a formé l’humanoïde à agir seul, à se former, à vivre tel un humain, il doit donc assumer ses responsabilités en tant que tel. Une fois encore, ces questions peuvent paraître prématurées, mais elles ont déjà suscité de nombreux débats. Créer un humanoïde n’est pas aussi simple que de créer un robot aspirateur. On sait que ce robot aspirateur ne pourra pas développer d’autres fonctions que celle de nettoyer, or l’intelligence artificielle a déjà su faire preuve de créativité en inventant elle-même un langage codé que l’Humain n’a pu déchiffrer.

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Nous avons abordé le cas suivant à plusieurs reprises dans cet article. Si le robot est conscient de pouvoir être formé dans l’élaboration de tâches humaines afin d’aider d’autres personnes, pourquoi ne serait-il pas également capable de développer lui-même de nouvelles pratiques et de nouveaux langages ? Rien n’est impossible avec l’intelligence artificielle. La dernière affaire sur le sujet date de 2017 avec les robots appartenant au laboratoire de recherche sur l’intelligence artificielle du groupe Facebook. Les deux auteurs de cette affaire s’appellent Alice et Bob, deux robots qui ont réussi à recréer un langage autre que l’anglais.

Les deux robots ont été par la suite désactivés par leurs créateurs en expliquant que le résultat obtenu n’était simplement pas celui espéré, et qu’il ne fallait pas craindre ces robots. Dhruv Batra, chercheur pour le laboratoire de Facebook a insisté sur le fait que ces robots avaient seulement créé des abréviations comme pourraient tout aussi bien le faire les humains.

Ce concept de rébellion reste pour l’instant très abstrait, bien que le jeu vidéo Detroit : Become Human nous aide à y voir plus clair sur le sujet. Ce jeu met en exergue plusieurs humanoïdes au service de personnes qui pour la plupart sont violentes. Même s’il ne s’agit que d’un jeu vidéo, cela permet de visualiser le fonctionnement d’une société où les humains et les humanoïdes vivent mutuellement, et nous aident à réfléchir à de nouvelles règles qui pourraient être mises en place concernant l’utilisation de ces humanoïdes.

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Ce nouvel humanoïde Tesla annonce de bonnes comme de mauvaises nouvelles. L’aspect positif de cette innovation, c’est qu’il pourrait permettre d’aider les personnes en situation de handicap dans leur quotidien. Bien que l’on envisage son prix de vente très élevé, ce qui pourrait compromettre la phase d’achat, cet aspect du robot est pour le moins valorisant. En revanche, l’utilisation de ce robot à des fins abusives comme nous le montre le jeu vidéo Detroit : Become Human, décrédibilise quelque peu cette innovation. Pour l’instant cette situation très spécifique ne s’est jamais produite, il ne s’agit que de concepts très abstraits. En revanche, avec l’annonce récente du Metaverse, nous tendons vers une réelle gamification de la société qui pose de nouvelles problématiques sur le sujet. Il serait peut-être nécessaire d’instaurer de nouvelles règles ou des lois pour combler ce probable vide juridique. Ces deux innovations vont très certainement bouleverser le monde de demain sur notre façon de vivre, de travailler en entreprise, de réagir auprès de cette nouvelle forme de vie robotisée. Nous sommes encore loin de voir cet humanoïde exister. Pour l’instant, la seule intelligence artificielle qui fonctionne approximativement, est celle qui est présente dans la voiture électrique Tesla. Avant de vouloir créer une nouvelle intelligence artificielle, il serait peut-être nécessaire de finaliser le projet de la voiture Tesla ? En un mot, Elon Musk semble brûler quelques étapes concernant le déploiement et la démocratisation de l’intelligence artificielle Tesla au sein de la société. Au vu des nombreux débats que suscitent cette innovation, notre société ne semble pour l’instant pas préparée pour un tel changement technologique en si peu de temps. Il va falloir attendre quelques années encore avant de voir un humanoïde nous servir notre café du matin …

Par Antonin Gatard, promotion 2021-2022 du M2 IESCI d’Angers

Sources.flv

-Amélie Charnay, 2021. Elon Musk peut-il vraiment créer un robot humanoïde dès 2022 ?

<https://www.01net.com/actualites/elon-musk-peut-il-vraiment-creer-un-robot-humanoide-des-2022-2047772.html>

-Automobile-propre, 2021. <https://www.automobile-propre.com/wp-content/uploads/2021/08/teslabot-hd.jpg>

-Boris Manenti, 2021. Elon Musk va-t-il mettre au point le premier robot humanoïde en moins d’un an ? <https://www.nouvelobs.com/economie/20210828.OBS47984/elon-musk-va-t-il-mettre-au-point-le-premier-robot-humanoide-en-moins-d-un-an.html>

-Dr Nozman, 2021. Pourquoi le Tesla Bot est effrayant ? (Et incroyable). <https://www.youtube.com/watch?v=gqaWYZHrrz8>

-Emmanuel Touzot, 2021. Tesla Bot : tout ce qu’il faut savoir sur l’incroyable robot d’Elon Musk. <https://www.automobile-propre.com/tesla-bot-tout-ce-quil-faut-savoir-sur-lincroyable-robot-delon-musk/>

-FranceInfo, 2017. Intelligence artificielle : deux robots Facebook développent leur propre langage. <https://www.francetvinfo.fr/internet/reseaux-sociaux/facebook/intelligence-artificielle-deux-robots-facebook-developpent-leur-propre-langage_2308367.html>

-Investing.com, 2021. Elon Musk révèle son projet Tesla Bot.

<https://fr.investing.com/news/most-popular-news/elon-musk-revele-son-projet-tesla-bot-2040262>

-Playstation Store, Sony Interactive Entertainment, 2018. <https://image.api.playstation.com/vulcan/img/rnd/202010/2119/s5v9cfHUJlxYOJxlO3gUibyq.png>

-Rodney Brooks, 2021. <https://twitter.com/rodneyabrooks/status/1428868522973700099>

-William, 2021. Le projet futuriste Robot Tesla : tout ce qu’il y a à savoir ! <https://www.lesnewseco.fr/le-projet-futuriste-robot-tesla-tout-ce-quil-y-a-a-savoir-27975>

-Yohan Demeure, 2017. Des robots Facebook désactivés après avoir eu une conversation quelque peu étrange… <https://sciencepost.fr/robots-facebook-desactives-elabore-propre-langage/>

 

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Impact de la crise de la Covid sur les évènements du monde du Luxe https://master-iesc-angers.com/impact-de-la-crise-de-la-covid-sur-les-evenements-de-la-mode-de-luxe/ Thu, 17 Jun 2021 09:53:42 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3480 Au printemps 2020, les entreprises du monde entier ont dû s’adapter pour faire face à la crise liée à la COVID 19. Les mesures de confinement auxquelles les gouvernements ont recouru ont bouleversé l’organisation des entreprises. Les firmes multinationales ont… Continuer la lecture

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Au printemps 2020, les entreprises du monde entier ont dû s’adapter pour faire face à la crise liée à la COVID 19. Les mesures de confinement auxquelles les gouvernements ont recouru ont bouleversé l’organisation des entreprises. Les firmes multinationales ont vu une complexité se rajouter à leur complexité et chaque secteur a été touché. Les informations ont fusé de partout sur l’approvisionnement des magasins de première nécessité, dits commerces essentiels, sur les rayons vides ou les ruptures de stocks en raison de l’approvisionnement à l’international et de la mise à l’arrêt de la Chine, grand pays producteur, en raison du fait que le berceau de la pandémie a été Wuhan, ville de la Chine centrale. Il y a eu pourtant un secteur, moins médiatisé, qui a tout autant été touché pour les mêmes raisons : le secteur de la mode et du luxe. En effet, dans les années 2000, le marché de la mode de luxe a gagné la Chine. La production jadis très concentrée en Italie a bougé vers la Chine, attirée par le faible coût de la main-d’œuvre. Ont alors suivi les grands magasins et showroom lancés sur les traces de la nouvelle clientèle chinoise qui a gagné en pouvoir d’achat et prête à s’acheter des articles de luxe.

En janvier 2020 apparaissaient officiellement les premiers cas de coronavirus en Chine. S’en sont suivi le confinement des villes puis du pays et la fermeture des frontières. Cette situation inédite a paralysé de nombreuses productions et canaux de distribution disruptant ainsi toute la chaîne d’approvisionnement dans plusieurs secteurs. La particularité du secteur de la mode de luxe est que les nombreux évènements, rendez-vous culte organisés à des moments précis de l’année, ont dû également être modifiés ou annulés, d’autant plus que la maladie a gagné très vite le deuxième pays au cœur du secteur qu’est l’Italie, avant de se propager à l’échelle planétaire, alors que les évènements de la mode de luxe rassemblent chaque année des milliers de visiteurs du monde entier.

La mode est aussi vieille que le monde. Elle renvoie aux goûts vestimentaires d’une époque et d’une région ainsi qu’à l’image que la société s’en fait. L’industrie a renforcé sa présence dans le monde avec la conception des magazines de mode au 18ème siècle et comprend le textile, les vêtements, l’horlogerie et la bijouterie, chaussures et maroquinerie, parfum, cosmétique et optique. Ce marché est dominé par des marques françaises comme Louis Vuitton, Chanel, Cartier, Saint Laurent, détenant la plus grande part de marché (23,5% du chiffre d’affaire du top 100, selon une étude de Deloitte). Ce qui fait du luxe l’un des secteurs les plus dynamiques de l’économie française avec un chiffre d’affaire de 150 Milliards d’Euro en 2019, trois fois plus que l’aéronautique. Le secteur est également le numéro 1 de l’exportation avec un chiffre de 50 milliards d’Euro en 2019. En France, l’industrie du luxe crée environ 10.000 emplois chaque année et verse au trésor public près de 1,2 milliards d’Euro chaque année.

La question que l’on se pose est : pourquoi continuer à acheter des vêtements et des accessoires alors que le monde est à l’arrêt et que tout le monde reste chez soi ? Face à cette interrogation, on peut se dire que l’industrie de la mode de luxe a dû drastiquement souffrir de cette crise de la production à la distribution. Cependant, lors d’un interview donné à Elle sur l’impact de la crise sur le secteur au dernier trimestre 2020, Tory Burch donne son avis sur la question. D’après la styliste américaine, à une époque incertaine, les vêtements rassurent et permettent de se raccrocher à la réalité. Pour elle c’est une question de bien-être. L’enjeu est de se réinventer et de réussir à assurer une certaine présence auprès des clients, étant donné que les calendriers des évènements ont été bouleversé. Il est donc de bonne guerre d’analyser les conséquences de cette année sans précédente sur un secteur aussi important. D’autant plus que Paris accueille d’importants évènements liés à la mode de luxe, auquel se limitera ce document. La première partie de cet article abordera le secteur avant la crise et comment les entreprises y ont fait face. Ensuite une deuxième partie abordera les conséquences de la crise sanitaire sur les évènements, les innovations auxquelles les entreprises ont dû recourir pour limiter les dégâts et celles qui sont susceptibles de perdurer.

Le positionnement du secteur de la mode avant 2020

Le secteur de la mode est en constante évolution et ne cesse de gagner, chaque année, des parts de marché, notamment en raison de ses innovations, de son marketing et de ses nouveaux outils. La France est la première puissance mondiale dans le domaine de la mode, tel que le luxe. En effet, un quart des ventes mondiales est réalisé par des marques françaises [1]. Le chiffre d’affaires de ce secteur pèse aujourd’hui près de 2,7% du PIB français. Le territoire compte de nombreuses grandes maisons de haute couture comme Channel, Christian Dior, Louis Vuitton, Balmain, qui ont fait la renommée de la France à l’international, avec les vêtements, les parfums ou bien les accessoires. C’est également le cas avec de grandes entreprises regroupant de prestigieuses marques reconnues mondialement comme LVMH (Moët Hennessy Louis Vuitton) ayant pour PDG Bernard Arnault ainsi que la Société Kering dirigée par François-Henri Pinault et l’Oréal, sous la direction de Jean-Paul Agon. Selon le cabinet Deloitte, en 2017, ces trois entreprises se situaient dans le classement des 10 premières entreprises internationales dans le domaine du luxe d’après une étude de Deloitte.

En conséquence de la crise des subprimes, selon les Echos, le secteur a connu une baisse cumulée du chiffre d’affaires d’environ 14 % entre 2008 et 2017.  Toutefois, la mode du luxe a su se renouveler, se développer sur le marché du numérique et attirer les nouveaux jeunes créateurs. Ainsi, auparavant, les boutiques n’envisageaient pas de présenter leurs produits sur les sites, ceux-ci étant souvent faits sur-mesure ou uniques et orientés vers un public cible précis, habitué à fréquenter les boutiques. Réalisant l’importance de séduire un public plus jeune, tel que les 15-35 ans et de le fidéliser, un tournant a pourtant été pris. Cette catégorie d’âge peut suivre les nouvelles tendances plus facilement, détecter rapidement les promotions, diffuser et relayer les informations sur les réseaux sociaux. Ils sont donc des facteurs de développement importants pour les entreprises. Les produits de luxe, notamment le sur-mesure, permettent d’avoir, grâce à internet, la possibilité de visualiser le produit, l’adapter à ses envies et provoquer plus facilement l’achat. La mode de luxe a donc pris le tournant de l’e-commerce.

Ensuite, l’exportation à l’étranger représente un secteur relativement important pour le secteur de la mode du luxe. Depuis, une dizaine d’années, les Chinois font partie des plus gros consommateurs de ce type de bien. En effet, la classe moyenne chinoise possède aujourd’hui davantage de pouvoir d’achat et la population ne cesse de s’accroître, le marché atteint est donc majeur et ne cesse de se développer. Selon un rapport de McKinsey China Luxury de 2019, 35% des consommateurs de biens de luxe dans le monde sont chinois.

Avant l’année 2020, le secteur de la mode a donc connu un nouvel élan prometteur, redonnant confiance, notamment auprès des consommateurs conquis par les nouvelles pratiques de ces dernières années.

« C’est vraiment une tendance globale. Le tourisme a un poids très élevé dans la consommation de produits de luxe, et ce sont surtout les Chinois qui ont porté cette croissance en 2017 et vont continuer de la porter en 2018 : ils se sont mis à beaucoup consommer sur leur marché domestique, et par ailleurs ils se sont remis à voyager » Bénédicte Sabadie, associée en charge du secteur Luxe chez Deloitte France / 29-05-2018 / Site Fashion Network

Les conséquences de la crise sur les évènements

Le secteur du luxe mise beaucoup sur les évènements en raison de leur fort impact médiatique et commercial. Il s’agit des traditionnels fashion week, des défilés de mode, des festivales, des showrooms et de tous les autres évènements rassemblant des stars et des personnalités connues, notamment du showbiz. Cette année, l’interdiction des rassemblements n’a pas rendu les évènements possibles. Cependant, le secteur du luxe très ancré dans les traditions, a dû s’adapter et trouver des alternatives. Depuis sa première édition en 1985, le festival de Hyères créé par Jean Pierre Blanc soutien les jeunes créations par son rassemblement international de mode et de photographie. La 35ème édition cette année a eu lieu dans des conditions atypiques. Si organiser ce genre de festival n’est généralement pas une tâche facile, la crise sanitaire a encore plus complexifié la situation. L’organisateur déclare rester quand même optimiste pour l’industrie car elle a montré qu’elle sait se remettre en question et s’adapter. Même les grandes marques développent de nouveaux réflexes. Gucci par exemple a décidé de renoncer aux présentations qui s’enchainent et de choisir son propre rythme de présentation de collections et de proposition de défilés. Elle a ainsi manqué la fashion week de Milan. Cette décision de la marque phare du géant Français Kering pose la question de la pérennité des évènements traditionnels de mode comme nous les connaissons depuis plusieurs décennies.

Le secteur de la mode regorge de créativité et d’inventivité en raison de la quintessence même du métier. En effet pour réussir, les créateurs sont habitués à être attentif aux tendances et à adapter leurs créations au marché tout en intégrant leurs visions. Désormais il va falloir étendre cette capacité aux organisations. En février dernier, Armani a été le premier à prendre en Europe, la décision de changer le cours normal des choses. Ainsi, son défilé à la fashion week de Milan s’est tenu à huis clos dans un de ses teatro, dans le souci de préserver le bien-être de ses invités en leur évitant de fréquenter des endroits surpeuplés. Le défilé a été diffusé sur le site internet de la griffe et sur ses comptes de réseaux sociaux. En revanche, les défilés de six créateurs chinois ont été annulés, ainsi que les salons professionnels, les showrooms professionnels. Les market week ont également été annulé. Il s’agit d’un rendez-vous de distribution entre les marques et les acheteurs après la fashion week. Les défilés métiers art et croisières de mai avec Chanel, Prada et Gucci ont également été annulé. Certains organisateurs profitent de la disruption créée par la crise, pour insérer leurs objectifs de performance préexistants. Ainsi, la fashion week homme de Londres de janvier 2021 a été reportée à celle des femmes de février 2021 afin de réduire la norme de genre et les déplacements pour une mode éco responsable. Le British fashion Council a annulé la prochaine édition de la fashion week homme de Londres en raison de la pandémie, du Brexit, et évoque une volonté de repenser l’évènement.

Certains évènements ont été drastiquement modifiés pour répondre aux nouvelles exigences. La semaine de la mode de juin 2020 et celle de la haute couture de juillet 2020 ont été digitalisées. La fashion week homme Paris de juillet s’est déroulée à 100% en ligne. A Milan, les prochains évènements sont confirmés. Ils se tiendront en physique ou en digital en fonction de l’évolution de la pandémie. Depuis l’été 2020, Milan organise ses évènements en numérique. L’automne dernier, la fashion week de Milan a présenté 156 collections via un espace de showroom digital avec 300 marques.  Ce canal a battu un record avec 45 millions de vues et a fait de Milan la première plateforme mondiale la plus visualisée des semaines de la mode. Le président de la chambre Italienne de la mode a sollicité l’aide du gouvernement pour soutenir les efforts de résilience du secteur sinistré. Il faut noter que la mode est la deuxième industrie manufacturière en Italie. Elle réalise plus de 60% de la production haut de gamme mondiale et 41% de la production européenne en termes de mode/accessoires contre 12% pour l’Allemagne et 8% pour la France. En effet, d’après une étude de l’organisation patronale Confindustria Moda, le secteur a perdu 29 Milliards d’euros de chiffre d’affaires en Italie, sur les neufs premiers mois de l’année 2020. D’autres évènements ont bel et bien eu lieu en présence des convives. Cependant, ils ont dû se faire dans des lieux atypiques, plus appropriés pour respecter les exigences de cette situation inédite. Le défile printemps-été 2021 de Céline par exemple s’est tenu à huis clos au stade Albert II à Monaco. Ces changements ont impacté les dynamiques d’achat étant donné que dans la mode de luxe il y a beaucoup d’achats qui se font après les évènements. Les maisons ne sont pas face à des acheteurs en B to B.

L’impact de la crise en quelques chiffres

Le recul de l’activité, la mise à l’arrêt des usines, la fermeture des magasins et enfin les reports et annulations d’évènements ont porté un coup dur au secteur. Les maisons de luxe Françaises étant exportatrices à 90%, la perte de chiffre d’affaire pour l’année 2020 a été évaluée à 20%. Il faut noter que les marchés asiatiques représentent 50% des ventes de ces maisons. Le secteur craint aujourd’hui un « effet de cliquet ». C’est-à-dire que les consommateurs prennent des habitudes d’achat et que le marché ne revienne plus à ce qu’il était avant la crise. LVMH avec ses 75 maisons, prévoyait un recul des ventes de 10 à 20%. L’activité du groupe Kering a été soutenue par la marque Gucci, alors que la branche lunettes/joaillerie/horlogerie a enregistré un recul de vente de 25% en raison de l’arrêt du tourisme en Europe. Par surprise, les sacs de luxe ont connu une forte demande au premier semestre. Louis Vuitton a enregistré une hausse de 123% avec un prix moyen par sac de plus de 104%. Les millénials ont été identifiés comme étant les clients à l’origine de ce boom de vente. D’après le magazine InStyle, les millénials ont acheté plus de sac à main Hermès au cours du deuxième trimestre que n’importe quelle autre tranche d’âge. Ils sont les nouvelles cibles des maisons de luxe. Leur application favorite TikTok a à cet effet été utilisé pour la diffusion de certains défilés. Les jeunes privés de loisir dépensent leurs économies auprès des maisons de luxe. Certaines marques adoptent des stratégies commerciales de partenariat. Par exemple la maison Valentino noue des partenariats avec animal crossing.

La place de l’innovation en période post crise

Depuis le début de la crise, certains articles posent le postulat selon lequel le secteur de la mode du luxe devrait se réinventer. Il pourrait mener des stratégies commerciales, digitales et stratégiques en accord avec les demandes du marché, les besoins et réalités des nouveaux clients, et les contraintes environnementales auxquelles il doit se soumettre. Mais le secteur très centré sur l’humain peine à tirer parti de l’euphorie du digital et de la technologie. D’après Bruno Pavolvsky, Président des activités mode de Chanel, sans les rencontres, le métier n’a aucun sens. Il disait que l’humain, le travail de la main, les rencontres entre les créateurs et les artisans, doivent absolument perdurer. Toutefois, cela n’empêche pas qu’il y a une forte émergence de la technologie dans le domaine depuis une trentaine d’années. Situation qui s’est accentuée avec la crise actuelle et le recours au digitale, une autre forme d’expression de la créativité. Les créateurs avant-gardistes qui introduisent des innovations et des concepts particuliers dans leur art vont avoir l’opportunité de laisser court à leur imagination pour répondre aux besoins du marché en période post-covid. Quant aux géants du luxe, ils amorcent la digitalisation. Kering, Richemont et Alibaba ont décidé de soutenir la plateforme Britannique d’e-commerce Farfetch avec un investissement de 928 millions d’euros. En effet, cette plateforme d’e-commerce a enregistré un boom d’activité en 2020 alors qu’elle peinait à être rentable. Farfetch fit son entrée en bourse en 2018 en faisant confiance à la place des marketplaces à l’horizon 2025. Mais avec le coronavirus, la société a le vent en poupe. Avec ce partenariat, Kering, Richemont et Alibaba ont pour ambition de conserver leur notoriété dans le monde de la mode du luxe et de l’accroitre en Chine. Il faut également souligner les coopérations, avec le monde de la culture en général, qu’a généré cette crise. En effet, la fashion week a fait appel à des cinéastes pour réaliser des évènements en ligne sensationnels. C’était le cas du cinéaste Matteo Garrone qui a travaillé pour Dior.

La crise a également eu un impact sur les rapports aux choses et la consommation. Il va falloir délaisser les tendances pour se concentrer sur les créations intertemporelles. De plus, elle renforce les enjeux écologiques du secteur. Les grandes puissances du luxe pourraient se retrouver très vite menacé par des nouveaux entrants qui font mieux avec peu et d’introduire des disruptions dans le secteur. Un secteur qui se réinvente engendre des opportunités qui peuvent être exploitées par des acteurs qui ont du potentiel et une vision. Les évènements n’impliquent pas que les créateurs et leurs créations mais également tous les métiers autour. De ce fait, les métiers de l’art, de la culture et les entreprises du digital devraient s’intéresser aux changements qui s’opèrent dans le monde de la mode de luxe, surtout en ces périodes post-covid.

Face à un contexte incertain, la nécessité de mettre en place une stratégie

Enfin, face à ces nouveaux enjeux et à l’instabilité que connaît le secteur de la mode de luxe, comme les crises financières ou de la Covid-19, l’intelligence économique est une notion essentielle à inclure dans le processus de réflexion des entreprises. Même si la France reste leader dans ce domaine d’activité, les concurrents sont nombreux tels que la Russie, l’Inde ou la Chine qui souhaitent offrir à leurs clients, de plus en plus fortunés, des produits créés dans leur propre pays.

L’importance de la veille

La création des services de veille au sein des structures n’est plus vue comme une option mais bien comme une nécessité. Elle permet ainsi de surveiller la concurrence, détecter les sources de contrefaçon ou bien repérer les pays permettant la mise en place de brevets, marques ou dessins et modèles, voire même de droits d’auteur. La veille intervient aussi dans le processus de production afin d’élaborer de nouveaux produits (nouvelle collection, style, tendances), nouvelles techniques (couture, pliage…), ou technologies (impression 3D, défilé virtuel, essayage à distance). Enfin, celle-ci permet de surveiller la réputation des entreprises, les réseaux sociaux prenant une importance majeure aujourd’hui. Les maisons de luxe s’appuient sur des valeurs et une qualité reconnue par tous. Toutefois, les créateurs peuvent parfois être au cœur de conflits, il est donc important de valoriser cette image auprès de l’extérieur.

Dans la société LVMH, le travail de veille est très important car il permet d’actualiser régulièrement les connaissances que possède l’entreprise en matière scientifique : utilisation de certaines substances, reformulation de produits, nouvelles utilisations de certaines substances mais aussi réglementation : droit international, normes, contraintes, sécurité ou traçabilité des produits.

Savoir analyser pour mettre en application

Ensuite, le traitement et l’analyse des données recueillies grâce à la veille permettent de mieux cibler la clientèle, d’en toucher une nouvelle ou de s’adapter rapidement aux nouvelles attentes ou tendances. Grâce à l’ère du numérique, on constate ces dernières années que la clientèle est mieux informée donc plus exigeante. Le haut de gamme doit se montrer à la hauteur de ces attentes.

Pour cela, la mode doit se présenter sur de nouveaux supports et proposer des expériences marquantes. Les défilés sont des occasions parfaites pour attirer et se démarquer. De plus, mettre en place une stratégie d’intelligence économique permet de préserver les savoir-faire des grandes maisons de luxe et de garantir ces atouts, gage de qualité. Elle permet aussi d’innover en permanence.

Les créateurs doivent constamment avoir de nouvelles idées et créations pour garantir de nouvelles collections innovantes. Ils créent la mode de demain et donc ne doivent cesser d’avoir une longueur d’avance. La stratégie d’intelligence économique permet cette préparation et cette anticipation. Enfin, elle permet de s’adapter aux tendances de la société. Aujourd’hui, le consommateur se veut plus responsable et acteur de son monde. Le secteur de la mode se convertit donc peu à peu à l’éco-responsabilité. En effet, face à cette industrie polluante, les enseignes doivent élaborer de nouvelles stratégies pour attirer les nouveaux clients sensibles à ces nouvelles préoccupations. On valorise donc le recyclage, des tissus bio ou éco-responsables, valorisant le travailleur en le rémunérant à sa juste valeur.

Toute la chaîne de production est remaniée pour garantir la transparence envers les consommateurs. L’intelligence économique permet de mettre en place ces stratégies, de tracer les produits, de répondre aux attentes des consommateurs en répondant à leurs besoins et de valoriser l’image de la mode du luxe.

Pour conclure, le secteur de la mode représente aujourd’hui un domaine majeur dans l’économie française et mondiale, notamment en raison de la multitude d’acteurs qui composent la chaîne et qui en dépendent. Toutefois, la crise de la covid-19 est venue bouleverser les habitudes en instaurant de nouvelles pratiques : le développement des entreprises sur internet, l’augmentation des achats en ligne, les défilés virtuels et le déploiement de la réalité virtuelle. Même si les problématiques ne sont pas évidentes car lors de l’achat, le client souhaite voir les produits, les toucher et les essayer, le numérique doit relever ces enjeux pour réduire au maximum les contraintes imposées et permettre aux clients de s’approprier le produit. Quel sera donc l’avenir du secteur de la mode de luxe et va-t-on s’approprier les nouvelles pratiques liées au numérique ? Dans tous les cas, il sera difficile de convertir la filière à 100% au numérique en raison de l’importance qu’accorde le consommateur à toucher et essayer le produit. Pourtant, cette expérience a permis de déployer de nouvelles technologies, pratiques et de nouveaux outils qui ont rapidement modernisé le secteur. Dans les années à venir, ces habitudes vont probablement continuer de se développer pour toucher de nouveaux clients, qui jusque-là, n’étaient pas ou peu inclus dans le système et créer de nouvelles manières de vendre. De plus, en raison de la demande croissante des consommateurs, davantage de pratiques et de produits éco-responsables pourraient voir le jour. Le domaine de la mode de luxe est donc depuis ces dernières années en pleine mutation, la pandémie a toutefois permis d’accélérer cette modernisation. Ces prochaines années pourraient donc annoncer l’essor dans la mode de nouvelles technologies plus adaptées à ces changements.

Par Colette Armandine AHAMA et Aude LEMONNIER, promotion 2020-2021 du M2 IESCI

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L’Etat entrepreneur de Mariana Mazzucato https://master-iesc-angers.com/letat-entrepreneur-de-mariana-mazzucato/ Mon, 29 Mar 2021 10:23:39 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3420 Formulée par le père fondateur de l’économie, Adam Smith, la théorie de la main invisible représente sans doute l’un des principes économiques les plus repris et soutenus par les successeurs de la discipline. Cette notion, érigée en principe prend parfois… Continuer la lecture

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Formulée par le père fondateur de l’économie, Adam Smith, la théorie de la main invisible représente sans doute l’un des principes économiques les plus repris et soutenus par les successeurs de la discipline. Cette notion, érigée en principe prend parfois la forme des doctrines libérales les plus extrêmes qui se traduisent par des coupes budgétaires, des désengagements Etatiques, des privatisations et toutes autres mesures regroupées sous le nom de politiques d’austérité. En parallèle la recherche de la prospérité, à l’époque où la croissance des pays occidentaux stagne devient un sujet longuement débattu. La poursuite soutenue du développement devient tellement inconcevable pour certains économistes qu’ils proposent des théories de décroissance. Et pourtant le développement est possible selon Mariana Mazzucato, enseignante d’économie de l’innovation et des biens publics à la Université College London. Dans son ouvrage « l’Etat entrepreneur » l’économiste cherche justement à démentir un vieux préjudice selon lequel l’Etat incompétent dans les questions économiques devrait se contenter tout au plus à procéder à des ajustements et corriger les défaillances des marchés.

La méfiance envers L’Etat interventionniste

Alors que le monde a besoin d’actions fortes et de coups décisifs faces aux nouveaux défis d’inégalité, de tensions sociales et de déséquilibre environnemental, les Etats et gouvernements ont de plus en plus les mains liées par des politiques libérales restrictives. Cette situation ne leur laisse que très peu de marges de manœuvre. Depuis des décennies l’action publique recule et laisse place à l’initiative privée. Cette tendance s’explique par la méfiance chronique envers l’intervention de l’Etat dans l’économie. En effet on associe régulièrement la lourdeur administrative, l’incompétence des décideurs et le manque d’efficacité organisationnelle aux institutions Etatiques tandis que le secteur privé lui est perçu comme souple, dynamique et innovant.

A force de reprocher à l’Etat d’être trop procédural et bureaucratique on a fini par convaincre les décideurs de l’inefficacité des politiques économiques audacieuses et leur restreindre progressivement le champ d’action et le budget nécessaire. Il serait étonnant qu’avec un tel renforcement de la doctrine libéral l’Etat puisse garder sa perspicacité et ses compétences. On voit en cela une sorte de prophétie autoréalisatrice.

Toutefois il convient de ne pas oublier le rôle prépondérant que l’Etat a joué et continue de jouer dans le développement du pays tant sur le plan social, culturel qu’économique. La conception néoclassique de l’Etat se contentant des fonctions régaliennes possède ses limites. Sans les investissements lourds de l’Etat dans les phases de tâtonnement, les périodes les plus incertaines, très peu d’innovation auraient vu le jour, très peu de nouveau marché seraient créés. L’Etat doit se doter de moyens et d’une vision à long terme dépassant la logique de coûts/bénéfices trop statique ou des préconisations du « new public management ».

L’Etat innovateur – l’exemple de la DARPA

L’Etat est véritablement un acteur majeur de l’impulsion de l’innovation et de la croissance dans l’économie. A travers les centres de recherche, universités et autres institutions l’Etat est en mesure d’organiser l’économie en réseaux, d’assurer la circulation continuelle et rétroactive des idées et concepts novateurs entre les individus et les organisations.  De telle façon les limites du savoir sont constamment repoussées et peuvent bénéficier au plus grand nombre.

Ce sont justement les moyens que se donnait l’Etat américain par l’intermédiaire de l’agence de recherche dans les technologies destinées à usage militaire, DARPA (Défense Advanced Reaserch Projects Agency). A son époque cette structure a très massivement contribué à l’essor des technologies de l’information et de la communication (batteries lithium-polymère, semi-conducteurs, les disques durs de stockage, technologie GPS, …) et de l’Internet. La DARPA se donne pour principale mission de rapprocher la recherche académique fondamentale à l’échelle temporelle plus large et les besoins technologiques immédiats de l’armée. Bien que rattachée au ministère de la défense, la DARPA bénéficie d’une très grande autonomie et flexibilité ce qui lui a permis après la Seconde Guerre Mondiale de se consacrer aux technologies à usage civil ou de les transposer du champ militaire.  L’agence n’était pas exposée aux contraintes temporelles ou budgétaires dans l’élaboration des technologies, ce qui lui a conféré une véritable vision stratégique de long terme.

Les caractéristiques d’organisation de l’agence sont primordiales pour comprendre son succès. Les chercheurs et scientifiques travaillent au sein de petite cellules proactives et cherchent à répondre à des problématiques spécifiques. L’allocation de fonds aux groupes d’acteurs s’opère en fonction de la capacité de progression de ceux-ci. L’horizon temporel long et le vaste champ d’application des recherches permet à l’agence d’accompagner les start-ups jusqu’au stade de viabilité commerciale. Les différents groupes sont sous la supervision de l’agence qui s’occupe de la diffusion des idées, des ressources et des moyens humains.

Adoptant cette démarche l’agence offre un cadre collaboratif pour les acteurs du milieu privé, public et académique dans une démarche opérationnelle. De cette façon elle assure un fonctionnement dynamique et efficace des groupes et impulse l’innovation dans l’économie.

L’Etat n’intervient pas seulement aux étapes initiales de recherche et financement de nouveaux produits, il accompagne les entreprises tout au long de leur croissance. Les autorités, après avoir assuré la transmission de technologies développées sur fond publiques et alimenté l’économie en capital connaissance ont poursuivi leur soutien en préparant le cadre juridique international. Elles ont assuré qu’une fois développés et bien établis sur le territoire national les produits puissent pénétrer les marchés mondiaux en encourageant et parfois en forçant l’ouverture économiques des pays. Pour éviter que les industries nationales ne soient exposées à la concurrence ils se sont assuré de l’instauration et du respect des règles internationales de la propriété intellectuelle.

La théorie développementaliste

L’exemple des pays nouvellement industrialisés est très intéressant à étudier du point de vu de l’intervention de l’Etat dans l’économie. Ces pays ont généralement entrepris de grands projets d’industrialisation et de dynamisation de l’économie. Par l’incitation à l’innovation et l’allocation d’importantes parts du PIB à la R&D ces pays ont su opérer une montée en gamme sur l’échelle industrielle.

Mais avant tout les gouvernements des pays asiatiques ont réalisé l’importance de l’organisation fluide et en réseau des connaissances. La R&D était profondément ancrée dans la politique des pays et intégrée à la production. Les gouvernements y encourageaient non seulement la création de nouvelles connaissances mais aussi l’import des connaissances existante de l’étranger. Les bénéfices dégagés servaient au réinvestissement dans les étapes

Quelques préconçus sur l’innovation

Pour soutenir l’innovation et renforcer la compétitivité du territoire national il est très tentant de mettre en place diverses mesures incitatives. Mais il convient de ne pas tirer de conclusions trop hâtives sur l’efficacité des dispositifs et comprendre la complexité d’un concept tel que l’innovation. Dans son ouvrage, l’autrice dresse un certain nombre d’erreurs souvent commises à l’égard de la promotion de l’innovation.

Il est par exemple erroné de croire en une causalité directe et immuable de la R&D et de l’innovation. Il existe beaucoup de projet de développement qui ne se concrétisent pas en une invention nouvelle. Et le fait de simplement renflouer les entreprises et organisations administratives dans l’espoir de voir le niveau de l’innovation et donc le niveau de productivité augmenter n’est pas une bonne stratégie. Les besoins des acteurs sont complémentaires et différents d’un secteur à un autre.  Il convient donc de les comprendre et de cibler l’investissement en fonction du potentiel des entreprises. Aussi les efforts de recherche sont généralement récompensés uniquement à moyen et long terme et nécessitent donc un travail de longue haleine pour les entreprises. C’est le cas des industries pharmaceutiques qui parviennent à des résultats uniquement grâce à leur persévérance dans le temps.

Une autre confusion que l’on retrouve régulièrement dans les mesures de politiques économiques est le fait de croire que toutes les PME sont innovantes et nécessitent par conséquent un soutien et des exemptions d’impôts. Dans la réalité le paysage industriel et entrepreneurial n’est pas du tout homogène et au lieu de regarder la taille de l’entreprise il convient avant tout de prêter attention à son âge et à son niveau de croissance. Dans la majorité de cas les entreprises les plus prometteuses sont jeunes et voient leur productivité croitre rapidement. Mais au-delà de subventionner une catégorie particulière d’entreprises il faudrait surtout se concentrer sur la création de conditions concurrentielles identiques en supprimant les barrières à l’entrée et en résistant aux actions de lobbying des entreprises qui peuvent s’en donner les moyens.

L’augmentation du nombre de brevet n’illustre pas la progression de l’innovation dans une économie. D’un côté on observe l’augmentation des brevets de faible valeur qui sont très peu cités dans d’autres recherches ou innovations. On a donc comme une hyperinflation de brevets qui donne une illusion de croissance du nombre d’innovations. De l’autre côté il est devenu possible de breveter des découvertes et des procédés et outils de recherche ce qui freine considérablement l’accès aux techniques de recherche en particulier pour les pays en développement. Dans ce cas là le dépôt de brevet ne fait que freiner le processus inventif au lieu de le stimuler.

Cependant la progression du nombre de brevets d’une entreprise reste un indicateur très convaincant pours les capitaux-risqueurs. Des politiques économiques sont parfois dirigées dans ce sens en cherchant à subventionner et exempter d’impôts les entreprises qui déposent le plus de brevets. Nous parlons ici des mesures « patent box ». Ce type de mesures ne favorise que les entreprises qui en ont les moyens et surtout elles développent des comportements d’opportunisme et de passagers clandestin chez les entreprises. Le risque est de favoriser une guerre des brevets sans pour autant observer une véritable création de valeur ajouté dans l’économie.  Une des alternatives que propose l’autrice est de calculer les subventions en fonction du nombre de moyens humains réellement alloués au projet de R&D, un indicateur qu’il serait plus difficile de truquer.

Les stratégies de verrouillage de marché et leur effet nocif sur l’innovation

L’écosystème de la nouvelle économie n’est pas régi par les mêmes règles que d’autres secteurs.  Les plateformes numériques se développent très rapidement grâce à des stratégies d’élargissement des champs d’application et de prestations ce qui leur permet d’atteindre une masse critique. En outre cette économie d’envergure est nuisible à la concurrence et donc à l’innovation. Les plateformes numériques adoptent aussi des techniques de verrouillage de marchés et d’acquisitions prédatrices.

Pour éviter de se faire concurrencer par des nouvelles start-ups très innovantes, les géants de la tech recourent régulièrement à des rachats. C’est ainsi qu’entre 2001 et 2019 667 entreprises dont la plupart des start-ups ont été rachetées par les GAFAM.  Et ces sociétés recouvrent des domaines larges et variés mais qui sont susceptible d’être complémentaires avec les services des GAFAM. Cette pratique est aussi très fréquente dans le secteur pharmaceutique. Le rachat n’est pas fait dans l’objectif de développer et valoriser l’innovation acquise mais de l’étouffer à son Etat embryonnaire et la faire disparaitre du paysage concurrentiel. C’est ce que l’on appelle aussi une acquisition tueuse ou « Killer acquisition ».

Dans le domaine numérique il existe une vaste zone mortifère « Killer zone », des secteurs proches des activités des GAFAM et donc en concurrence. Du fait de cette proximité les opportunités de développement sont faibles et surtout la probabilité de rachat est très élevée. Les investisseurs et capitaux-risqueurs se méfient de ces zones car elles présentent peu de perspectives (recrutement des talents, acquisitions tueuses, copie sans contrepartie, …)

Du fait d’un modèle économique intrinsèquement différent des secteurs traditionnels les entreprises numériques disposent de conditions financières moins contraignantes. Les acquisitions ne suivent pas une loi de rentabilité financière traditionnelle (à la date de rachat Instagram ne dégage aucun profit, Twitter n’était pas rentable pendant plus de 10 ans).  Ceci créé une inégalité de traitement notamment pour les projets d’Etat qui sont constamment évalués sous l’angle de coût/bénéfice. En effet les projets de participation de l’Etat doivent selon les règles de l’Union Européenne répondre à une logique « d’investisseur avisé ».

Au bout du compte les entreprises parviennent de plus en plus à s’affranchir de contraintes concurrentielles et limiter leurs efforts en matière d’innovation tout en exigeant de l’Etat toujours moins d’intervention et prélèvement. L’innovation est avant tout une question de réseau ouvert et interactifs d’acteurs de différents milieux (académiques, industrielles, publics, chercheurs, etc…) qui partagent et diffusent l’information qui va générer de nouvelles idées et pousser le progrès. Si les canaux d’échange s’obstruent c’est le mécanisme tout entier de création et innovation qui est endommagé. C’est pourquoi il est primordial d’assurer un écosystème d’entreprises diversifiées et surtout un terrain concurrentielle identique pour tous. L’accumulation de trois facteurs de l’économie de la connaissance (structure organisationnelle en réseau, TIC, capital humain) ne peut être assuré par le secteur privé, qui comme on l’a vu se préoccupe avant tout de sa propre pérennité. Limiter les marges de manœuvre et les champs d’action des pouvoirs publiques ne résoudra pas le problème de stagnation. Au lieu de chercher le coupable ne serait-il pas plus intéressant de penser à un environnement ouvert et coconstruit par des partenariats symbiotiques public-privé ?

Par Alina Ibragimova , promotion 2020-2021 du Master 2 IESCI

Sources et bibliographie

Mariana Mazzucato, « L’Etat entrepreneur : Pour en finir avec l’opposition public/privé », Fayard, janvier 2020

Joelle Toledano, « GAFA : Reprenons le pouvoir ! », Odile Jacob, septembre 2020

Ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, « Note flash de l’SIES : Panorama de l’effort de R&D dans le monde. », n°17, novembre 2017

Business enterprise R&D expenditure (BERD) by source of funds (value or intensity)

Dépenses intérieures brutes de R&D

Visualisation de données : Tableau Public

Dépenses de Recherche Insee

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Etats-Unis / Chine, dans la conquête du monde par l’IA, quelle place pour la France ? https://master-iesc-angers.com/etats-unis-chine-dans-la-conquete-du-monde-par-lia-quelle-place-pour-la-france/ Fri, 12 Feb 2021 09:03:34 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3346 « Celui qui deviendra leader dans ce domaine sera le maître du monde. » Vladimir Poutine, 1er septembre 2017 intervention publique La petite histoire de l’IA… Le conseil de l’Europe définit l’intelligence artificielle (IA) comme un ensemble de sciences (théories et techniques)… Continuer la lecture

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« Celui qui deviendra leader dans ce domaine sera le maître du monde. »

Vladimir Poutine, 1er septembre 2017 intervention publique

La petite histoire de l’IA…

Le conseil de l’Europe définit l’intelligence artificielle (IA) comme un ensemble de sciences (théories et techniques) qui ambitionne d’imiter les capacités cognitives d’un être humain.

L’histoire de l’IA remonte dans les années 40 aux États-Unis, dans le sillage de la cybernétique. A l’époque, Norbert Wiener, pionnier de la cybernétique, cherchait à unifier la théorie mathématique, l’électronique et l’automatisation en tant que « théorie entière de la commande et de la communication, aussi bien chez l’animal que dans la machine ». Au même moment en 1943, Warren McCulloch et Walter Pitts mirent au point un premier modèle mathématique et informatique du neurone biologique (neurone formel).

En 1950,  Alan Turing posera pour la première fois la question de l’éventuelle intelligence d’une machine dans son article « Computing Machinery and Intelligence » et décrira un «jeu de l’imitation», où un humain devrait arriver à distinguer, lors d’un dialogue par téléscripteur, s’il converse avec un homme ou une machine.

De ces foisonnements naitra l’IA en tant que discipline en 1956, lors de la conférence au Dartmouth College avec McCarthy et Minsky (reconnus comme pères de l’IA).

Si l’IA continue de se développer jusqu’au milieu des années 60, c’est seulement avec la recherche américaine, principalement financée par le Département de la Défense. Dans le même temps, on verra s’ouvrir des laboratoires çà et là à travers le monde.

Des années 70 aux années 2000, l’IA va rentrer dans sa période  « AI Winter ».

C’est seulement avec le succès public en mai 1997 de Deep Blue (système expert d’IBM) au jeu d’échecs, contre Garry Kasparov, que l’IA sortira de son sommeil.

A partir des années 2010, l’IA sera relancée définitivement avec des succès grands publics : en 2011, avec Watson, l’IA d’IBM remportera les parties contre 2 champions du « Jeopardy » ; en 2012, Google X (laboratoire de recherche de Google) arrivera à faire reconnaître à une IA des chats sur une vidéo.

A ce stade, seulement trois pays étaient dans le compétition de l’IA : les États-Unis, le Canada, et la Grande-Bretagne. C’est l’équipe dirigée par Geoffrey Hinton (de l’Université de Toronto), qui permettra de faire des percées dans l’apprentissage par la machine (machine learning) avec l’apprentissage profond (deep learning). Les deux autres membres de l’équipe sont Yoshua Bengio (de l’Université de Montréal) et Yann LeCun (de l’Université de New York), qui, dès 2003, avaient décidé de démarrer un programme de recherche pour remettre au goût du jour les réseaux neuronaux.

A partir de ce moment, certaines sociétés vont prendre les devants. Avec le deep learning, la problématique de l’IA devient d’avoir de la donnée à traiter. Google devient rapidement un pionnier. En 2012, la firme de Mountain View n’avait que quelques projets d’usages, contre 2 700 trois ans plus tard. En 2013, Facebook ouvre le Facebook Artificial Intelligence Research (FAIR) dirigé par Yann LeCun. Amazon, Microsoft, Apple, Netflix, Tesla vont suivre aussi.

En 2016, AlphaGO (IA de Google spécialisée dans le jeu de Go), en battant le champion d’Europe (Fan Hui) et le champion du monde (Lee Sedol), puis elle-même (AlphaGo Zero), change les cartes. Les États-Unis étaient alors les maîtres incontestés de cette technologie.

Le plan MIC 2025 …

Suite à la victoire d’AlphaGo, la Chine décide d’entrer dans la compétition de l’IA.  À ce stade, elle accuse au moins quinze ans de retard, ce qui représente une éternité sur l’échelle de l’IA. Mais, à partir du moment où elle a décidé de rentrer dans la compétition, plus rien ne va l’arrêter.

En fait, le plan décennal « Made in China 2025 » (MIC 2025) était déjà en marche. Annoncé par le premier ministre Li Keqiang lors de la 12e session plénière de l’assemblée du peuple le 5 mars 2015, le MIC 2025 redéfinit les priorités industrielles de la Chine. Il vise à faire passer la Chine du statut « d’usine du monde » à celui de « grande puissance industrielle », maîtrisant la recherche, l’innovation et la production de biens à forte valeur ajoutée. La Chine va entrer dans la révolution connectique. Le MIC 2025 doit permettre la création de champions nationaux capables de s’imposer comme des acteurs incontournables à l’international, par une stratégie d’acquisition de nouvelles technologies, et le déploiement à l’étranger des entreprises chinoises, idéalement sur les pays concernés par la « ceinture de la route de la Soie » (BRI[1]), l’autre programme phare du « rêve chinois » pour 2049).

En effet, dès son arrivé au pouvoir en 2012, Xi Jinping affiche l’objectif de réaliser le «rêve chinois» pour 2049 pour le centenaire de la fondation de la République populaire de Chine. La Chine sera « un pays innovant » d’ici 2020, «un des pays les plus innovants» d’ici 2030 et, pour finir, « la première puissance innovante » d’ici 2049, avec les deux programmes phares qui sont les Nouvelles Routes de la Soie en 2013 (BRI) et MIC 2025 en 2015.

En termes de R&D, les dépenses ont été multipliées par un facteur 13 entre 2000 et 2017, passant de moins de 1 % du PIB en 2000 à 2,1 % en 2017. En 2019, ce montant dépasse le niveau moyen de l’Union européenne et s’élève à 290 milliards d’euros soit 2,23% du PIB de la Chine (selon les données publiées en septembre 2020 par trois agences gouvernementales chinoises couvrant les secteurs privé et public).

Concernant le nombre de brevets déposés par la Chine, il a rapidement augmenté (+700 % entre 2007 et 2017). La Chine s’est hissée à la première place devant les États-Unis (57 840 demandes) avec 58 990 demandes internationales de brevets en 2019, ce qui représente 22% des demandes totales (Source INPI).

La Chine note ses réussites sur le plan international, comme l’envoi de taïkonautes dans l’espace en octobre 2016, la sonde Chang’e 4 qui se pose sur la face cachée de la Lune en décembre 2018, ou encore directement en IA avec la mise au point de supercalculateurs.

Depuis 2016, la Chine domine le TOP500 en ce qui concerne le nombre de systèmes, avec, en 2020, 226 supercalculateurs contre 114 pour les États-Unis, 30 pour le Japon en troisième, 18 pour la France en quatrième.

Le numérique, et plus particulièrement l’IA, occupe donc une place centrale dans la stratégie chinoise. L’ascension des BATX[2] reste de ce fait remarquable.

L’effort de transformation dirigé par la Chine pour l’implantation des entreprises et de startups en IA sur l’ensemble de son territoire est gigantesque. Le Dr Kai-Fu Lee, spécialiste de l’intelligence artificielle, voit l’immense avantage de la Chine dans la course à l’IA dans la surabondance des données collectées, la force d’un écosystème d’entrepreneurs « prêt à tout » pour créer de nouveaux produits, et un soutien indéfectible de l’État, capable d’injecter des milliards et de créer un environnement réglementaire extrêmement favorable[3]. La Chine a réussi à faire émerger, dans les grandes villes, des pôles de compétence, chacun plus innovants les uns que les autres, et toujours avec comme socle de leur activité la donnée numérique. Guiyang, avec le siège de l’entreprise Global Big Data Exchange (GBDEX) peut être citée. Elle est considérée comme la plus grande plateforme de commercialisation de mégadonnées en Chine. Un deuxième exemple est la ville de Hangzhou, qui abrite Alibaba.

Le modèle chinois se veut être entre adaptation et disruption. Il doit permettre à la Chine de répondre tout à la fois à son ambition de domination nationale (renforcement de l’État et de son armée), régionale (« route de la soie » et intérêts stratégiques), et mondiale (devenir un acteur de premier rang et dépasser les États-Unis).

Entre les deux colosses, quelle place pour la France dans la guerre à l’IA ?

L’IA française en chiffres[4]

  • La France compte parmi les 4 premiers pays au monde pour la production mondiale d’articles sur l’IA, avec la Chine, les États-Unis, et le Royaume-Uni, grâce à son excellence en mathématiques, en STIC et en SHS.
  • 268 équipes de recherche
  • 5 300 chercheurs
  • 81 écoles d’ingénieurs et 38 universités délivrant 138 cours liés à l’IA.
  • 18 diplômes de mastères spécialisés en IA
  • 80 ETI et PME et plus de 270 start-ups spécialisées dans l’IA, avec un rythme de création soutenu : plus de 30% par an depuis 2010.
  • 400 M€ par an de financement public pour la recherche en IA

En septembre 2017, le gouvernement français demande au mathématicien Cédric Villani, alors député de la majorité, de conduire une mission sur la mise en œuvre d’une stratégie française et européenne en IA. Dans cette guerre stratégique où il est question de souveraineté et d’indépendance technologique, la France veut construire sa voie.  Dans la course à l’IA, c’est la puissance de l’État qui permettra de faire avancer les choses plus vite.

Plusieurs initiatives ont donc été menées par le gouvernement français ces dernières années pour aider les entreprises à se développer et/ou s’internationaliser. En septembre 2019, le président Emmanuel Macron annonce un plan pour encourager l’investissement dans les jeunes pousses françaises et augmenter le nombre de licornes, ces entreprises valorisées à plus d’un milliard d’euros. L’État a aussi noué des partenariats avec de grands investisseurs institutionnels français pour un montant total de cinq milliards d’euros injecté dans les start-ups.

L’IA devient le domaine technologique privilégié des start-ups françaises

En 2020, la France comptait 453 start-ups travaillant sur des projets liés à l’intelligence artificielle, plus de deux fois plus qu’en 2016 (avec 180 startups). Les investissements dans ces sociétés sont également en forte hausse. Les levées de fonds réalisées par les start-ups françaises ont doublé entre 2018 et 2019, pour un montant d’1,268 milliard de dollars.

La France, avec la plus grande concentration de laboratoires de recherche sur l’IA en Europe, devient un acteur aussi important dans le domaine qu’Israël et le Royaume-Uni (Source France Digitale, Nicholas Brien, PDG ).

Si la France peut se targuer de la quatrième place, juste derrière le Japon en nombre de supercalculateurs classés (avec 18 supercalculateurs et une puissance totale de 68,9 pétaflops), on ne dénombre qu’un seul producteur de supercalculateur de classe Exascale au niveau européen, avec le français Atos-Bull. La France accuse donc aussi certaines fragilités.

Concernant l’IA, le constat est qu’aucun pays européen ne peut y arriver seul. L’Europe se doit d’avoir une « superstratégie », la plus globale possible, même si chaque pays a son propre plan. Si la création de Genci[5] en 2007 a permis de faire comprendre aux pays européens qu’il fallait avoir une infrastructure européenne capable de concurrencer les grosses puissances du domaine (États-Unis, Chine, Japon), il faut attendre fin 2018 avec l’initiative européenne EuroHPC[6] pour coordonner les efforts de R&D et le déploiement de premiers supercalculateurs de classe mondiale dédiés à la recherche au niveau européen. C’est seulement dans le cadre de la deuxième phase prévue pour 2022-2023, que le programme soutiendra le développement de machines Exascale, pour lesquelles la France et l’Allemagne se sont portées volontaires pour l’hébergement.

La France doit trouver son chemin…

Un des enjeux est donc de ne pas subir les évolutions de l’IA, et de se doter de tous les moyens : humains, matériels, dont les supercalculateurs, et un circuit de prises de décisions politiques agiles, afin de ne plus subir ces changements.

Se doter de matériels…

La France doit disposer à la fois d’infrastructures publiques, mais aussi de moyens opérés par des industriels. On peut citer EDF, Airbus, Safran, Renault … qui investissent fortement dans le calcul intensif en termes de moyens de calcul et d’applications. Si on compte parmi les fleurons français Atos-Bull, qui est le seul producteur européen de supercalculateur de classe Exascale, la première entreprise française classée au top 500 de novembre 2020 est Total, qui,  avec sa machine IBM Pangea III, n’arrive qu’à la 18e position.

Se doter de moyens humains…

Cédric Villani, en charge de la mission sur l’IA en 2017, a admis une fuite des experts français en IA. Pour exemple, parmi les quinze personnalités françaises de l’IA, cinq exercent aux États-Unis (dont Yann LeCun, Jérôme Pesenti, Patrick Simard, Léon Bottou ou encore Rémi Munos).

Le cas Atos-Bull : la France à l’échelle mondiale

Malgré tout, la France, avec l’exemple d’Atos-Bull, numéro quatre mondial des supercalculateurs joue bien dans la cours des grandes.

De 2016 à 2019, son usine d’Angers a produit près d’un demi- exaflop[7] de puissance de calcul. Sur cette période, la production de serveurs de calcul est passée de 3 000 à 5 000 par an. Et en 2022, Atos prévoit de produire près de 10 000 machines à Angers, équivalent à près de 2 exaflops, faisant du site du Nid-de-Pie l’une des trois plus importantes usines au monde en la matière.

La construction du nouveau centre de test angevin a nécessité un investissement global de l’ordre de 10 millions d’euros, cofinancé par le fonds européen de développement régional, avec un soutien de la Région Pays de la Loire dans le cadre de la politique de développement économique (600 000 €) et le financement Européen FEDER[8] (1200 000€). Les performances d’Atos -Bull ont permis de créer 800 emplois d’ingénieurs de haut niveau et de pérenniser l’avenir de l’usine à Angers.

Demain, l’IA française…

La France ne manque pas d’atouts dans le domaine de l’intelligence artificielle.

Aujourd’hui, les mentalités commencent à changer, et on observe une sorte de conscience collective qui émerge sur des enjeux autour de la donnée et de l’IA.

La France continue de se chercher une IA compétitive, qui génère du business, tout en étant éthique. Si l’IA européenne reste encore aujourd’hui, pour l’essentiel, du domaine de la recherche, et tend à se déployer dans des domaines critiques comme la santé, la cybersécurité, les modèles économiques et sociétaux autour de la notion de confiance, petit à petit, l’IA tend à se démocratiser.

Malgré des faiblesses à jouer sur le plan international avec des « fuites de talents », ou encore des machines dont les performances sont très loin de Fugaku de Fujits, l’exemple d’Atos-Bull à Angers montre que l’IA peut permettre de créer des emplois d’ingénieurs de haut niveau, insufflant ainsi une dynamique territoriale.

La France se classe en 2ème position des pays européens les plus performants et dynamiques en termes d’IA, derrière la Grande-Bretagne[9]. 21% du total des entreprises européennes positionnées sur ce secteur sont françaises.

Le territoire français accueille les chercheurs en IA des GAFA, avec Facebook et son hub européen Facebook AI Research (FAIR), ou encore Google et son centre de recherche en IA à Paris.

Pourquoi pas une IA Made In France (MIF) ? La France (dans le cadre européen) pourrait partir sur l’idée d’une IA qui ne serait pas une offre en compétition avec celle de la Chine et des États-Unis, mais plutôt une alternative, en créant un différenciant au niveau européen. L’explicabilité, la traçabilité et l’éthique, doivent permettre de créer ce barycentre entre une IA chinoise (OMO[10]) et une IA américaine drivée par les GAFAM. L’avance prise par les États-Unis et la Chine pourrait vite se rétrécir faute de pouvoir déployer leurs solutions sur le territoire européen. Il se pourrait qu’ils n’aient pas du tout de réponse sur certains marchés européens à défaut d’avoir pris en compte ces critères dès le début .

Et demain ?

La première hypothèse est que, demain, Europe, États-Unis et Chine travailleront chacun séparément de son côté. Dans ce cas, les puissances chinoise et américaine laisseront peu de place à l’émergence d’un IA made in France. La deuxième serait que l’Europe suscitera une prise de conscience dans les autres pays : les Américains prendront alors l’éthique et le social en compte, et les asiatiques[11] freineront la surveillance technologique.

Nul ne peut vraiment dire ce que demain sera fait, mais ce qui est sûr, c’est que la France a déjà son propre chemin. Il passe par la différenciation via l’éthique, la traçabilité et l’explicabilité : tout n’est pas forcément dessiné !

Par Thao Noet, promotion 2020-2021 du M2 IESCI

[1] BRI : Belt and Road Initiative

[2] Baidu, Alibaba, Tencent & Xiaomi

[3] Kai Fu Lee, (2019) I.A. La Plus Grande Mutation de l’histoire au édition Les Arènes

[4] Source : https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/pid26414-cid128577/rapport-de-cedric-villani-donner-un-sens-a-l-intelligence-artificielle-ia.html

[5] GENCI (Grand Équipement National de Calcul Intensif ) a pour mission, au niveau national et européen, de favoriser l’usage du calcul intensif associé à l’Intelligence Artificielle au bénéfice des communautés de recherche académique et industrielle

[6] High-Performance Computing

[7] un exaflop = un milliard de milliards d’opérations en virgule flottante par seconde

[8] FEDER : Le Fonds européen de développement régional

[9] Étude du groupe américain fabricant de composants électroniques PNY Technologies qui recense 424 entreprises françaises opérant dans le domaine de l’IA

[10] Offline Merge Online

[11] En mai 2019, l’Académie de Pékin en intelligence artificielle a publié le « Consensus de Pékin », un document de 15 articles édictant des principes visant à encadrer la recherche et développement, l’utilisation et la gouvernance de l’IA. C’est la première fois qu’une organisation officielle chinoise édicte des principes, notamment éthiques, dans ce domaine.

Sources

(Les sites ont été consultés entre le 19 et 27 janvier 2020)

Villani C, (2017), Donner un sens à l’intelligence artificielle: pour une stratégie nationale, 2017 https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=Q7lUDwAAQBAJ&oi=fnd&pg=PP1&dq=Intelligence+artificielle+France&ots=0HDgR7SES-&sig=kS_8B-pATRgjOu27aQucNH_bDcg#v=onepage&q=Intelligence%20artificielle%20France&f=false

Enseignement supérieur recherche : 

https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid128577/rapport-de-cedric-villani-donner-un-sens-a-l-intelligence-artificielle-ia.html

https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid136649/la-strategie-nationale-de-recherche-en-intelligence-artificielle.html

https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid128618/la-strategie-ia-pour-faire-de-la-france-un-acteur-majeur-de-l-intelligence-artificielle.html

Chine Magazine :

La Chine a consacré 2210 mililards en R&D en 2019

INPI :

https://www.inpi.fr/fr/internationales/chiffres-cles-2019-de-l-ompi-la-chine-premier-deposant-de-demandes-internationales-de-brevets

Usine Nouvelle :

https://www.usinenouvelle.com/editorial/avis-d-expert-top-500-des-supercalculateurs-l-europe-a-tous-les-atouts-dans-son-jeu-pour-devenir-n-1-mondial.N1030369

https://www.usinenouvelle.com/article/portraits-les-gourous-de-l-ia.N650119

https://www.usinenouvelle.com/editorial/comment-la-sncf-compte-faire-des-economies-grace-a-la-maintenance-predictive.N979246

Le Figaro :

https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/2016/06/21/32001-20160621ARTFIG00124-la-chine-devient-la-premiere-puissance-informatique-au-monde.php

CNRS :

https://lejournal.cnrs.fr/articles/supercalculateurs-les-enjeux-dune-course-planetaire

Usbek & Rica :

https://usbeketrica.com/fr/article/ia-france-plutot-leader-suiveuse-pionniere

Hub Institute :

https://hubinstitute.com/2018/transformation/infographie-Baidu-Alibaba-Tencent-Xiaomi-capitalisation-gafa

Hub France IA :

Actus

Siècle Digital :

https://siecledigital.fr/2018/08/20/histoire-intelligence-artificielle/

 

France Digitale :

Les startups spécialisées dans l’IA continuent à augmenter en France

 

Conseil de l’Europe :

https://www.coe.int/fr/web/artificial-intelligence/history-of-ai

 

Le Monde :

https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/02/18/comment-l-europe-veut-gagner-la-bataille-de-l-intelligence-artificielle_6029912_3234.html

 

Fairise, A. (2018). Les premiers pas de l’IA en entreprise. Alternatives Économiques, 380(6), 42-42. https://doi-org.buadistant.univ-angers.fr/

 

Chavagneux, C. (2018). Intelligence artificielle : des moyens insuffisants. Alternatives Économiques, 379(5), 47-47. https://doi-org.buadistant.univ-angers.fr/

Allard, P. (2020). La Chine, championne technologique ou géant empêtré ? Politique étrangère, printemps(1), 121-133. https://doi-org.buadistant.univ-angers.fr/10.3917/pe.201.0121

Heurtebise, J. & Maréchal, J. (2020). Éditorial. L’innovation en Chine : réalités et problèmes. Monde chinois, 61(1), 5-7. https://doi-org.buadistant.univ-angers.fr/10.3917/mochi.061.0005

Zubeldia, O. (2020). Entre résilience et rupture : l’émergence d’un nouveau modèle technologique chinois? Monde chinois, 61(1), 39-53. https://doi-org.buadistant.univ-angers.fr/10.3917/mochi.061.0039

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Nouvelle économie – nouvelles méthodes de lutte https://master-iesc-angers.com/nouvelle-economie-nouvelles-methodes-de-lutte/ Sun, 29 Nov 2020 13:48:19 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3304 « L’intelligence est le croisement de l’information et de la stratégie. Le prisme est large. Il va du cycle du renseignement – dont la définition « officielle » de l’intelligence économique s’est inspirée – à la manipulation de la connaissance… Continuer la lecture

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« L’intelligence est le croisement de l’information et de la stratégie. Le prisme est large. Il va du cycle du renseignement – dont la définition « officielle » de l’intelligence économique s’est inspirée – à la manipulation de la connaissance en passant par la désinformation. Dans tous les cas, l’information est au service d’une stratégie : en amont pour définir et comprendre son environnement pertinent, prévenir les risques, détecter les opportunités…; en aval pour décider, leurrer l’adversaire, le paralyser, … », Moinet (François)

Le monde est au bord des changements de l’économie internationale. L’échange de biens, d’informations et de capitaux entre les pays augmente quotidiennement. Les entreprises nationales se transforment en d’énormes sociétés internationales, parallèlement à cela, le volume du commerce international augmente. Ainsi une mondialisation croissante des activitées et une crise du système fordiste des pays développés aboutissant au passage à une économie de la connaissance. L’économie de la connaissance est l’étape la plus élevée du développement de l’économie postindustrielle et de l’économie de l’innovation, caractérisée par la société de l’information ou bien par la société de la connaissance. Mais, également, la prochaine étape du grand développement de l’économie et de la société des pays avancés du monde. L’information est l’arme principale pour conquérir de nouveaux marchés et profits.

Si l’information peut être qualifiée « d’arme », existe-t-il une guerre de l’information ? Quelles nouvelles méthodes de lutte économique sont nées parallèlement au développement de l’économie de la connaissance ? et quels sont les déterminants contemporain de la compétitivité ?

 Pour répondre à ces questions, nous considérerons le concept de guerre de l’information et l’impact du progrès technologique sur la compétitivité des pays ;  dans la deuxième partie, nous parlerons des nouvelles tendances dans le développement stratégique de la FMN et des limitations commerciales ;  dans la troisième partie, nous examinerons les méthodes d’intelligence économique et les nouvelles formes d’interaction entre entreprises.

1. Les déterminants contemporains de la compétitivité des pays

Le développement accéléré des technologies de pointe, des réseaux de transmissions de données, la place de plus en plus grande des médias dans la vie des sociétés sont des phénomènes qu’il n’est plus possible d’ignorer car ils contribuent à modifier fondamentalement la stratégie, la politique, l’économie et le comportement humain. L’information n’est plus une seule nécessité, elle devient un élément majeur de l’art de la guerre économique : elle permet de gagner un conflit qu’il soit militaire ou économique.

La notion de guerre de l’information est valable à la fois en temps de guerre et en temps de paix. La guerre de l’information désigne l’ensemble des méthodes et actions visant à infliger un dommage à un adversaire ou à se garantir une supériorité. Les buts de la guerre de l’information peuvent être des tentatives d’établir une hégémonie sur les réseaux de connaissances (entreprises, universités, grandes écoles, centres d’études et de recherches) en jouant sur des normes macroéconomiques ; l’influence sur l’économie internationale, en mettant en œuvre des règles sur les contrats internationaux, et en utilisant les failles juridiques de l’adversaire d’évaluation du capital immatériel, ou sur les normes en général (en informatique et en télécommunication notamment) ; l’influence politique ; l’acquisition d’information (données ou connaissances) stratégique à propos dudit adversaire … Dans la guerre de l’information, l’efficacité repose sur le partage et non sur la rétention de l’information. Mais quelles sont les déterminants qui contribuent à l’augmentation de la compétitivité des pays et permettent de gagner dans la guerre économique?

Tout d’abord, c’est un niveau de développement des nouvelles technologies d’information et de communication (NTIC). Les nouvelles technologies font depuis longtemps irruption dans notre quotidien: smartphones, Internet des objets, aspirateurs robotisés, voitures avec fonctions de conduite autonome etc. Mais le développement de ces produits est devenu possible grâce à des technologies plus complexes et globales, telles que la blockchain, les équipements de reconnaissances des données, l’intelligence artificielle, les technologies de communication et les automations industrielles etc. Tout cela caractérise la révolution technologique, qui modifie les structures de l’industrie et les règles de concurrence. Les TIC ont pris une importance stratégique en affectant toutes les entreprises. Des indicateurs tels que le niveau d’investissement dans les actifs immatériels, le nombre de brevets par habitant du pays, le nombre de scientifiques, etc., déterminent le niveau de développement technologique du pays et sa capacité à introduire des innovations.

Sur le site WIPO (World intellectual property organisation) est présenté un rapport, Le Global Innovation Index, qui fournit des mesures détaillées sur les performances d’innovation de quelque 130 pays et économies du monde entier.

L’un des indicateurs du progrès scientifique est également le nombre de brevets déposés par habitant, que l’office européen des brevets (OEB) traite en Europe.

Une enquête réalisée auprès de chefs d’entreprise américaines révèlent  que 86% d’entre eux citent l’innovation comme l’un des principaux axes de croissance. Bien évidemment, le développement de la technologie est le principal avantage concurrentiel des pays et des entreprises à l’époque d’une économie du savoir très développée.

Mais il existe un autre indicateur qui prend en compte le niveau de culture, le succès de la politique étrangère d’un pays et ses valeurs politiques – Soft Power. En utilisant des outils de Soft Power, les pays peuvent influencer la perception de leur image aux yeux de leurs résidents et des résidents d’autres pays. Joseph Nye a introduit pour la première fois le concept de « Soft Power » ce qui signifie une forme de pouvoir politique, la capacité d’atteindre les résultats souhaités sur la base de la participation volontaire, de la sympathie et de l’attractivité. Pour atteindre leurs objectifs, les pays utilisent des méthodes de guerre de l’information – l’impact émotionnel des images. Pour cela, ils utilisent  les stratégies de communication, spécifiquement la communication de masse ou en utilisant les réseaux sociaux professionnels, travaillent à travers les industries de la télévision et du cinéma (cinéma indien), organisent des compétitions sportives mondiales ou même un réseau mondial de restauration rapide (McDonald’s). Dans tous les cas, il s’agit de diriger l’opinion à travers des actions de guerre psychologique, de guerre de l’image, de mise en scène et de désinformation, destinées notamment à faire adhérer l’opinion internationale à sa cause, à diaboliser l’adversaire ou à démoraliser le camp adverse. Ici, guerre de l’information est synonyme de propagande, manipulation mentale ou d’influence stratégique.

 Selon le classement du Soft power du CPD (Centre de diplomatie publique) la France prend la première place en 2019. Nous voyons également comment, au cours des quatres dernières années, Les États-Unis ont perdu leur positions en raison de la politique étrangère agressive de Donald Trump.

Nous avons examiné certains facteurs qui déterminent la compétitivité des pays en période de mondialisation et de transition vers une économie de la connaissance. Plus le niveau de développement technologique d’un pays est élevé, plus son économie est développée et donc sa compétitivité plus élevée. D’une part, les NTIC sont un indicateur de la compétitivité du pays, et d’autre part, ils favorisent la diffusion de masse (télévision, Internet, radio) et la collecte d’informations (données personnelles, publicités ciblées) dans le but de renforcer l’impact sur la conscience des consommateurs.

2. Les contradictions du développement stratégique des entreprises : RSE ou Greenwashing ?

Lors de la conférence « Perspectives stratégiques sur la consommation » du Forum économique mondial de Davos en 2019, la question du changement de comportement des consommateurs a été abordée. Dans la société moderne, la question de la responsabilité sociale des entreprises est strictement posée. Depuis 1980, le marketing social et solidaire (et économique) gagne en popularité en raison de l’inquiétude accrue des consommateurs quant à l’origine du produit et à son impact sur la société et l’environnement. Cela a servi de condition préalable au développement du marketing social, ainsi que l’insatisfaction à l’égard des conditions de travail des pays du tiers monde qui est devenu l’impulsion pour le développement de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). De nombreuses entreprises ont commencé à utiliser la RSE comme outil de marketing, plaçant les questions environnementales et la consommation responsable au cœur de la stratégie. Mais la publicité et le marketing sont sujets à de fausses déclarations; une stratégie RSE émise par une entreprise peut se révéler être un simple Greenwashing.

Le greenwashing (éco-blanchiment) est une méthode de marketing consistant à communiquer auprès du public en utilisant l’argument écologique. Le but du greenwashing étant de se donner une image éco-responsable, assez éloignée de la réalité… La pratique du greenwashing est trompeuse et peut-être assimilé à de la publicité mensongère. L’organisation Underwriters Laboratories en collaboration avec Terra Choice a conçu un appareillage de communication dans lequel elle détaille les « péchés » associés aux discours et pratiques de l’éco-blanchiment, c’est-à-dire les différentes formes que prennent les fausses réclamations environnementales corporatives. Leur analyse, produite en 2010, évalue 4 744 produits qui se prétendent « verts » et en arrive à la conclusion que plus de 95 % de ces produits sont coupables d’au moins un de ces péchés. Il s’agit des péchés de la contrepartie cachée, de l’absence de preuve, du tout-flou, de l’étiquette trompeuse,  de la fausseté, de la non-pertinence  et du moindre des maux.

Voici quelques exemples de sociétés qui abusent des politiques RSE :

  • Shell et la multiplication de ses projets de gaz de schiste dans le monde entier (2014 – le Prix Pinocchio dans la catégorie « Une pour tous, tout pour moi ») ;

 

  • IKEA – l’abattage d’arbres centenaires en Carélie (Russie) et la publication de grandes séries de catalogues et le non-respect des obligations relatives à leur traitement.

 

  • La filière nucléaire et le mythe du recyclage: seule une infime partie (à peine 1%) des « matières » produites chaque année est réellement réutilisée. Le reste s’entasse un peu partout en France.

 

Tous ces exemples sont la politique hypocrite de communication des entreprises, qui présente des signes de guerre de l’information et de substitution délibérée des faits. Mais parallèlement à la politique de liberté de communication d’entreprise, ces limites sont nées. Ce « verdissement d’image » participe directement à la désinformation des consommateurs et est donc réglementé par la loi et contrôlé par des organismes comme L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME ou Ademe, qui a publié le guide « anti-greenwashing » pour aider les entreprises à évaluer la campagne publicitaire et sa conformité à la législation environnementale ); l’ARPP (L’Autorité de régulation professionnelle de la publicité). Il apparaît également de nouvelles contraintes et formes d’organisations dans les domaines de l’environnement, de l’éthique et de la société. L’État réglemente le domaine de la protection de l’environnement en créant des commissions spéciales chargées de développer les contraintes réglementaires pour l’implantation d’infrastructures industrielles. Par exemple, la Commission mondiale pour l’environnement et le développement, déclare que le développement doit répondre aux besoins des générations du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Des contraintes éthiques sont créées dans le domaine des politiques publicitaires des entreprises (publicité mensongère, tromperie sur la marchandise), les condition des RH (les discrimination à l’embauche, dans la rémunération), de processus de production et de gestion (délit d’initié, corruption, ententes). Les Contraintes sociales sont également réglementées par la loi : donner du travail (création d’emploi, limite du licenciement, adoption de combinaisons productives ne pénalisant pas l’emploi, répartition du travail); former les salariés tout au long de leur vie, adaptation aux technologies, remises à jour des connaissances.

Avec l’avènement de nouvelles stratégies de promotion des entreprises, leurs limites apparaissent également, conçues pour contrôler les violations éthiques, sociales et environnementales. Depuis, avec l’aide des technologies de communication modernes, les entreprises peuvent abuser des informations et se substituer aux faits. Il existe une frontière fine entre les politiques de consommation responsable et le Greenwashing.

3. La nouvelle économie engendre de nouvelles stratégies

Une mondialisation croissante des activités, modification de l’échelle du temps et de l’espace grâce aux TIC, le développement des produits immatériels aboutissent au passage à une économie de la connaissance. La nouvelle économie développe de nouvelles méthodes de gestion de l’information et de nouvelles stratégies concurrentielles.

L’intelligence économique peut être définie comme « une nouvelle méthodologie fondée sur la collecte, l’analyse et l’utilisation des informations visant à augmenter l’efficacité des agents économiques (Baulant, 2004, 2017). Méthodologie de de l’intelligence économique comme mode de pensée et mode d’action inclut :

  1. La veille consiste à collecter des informations stratégiques pour permettre d’anticiper les évolutions et les innovations. Selon l’Afnor, la veille est une « activité continue en grande partie itérative visant à une surveillance active de l’environnement technologique, commercial, concurrentiel, etc., pour en anticiper les évolutions ».
  2. L’Analyse prospective consiste à se projeter dans le temps long, celui des transformations (des règles du jeu, transformation des stratégies et des organisations) ; c’est une méthode  pour imaginer les différents modes possibles dans lesquels les organisations agiront et d’anticiper les transformations à venir, de mettre en évidence de nouvelles règles du jeu, de nouveaux espaces d’innovation, des nouvelles capacités d’action.
  3. Les actions stratégiques à long et court terme qui incluent la construction des «avantages concurrentiels» soutenable à long terme (le «losange» de Porter, 1997, 1999).
  4. L’accompagnement de l’action stratégique consiste de la protection du patrimoine immatériel, les réseaux et l’influence et le lobbying.
  5. Retour d’expérience: Echange de pratique et de savoirs, audit d’intelligence économique et auto évaluation, études d’impact, rétro veille sur le processus.

Il existe également d’autres moyens d’augmenter la compétitivité. Selon François Jakobiak, le benchmarketing est un processus continu d’évaluation des produits, services et méthodes par rapport à ceux des concurrents les plus sérieux ou des entreprises reconnues comme leaders. Le benchmarketing intègre non seulement l’analyse des produits et services, mais aussi les méthodes pour obtenir des avantages concurrentiels ; il peut être considéré comme étant avant tout un processus de fixation d’objectifs.

Toutes ces méthodes sont basées sur la collecte, le traitement et l’analyse approfondie des informations. En mettant en œuvre ces méthodes, il est possible d’atteindre un niveau élevé de compétitivité informationnelle. La compétitivité informationnelle est fondée sur la maîtrise des information et des connaissances en utilisant trois outils absents de la compétitivité hors prix : la protection de patrimoine immatériel, les réseaux, l’influence et le lobbying.

La capacité organisationnelle de l’entreprise à travailler en réseau et à gérer des réseaux d’influences donne lieu à de nouvelles stratégies. Le concept de «coopétition» est apparu grâce à une synthèse du «partage des connaissances» et de la «guerre économique». C’est un nouveau type de stratégie, qui comprend le processus de la coopération (s’effectue sur certains segments et par les réseaux) et le processus de la concurrence réalise sur d’autres segments. Un exemple d’une telle interaction peut être l’intégration des entreprises agricoles en Pays de la Loire pour accroître la compétitivité de la région, le projet de la « 3ème révolution industrielle et agricole » (TRIA). Le pari de projet est de rassembler tous les acteurs (entreprises, institutions, projets..) vers la TRIA. Cette synergie permettra aux Pays de la Loire de devenir un territoire leader dans la conception et la mise en œuvre de solutions innovantes. Cette collaboration a été initiée par le réseau des trois chambres consulaires régionales (Chambres de commerce et d’industrie, Chambre d’artisanat et des métiers, Chambres d’agriculture).

L’application de la méthodologie de l’intelligence économique dans la pratique contribue au développement de nouveaux modes d’interaction entre les acteurs d’un même marché. Cette interaction est en mesure de créer un avantage concurrentiel et une situation de «Win-Win» pour tous les participants qui se considéraient auparavant comme des concurrents.

Conclusion

La nouvelle économie contribue au développement de nouvelles méthodes de lutte économique, où les méthodes de guerre de l’information peuvent être un moyen de réussir financièrement des entreprises ou des pays. Selon celui qui l’emploie et suivant le contexte, l’expression « guerre de l’information » peut désigner aussi bien à l’espionnage industriel  dont le rôle du point de vue de l’intelligence économique assure le veille technologique. Le progrès scientifique contribue au développement de technologies pouvant être utilisées contre la société. Dans le cadre des politiques RSE, les entreprises peuvent procéder à un Greenwashing. À l’heure de la mondialisation et d’une nouvelle économie les discontinuités entre droite et gauche, public et privé, ennemi et ami, coopération et compétition disparaissent. Pour le dire autrement, pendant que la guerre économique mobilise une composante de plus en plus importante d’information et de communication l’économie dite de l’information devient de plus en plus conflictuelle.

Par Alisa Zhukova, promotion 2020-2021 du M2 IESCI

Bibliographie

  • Baulant Camille « Specialisation et échanges internationaux : les apports des nouvelles théories de commerce international » (exposé pour les professeurs), 2008
  • Jakobiak François « L’intelligence économique en prtique », 1998
  • Guilhon Alice, Moinet Nicolas « Intelligencr économique. S’informer, se proteger, influencer », 2016
  • Les principes de la guerre d’information, 2001

https://infoguerre.fr/2001/11/les-principes-de-la-guerre-de-l-information/

  • Moinet Nicolas « L’intelligence économique, nerf de la guerre économique », 2019

https://www.areion24.news/2019/02/15/lintelligence-economique-nerf-de-la-guerre-economique/

https://www.futura-sciences.com/sciences/questions-reponses/inventions-brevets-sont-pays-secteurs-plus-innovants-11052/

 

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Les nouvelles technologies digitales comme moyen d’améliorer le traitement de l’autisme https://master-iesc-angers.com/les-nouvelles-technologies-digitales-comme-moyen-dameliorer-le-traitement-de-lautisme/ Thu, 30 Apr 2020 14:21:31 +0000 https://master-iesc-angers.com/?p=3197 L’autisme correspond à un trouble du développement qui est causé par un dysfonctionnement neurobiologique affectant la capacité à communiquer et à avoir des interactions sociales. En France, entre 450 000 et 600 000 personnes seraient atteintes de troubles du spectre… Continuer la lecture

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L’autisme correspond à un trouble du développement qui est causé par un dysfonctionnement neurobiologique affectant la capacité à communiquer et à avoir des interactions sociales. En France, entre 450 000 et 600 000 personnes seraient atteintes de troubles du spectre autistique, soit une naissance sur cent cinquante. Malgré ce nombre, ce trouble est mal connu des professions médicales et beaucoup ne sont pas suivis comme il le faudrait : 80% des enfants autistes ne sont pas scolarisés et seulement 23% des enfants autistes ont un accompagnement adapté. Aujourd’hui, les avancées numériques et technologiques sont telles qu’elles permettent aux personnes atteintes de troubles divers, comme l’autisme, de réussir à mieux s’insérer dans leur environnement social[1].Le développement des nouvelles technologies et des outils numériques offre un panel de possibilités très large, notamment pour améliorer le quotidien des personnes atteintes de troubles du spectre autistique. C’est ce que nous montre le réseau sémantique suivant :

Ces différentes innovations vont permettre, grâce au numérique, de développer le comportement des personnes autistes et notamment celui des enfants. En effet, les articles étudiés mettent en évidence les bénéfices de ces innovations : amélioration du langage corporel, identification des émotions, aide à l’intégration.

Les outils numériques à l’international

Le nombre de troubles du spectre autistique (TSA) a presque triplé depuis 2000, touchant un enfant sur 59 aux États-Unis, selon les Centres pour le Control et la Prévention[2]. Le nombre d’enfants autistes américains a augmenté de 119,4% entre 2000 et 2010[3]. Il n’est donc pas étonnant que les Etats Unis soient les premiers à avoir développé des outils pour dépister et combattre l’autisme chez les enfants. Les zones géographiques les plus actives et intéressées par ce domaine sont : premièrement, l’Amérique de Nord (Les Etats-Unis, le Canada), ensuite l’Europe (Suède, Italie), et finalement l’Asie (Japon). Beaucoup d’universités et d’Instituts spécialisés dans le domaine ont contribué à développer des nouveaux outils et mécanismes pour aider les familles en difficulté, notamment les enfants diagnostiqués TSA.

On peut citer quelques exemples concrets comme des robots qui sont parvenus à « se connecter » aux enfants atteints de TSA, (grâce aux compétences émotionnelles et communicatives qui peuvent posées des difficultés), ou encore des policiers américains qui utilisent la réalité virtuelle pour interagir avec les enfants autistes. Ces deux exemples montrent l’avenir florissant du développement de la technologie liée à la santé. Les dispositifs mentionnés montrent qu’il est possible d’aider les personnes, et plus particulièrement les enfants atteint d’autisme, à comprendre les interactions sociales et comment s’intégrer dans un groupe.

Les outils numériques se sont également avérés utiles pour le dépistage de l’autisme. A Philadelphie, à l’Hôpital pour enfants, une recherche est présentée. Des capteurs enregistrent les mouvements du visage, y compris la posture de la tête et les mouvements des yeux, au cours d’une conversation de trois minutes. Cet outil prétend pouvoir prédire l’autisme à environ 89%[4]. De même, une application appelée « Autism & Beyond », qui enregistre les réponses et les comportements émotionnels d’un enfant pendant qu’il regarde une courte vidéo, a permis d’identifier plus de 1 000 enfants présentant des caractéristiques de l’autisme.

Les codes de langage des enfants autistes sont l’un des premiers domaines de l’étude pouvant déboucher sur de nouvelles thérapies. Les chercheurs financés par le SFARI[5] utilisent déjà des smartphones et un logiciel de transcription automatique pour enregistrer la parole et détecter les comportements des enfants atteints d’autisme.

Aux Etats-Unis, près de 50 000 personnes atteintes d’autisme quittent l’école secondaire chaque année5. Ce genre de fait sur l’autisme peut résulter de plusieurs facteurs, mais ces étudiants ont surtout du mal à maîtriser les processus d’apprentissage. En moyenne, l’autisme coûte aux familles environ 60 000 dollars par an6. Par contre, éduquer un enfant autiste coûte 8 600 $ de plus par an7. Cependant, le coût de la prise en charge des Américains atteints d’autisme atteindra 461 milliards de dollars d’ici 20258.

L’Angleterre dispose de programmes importants pour l’intégration des enfants atteints de troubles du spectre de l’autisme au sein d’écoles non spécifiques en faisant appel à des interlocuteurs pouvant aider à répondre aux questions : tant des enseignants, des parents que des élèves, et mettre en place des aides spécifiques adaptées à chaque enfant. L’Angleterre incite donc la confrontation des autistes au monde de tous les jours, c’est comme cela que l’un des musées de Bristol a décidé de mettre en place une application adaptée au enfants atteints de l’autisme en utilisant les points de vus de ces derniers. En effet, on peut constater que les visites de musée pour les autistes peuvent être stressantes et un challenge important. Il est donc intéressant pour ce musée de réussir une application leur permettant d’être à l’aise et de capter leur attention. Les écrans tactiles autant visuels qu’audio permettent de créer de la participation mais aussi du divertissement pour réussir à capter l’intérêt des autistes.

De plus, on peut voir que diverses innovations sont proposées, notamment avec la création de technologie informatique grâce à de la musique allant au-delà de la musicothérapie traditionnelle. La musique permet donc de faciliter la communication mais aussi de nouer des liens sociaux. Les systèmes informatiques permettent donc la multi-sensorialité. C’est en Espagne que l’application BendableSound a été créée par Cibrian, Pen˜a, Ortega, & Tentori qui permet une interaction haptique pour définir sa propre expérience auditive en contrôlant des éléments musicaux tels que la hauteur, le volume ou bien même le rythme. Ceci permet donc une exploration de soi tout en permettant d’appliquer des compétences nouvelles à des environnements réels.

Le Japon a longtemps été le premier pays à poser des brevets et innover de toute part, ils se sont aussi intéressés à l’autisme, et c’est même récemment que l’on peut voir qu’une entreprise ‘Spectrum Visions Global, Inc.’ a créé la plate-forme Voice4u qui est une révolution en termes de communication alternative. Cette plate-forme aide les autistes à exprimer leurs sentiments, leurs pensées, leurs actions et leurs besoins. Ceci permet donc un meilleur apprentissage mais aussi une communication facilitée.

Conclusion

Grâce au progrès et à l’innovation notre société devient de plus en plus technologique et digitale. Les leaders économiques d’aujourd’hui sont les entreprises qui ont su s’adapter à cette transition numérique comme les GAFAM aux Etats-Unis. L’enjeu pour elles est donc de fournir leurs innovations au plus grand nombre, elles prennent de plus en plus en compte les spécificités des individus pour leur proposer des outils numériques adapter à leurs besoins. Ainsi, le développement de nouvelles technologies à destination des personnes atteintes d’autisme s’est fait tout naturellement et représentent aujourd’hui un vrai marché lucratif.

Ces outils numériques ont beaucoup d’atouts, ils permettent notamment aux enfants autistes à communiquer et à mieux comprendre le monde et les personnes qui les entourent. Cependant, de tels outils ne doivent pas enfermer les individus souffrant d’autisme dans un monde virtuel qui les détacherait du monde réel.

Par Denisa Apostol, promotion 2019-2020 du M2 IESCI

[1] Selon l’Institut National de la santé et de la recherche médicale

[2] Big Ideas University of California, https://bigideas.ucdavis.edu/news/autism-treatment-new-technologies

[3] Statistics about autism, https://disturbmenot.co/autism-statistics/

[4] « Are digital tools the future of autism research? », https://sparkforautism.org/discover_article/are-digital-tools-the-future-of-autism-research/

[5] Simons Fondation Autism Research Initiative, https://www.sfari.org/

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Au cours des dernières décennies les progrès scientifiques et les innovations en tout genre n’ont jamais été aussi nombreuses et un secteur particulier a pu évoluer grâce à ces découvertes : la conquête spatiale. Or, nous savons que l’homme n’est en aucun cas fait pour vivre dans l’espace, un des écosystèmes les plus dangereux qui puisse exister. Il faut donc sans cesse trouver des solutions plus novatrices les unes que les autres pour aider dans la conquête spatiale. Christopher E. Mason, chercheur reconnu en biologie et en génétique humaine, propose de modifier génétiquement certaines personnes pour les rendre aptes aux voyages spatiaux et ainsi potentiellement se rendre sur Mars.

Ce fait d’actualité plutôt marquant met en évidence deux choses : tout d’abord, les champs d’application de la modification génétique sont immenses et englobent tous les secteurs d’activités. Ensuite, la modification génétique permet d’espérer, et de mettre en place des idées et des hypothèses qui ont toujours appartenu à la science-fiction telles que l’amélioration du QI, ou l’immortalité, par exemple. Ce courant de pensée se nomme le transhumanisme. Le transhumanisme cherche à mettre le progrès technologique au service de l’Homme et plus précisément de son patrimoine génétique. Le but est d’augmenter ses capacités, qu’elles soient cognitives, physiques ou émotionnelles. Le transhumanisme peut donc être mis au service des problèmes de sociétés qui se posent actuellement tels que l’augmentation de l’infertilité, et le traitement des maladies génétiques, par exemple. Tout au long de cet article nous avons cherché à comprendre quel était le soubassement économique et les limites du transhumanisme.

Afin de répondre à cette question, nous allons nous concentrer sur les explications des différents mécanismes utilisés dans la modification génétique. Pour cela, nous présenterons dans un premier temps le contexte biologique, puis nous étudierons la course à l’innovation génétique. Dans un second temps, nous verrons les intérêts de ces méthodes de modifications génétiques. Enfin, dans une dernière partie nous présenterons les dérives possibles liées à la modification génétique.

1         Explications techniques

1.1        Contexte biologique

Le point de départ : la technique CRISPR-Cas9

Le CRISPR Cas9 est une méthode qui a été découverte par deux chercheuses : Emmanuelle Charpentier et Jennifer Doudna à l’université de Berkeley, en 2012. Elle permet de modifier le génome des êtres vivants : des végétaux, et des animaux, aussi bien que celui de l’Homme. Bien consciente des enjeux immenses de leur découverte, Emmanuelle Charpentier a révélé ses craintes : ‘‘ Avec l’accès ouvert aux résultats, comme nous le faisons dans les Etats démocratiques, il y a toujours le risque que cette connaissance soit mal utilisée ’’.  L’enzyme Cas9, qui donne son nom à cette méthode, agit comme une sorte de ciseaux moléculaire qui va permettre de découper une séquence d’ADN à un endroit précis, au sein d’une cellule quelconque, dans le but de la modifier l’ADN ou de rendre inactifs les allèles concernés (variantes des gènes). Cette technique est aujourd’hui facile à mettre en place par les chercheurs et peu coûteuse. Elle est déjà utilisée dans de nombreux laboratoires et sert de référence dans la recherche et plus particulièrement dans la recherche sur les modifications génétiques.

Elle présente cependant de nombreuses limites : l’édition du génome entraîne des modifications non maitrisées qui induisent des conséquences imprévisibles sur l’être vivant. Ceci s’explique par la complexité des êtres vivants et par le relatif manque de connaissances dont nous disposons à ce sujet. Or, l’Homme est sans conteste l’être vivant le plus complexe et la biologie humaine rend difficile, voire impossible, de mettre en œuvre toutes les modifications que l’on souhaite, sans impacter d’autres partie du génome et donc créer des mutations non souhaitées. Plusieurs interactions se créent à la suite de l’utilisation du CRISPR Cas9, qui ne sont pas nécessairement observables et encore moins prévisibles. La démocratisation et l’utilisation de cette technique soulève de nombreuses questions. D’autre part, sous couvert d’être utilisée pour traiter les maladies génétiques, elle ouvre clairement la voie au transhumanisme et au concept de l’homme augmenté qui sont des sujets extrêmement sensibles et controversés.

Le CRISPR Cas 9 est une grande avancée qui permet des modifications génétiques simple et peu coûteuse, cependant les implications de ces modifications ne sont pas toutes connues, ce qui peut provoquer des conséquences imprévisibles, et irréversibles.

Les innovations du découpage génétique

La technique CRISPR Cas9 peut servir dans différentes situations que nous allons détailler ci-dessous. A partir d’une microchirurgie réparatrice des gènes, il est possible de corriger et rendre actif des gènes qui ne fonctionnent pas. Cette méthode que l’on nomme la “thérapie génique” a permis de traiter une centaine de patients qui étaient atteints d’un déficit immunitaire. Toutefois, ce travail peut uniquement s’effectuer au cas par cas, car il existe un grand nombre de critères à remplir par les malades, afin qu’ils puissent participer aux différents essais cliniques. De ce fait, un très faible nombre de patients peuvent être soignés avec partir de cette technique. De plus, cette solution reste très coûteuse, en termes d’investissement et de recherche, par conséquent, la pression économique est très forte : le coût de la thérapie génique pour soigner un patient, est actuellement compris entre 1 et 5 millions d’euros.

La technique CRISPR Cas9 peut également permettre la réécriture partielle du génome, avec les modifications héréditaires qui en découlent. Il est donc potentiellement possible de soigner des maladies génétiques, qui concernent l’ensemble des cellules, au niveau de l’embryon. Cette technique se nomme la thérapie génique germinale. Il est donc possible de choisir les traits qui seront transmis à la descendance. Cette innovation a été utilisée chez le macaque, et les modifications du génome semblent avoir été conservées chez les embryons associés, bien que les résultats restent incomplets puisqu’un grand nombre de grossesses n’ont pas pu arriver à leur terme.

Toutes ces possibilités offertes par CRISPR Cas9 permettent d’innover dans la génétique, ce qui intéresse fortement les entreprises du monde entier. Ces innovations sont aujourd’hui au cœur d’une féroce compétition entre les chercheurs de différents pays.

1.2        La course à l’innovation génétique

Le financement de la recherche en France

Les coûts de recherche et de développement sont particulièrement importants dans le domaine de la génétique, et de la thérapie génique. C’est pourquoi, les différentes innovations se construisent avec des besoins de financement importants et croissants. Le financement de la recherche et de l’innovation en France se fait par différentes sources, nous allons voir lesquelles.

Au niveau de l’Union Européenne, la principale source de financement de la recherche et de l’innovation est pilotée par les Programmes Cadre pour la Recherche et le Développement Technologique (PCRDT) qui se succèdent depuis 1984. Le principal but est de créer un Espace Européen de la Recherche (ERR). Pour cela, il faut coordonner les recherches des Etats membres, et organiser une certaine coopération entre les chercheurs pour augmenter les capacités de recherche et développement, notamment dans le domaine de la génétique. Cette coopération semble nécessaire de par la complexité et le coût des recherches.  Aujourd’hui et depuis 2014, le 7ème PCRDT est en place, il se nomme “Horizon 2020”. Son budget est de 79 milliards d’euros. L’objectif premier de ce programme est de créer une plateforme en libre accès de la connaissance, et plus particulièrement à partir des publications des chercheurs européens.

En France, le budget alloué à la recherche publique est géré par la Mission Interministérielle Recherche et Enseignement Supérieur (MIRES). En 2017 il représentait 13,3 milliards d’euros. Ces fonds sont constitués de ressources propres, et pour plus de 65% des dotations budgétaires de l’Etat. L’Agence Nationale de la Recherche (ANR) est également un acteur clé de la recherche française. Elle finance des projets qui sont sélectionnés à partir de critères internationaux, et principalement à l’aide d’appels à projets, qui respectent des priorités établies à l’échelle nationale.

Les dons constituent également une part importante du financement de la recherche dans le domaine de la médecine. Ces dons soutiennent les chercheurs qui publient des articles scientifiques démontrant l’avancement de leurs recherches. L’Etat encourage les dons pour la recherche médicale en défiscalisant une partie de ces derniers à hauteur de 66%, dans la limite d’un don inférieur à 20% du revenu net imposable. Les chercheurs sont restreints par les différents budgets qui leurs sont alloués, mais pas seulement, le cadre législatif, qui varie d’un pays à l’autre, peut également être plus ou moins restrictif.

Un enjeu stratégique international dans un cadre législatif flou

Bien que les coûts en recherche et développement soient très important, une compétition s’est installée entre les Etats, dans une véritable course à l’innovation et aux brevets avec comme acteurs principaux les États-Unis et la Chine.

En ce qui concerne l’aspect législatif, tous les pays ne suivent pas les mêmes règles. Aujourd’hui, l’utilisation simple du CRISPR Cas9 a mis en évidence qu’il n’existe aucun droit international, ou consensus législatif autour de l’édition du génome humain.

Cependant, 5 pays de l’Union Européenne : le Royaume Uni, la France, l’Allemagne, l’Italie et la Russie ont signé la convention d’Oviedo de 1997. Elle pose des bases sur des questions éthiques liées aux droits de l’Homme, à la dignité humaine et à l’identité des individus dans le cadre de la biomédecine. Elle contribue à la réglementation notamment de la génétique (test et clonage), mais également de la transplantation d’organe pour éviter les trafics.

En France, la modification génétique est réglementée depuis 1994. La modification de l’espèce humaine est interdite, quel que soit l’objectif poursuivi. Par conséquent, le clonage est interdit sous peine de 30 ans de prison et 7,5 millions d’euros d’amende. La thérapie génique, qui s’applique sur les cellules germinales, et donc à la descendance, est également interdite.

La législation aux États-Unis est différente, le cadre est plus libéral bien que les “bébés sur-mesure” aient été interdit à la suite d’une loi de 2016. L’édition du génome humain, et plus précisément des cellules germinales est actuellement jugée comme irresponsable par la justice américaine.

En Chine, la législation tend à se durcir à propos des modifications génétiques. La modification génétique d’un embryon ou d’un Homme est soumise à la responsabilité de celui qui l’effectue, en interdisant la mise en danger de la santé des individus, et en obligeant à respecter l’éthique. Les législations sont distinctes selon les pays et permettent des innovations génétiques plus ou moins rapides, et des débats éthiques différents, qui varient selon les cultures.

2         Les espoirs de la modification génétique

2.1        L’Homme augmenté

Vers une augmentation de nos capacités cognitives ?

Comme nous l’avons vu précédemment, la thérapie génique germinale peut permettre d’envisager un Homme augmenté, en sélectionnant les gènes transmis aux générations suivante. L’eugénisme représente l’ensemble des méthodes auxquelles les scientifiques ont recours afin d’améliorer le patrimoine génétique des êtres humains. Malgré les avancées exceptionnelles faites dans ce domaine, il reste, à l’heure actuelle, impossible de combattre la vieillesse, et encore moins de développer l’immortalité.

Les transhumanistes jugent que l’augmentation de l’Homme grâce aux nouvelles technologies s’inscrit dans l’évolution logique de l’espèce humaine. L’Homme peut être augmenté grâce à la modification génétique, mais pas uniquement, il peut également être augmenté avec les diverses nanotechnologies et l’informatique.

Ces avancées concernent toutes les parties du corps, et permettent de régler un certain nombre de problèmes, pour étayer ce propos, nous allons nous intéresser à plusieurs exemples.

Aujourd’hui, il est déjà possible de redonner la vue à certains aveugles, par le biais d’implants rétiniens électroniques. Toutefois, des espoirs fondés sur le génome d’une algue sensible à la luminosité existent, afin d’améliorer les résultats déjà observables actuellement.

Des prothèses de plus en plus sophistiquées sont utilisées pour remplacer des membres pour des handicapés moteurs. Les membres bioniques sont des vraies innovations, avec des possibilités infinies, qui pourrait permettre aux individus amputés de retrouver les facultés qu’ils avaient perdus et mêmes d’augmenter celles-ci.

Enfin, nous pouvons évoquer les possibilités qui existent grâce à l’imprimante 3D. Tout d’abord, des chercheurs français ont réussi à ‘’imprimer’’ un fragment de peau. C’est une évolution significative qui pourrait permettre de soigner, de greffer mais également d’intégrer de nouveaux outils comme des tatouages électroniques qui évolueraient en fonction de l’état de santé de l’individu. Et les capacités de l’imprimante 3D peuvent s’étendre à la création d’organes vitaux, tels que le cœur ou les poumons par exemple, à partir de cellules souches.

Cependant, des questions éthiques se posent. Au premier abord il peut sembler pertinent de pouvoir faire naître des humains augmentés, ou d’améliorer les capacités des Hommes. Mais alors, comment éviter l’instrumentalisation de l’humain, et le développement de nouvelles inégalités ? Ces inégalités biologiques prendraient leurs sources dans les différences entre les humains modifiés et les humains non modifiés.

Une récente chute du Quotient Intellectuel

Bien que la recherche génétique évolue depuis les années, des chercheurs norvégiens ont démontré, en 2018, que le quotient intellectuel des Hommes baisse depuis le milieu des années 1980. Ce phénomène est appelé la réversion de l’effet Flynn. L’effet Flynn découvert par le psychologue du même nom, décrit une tendance selon laquelle l’intelligence mesurée par le QI n’a cessé d’augmenter depuis le début du siècle dernier et l’apparition des premiers tests de QI. Selon les chercheurs, c’est aujourd’hui en moyenne 3 points de QI que les générations futures perdent à chaque décennie. Les causes de cette inversion ne seraient pas génétiques mais plutôt lié à l’évolution de l’environnement dans lequel nous évoluons.

Les phénomènes d’évolution génétique liés à l’environnement proviennent de l’épigénétique. L’environnement et la nature peuvent en effet modifier la façon dont certaines séquences d’ADN s’expriment. Comme facteurs environnementaux potentiellement responsables de la diminution du QI, nous pouvons citer l’alimentation, les perturbateurs endocriniens (pesticides, retardateur de flammes, polluants organiques) ou la surexposition aux écrans qui ont tous été mis en évidence comme néfastes pour les capacités cognitives.  De plus, ces modifications épigénétiques sont transmises à la descendance de l’individu.

Toutefois, les modifications épigénétiques restent réversibles. Il existe de nombreux exemples au cours de l’évolution : les femmes qui souffrent de malnutrition donnent naissance à des enfants avec de nombreuses carences, qui peuvent entraîner des problèmes de santé tels que l’hypertension ou le diabète, qui sont par la suite transmis aux générations futures. La baisse du QI semble être le résultat de l’adaptation des humains à leur environnement, qui est en constante évolution.

Bien que l’environnement influence l’expression du génome humain, il ne faut pas négliger les possibilités qu’apportent la modification génétique, et les thérapies qui peuvent être mise au point grâce à la méthode CRISPR Cas9.

2.2        Un traitement contre les maladies génétiques

Une détection avancée des dysfonctionnements génétiques

Le diagnostic précoce permet de détecter de plus en plus tôt, sur les embryons en gestation, les problèmes ou dysfonctionnements d’ordres génétiques. Ce type de diagnostic est amené à se développer et à devenir de plus en plus précis. Cela permettra de détecter de plus en plus précisément les maladies génétiques graves pouvant affecter le futur enfant et ainsi les traiter le plus rapidement possible. Le diagnostic préimplantatoire, plus controversé, est actuellement utilisé dans le choix des embryons utilisés pour les PMA. La PMA, bien qu’elle se démocratise, reste tout de même une technique complexe, chère, et qui ne fonctionne pas toujours correctement. Ce type de diagnostic est plus contesté car il peut aisément dévier vers une application à visée eugéniste. La sélection des individus deviendrait alors possible via la sélection en amont des embryons. A la suite d’une fécondation une vitro, l’embryon qui en résulte est analysé pour déterminer s’il présente ou non des anomalies génétiques. Bien que cette méthode soit principalement utilisée pour détecter de potentielles maladies génétiques, il est techniquement possible de sélectionner un embryon en fonction des gènes que l’on souhaite garder. Ainsi, il devient possible de donner vie à un enfant disposant de certaines caractéristiques plutôt que d’autres (couleur des yeux, des cheveux, taille, morphotype, etc…).

Les dysfonctionnements peuvent provenir des différents problèmes notamment liés à la plasticité du génome qui existe chez les êtres vivants. Le génome humain doit s’exprimer correctement, sans mutations ponctuelles, ni remaniements chromosomiques, afin de conserver l’intégrité de l’information génétique au cours de la division cellulaire, qui est indispensable pour la survie des embryons.

Outre le diagnostic précoce et le diagnostic pré-implantatoire, les récents progrès de l’intelligence artificielle associés aux nouvelles découvertes de la recherche génétique, viennent également bouleverser la médecine traditionnelle et notre compréhension de certaines maladies. A l’aide de données génétiques récoltées auprès d’une multitude d’individus, ainsi que d’un algorithme spécifique, plusieurs chercheurs du Canada ont développés de nouveaux tests permettant de déterminer les risques pour une femme de développer un cancer du sein.

Ces tests établissent un risque potentiel sous forme de score que l’on nomme le “score de risque polygénique”. En résumé, cela permet de déterminer les prédispositions génétiques d’un individu à développer une maladie. Il devient dès lors possible de classer les individus selon l’intensité du risque, (allant du risque peu élevé au risque très élevé) et d’adapter ainsi les traitements et les prises en charge.

Ce score est établi en analysant l’ensemble du génome de l’individu. Cela consiste à effectuer plusieurs tests sur un échantillon d’ADN pour déterminer les particularités propres à l’individu qui s’expriment à travers ses différents gènes. Le résultat des tests est ensuite comparé aux différents patrimoines génétiques des personnes atteintes par cette maladie.

Ces tests permettent donc de détecter les variations des gènes (allèles) susceptibles d’exprimer une maladie connue. Principalement utilisé pour dépister les cancers, ce type de scoring a été rendu possible par le big data et la mise en relation de toutes les données génétiques disponibles pour une population ou un groupe de population. Contrairement aux tests génétiques que nous utilisons aujourd’hui, le score de risque polygénique permet de déterminer génétiquement la probabilité de développer une maladie même lorsqu’elle ne s’est jamais ou rarement développée dans la généalogie du patient.

 Il s’agit d’une avancée majeure dans le domaine de la médecine préventive et personnalisée, qui peut ouvrir un débat sur l’utilisation des données personnelles de santé, leurs stockages et leur sécurisation. Une analyse spécifique des caractéristiques génétiques du patient peut ainsi révéler des prédispositions génétiques aux maladies dites connues.

Vers des solutions applicables aux adultes ?

La thérapie génique pourrait donc être l’outil approprié pour traiter certaines maladies orphelines. Les cellules prélevées sont modifiées grâce à la technique du CRISPR Cas9, et réinjectées, par le biais d’un traitement. Cette modification pourra ensuite se diffuser dans l’ensemble de l’organisme grâce au processus de la division cellulaire des cellules souches. Ce procédé permettrait de soigner des organes qui ne fonctionnent pas correctement en les reconstituant à partir de cellules saines. Aujourd’hui, il est possible d’utiliser des “prothèses” de gène, dans le but de remplacer le gène qui fonctionne mal par un gène qui s’exprime correctement.

Les tests de risques polygéniques offrent des perspectives très encourageantes pour le diagnostic des maladies graves. Mais les conséquences potentielles demeurent cependant difficiles à évaluer avec précision. Le risque de développer des maladies telles que la schizophrénie, l’autisme, le diabète, le cancer, les maladies cardio-vasculaire et bien d’autres deviendrait alors probabilisable “simplement” via l’analyse de notre génome. Dans un futur plus ou moins proche il serait également possible d’évaluer les chances d’une personne de développer une addiction à la cigarette, à l’alcool, d’être atteinte d’Alzheimer ou de développer une forme de schizophrénie.

Il s’agit donc d’un nouveau type de données individuelles et personnelles que nous sommes susceptibles d’exploiter. L’exploitation de ces données peut offrir de multiples possibilités. Outre la prise en charge médicale et le traitement des maladies, elles peuvent être utilisées de manière préventive. Par exemple, une personne présentant un risque élevé de maladie cardio-vasculaire pourrait ainsi, adopter un mode de vie plus adapté permettant d’atténuer ces risques comme la pratique sportive ou une alimentation adaptée. Connaître son risque de développer un cancer peut également inciter une personne à moins s’exposer à des agents cancérogènes telles que le tabac, les rayons ultraviolets, les rayons X, etc…

Toutes ces avancées bien que prometteuses soulèvent de nombreuses interrogations et de vifs débats notamment en termes d’éthique et de déontologie. La capacité à décrypter le génome et les spécificités d’un individu peut être utilisée de bien des manières et cela pose naturellement la question de la discrimination génétique. Définir un individu uniquement à travers un ensemble de gènes semble quelque peu réducteur voir dangereux. D’autant plus lorsqu’il s’agit d’un embryon pour lequel les gènes ne se sont pas encore exprimés. Dans le cas où le diagnostic préimplantatoire venait à se démocratiser, il deviendrait donc possible de sélectionner chaque embryon en fonction des caractéristiques génétiques que l’on souhaite ou non conserver. Cette sélection en amont des individus peut rapidement donner lieu à des dérives que nous allons maintenant présenter.

3         Les dérives de la modification génétique

3.1        Sélection des individus

Vers une faiblesse génétique de la société

La sélection des individus peut aboutir à des dérives de la modification génétique. Afin de le démontrer, nous allons expliquer la faiblesse génétique qui pourrait en découler au sein de la société, mais également les conséquences que cela pourrait engendrer.

La modification génétique, et plus particulièrement la sélection génétique, peut apporter rapidement un manque de diversité au sein de l’Humanité, ainsi que dans l’ensemble de la biodiversité. En effet comme nous l’avons vu précédemment, la technique CRISPR-Cas9 permet la modification de n’importe quelle cellule d’êtres vivants, dont les cellules humaines. Or il y a bien un problème d’éthique et de diversité qui se pose ici, principalement avec ce que l’on peut appeler la « sélection génétique » ou encore les « bébés sur mesure ». Ces manipulations que l’on a pu retrouver dans le film « Bienvenue à Gattaca », ne font aujourd’hui plus parties de la science-fiction : si les gouvernements l’autorisent il sera surement possible de choisir les caractéristiques physiques mais aussi intellectuelles de ses enfants.

Pour bien le comprendre il faut faire la distinction entre deux types de cellules : les cellules somatiques qui constituent en grande majorité la constitution d’un être humain, et les cellules germinales qui sont en fait les gamètes, c’est-à-dire les spermatozoïdes pour l’homme et les ovocytes pour la femme. Or la modification des cellules germinales pourrait entraîner de graves conséquences à long terme, et pour cause : les modifications de ces cellules sont héréditaires.

La sélection des caractéristiques des enfants à naître pose donc un grand risque pour le patrimoine génétique de l’humanité. En effet au vu de la standardisation de notre société actuelle, nous pouvons raisonnablement penser que si le choix des caractéristiques de l’enfant appartenait aux parents, nous tendrons alors inévitablement vers un standard, un “enfant-type”, et donc un monde où tout le monde se ressemble.

Des conséquences non maîtrisées et imprévisibles

Il a été démontré que la réécriture du génome entraîne des modifications génétiques non souhaitées et imprévisibles. Les conséquences d’une réécriture du génome sont également susceptibles de s’exprimer autre part que sur la séquence initialement ciblée. Des mutations peuvent alors se développer sur l’ensemble du génome. Il est donc impossible de prévoir et d’anticiper les mutations qui vont avoir lieu à la suite de l’utilisation de cette technique ainsi que leur ampleur. La fonction et l’expression des gènes issus du processus d’évolution, sont alors modifiées et les conséquences à long-terme ne sont pas mesurables.

Par exemple, le récepteur CCR5 connu pour permettre au virus du SIDA (VIH) de s’implanter et de se développer, semble également avoir une autre utilité puisqu’il a été conservé au fil du temps par le processus d’évolution, sinon il aurait disparu.

En se projetant à moyen et long-terme il est encore impossible à l’heure actuelle de savoir si la technique CRISPR Cas9 peut réellement permettre (dans le cas où elle serait suffisamment maîtrisée) de créer uniquement les modifications souhaitées sur le génome humain. C’est pourquoi de nombreux généticiens mettent en garde la communauté scientifique contre les dérives et les dangers potentiels liés à l’utilisation de cette technique

3.2  Des objectifs en dehors de la réalité

Une recherche de la toute puissance

Certains scientifiques se fixent des objectifs qui ne sont pas réalisable en poursuivant cette quête de la toute-puissance induite notamment par les transhumanistes. L’importance des nouvelles connaissances aboutit à l’émergence de données inexploitables.

Les incitations sont nombreuses dans le domaine de la génétique, et le phénomène de compétition entre les chercheurs pousse ces derniers à expérimenter de nouvelles techniques pour se distinguer, quitte à utiliser des méthodes contestables ou pas encore suffisamment maîtrisées. Nous allons présenter deux exemples en annexe qui illustrent les dérives de la modification du génome humain. Cette partie s’articulera donc plus spécifiquement autour de la recherche de l’immortalité désirée par les transhumanistes pour déterminer en quoi ce défi relève encore de l’utopie ou de la science-fiction.

L’homme qui vivra 1000 ans est déjà né”, à l’origine de ces paroles on retrouve Aubrey de Grey, gérontologue étudiant depuis de nombreuses années le phénomène du vieillissement des cellules. En effet, ces idées toujours perçues comme des idées issues de romans fantaisistes, sont actuellement prisent au sérieux par un certain nombre d’entreprises internationales, financiers et autres milliardaires. A ce titre on peut notamment citer plusieurs entités telles que la fondation SENS (Strategies for Engineered Negligible Senescence) ou Google qui a créé California Life Company en 2013. Il y a également Peter Thiel, fondateur de Paypal qui contribue à cette filiale de Google à auteur de plusieurs centaines de milliers d’euros par an.

Si cette idée de l’immortalité ou d’un prolongement réellement significatif de l’espérance de vie humaine est reprise, c’est parce qu’il y a eu certaines découvertes majeures depuis quelques années. A ce titre on peut notamment citer la découverte étonnante du généticien franco-croate Miroslav Radman : en étudiant une bactérie spécifique il a découvert que celle-ci pouvait constamment “s’auto-ressusciter” grâce à sa capacité à produire ce qu’il appelle une “pile biologique rechargeable et universelle”.

Mais même si les progrès scientifiques font d’étonnants bonds en avant, la quête de l’immortalité reste actuellement dans le domaine du fantastique. En effet avec les recherches actuelles on estime pouvoir améliorer la longévité humaine de seulement quelques années. L’hypothèse de l’homme au 1000 ans reste donc encore peu probable, a moins d’une découverte révolutionnaire en matière de génétique ou d’assemblage moléculaire.

Incapacité relative à exploiter les nouvelles connaissances

La technique CRISPR Cas9 est pleine de promesses pour l’avenir. Facile à mettre en place et peu coûteuse, elle reste cependant utilisée principalement dans la recherche mais très peu pour le soin et le traitement des malades. La raison est simple, aujourd’hui nous ne sommes pas en mesure de l’exploiter sans dangers au vu de nos connaissances. A l’aide de cette technique il est possible de découper une partie de la séquence ADN d’un individu pour la retirer puis la remplacer par une autre comprenant les modifications que l’on souhaite apporter. Néanmoins, CRISPR Cas9 n’est pas utilisé sur l’être humain car nous ne sommes pas en mesure d’anticiper les conséquences d’une telle intervention.

L’ADN est unique et propre à chacun, permettant d’identifier une personne par rapport à une autre. Des interactions se produisent entre les différentes séquences d’ADN ainsi qu’entre les différents gènes associés que nous sommes actuellement incapables de comprendre ou de percevoir. Une édition du génome via CRISPR Cas9 pourrait donc produire des changements et des modifications autre que celles initialement souhaitées. Ces modifications impacteraient alors ce qui exprime et ce qui définit à la fois l’individualité et la singularité d’une personne.

C’est le cas des jumelles chinoises surnommées Lulu et Nana. La vague de contestation qui a suivi l’annonce du scientifique chinois provient du fait que les paramètres et les conséquences de l’intervention n’ont absolument pas été maîtrisés.

La thérapie génique, expérimentée pour la première fois en 1999 démontre aussi ses limites. Le scandale Jesse Gelsinger, prouve qu’une erreur de diagnostic et de prise en charge est très vite arrivé. Cet américain de 19 ans a fait partie des premiers patients traités par thérapie génique. Malheureusement pour lui, son corps n’était pas apte à recevoir un tel traitement, notamment en raison de son foie fragile. Plusieurs défaillances imputables aux professionnels de santé responsables de son traitement ont été identifiées et notamment le diagnostic préalable.  Le décès de ce jeune homme nous rappelle que ce type d’intervention n’est pas anodin et doit s’effectuer avec beaucoup de précaution.

Nous n’avons encore que peu de recul concernant la thérapie génique et les conséquences à long termes. Bien qu’il s’agisse d’une avancée spectaculaire, elle demeure encore aujourd’hui peu exploitable. Le coût d’une telle prise en charge, évalué entre 1 et 5 millions d’euros, est bien trop élevé pour être utilisé massivement. Mais ce n’est pas qu’une question de moyens. Dans ce type de thérapie, l’organisme du patient peut produire une réponse immunitaire qui est un mécanisme de défense de l’organisme, et qui va alors rejeter le traitement. Il devient parfois impossible de réinjecter le traitement ce qui oblige les médecins à se tourner vers d’autres solutions.

Conclusion

Le courant transhumaniste est fortement influencé par les récentes découvertes en génétique. Ce sont ces découvertes qui portent le mouvement transhumaniste et lui donnent le crédit dont il bénéficie aujourd’hui.  Mais bien que ces innovations soient cruciales pour l’avenir de l’Homme, elles n’en demeurent pas moins une source d’inquiétudes et de controverses.

Les nouvelles avancées telles que CRISPR Cas9, le diagnostic pré-implantatoire ou le score de risque polygénique sont des innovations pleines de promesses et porteuses d’espoir pour un grand nombre de personnes atteintes de maladies graves ou présentant des risques élevés de développer de telles maladies. Néanmoins, il est encore trop tôt pour les considérer comme des solutions à part entière. La compréhension de la génétique n’en est encore qu’à ses prémices et la complexité des informations que renferme le patrimoine génétique rend la démarche très délicate. La découverte de la technique CRISPR Cas9 est une révolution dans le domaine de la génétique car elle rend possible les modifications du patrimoine génétique d’une personne ainsi que la transmission de ce patrimoine via les cellules germinales. La sélection génétique devient dès lors possible, ainsi que toutes les dérives qu’elle peut supposer.

Ces innovations majeures nourrissent l’idéologie et les fantasmes des transhumanistes qui considèrent que l’Homme est imparfait et doit être amélioré pour ainsi repousser ses limites biologiques. Les transhumanistes, convaincus que l’avenir de l’Homme passe par la modification génétique sont très enthousiastes quant aux avancées de la médecine et de la génétique, n’hésitant pas à déclarer que bientôt nous serons en mesure de stopper le vieillissement. En éludant la question du souhait de voir un tel futur se dessiner, la “vie éternelle” promise par les transhumanistes est pour l’instant bien loin de devenir une réalité comme le confirme le discours des généticiens.

Plus que le transhumanisme, ce sont les visions eugénistes de la société qui retrouvent un nouvel élan au travers de ces innovations. La possibilité de pouvoir choisir les caractéristiques de son futur enfant à l’aide de manipulations et de sélections génétiques est d’autant plus préoccupante que la législation en la matière varie fortement d’un pays à un autre. Les règles d’éthique de la Chine, des Etats-Unis ou de la France ne sont absolument pas les mêmes et rendent difficile, voire impossible, une harmonisation au niveau mondial. Aucune législation internationale n’encadre aujourd’hui la recherche et les expériences génétiques et chaque pays agit comme il le souhaite en fonction de sa légalité. La sélection génétique est d’autant plus dangereuse qu’elle peut rapidement conduire à la discrimination génétique et donc à l’eugénisme. Les “bébés sur mesure” et la standardisation des individus sont des exemples de ce à quoi l’avenir pourrait ressembler si l’utilisation de ces nouvelles techniques vient à se démocratiser et à se banaliser.

Mais bien qu’elles soient prometteuses, ces recherches nécessitent des financements et des investissements colossaux pour des résultat plutôt incertains. Ce climat de course à l’innovation et donc aux financements, crée un phénomène de concurrence entre les pays qui souhaitent devenir leaders dans ce domaine et ne surtout pas se faire distancer par les autres. Cela provoque également une forme de compétition entre les différents chercheurs qui ont tous pour ambition de découvrir la dernière innovation majeure. Cette concurrence peut alors inciter les chercheurs à expérimenter des nouvelles techniques sans pour autant maîtriser l’ensemble des paramètres et des conséquences que les modifications génétiques peuvent engendrer. Les exemples des jumelles chinoises et de Jesse Gelsinger prouvent qu’il faut redoubler de prudence avant d’entreprendre des traitements expérimentaux ou d’utiliser de nouvelles techniques. Il y a toujours des risques car chaque patrimoine génétique est unique et chaque gène peut s’exprimer de différentes manières provoquant des conséquences imprévisibles.

Comme nous l’avons expliqué, la thérapie génique, les diagnostics préimplantatoires et le score de risque polygénique sont susceptibles de traiter ou de prévenir de nombreux dysfonctionnements physiologiques ainsi que de nombreuses pathologies. Mais le coût que représente ce type de thérapie ou de diagnostic est encore trop élevé pour être utilisée à grande échelle, même au sein des pays développés dotés d’un système de santé performant. Si l’utilisation de tels traitements pourraient être possible à moyen ou long terme dans ces pays, il est évident que les pays en développement sont très loin de pouvoir bénéficier de ces innovations. Par ailleurs, la thérapie génique ne peut aujourd’hui être réellement envisagé que pour un certain type de patients, concernés par des maladies liées à certains gènes bien connus et identifiés. Avant d’envisager l’utilisation des modifications du génome comme thérapie, il reste encore beaucoup de chemin à parcourir et de nombreuses connaissances à développer. Il reste également de nombreuses questions à éclaircir, tant au niveau de la bioéthique et de l’encadrement de l’utilisation de ces nouvelles découvertes, que de leur réels impacts et conséquences sur le vivant.

Par Paul Bruneau et Victor Munter, promotion 2019-2020 du M2 IESCI

Bibliographie

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Boutin, Bedel, Cullot et Moreau-Gaudry « CRISPR Cas9 : Vers un outil plus sûr pour éditer les génomes » URL : https://www.inserm.fr/actualites-et-evenements/actualites/crispr-cas9-vers-outil-plus-sur-pour-editer-genomes

Combis, « Comment fonctionnent les ciseaux CRISPR-Cas9, capables de couper l’ADN à volonté, France Culture, 3 août 2017, URL : https://www.franceculture.fr/sciences/comment-fonctionnent-les-ciseaux-crispr-cas9-capables-de-couper-ladn-volonte

Cyranoski et Ledford, « Des bébés CRISPR chinois ? », Pour la science, 29 novembre 2018, URL :  https://www.pourlascience.fr/sd/genetique/des-bebes-crispr-chinois-15344.php

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Futura avec l’AFP-Relaxnews « Bébés chinois OGM : des modifications imprévues sont apparues dans leur génome » URL : https://www.futura-sciences.com/sante/actualites/crispr-cas9-bebes-chinois-ogm-mutations-imprevues-sont-apparues-leur-genome-73919/

Galanopoulo, « CRISPR-Cas9 : des ciseaux génétiques pour le cerveau », CNRS Le journal, 3 mai 2016, URL : https://lejournal.cnrs.fr/articles/crispr-cas9-des-ciseaux-genetiques-pour-le-cerveau

Gaubert, « Le QI de la population baisse-t-il depuis les années 70 ? », Sciences et Avenir, 13 juin 2018, URL :  https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2015/07/medsci2015316-7p691/medsci2015316-7p691.html

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Houdebine, « Les différentes techniques de sélection génétique », Afis science, 3 décembre 2017, URL : https://www.pseudo-sciences.org/Les-differentes-techniques-de-selection-genetique

Jalinière, « Première Mondiale. Des chinois modifient le génome d’embryons humains », Sciences et Avenir, 23 avril 2015, URL : https://www.sciencesetavenir.fr/sante/premiere-mondiale-des-chinois-modifient-le-genome-d-embryons-humains_28900

Mandel, « Améliorer l’homme par la génétique ? », Revue d’éthique et de théologie morale, 2015, n°286, p.25-34, URL :  https://www.cairn.info/revue-d-ethique-et-de-theologie-morale-2015-4-page-25.htm:

Scotto, “Transhumanisme : A quoi ressemblera l’homme ‘’augmenté’’ de 2050 ? », 20 minutes, 3 juin 2016, URL : https://www.20minutes.fr/sante/1831643-20160603-transhumanisme-quoi-ressemblera-homme-augmente-2050

Sender, « Emmanuelle Charpentier : ‘’Il y a toujours un risque que CRISPR-Cas9 soit mal utilisé’’ », Sciences et avenir, 5 octobre 2016, URL : https://www.sciencesetavenir.fr/sante/emmanuelle-charpentier-il-y-a-toujours-un-risque-que-crispr-cas9-soit-mal-utilise_105292

Speranta Dumitru, « Liberté de procréation et manipulation génétique, pour une critique d’Habermas », Presses de Sciences Po, 2003, n°12 – p. 31 à 54

Vos, « La mort d’un patient aux Etats-Unis freine l’essor des thérapies géniques », Le temps, 13 décembre 2019, URL : https://www.letemps.ch/societe/mort-dun-patient-aux-etatsunis-freine-lessor-therapies-geniques

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De nos jours, la manière de se déplacer et de voyager a complètement changé. Entre covoiturage, transport urbain et autocar, le secteur du transport des individus a connu une réelle évolution. En France, ces trois types de transport ont totalement modifié la vision du consommateur et son mode de consommation et ont bouleversé le secteur. En effet, transporter de la marchandise, des biens ou des personnes a toujours été considéré comme une obligation primordiale, et ce de plus en plus avec l’évolution de la digitalisation et le développement du E-commerce. L’industrie du transport est totalement perturbée à cause des transformations et des innovations assez importantes. Les NTIC ont totalement chamboulé les modèles traditionnels des entreprises de transport et les ont poussées à migrer vers de nouveaux modèles économiques afin de poursuivre leurs activités. Le transport de personnes a été totalement révolutionné et a connu un séisme avec l’apparition de plusieurs applications qui ont concurrencé le monde du transport traditionnel.

Covoiturage : Blablacar, leader français du covoiturage a connu une évolution à part entière et compte à ce jour plus de 87 millions d’utilisateurs dans le monde (France, Espagne, Royaume-Uni, Italie, Pologne, Allemagne, Portugal, Belgique, Pays-Bas, Luxembourg, Russie, Ukraine, Turquie, Inde, Mexique, Serbie, Roumanie, Croatie, Hongrie, Brésil, Slovaquie, République Tchèque) et offre aux clients une nouvelle manière de voyager. L’application met en relation les conducteurs et les passagers, les premiers postent leurs trajets prévus et les deuxièmes sont à la recherche de trajet, et achètent la place en ligne à un prix raisonnable, récemment la SNCF a estimé une baisse de trafic de 5% à 10% sur quelques lignes et cela est dû principalement à l’ampleur du covoiturage. Après avoir instauré le concept du covoiturage longue distance, Blablacar a créé une application de covoiturage consacrée aux trajets quotidiens, BlablaLines, le concept consiste à mettre en relation les particuliers afin de partager leur trajet commun. Pour toute demande, la plate-forme attribue au passager une ligne (un trajet du point de départ au point d’arrivée), dès qu’un conducteur effectue le même trajet, ce dernier est proposé et activée par l’application. Avec cette dernière la mise en relation est automatique, le passager propose son trajet sur la plateforme qui trouve un conducteur qui effectue le même trajet au moment demandé et qui a accepté la réservation.

Transport urbain : Uber, la firme américaine est le symbole de la révolution du secteur du transport leader du VTC (voiture de transport avec chauffeur) , l’entreprise a transformé le lever de la main pour appeler un taxi par un bouton sur un smartphone, l’application permet au chauffeur et au client  de se géolocaliser mutuellement et de transporter le client le plus proche d’un point à un autre. Elle facilite le transport en permettant à toute personne de partir là où elle veut tout en lui proposant un paiement en ligne simplifié. L’application offre aux utilisateurs un service fiable, à n’importe quel moment, et avec un prix plus ou moins économique. La multinationale a également lancé dernièrement des vélos et trottinettes électriques à Paris avec sa filiale Jump, qui peuvent être commandés au sein de l’appli Uber, à côté des commandes de VTC, Uber est devenu la révolution du transport des individus. L’application s’améliore en permanence et prépare le lancement d’une application de transport aérien partagé prévu pour 2023.

Transport en autocar : depuis août 2015, et suite à la loi du président Macron de nouvelles lignes de bus peuvent désormais être lancées à toute distance supérieure à 100 kilomètres. La concurrence entre les sociétés d’autocar est rude, la société allemande Flixbus a imposé dès sa création en 2013 des nouveautés dans les autocars longue distance tel que : la wi-fi et la prise électrique pour tous les passagers à bord , la société des autocars verts encourage la vente des ticket en ligne, et propose plusieurs nouveautés comme le choix du meilleur siège, mais aussi deux autres services innovants , le premier est la géolocalisation en temps réelle comme les VTC, le deuxième consiste à ce que Flixbus qui est en collaboration avec la société suédoise Icomera offre à ses passagers une sélection de films, de musiques et de livres durant tout le trajet sur leur smartphone.

Transport en micro-mobilité : Un nouveau moyen de transport est apparu dernièrement et il s’agit des vélos et trottinettes en libre-service, pour les utiliser tout se fait grâce à l’application dédiée au service, la plateforme nous présente leur localisation et nous permet de les réserver à l’avance. La carte sur l’application nous indique le plus court trajet à prendre et le temps de marche estimé pour récupérer l’engin.

Enjeux pour les villes et les territoires

Dans la ville moderne et en extension continue, les habitants sont amenés à se déplacer entre des larges zones des villes et à emprunter plusieurs modes de transport. Ainsi, face aux nouveaux besoins des citoyens, et afin de les inciter à se diriger vers les transports en commun, dans une optique écologique, il est devenu important de faciliter les déplacements et d’accompagner les utilisateurs en temps réel. Pour ce faire, des solutions sont aujourd’hui proposées et accompagnent les citoyens dans leur quotidien, à travers le calcul de l’itinéraire, les alertes personnalisées, les horaires des transports et leurs modifications en temps réel, l’achat des titres de transport… etc. Dès lors, l’enjeu principal de la mobilité connectée est d’assurer un trajet fluide et simplifié, en accompagnant les usagers avant, pendant et après le trajet, à travers des applications mobiles, pensées initialement par le groupe Keolis, opérateur de transport public franco-québécois du secteur des transports de voyageurs, détenu majoritairement par la SNCF, et par la suite, par des partenariats avec des startups françaises.

Une expérience voyageur repensée

Comme l’a indiqué Elisabeth Borne, PDG du groupe RATP, il est aujourd’hui important de mettre le digital au service de l’amélioration de l’expérience client. Pour ce faire, la RATP compte sur son application de recherche d’itinéraires qui permet d’informer en temps réel les usagers. L’objectif est de mettre à la disposition des utilisateurs un outil de valeur, avec un accès au réseau Internet et une mobilité sans contact, afin d’assurer une expérience de voyage optimale. Ainsi, afin d’améliorer l’expérience voyageur, il est nécessaire de se focaliser sur la qualité des parcours pour inciter les voyageurs à refaire l’expérience, d’assurer la fluidité de la communication avec le Customer Time Manager, de socialiser les parcours pour convertir les utilisateurs en créateurs de valeur, et de les faire participer pour plus de valorisation client.

Ainsi dans le cadre de l’évolution de la relation client, les transporteurs ne se limitent plus dans leur mission principale, qui est de déplacer des personnes d’un point de départ à un point d’arrivée, mais visent la mise en place de stratégies d’expérience du voyage, qui dépasse un simple trajet, pour faire des transports publics une véritable solution de mobilité connectée au quotidien, séduisante et captivante. Ce nouveau mode de transport est caractérisé aussi par le modèle économique “Pay as you go”, qui signifie “paiement à l’usage”, un concept qui permet au client de payer uniquement ce qu’il a consommé. Ainsi, contrairement aux abonnements, le consommateur a l’impression d’avoir plus de liberté.

Le principe de « Mobility as a service »

Né du modèle économique “ Pay as you go”, le principe “ Mobility as a service”(MaaS) a été lancé en 2014 par une start-up finlandaise, nommée Whim. Ce principe consiste à avoir accès à un service intermodal, bien adapté aux besoins de mobilité des voyageurs, et leur permettant de passer à côté des moyens de transport individuels, en utilisant des interfaces Web facilitées. En effet, comme les utilisateurs des moyens de transport sont amenés aujourd’hui à utiliser plusieurs applications, entre recherche d’information, paiement et comparaison, ils sont obligés de jongler entre elles, car même celles qui offrent la possibilité de comparer les chemins, comme Google Maps, ne permettent pas le paiement. Ainsi, grâce au principe “Mobility as a service”, une seule application permet de tracer un trajet et de le payer, soit par trajet ou sur forfait. Le MaaS s’impose ainsi aujourd’hui avec des mécanismes adhoc, bien adaptés aux besoins des utilisateurs. L’enjeu pour les entreprises de transport est de partager leurs données afin d’avoir plus de transparence en matière des modes de transport disponibles en temps réel. Toutefois, il est aussi important pour la MaaS de s’approprier un modèle économique viable, et d’avoir un bénéfice significatif.

Engagement vers des systèmes de Transports intelligents

La mobilité du futur repose aujourd’hui sur l’anticipation des problématiques liées au développement des systèmes de transports intelligents (STI), comme les véhicules autonomes et la mobilité numérique. Elle concerne aussi tout projet d’innovation et la participation à la réalisation des projets d’intelligence artificielle en relation avec la prédiction des accidents et des embouteillages à l’aide du Big Data.

Cependant, le développement de ce nouveau système ne se fera pas sans la contribution de tous les acteurs concernés. Il s’agit de favoriser l’échange d’informations, d’orienter la politique technique et de préparer le plan national STI. Une étude s’avère aussi importante afin de recueillir les besoins des départements en matière des STI et de réussir à établir un rapport de mobilité intelligente. Ainsi sont réunis les gestionnaires du réseau routier national et le RST dans un groupe nommé EasyWay pour le déploiement des STI. A ces structures s’ajoutent les structures de la recherche­ développement en France.

En guise de conclusion, le secteur des transports enregistre une modification fondamentale et une révolution au niveau technologique, en matière de digitalisation, et d’usage, à travers les nouvelles formes de mobilité. Ces changements impactent le modèle économique des acteurs comme les constructeurs automobiles et les organismes de transport. Ainsi, la relation entre homme, automobile et environnement est réinventée et se lie aujourd’hui au système de transport intelligent TSI.

Par Ghita MARRAKCHI et Hajar NAQACHI, promotion 2019-2020 du M2 IESCI

Sources

https://www.socialy.fr/blog/mobilite-uberisation-digital/

https://www.dejamobile.fr/usages/transport/

https://mbamci.com/transports-et-numerique/

https://www.linkedin.com/pulse/digitalisation-des-transports-publics-quels-enjeux-ludovic-ronchaud/

https://business.lesechos.fr/directions-numeriques/partenaire/partenaire-813-le-numerique-revolutionne-les-usages-dans-les-transports-302730.php

https://mbamci.com/transports-et-numerique/

https://www.voxlog.fr/dossier/68_1/le-transport-a-lere-de-la-digitalisation

https://www.crealise.io/comment-le-digital-a-t-il-impacte-le-secteur-du-transport-et-de-lautomobile-2/

https://blog.blablacar.fr/blablalife/nouveautes/blablacar-dans-le-monde/10-millions-membres-blablacar

https://books.google.fr/books?id=kUBsDwAAQBAJ&pg=PT131&lpg=PT131&dq=uber+le+symbole+de+la+digitalisation+du+transport&source=bl&ots=wjfYqOSEiq&sig=ACfU3U0N0lCVHYcJIOF5X2R3-gCMlwBpRA&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwjx68C11vLnAhVSOBoKHTyBCqcQ6AEwEXoECAoQAQ#v=onepage&q=uber%20le%20symbole%20de%20la%20digitalisation%20du%20transport&f=false

https://www.usine-digitale.fr/article/pour-ses-cinq-ans-flixbus-mise-sur-les-innovations-numeriques.N652874

https://blog.blablacar.fr/newsroom/news/blablalines

https://www.lesechos.fr/idees-debats/sciences-prospective/les-espoirs-et-les-defis-du-mobility-as-a-service-1009710

https://www.mobilite-intelligente.com/sites/mobilite/files/fichiers/2018/10/Rapport_STI_art_17-1_final-2-2.pdf

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