Les conditions de travail en France

Depuis quelques années, nous pouvons entendre par de nombreuses personnes, que ce soit des citoyens français ou des experts, que les conditions de travail en France se détériorent. Le thème des conditions de travail est au cœur du débat public de chaque pays développé. Il devient même une préoccupation pour certains hommes politiques ou certains syndicats étant donné que le travail est en perpétuelle évolution.

Cependant, malgré des mesures prisent par les différents gouvernements, le ressenti des individus français peinent à s’améliorer.  Pour illustrer nos propos, prenons la vente d’antidépresseurs qui ne cesse d’augmenter au fur-et-à-mesure des années dans notre pays et parallèlement dans beaucoup d’autres pays d’Europe et du monde.

Comment ont évolué les conditions de travail en France depuis 1950 ? Les conditions de travail sont-elles les mêmes pour chaque individu ? Les lois relatives aux conditions de travail ont-elles véritablement changé et amélioré la situation dans laquelle sont les salariés français ?

Nous nous efforcerons donc dans cet article de traiter et d’analyser 4 principales composantes des conditions de travail que sont : la durée du travail, le développement des horaires de travail atypiques, la pénibilité au travail ainsi que les maladies et accidents de travail. Pour terminer nous traiterons d’un cas d’actualité traitant de ces facteurs : le cas de l’entreprise SMART.

En 2012, les salariés français travaillaient 1400 heures par an en moyen

Depuis 1950, la durée du travail n’a cessé de chuter. A cette époque, l’ensemble des salariés travaillait en moyenne 1900 les salariés ne travaillent plus que 1400 heures par an. La durée annuelle du travail de l’ensemble des salariés a donc baissé en France de 25 %.

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C’est à partir des années 1965 et jusqu’en 1982 qu’une forte chute du temps de travail va s’effectuer en France. Cela s’explique par les réductions collectives avec la 4ème semaine de congés payés en 1969. En 1981 seront mis en place, sous Mitterrand, la 5ème semaine de congés payés ainsi que les 39h  alors qu’auparavant les salariés français travaillaient 40 heures par semaine.

1998 est une année charnière pour la France au niveau de la durée du temps de travail car c’est à ce moment la que seront votées par les socialistes les 35h par semaine pour les salariés français. Durant ses années 90, en parallèle, nous verrons une augmentation du temps partiel qui fera chuter la moyenne des heures de travail effectuées par les salariés français jusqu’en 2002 où il commencera à se stabiliser.

Depuis 1998, aucun texte n’a abrogé la loi sur les 35h. Cela explique pourquoi depuis cette date le nombre d’heures travaillé par les salariés français stagne autour des 1400 heures par an. Sous son quinquennat, Nicolas Sarkozy avait défiscalisé les heures supplémentaires afin de contourner cette loi et ainsi promouvoir sa promesse électorale : « Travailler plus pour gagner plus ».

Il est souvent question de cette loi dans le débat politique. A droite de l’échiquier, les politiciens sont en général pour une suppression de cette loi et une augmentation du nombre d’heures de travail des salariés ; puis à gauche, ils sont totalement favorable à cette loi et veulent partager le travail comme ils s’en sont défendus lors de sa promulgation.

La durée annuelle du travail des salariés a baissé de 25 % entre 1950 et 2012

Une des composantes des conditions de travail, le développement des horaires atypiques, est en perpétuelle évolution. Notre tableau 2 le montre très précisément car nous pouvons noter que les salariés français, au fil du temps, travaillent de plus en plus le dimanche par exemple. Ils sont près de 12% à travailler le dimanche de manière habituelle en 2005 alors qu’en 1998 ils n’étaient que 6% environ. Le chiffre a donc doublé en 7 ans.

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En 2012, ils sont 26% de salariés à travailler le dimanche. C’est-à-dire qu’environ 1 salarié sur 4 travaille le dimanche de façon habituelle ou occasionnelle.

Le travail de nuit est également une forme d’horaire de travail atypique. Il se pratique beaucoup moins que le travail le dimanche ou le samedi mais concernait malgré tout 15% des salariés en 2005. En 1998 il concernait quasiment le même pourcentage de salariés mais était beaucoup plus occasionnel qu’en 2005. Car en 2005, 6,5% des salariés travaillaient habituellement la nuit contre 4% en 1998. En 2012, 7,4% des salariés travaillent de façon habituelle la nuit et 8% de façon occasionnelle. La part des femmes travaillant la nuit a également fortement augmenté. La cause étant qu’en 2001, il y a eu une évolution de la réglementation autorisant le travail des femmes la nuit dans l’industrie. Toutefois, le développement du travail de nuit des femmes dans l’industrie a été continue depuis une quinzaine d’années : 1,4 % en 1991 et 7,9 % en 2012.

Pour conclure, les conducteurs de véhicules, policiers et militaires, infirmières, aides-soignantes et ouvriers qualifiés des industries sont les cinq types de familles professionnelles les plus représentatives du travail de nuit.

1 salarié sur 4 en France travaille le dimanche

Impossible de parler de conditions de travail sans parler de pénibilité. Les différents discours des politiques peuvent illustrer nos propos. Par exemple lors de la remise de la retraite à 60 ans de François Hollande, où suivant le métier, les pénibilités de celui-ci et l’âge que l’on avait, nous pouvions accéder à la retraite à taux plein.

Notons que 3 des 6 grandes pénibilités recensées par DARES, se stabilisent et 3 autres ne cessent de se développer. Celles qui se stabilisent sont : la posture pénible, le bruit au travail et le fait de rester longtemps debout. Pour cette dernière, en 2005, environ 51% des salariés disaient devoir rester longtemps debout lorsqu’ils travaillent contre 50% en 1984.

En ce qui concerne les pénibilités qui se développent nous pouvons citer les charges lourdes, les vibrations et les mouvements douloureux.

Pour illustrer nous pouvons dire qu’en 2005, 39% des salariés disaient devoir porter des charges lourdes alors qu’ils n’étaient que 22% en 1984. 35% également des salariés se plaignent de faire des mouvements douloureux au travail.

Cette pénibilité qu’est le fait de faire des mouvements douloureux n’a été prise en compte qu’à partir de 1998, ce qui est récent et qui montre que les tâches au travail évoluent avec le temps et les métiers.

Les pénibilités au travail nous amènent forcément à parler des maladies ou accidents de travail avec arrêt car c’est ce qu’elles peuvent provoquer in fine (Voir tableau 3).

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11 000 à 23 000 cas de nouveaux cancers seraient attribuables aux expositions professionnelles, alors que 2000 seulement sont reconnus par l’INVS

Malgré une baisse de la fréquence des AT, le nombre de maladies professionnelles explose depuis une quinzaine d’années. Les avancées scientifiques et pathologiques ont aidé à la reconnaissance de ces maladies. Selon les médecins, l’intensification du travail corrélé aux troubles musculo-squelettiques ainsi que des affectations pulmonaires liés à l’amiante, représenteraient la grande majorité des maladies professionnelles.

De plus, il est important de souligner que d’après l’Institut national de veille sanitaire (INVS), entre 4 et 8% de nouveaux cancers proviendraient d’expositions professionnelles.

Analyse de l’actualité

Début septembre 2015 le premier ministre français actuel, Manuel Valls, a reçu le fameux rapport sur l’assouplissement des règles du code du travail. François Hollande aimerait s’atteler à cet épineux sujet avant la fin de son mandat afin de « débloquer l’économie française. »

Nous avons vu auparavant dans l’article que les conditions de travail ont drastiquement changé depuis 1950 étant donné que les besoins des entreprises ont eux aussi évolués.

Un débat s’est instauré dans la classe politique ainsi que dans de nombreuses entreprises sur certains sujets comme celui des 35h, mais également sur le facteur pénibilité etc. L’entreprise SMART a d’ailleurs surfé sur cette actualité et sur sa bonne période économique pour essayer d’améliorer la compétitivité de son site en Alsace. La direction a proposé aux salariés de passer à 39h payées 37 et de réduire la durée des RTT pour les cadres. En contrepartie, l’entreprise assure garder tout l’effectif actuel du site SMART en Alsace jusqu’en 2020.

Certains diront qu’il n’est pas possible de passer de 35 à 39h mais cela est bien possible grâce à un accord d’entreprise. Si une majorité de salariés acceptent cette proposition de la direction alors elle pourra la faire appliquer et ainsi augmenter sensiblement la compétitivité du site. Ce qui est plus difficile c’est de rassembler une majorité de salariés, car d’un côté les cadres syndiqués sont plutôt favorables alors que les syndiqués ouvriers ne le sont pas à 80%. L’explication est simple, la perte de salaire de l’ordre de 6% est bien trop élevée.

Malgré le fait que le gouvernement cherche à assouplir le code du travail afin d’encourager les entreprises à embaucher, François Hollande a réagi sur l’affaire SMART en soulignant que la durée légale de travail ne changerait pas.

Nous voyons bien qu’une majorité d’entreprises connaît une distorsion au sein de leur effectif entre les cadres d’un côté et les ouvriers de l’autre. Les raisons de cette distorsion sont la différence très claire de salaire ainsi que la motivation du travail effectué. Un ouvrier travaillant à la chaine avec des tâches répétitives avec un salaire proche du SMIC n’aura pas la même motivation qu’un cadre ayant un salaire bien plus conséquent avec des tâches de travail lourdes mais diverses. Ensuite un ouvrier n’a peut-être pas forcément intérêt à accepter de travailler plus, au niveau individuel, pour gagner moins au final car son salaire n’est pas aussi conséquent que celui du cadre. Tandis qu’un cadre, comme chez SMART, lui, pensera plus collectif car son salaire déjà conséquent ne sera pas forcément trop amputé comparé à celui de l’ouvrier. Après la question qui se trame derrière tout cela est qu’elle est la bonne solution pour l’avenir du site en Alsace et du groupe SMART. Faut-il prendre le risque de perdre un grand nombre de salariés si un accord n’est pas trouvé entre les différents partis ?

Pour conclure il serait intéressant d’ouvrir le débat dans notre pays sur ces questions de baisse ou d’augmentation du temps de travail tout en prenant en compte l’aspect pénibilité de chaque branche de métier. La question étant : Comment vivre mieux et plus longtemps, tout en restant productif dans son travail et accroitre les richesses de notre pays ? Car notre monde connaît un bouleversement total de son mode de fonctionnement, une guerre économique a été lancée au sein des pays du monde entier. Le cas de SMART, entreprise automobile allemande, montre bien la frilosité qu’ont les politiciens français au changement et à la réforme. Un fossé se creuse dans le temps entre les cadres et les non-cadres (employés-ouvriers etc). Chaque salarié a des intérêts divers et il est difficile de trouver un consensus afin que tout le monde y gagne. Plus le temps passe plus les efforts demandés aux salariés seront lourds, il est donc nécessaire de trouver une réponse à la question du travail en général et de sa pénibilité suivant les postes et les statuts

Par Alexandre Lucas, étudiant promotion 2015-2016 du M2 IESC

Bibliographie :

http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/ref/EMPLOIR08g.PDF

http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?ref_id=T14F044

http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/2014-062.pdf

http://www.vie-publique.fr/politiques-publiques/regulation-relations-travail/chronologie/

http://www.huffingtonpost.fr/2015/09/11/smart-france-39-heures-vote-temps-de-travail_n_8120692.html

http://www.huffingtonpost.fr/2015/09/09/code-du-travail-rapport-explosif-petard-mouille_n_8108566.html

http://www.fonction-publique.gouv.fr/files/files/statistiques/Hors_collection/dares-2014-095-exposition-penibilite.pdf

Admin M2 IESC