L’entrepreneuriat en France : véritable remède à la crise ?

La France va mal ! Elle a du mal, actuellement, à retrouver la confiance, comme en attestent différents sondages et certains chiffres clefs. En effet, le nombre de créations d’entreprises en est un bon exemple. Celui-ci a baissé de 5 % entre 2014 et 2015. 2014 était une très bonne année en termes de créations d’entreprises avec un chiffre de 550 700. C’est 25 000 de plus que l’année suivante, en 2015 (525 100). Malgré cette forte chute en 2015, les derniers sondages montrent que les Français n’ont jamais eu autant envie d’entreprendre. Plus précisément, 37% des Français envisagent, un jour, de créer ou reprendre une entreprise. Une envie d’entreprendre qui est au plus haut depuis 15 ans, cela représente un vivier de 19 millions d’entrepreneurs. Ces données proviennent de la dernière enquête faite par l’Union des Auto Entrepreneurs (UAE). Pour aller plus loin avec cette enquête, 3 millions d’entre eux envisageraient de mettre leur projet à exécution dans les 2 ans qui suivent.

Le CES de Las Vegas a montré au monde entier la puissance des start-ups françaises dans le domaine du numérique et des nouvelles technologies. La France se situait au second rang derrière les Etats-Unis. D’ailleurs Pierre Gattaz, président du MEDEF, n’a pas manqué de le souligner en affichant les ambitions françaises dans ce domaine : « Comme Londres est la tête de pont de l’industrie financière en Europe, la France peut devenir la tête de pont du numérique en Europe ».

C’est ce genre de start-ups qui fait rêver les Français ! Mais en réalité, ils pensent de manière plus pragmatique, à ouvrir une maison d’hôte pour 40% d’entre eux, un commerce de proximité pour 27%, un cabinet de conseil (23%), ou bien même une activité d’artisanat dans le bâtiment pour 14% de ces futurs entrepreneurs.

Malgré cet optimisme dans l’entrepreneuriat des Français, nous pouvons constater que le chômage et ses chiffres explosent. Au troisième trimestre 2015, le taux de chômage au sens du BIT était de 10,6% de la population active. Il est donc nécessaire de trouver une solution à cette explosion du chômage d’où notre question : l’entrepreneuriat en France peut-il être un remède face au chômage de masse que nous connaissons actuellement ?

Qui sont ces individus cherchant à entreprendre en France ?

La moitié des jeunes de 18 à 24 ans ont envie de créer leur propre entreprise et 13% d’entre eux ont déjà un projet en main. Les jeunes sont donc plus susceptibles, que le restant de la population, à répondre aux appels de l’entrepreneuriat. Le numérique, qui est en vogue, joue un rôle très important dans cette envie des jeunes d’entreprendre. Christophe Bavière, président d’Idinvest Partners, l’illustre très bien grâce à une plaisanterie : « C’est quand même un peu plus facile de créer une strat-up à 25 ans dans le domaine du numérique que de créer un concurrent de Carmat dans le cœur artificiel ». Idinvest a permis le financement de diverses grandes entreprises telles que Criteo ou Dailymotion.

La première raison qu’invoque les Français pour expliquer leur envie d’entreprendre est la « liberté et l’indépendance ». La seconde est « l’épanouissement personnel » et pour finir « le gain financier » (revenu ou capital). Ensuite, à notre époque, il existe beaucoup plus de moyens de financement. Il y a 30 ans, il fallait de nombreuses recherches personnelles et des réseaux pour connaître et faire appel à des fonds pouvant servir à financer l’idée d’un jeune entrepreneur. À l’époque, le secteur du financement ainsi que le système d’aide et d’accompagnement étaient clairement immatures, et sont de qualité à l’heure actuelle. Pourtant, encore aujourd’hui les premières sources de financement envisagées sont « l’apport personnel » pour 45% des sondés et prêts bancaires basiques pour 41% d’entre eux. Viennent ensuite les aides publiques (35%), l’aide de l’entourage (15%) et pour finir le fonds de capital-investissement pour seulement 10% des sondés.

Il est à noter que les jeunes n’invoquent pas pour une majorité, le critère « d’échappatoire au chômage ». Une sorte d’idéalisme prévaut donc, ils préfèrent contribuer au développement économique de notre pays en premier lieu et voient cela comme une sorte d’acte et de réussite social.

Le MEDEF prend en main l’entrepreneuriat en France

Pierre Gattaz, qui est le président du MEDEF, s’est emparé de ce sujet. Car selon lui : « l’ascenseur social est bloqué, l’entrepreneuriat est la meilleure solution à l’intégration, pour créer son propre emploi, avec l’espoir de progresser ». Celui-ci, multiplie depuis quelques années, des initiatives dans ce sens.

L’organisation patronale qu’est le MEDEF a conclu différents partenariats. Premièrement, en 2014, un premier partenariat s’est effectué avec le Ministère de la Défense. Il s’agit d’une expérimentation de parrainages de militaires avec des entrepreneurs afin de les accompagner dans leur démarche de reconversion lorsque leur contrat se termine. 34 anciens militaires ont ainsi pu gérer leur reconversion en créant leur emploi et recruter des salariés pour leur entreprise. Le MEDEF s’est également lié à une association à destination des jeunes de quartiers. Il s’agit d’ « Agir pour réussir » (AGPR), qui est soutenue par Klesia en terme de protection sociale. Le fruit de cet accord a donné lieu à une formation lancée en décembre 2015 afin de leur donner envie d’entreprendre. Grâce à cette formation, 15 jeunes ont pu être accompagnés. Sur ces 15 jeunes, 10 ont créé leur entreprise, 3 ont trouvé un emploi et le restant est retourné dans le système scolaire.

Suite au salon des entrepreneurs, se déroulant à Paris du 3 au 4 février 2016, le MEDEF, par la voix de son président, a annoncé de nouvelles initiatives dans ce sens. Il compte dupliquer l’organisation de parrainages avec les militaires, aux sportifs de haut niveau. Ici, des chefs d’entreprises viendront les accompagner dans leur reconversion.

Un guide du routard a été lancé également permettant aux créateurs de trouver des sources de financement viables et adaptées à leurs besoins.

Pour finir, le MEDEF a tenté de faire du lobbying auprès du gouvernement en formulant des propositions de textes de loi. Celles-ci ont pour but d’être intégrées au sein du projet de loi défendu par la ministre du travail Myriam El-Khomri. Ces textes proposent par exemple : la sécurisation des relations entre entrepreneurs individuels et donneurs d’ordre en agissant sur le risque de requalification ; l’introduction d’une proportionnalité des sanctions appliquées par l’URSSAF lorsqu’il n’y a pas l’intention de frauder ; la fluidité des parcours entre salariat et activité individuelle ; la création d’une réelle couverture sociale grâce à une nouvelle assurance …

L’entrepreneuriat dans le monde : exemple du Gabon et de la Chine

L’entrepreneuriat est quelque chose d’international, chaque pays en a sa propre vision et l’applique à sa manière. En effet le pays où tout est possible est bien évidemment les Etats-Unis. Ce fait découle de l’« American Dream » où il est possible de réussir économiquement sans avoir le moindre argent au départ.

Le Gabon essaie, par exemple, malgré sa pauvreté et sa difficulté à réellement se développer, de former des jeunes dans cette optique. Ces jeunes pourront créer une dynamique économique positive au sein de leur pays. Plus précisément, le Gabon va financer via la Fondation Ali Bongo Ondimba, les projets des 7 lauréats du concours 2016 du Grand Prix de l’Excellence. 160 millions de francs CFA seront alloués à leurs projets, ce qui représente l’équivalent de 245 000€ : 25 millions de FCFA pour le meilleur projet de la CAN 2017 que le Gabon organisera, autant pour les projets de l’économie numérique et une somme moins élevée pour les catégories Action et Espoir. Pour finir, une somme sera allouée pour les prix des meilleurs projets des Gabonais de l’étranger afin de motiver tous les Gabonais du monde entier et profiter de tous les savoirs acquis au sein du pays ou à l’extérieur.

Le but ultime de cette organisation vise à soutenir et accompagner ces jeunes entrepreneurs dans le cadre de la diversification de l’économie et la lutte contre le chômage des jeunes.

La Chine, elle, devient au fil du temps une terre d’innovation, en termes de produits comme de concepts. En effet le concept d’entrepreneuriat social prend de plus en plus de poids au sein de l’Empire du Milieu, même si cela peut en laisser certains sceptiques étant donné l’image que les Occidentaux ont de ce pays. Une croissance de ce type d’entreprise voit le jour, avec comme but la résolution de problèmes sociaux et environnementaux.

Cette notion a émergé, très doucement, depuis l’événement catastrophique qu’a été le tremblement de terre de Sichuan, faisant plus de 70 000 victimes. Ce fait, très médiatisé dans le monde entier, a permis de montrer la très grande pauvreté existante dans certaines campagnes chinoises. Ann Wang, co-fondatrice chinoise de la société We-Impact illustre cette volonté de respect social : « Nos parents ont apporté le développement. Notre génération doit introduire la responsabilité sociale ». Nous pouvons définir ce concept par une manière d’entreprendre plaçant l’efficacité économique au service de l’intérêt général. Cette société, We-Impact, est une société proposant des services d’accompagnement d’entreprises. En effet, elle a pour but d’imaginer de nouveaux modèles organisationnels, de nouveaux produits, services ou marque. Tout ce qui peut permettre d’améliorer une entreprise, tout en rendant le monde meilleur.

Des entrepreneurs jeunes et diplômés

Ce genre d’entrepreneurs sociaux sont jeunes en Chine (2/3 ont moins de 40 ans), ils possèdent tous un diplôme universitaire et environ 40% sont des femmes. Près de la moitié sont déjà partis à l’étranger pour étudier ou travailler. C’est un concept jeune et fait pour les jeunes, pour le moment, car seulement 54% des entreprises ont moins de 3 ans et 21%, moins d’un an. Ces données proviennent du « China Social Entreprise Report » datant de 2012.

Des initiatives sont à noter dans l’éducation, la santé, le commerce équitable et l’environnement. Les entreprises évoluent donc dans toutes sortes de secteurs d’activités. Nous pouvons citer l’Association Shangai Young Bakers qui forme de jeunes chinois en difficulté à la Boulangerie à la Française. A la suite de cette formation, l’association leur trouve un premier emploi.

Malgré cet engouement pour cet entrepreneuriat social, le cadre juridique en Chine est flou et ne motive pas particulièrement les individus chinois. Les entreprises présentent dans ce créneau sont des entreprises à but non lucratif selon l’administration et implique un contrôle beaucoup plus accru du gouvernement.

Pour conclure, nous avons pu voir que l’entrepreneuriat est quelque chose de présent au sein de chaque pays et qu’il y est plus ou moins développé. Des études montrent par exemple qu’en 2012, les intentions d’entrepreneuriat en France étaient beaucoup plus élevées qu’aux Etats-Unis, au Royaume Uni et en Allemagne. Un écart de 7 points entre la France et les USA. Mais un fossé assez énorme existe entre ces deux pays en ce qui concerne toute la partie « émergence d’entrepreneurs », « nouveaux entrepreneurs » ou « entrepreneurs déjà établis ».

Il ne suffit donc pas de dire que l’on a la volonté d’entreprendre, il faut passer à l’action et créer sa propre entreprise. La France a un réel retard dans ce domaine dû certainement à un problème de mentalité.

Malgré ce fait, notre pays commence à se décomplexer, des initiatives sont prises au plus haut niveau de l’Etat avec la loi sur le travail du gouvernement Valls. L’opposition, de droite, propose également des initiatives en ce sens via les livres de Nicolas Sarkozy ou Jean-François Copé. Et pour finir, le MEDEF également ne se prive pas pour s’emparer de ce thème.

Ce ne sera donc pas un remède au chômage de masse actuel très vraisemblablement car les problèmes de mentalité d’un pays, aussi profonds soient-ils, prennent du temps à se résorber. Notons qu’il serait intéressant d’effectuer une analyse dans quelques années de ces faits mais également de faire une comparaison avec la Chine qui développe un système entrepreneurial social. Une solution pour l’économie de demain ?

Par Alexandre Lucas, étudiant du M2 IESC promotion 2015-2016

 Bibliographie :

http://www.lefigaro.fr/entrepreneur/2016/02/03/09007-20160203ARTFIG00099-jamais-les-francais-n-ont-eu-autant-envie-d-entreprendre.php

http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2016/02/03/20002-20160203ARTFIG00011-l-entrepreneuriat-un-remede-au-chomage.php

http://www.lepoint.fr/economie/en-france-l-entrepreneuriat-seduit-les-jeunes-12-04-2015-1920552_28.php

http://www.frenchweb.fr/quel-bilan-pour-les-femmes-dans-lentrepreneuriat-tech-en-2015/228646

http://www.afrik.com/gabon-160-millions-fcfa-pour-la-promotion-de-l-entrepreneuriat-des-jeunes

http://archives.strategie.gouv.fr/cas/system/files/2012-10-25_entrepreneuriait-volet1-na296.pdf

http://www.latribune.fr/actualites/economie/france/20150203trib9c86f26ff/l-entrepreneuriat-seduit-les-plus-jeunes.html

http://www.bilan.ch/entreprises/nombre-de-creations-dentreprises-a-baisse-de-18-2015

http://www.insee.fr/fr/themes/info-rapide.asp?id=14

http://www.challenges.fr/tribunes/20160211.CHA4963/l-entrepreneuriat-social-s-installe-en-chine.html

http://www.salondesentrepreneurs.com/paris/

http://www.usine-digitale.fr/article/portrait-robot-de-l-entrepreneur-francais-qui-cree-sa-boite-en-ligne.N377201

http://www.we-impact.com

 

Admin M2 IESC