Le 31 janvier dernier, le taxi volant électrique Vahana conçu par Airbus a réussi son premier vol à Pendleton dans l’Oregon, aux Etats-Unis. La particularité du drone : il ne contient aucun pilote à bord et se dirige de manière autonome. L’engin a volé pendant 53 secondes à une hauteur de 5 mètres avant de redescendre sur le plancher des vaches en toute sécurité.
Cela fait deux ans que l’entreprise travaille sur le projet et il s’agit là d’un fier succès. Le pôle innovation A³ (nommée “A cube”) est une start-up appartenant à Airbus, basée dans la Silicon Valley. Elle a vu son nouveau président Rodin Lyasoff, expert en technologies de drones, commandes de vol, logiciels, systèmes et simulation, arriver à la tête du pôle l’année dernière.
Peu de temps après l’envol de Vahana, le taxi volant de la start-up chinoise Ehang n’a pas attendu pour faire voler son taxi nommé Ehang184 avec 2 passagers à bord. L’engin a déjà atteint les 130 km/h et s’est envolé à une hauteur de 300 mètres. Il semblerait que la Chine prenne de l’avance dans cette technologie, puisqu’elle en est déjà à plus de mille essais de vols. Cependant, le principal concurrent d’Airbus, Boeing, a également voulu entrer dans cette course avec pour principal objectif de se démarquer de ce concept de taxi drone.
Ainsi, dans cette course aux transports aériens du futur, quelles tactiques Boeing a mis en place pour répondre au succès du projet Vahana d’Airbus ?
Particularités techniques de l’appareil Vahana
Le drone Vahana qui a décollé plus tôt dans l’année est composé de 8 rotors avec hélices. Disposant de patins pour se poser au sol, il est composé d’une cellule permettant d’accueillir quelques personnes ou des marchandises. Il mesure 6,2 mètres de large, 5,7 mètres de long, 2,8 mètres de hauteur et pèse environ 745 kg, au décollage.
L’idée sera de faire la transition du vol vertical qu’il effectue actuellement à un vol horizontal qui sera plus délicat à paramétrer. Aussi, l’équipe du pôle innovation a réussi à identifier un nouveau partenaire pour les moteurs : MAGicALL, une société californienne qui conçoit et fabrique des composants sur mesure.
Dans une vision futuriste, le taxi-drone pourra être commandé par smartphone en utilisant une simple application qui nous permettra de le “commander” à n’importe quel endroit en ville. Après s’être posé, il contactera le contrôle de trafic aérien automatiquement pour calculer une trajectoire sûre qui évite les conflits avec les différents transports aériens.
La ou les personnes seront ainsi en mesure d’embarquer dans l’appareil et de s’y installer confortablement devant le tableau de bord qui leur indiquera les conditions de vol (température, capacité opérationnelle du moteur, batterie du véhicule,…) afin d’effectuer les contrôles de sécurité pour l’envol.
Après le décollage, l’engin suivra sa trajectoire au millimètre près et aura la capacité d’éviter tout obstacle gênant son passage, un oiseau par exemple. Et celui-ci sera en mesure de communiquer avec les autres appareil Vahana qui vole afin de les avertir des différents obstacles dans le ciel. Un parachute est également prévu en cas de dysfonctionnement grave du drone. Concernant les prix de vol, ceux-ci sont annoncés raisonnables, pour l’instant.
Quelles réactions sur Twitter ?
Suite au premier envol de Vahana, les réactions sur les réseaux sociaux n’ont pas tardé à surgir, en particulier sur Twitter. D’après une analyse des utilisateurs impliqués dans le projet, on retrouve bien évidemment Airbus, mais bien d’autres personnes liées au projet.
La société @Airbus sur Twitter, publiant 2.75 tweets par jour (données socialbearing), n’a pas communiqué sur le sujet mais a, en revanche, été régulièrement mentionnée par des relayeurs ou intermédiaires d’informations. On distingue donc deux communautés principales sur la cartographie ci-dessous : la communauté verte représentant les influenceurs passionnés avec une forte communauté active (Evan Kirstel, Darell Etherington, et la communauté violette représentant les comptes officiels des journaux (Forbes, Les Echos, Numérama) rassemblant des abonnés peu investit dans les nouvelles technologies.
Parmi eux, “TechCrunch”, média spécialisé tech twittant sur les dernières nouvelles concernant les innovations technologiques et comptabilisant plus de 10 millions d’abonnés, a permis de relayer les informations courant 2017 mais également suite à l’envol de Vahana, en générant plus de 2000 retweets au total (données Visibrain).
D’une manière générale, les utilisateurs Twitter qui ont obtenu un taux d’engagement élevé sont ceux qui parlaient de l’avancement du projet fin 2017. Ainsi, Evan Kirstel ou Philippe Trebault, influenceurs dans le domaine des nouvelles technologies, ont relayé l’avancée du projet Vahana en octobre et novembre 2017, avec des tweets partagés plus d’une centaine de fois (données Visibrain).
Sonautos, utilisateur en retrait sur la cartographie ci-dessus, a touché une communauté particulière qui n’est pas reliée aux autres : il s’agit de sa propre communauté mexicaine.
Sur la cartographie ci-dessous, il a été question de faire le point sur les hashtags qui ont été utilisé sur le projet Vahana. On soulignera le thème des nouvelles technologies du futur (#airtaxi, #iot, #digital, #smartcity, #flyingcar) avec un public très axé sur le monde des innovations de demain.
Des concurrents sur le marché de l’aviation autonome
Le pôle A³ d’Airbus situé dans la Silicon Valley se caractérise par une volonté de développer de nouveaux produits rapidement dans un environnement favorable aux innovations. C’est une caractéristique qui permet de différencier cette structure d’Airbus Group et de l’industrie aérospatiale en Europe.
Cependant, Airbus qui a pris un coup d’avance, n’est pas en reste : d’autres sociétés entrent en lice sur ce marché. On retiendra principalement Boeing dans cette course folle au premier détenteur du transport aérien de demain. Sans oublier Ehang184, Volocopter, UberAir, Passenger Drone, Joby, Lillium Jet ou encore Surefly, projets venus des quatre coins du monde.
Boeing, surveillant son rival Airbus, a décidé lui aussi d’explorer les nouveaux marchés d’innovation de rupture. Le groupe a donc procédé à une série d’acquisitions de start-ups stratégiques dont la principale Aurora Flight Sciences, qui promet de donner un véritable renouveau technologique en matière de vols autonomes et de drones. Tout comme le pôle A³ d’Airbus, Aurora sera en mesure de développer des avions autonomes grâce à un système automatique.
En 2017, la start-up du côté de Boeing s’est associé avec Darpa, une cellule R&D de l’armée américaine, afin d’effectuer un test de simulation mettant en scène un robot nommé Alias (Aircrew Labor In-Cockpit Automation System). Ce fut un succès puisque le système a réussi à faire atterrir un 737 (biréacteur de Boeing), sans intervention humaine.
Aurora Flight Sciences s’est associé à Honeywell et à Rolls-Royce, dans le but de fabriquer un avion électrique hybride destiné au Pentagone. Enfin, parmi les nombreuses jeunes pousses dont Boeing a fait l’acquisition, “Zunum Aero” a promis la commercialisation du premier avion hybride électrique d’ici 2022. A l’inverse du projet Vahana, l’appareil sera en mesure de transporter une douzaine de passagers mais sera destiné aux trajectoires courtes, avec une autonomie de courte durée, tout comme les voitures électriques actuelles.
Boeing compte bien rattraper son retard dans le domaine de l’aviation autonome mais se positionne différemment par rapport à Airbus. Boeing souhaite élaborer des avions autonomes tandis qu’Airbus fait voler ses taxis-volants sous forme de drones. Ainsi, Airbus envisage de livrer une cinquantaine d’exemplaires de son projet Vahana à Uber en 2020.
Conclusion
Pour un premier vol réussi, la société se dit confiante dans l’avenir, le but étant de « démocratiser le vol personnel et répondre au besoin croissant de mobilité urbaine en exploitant les dernières technologies en matière de propulsion électrique, de stockage d’énergie et de vision artificielle » selon Airbus.
L’année dernière, Tom Enders, PDG d’Airbus, s’était déjà exprimé sur l’avancée du projet : « il y a 100 ans, le transport urbain s’est enterré, aujourd’hui, nous avons la technologie pour le faire décoller. » Encouragé par les passionnés sur Twitter (entre autres), Airbus espère une commercialisation de son UAM (Urban Air Mobility) vers 2020, mais il reste tout de même encore énormément de blocages réglementaires et technologiques à surmonter.
Cependant la concurrence se fera rude pour déterminer les taxis drones autonomes du futur. Airbus qui a pris un coup d’avance sur son plus gros concurrent d’outre atlantique, entend se positionner sur cette part de marché dédiée aux taxis drones, tandis que Boeing à l’ambition de développer de véritables avions autonomes suite au rachat de nombreuses start-ups.
Il est donc difficile de prédire quels appareils nous transporteront demain, seul le temps nous éclairera sur l’avancée de ces nouvelles technologies mais également l’acceptation des consommateurs à ce genre de transport, pour l’instant peu sûrs. Ces innovations de rupture prennent donc une part importante dans un monde dédié aux inventions, à qui se démarquera le plus. Cependant, les voitures volantes comme dans Blade Runner ou le 5ème élément, ce n’est pas pour demain à priori.
La stratégie phare des grands groupes, pour ne pas se faire dépasser est donc le rachat de start-ups, comme Boeing : une tactique pour éviter de se faire dépasser par celles-ci à l’avenir. Ainsi, une jeune pousse peut prétendre avoir toutes ses chances si elle innove et que le produit plaît : il s’agira de bien se faire voir auprès des grandes entreprises.
Par Maëlle Texier, promotion 2017-2018 du M2 IESCI
Sources
http://bfmbusiness.bfmtv.com/hightech/le-taxi-drone-d-airbus-reussit-son-premier-vol-1364403.html
http://lifestyle.boursorama.com/automobile/vahana-airbus-developpe-voiture-volante/
https://www.futura-sciences.com/tech/actualites/drone-drones-taxis-8-projets-plus-avances-70164/
https://www.journal-aviation.com/actualites/39544-le-vahana-d-airbus-fait-son-premier-vol
http://www.airbus.com/newsroom/press-releases/fr/2016/10/Rodin-Lyasoff-New-Chief-of-A3.html